Approches théoriques, valeur en langue et emplis du ne dit ‛explétif’ en français classique - article ; n°1 ; vol.143, pg 48-68
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Approches théoriques, valeur en langue et emplis du ne dit ‛explétif’ en français classique - article ; n°1 ; vol.143, pg 48-68

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Langue française - Année 2004 - Volume 143 - Numéro 1 - Pages 48-68
Nathalie Fournier : Approches théoriques, valeur en langue et emplois du ne dit « explétif» en français classique
This paper deals with expletive negation, ne, in 1 7th century French. By 'expletive' ne, we usually mean the use of ne, in dependant clauses (comparative clauses: il est plus grand que n'était son frère, or noun clauses: je crains qu'il ne vienne), where it can commute with zéro, but not with full negation ne., .pas. The first part of the paper examines the theoretical treatments of expletive ne, and especially its relation to negative ne (used alone or with pas); in case of a unitary treatment of the morpheme ne, two positions are possible: either deny to ne any full semantic value and consider it as a conditioned element, dependant of other contextual markers; or attribute to ne a basis semantic value, either negative (Guillaume) or discordantielle (Damourette et Pichon), which is responsible of different contextual values. The second and third parts, working on classical French corpora (first comparative clauses, then noun clauses), proves that expletive ne is used in much more delimitated contexts than in contemporary French, and its competition with zero is very limited. The paper examines which are the contextual factors correlated to the use of expletive ne or zero, and which semantic interpretation can be proposed when they can commute in similar contexts.
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 32
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

MME Nathalie Fournier
Approches théoriques, valeur en langue et emplis du ne dit
‛explétif’ en français classique
In: Langue française. N°143, 2004. pp. 48-68.
Abstract
Nathalie Fournier : Approches théoriques, valeur en langue et emplois du ne dit « explétif» en français classique
This paper deals with expletive negation, ne, in 1 7th century French. By 'expletive' ne, we usually mean the use of ne, in
dependant clauses (comparative clauses: il est plus grand que n'était son frère, or noun clauses: je crains qu'il ne vienne), where
it can commute with zéro, but not with full negation ne., .pas. The first part of the paper examines the theoretical treatments of
expletive ne, and especially its relation to negative ne (used alone or with pas); in case of a unitary treatment of the morpheme
ne, two positions are possible: either deny to ne any full semantic value and consider it as a conditioned element, dependant of
other contextual markers; or attribute to ne a basis semantic value, either negative (Guillaume) or "discordantielle" (Damourette
et Pichon), which is responsible of different contextual values. The second and third parts, working on classical French corpora
(first comparative clauses, then noun clauses), proves that expletive ne is used in much more delimitated contexts than in
contemporary French, and its competition with zero is very limited. The paper examines which are the contextual factors
correlated to the use of expletive ne or zero, and which semantic interpretation can be proposed when they can commute in
similar contexts.
Citer ce document / Cite this document :
Fournier Nathalie. Approches théoriques, valeur en langue et emplis du ne dit ‛explétif’ en français classique. In: Langue
française. N°143, 2004. pp. 48-68.
doi : 10.3406/lfr.2004.6782
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_2004_num_143_1_6782Nathalie FOURNIER
Université Lumière-Lyon 2 & LATTICE
Approches théoriques, valeur en langue
et emplois du ne dit 'explétif' en français
classique
Sous la dénomination usuelle de ne 'explétif, on entend les emplois de ne en
subordonnée (comparative ou complétive), dans lesquels il n'a pas de valeur
proprement négative, mais où il commute avec 0 et s'oppose sémantiquement à
la négation ne. . . pas, ainsi dans l'exemple : Je crains qu'il ne vienne, qui équivaut à
Je crains qu'il vienne (— 'je crains sa venue') et s'oppose à Je crains qu'il ne vienne
pas (= 'je crains sa non-venue'). Ce ne explétif donc au ne négatif, hérité
de l'ancien français et dont l'emploi s'est considérablement restreint en français
moderne, qui commute au contraire avec ne... pas, et s'oppose à 0, ainsi
l'exemple : II n'y a personne qui ne me donne raison équivaut à il n'y a personne qui
ne me donne pas raison (= 'tout le monde me donne raison') et s'oppose à il n'y a
personne qui me donne raison (= 'personne ne me donne raison').
L'étiquette de ne 'explétif a elle-même beaucoup varié dans les travaux
linguistiques 'modal' ou 'usé' : ne (Brunot), 'redondant' 'virtuel' ou 'pléonastique' (Martin) ; elle (Stauf), est par 'abusif ailleurs doublement (Vendryes),
malheureuse, d'une part parce qu'elle invite à voir dans le ne un marqueur
superflu, « qui n'apporte rien au sens de la phrase » (GLLF, cit. Muller, 1991 :
357), d'autre part, parce que la même étiquette a pu désigner les marqueurs pas
et point, dans la tradition grammaticale (chez Maupas notamment). Nous garde
rons cependant le terme 'explétif qui a l'avantage d'épingler clairement les
emplois où ne peut commuter avec 0, non pas sans une différence sémantique
(que notre propos sera d'apprécier), mais sans que le procès de la subordonnée
cesse d'être exprimé positivement.
L'emploi de ne explétif remonte au plus ancien français ; dès le Moyen Age,
on en trouve des exemples en comparative {le col plus blanc que n'est nois, Roman
48 Approches théoriques, valeur en langue et emplois du ne dit 'explétif en français classique
de la Rose, cit. Englebert, 1984 : 12) et en complétive (Jou criem qu'il ne l'en mesa-
viengne, L'Escoufle, cit. id.). Au XVIe siècle et au XVIIe siècle, il est usuel dans ces
mêmes contextes : en comparative d'inégalité ou de disparité qualitative : II est
plus vaillant que vous ne dites, il est tout autre que vous ne dites (Chiflet), et en
complétive dépendant des verbes de crainte ou d'empêchement : ]e crains que
mon pere ne meure, II faut empescher que cela n'arrive (Thomas Corneille), et il y est
en concurrence avec 0 : il est tout autre qu'il n'estoit ou qu'il estoit, vous craignez
qu'on ne vous méprise ou qu'on vous méprise (Andry de Boisregard).
Les grammairiens et les remarqueurs, qui relèvent tous ces emplois, ne recon
naissent pas pour autant le ne explétif en tant que tel, et ils le rangent, souvent
sans commentaires, sous les cas de suppression de pas et point, au même titre que
le ne négatif, et à côté d'exemples comme : Je ne me soucie de vos menaces, Je ne puis
vous dire ce que je pense, Que ne parlez-vous ? S'il ne me paye ce qu'il me doit, je le
tireray en procès (Chiflet). Il faut attendre l'abbé d'Olivet, dans l'édition de 1767 de
ses Remarques de grammaire sur Racine, pour que le ne explétif soit clairement ident
ifié au titre d'une « particule prohibitive », et distingué du ne négatif.
Dans ces conditions, il pourrait ne paraître guère pertinent de parler, pour le
XVIIe siècle, d'un ne explétif que ne reconnaîtrait aucun des grammairiens de
l'époque, pour lesquels le ne est toujours une particule négative. Nous garderons
cependant et la notion et l'étiquette de ne 'explétif, malgré leur anachronisme
métalinguistique, dans la mesure où les emplois de ne explétif sont usuels en
langue classique, et qu'ils sont clairement identifiés au cours du siècle par les
grammairiens et les remarqueurs.
Notre article suivra le plan suivant : après avoir rappelé rapidement les
diverses approches théoriques du ne explétif et précisé quelle sera notre problé
matique, nous examinerons, à partir de corpus dépouillés et des exemples
fournis par les grammaires historiques, les conditions d'emploi du ne explétif et
sa concurrence avec 0, en comparative puis en complétive, pour faire émerger la
valeur de la concurrence entre énoncé avec ne et énoncé sans ne.
I. LA PROBLÉMATIQUE LINGUISTIQUE DU NE EXPLÉTIF
Les travaux modernes sur la négation en français et particulièrement sur le ne
dit 'explétif sont nombreux et importants, mais leur ensemble est difficilement
maîtrisable, dans la mesure où ils reposent sur des options théoriques fortes et le
plus souvent incompatibles entre elles.
Le problème qui se pose pour le ne explétif est celui de son rapport au ne
négatif, qui était la forme ordinaire de la négation en ancien français et qui s'est
peu à peu restreint à des contextes circonscrits qui sont encore les siens en fran
çais moderne, le XVIIe siècle étant une période-clef à cet égard, pendant laquelle
se stabilisent ces contextes et se multiplient les réticences à l'égard du ne négatif.
Face à la situation d'un marqueur ne, qui peut avoir deux interprétations
contradictoires, l'une non négative dans : Je crains qu'il ne vienne (# qu'il ne vienne
lANGH FRANÇAISE 14! 49 négation en français classique La
pas) et l'autre négative dans : Je n'ose venir (- je n'ose pas venir), les positions théo
riques sont très tranchées. On peut les caractériser en les rapportant aux choix
suivants :
(1) choix d'un traitement homonymique, qui distingue deux marqueurs ne /vs/
(2)unitaire, qui maintient l'unité du marqueur ne,
(2) dans le cas d'un traitement unitaire, choix entre (2.1) un évidement sémantique
maximal du marqueur ne /vs/ (2.2) sa sémantisation par la reconnaissance d'une
valeur de base, qui sous-tend les valeurs apparemment contradictoires en discours.
(1) Le traitement homonymique est le fait de l'abbé d'Olivet, qui, en 1767 х,
rompt avec la tradition grammaticale ne reconnaissant qu'une négative ne et
distingue deux particules ne, l'une négative {ne... pas /point), et l'autre prohibit
ive (c'est le ne 'explétif'), qui est « redondante » m

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