Aux origines de la déchristianisation dans la Nièvre : Fouché, Chaumette ou les jacobins nivernais ? - article ; n°1 ; vol.264, pg 181-202
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Aux origines de la déchristianisation dans la Nièvre : Fouché, Chaumette ou les jacobins nivernais ? - article ; n°1 ; vol.264, pg 181-202

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Annales historiques de la Révolution française - Année 1986 - Volume 264 - Numéro 1 - Pages 181-202
L'historiographie est partagée sur la façon dont naît le mouvement déchristianisateur dans la Nièvre, qui en a été l'un des epicentres. L'initiative revient-elle à Fouché, représentant en Mission, ou à Chaumette qui le visite alors, et aurait pu diffuser une nouveauté parisienne. L'auteur s'interroge sur les comportements et les idées d'un groupe de jacobins locaux qui vont être les animateurs du mouvement et n'ont attendu ni Fouché, ni Chaumette pour poser les bases d'un activisme anticlérical, dans lequel ils voient un moyen de conquérir les masses populaires.
Historiography is divided ou the way the dechristianizing movement was born in the Nièvre, which was one of the epicentres. Was its initiative due to Fouché, the representative on mission, or to Chaumette, who visited him then, and could have spread a parisian novelty. The author wonders on the behaviours and ideas of a group of local jacobins who were to become the leaders of the movement and did not wait for either Fauché or Chaumette to set the basis of an anticlerical militancy, which they considered as o means to conquer the popular masses.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Nicole Bossut
Aux origines de la déchristianisation dans la Nièvre : Fouché,
Chaumette ou les jacobins nivernais ?
In: Annales historiques de la Révolution française. N°264, 1986. pp. 181-202.
Résumé
L'historiographie est partagée sur la façon dont naît le mouvement déchristianisateur dans la Nièvre, qui en a été l'un des
epicentres. L'initiative revient-elle à Fouché, représentant en Mission, ou à Chaumette qui le visite alors, et aurait pu diffuser une
nouveauté parisienne. L'auteur s'interroge sur les comportements et les idées d'un groupe de jacobins locaux qui vont être les
animateurs du mouvement et n'ont attendu ni Fouché, ni Chaumette pour poser les bases d'un activisme anticlérical, dans lequel
ils voient un moyen de conquérir les masses populaires.
Abstract
Historiography is divided ou the way the dechristianizing movement was born in the Nièvre, which was one of the epicentres.
Was its initiative due to Fouché, the representative on mission, or to Chaumette, who visited him then, and could have spread a
parisian novelty. The author wonders on the behaviours and ideas of a group of local jacobins who were to become the leaders of
the movement and did not wait for either Fauché or Chaumette to set the basis of an anticlerical militancy, which they considered
as o means to conquer the popular masses.
Citer ce document / Cite this document :
Bossut Nicole. Aux origines de la déchristianisation dans la Nièvre : Fouché, Chaumette ou les jacobins nivernais ?. In: Annales
historiques de la Révolution française. N°264, 1986. pp. 181-202.
doi : 10.3406/ahrf.1986.1167
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahrf_0003-4436_1986_num_264_1_1167ORIGINES DE LA DECHRISTIANISATION AUX
DANS LA NIÈVRE, FOUCHÉ, CHAUMETTE,
OU LES JACOBINS NIVERNAIS ?
Les historiens se sont souvent interrogés sur les raisons qui ont
pu conduire le prudent, l'opportuniste Fouché à inaugurer en
vendémiaire an II, dans la Nièvre et dans l'Allier, une politique
soudainement et radicalement déchristianisatrice, alors que rien,
dans l'activité précédemment déployée par le représentant en mission
à Troyes, à Dijon, à Nevers même, dans les six premières semaines
de son séjour, n'avait pu laisser prévoir un tel changement de cap.
Entre le 4 et le 22 septembre 1793,
un tournant radical sous l'influence de Chaumette ?
Le 4 Septembre encore, il cosigne avec son collègue Legendre (de
la Nièvre) une grande proclamation qui invite les Nivernais à remplir
les devoirs dictés par le décret de la mobilisation en masse du
23 août ; cette proclamation s'efforce de démontrer que le drapeau
religieux brandi par les rebelles couvre hypocritement les convoitises
territoriales des souverains étrangers et les ambitions politiques
d'administrateurs « intrigants », de « députés corrompus », de
« généraux perfides » ; les « despotes » et leurs « esclaves » angli
cans ou luthériens se soucient peu de restaurer une religion qui n'est
pas la leur ; quant au fédéralisme qui donne la main au « fanatisme
royal et religieux », il ne saurait s'opposer à la volonté du peuple qui
a aboli la royauté, ni invoquer « le prétexte hypocrite et imposteur
du rétablissement... » du culte catholique : celui-ci est « conservé
dans toute sa pureté primitive » et « la morale évangélique qui en fait
la base n'a reçu aucune atteinte. »
II est certain que Fouché a simplement apposé sa signature au
bas d'un texte qui fut entièrement rédigé pour son collègue Legendre, 182 NICOLE BOSSUT
ainsi que le souligne l'en-tête imprimé (1). Mais la conduite qu'il a
suivie à Nevers depuis son arrivée le 29 juillet indique qu'il partage
alors avec son collègue le souci de ne pas heurter les convictions
religieuses tout en éclairant les croyants sur le sens des manœuvres
politiques dont ils risquent d'être l'instrument (2).
Le 22 septembre, changement de ton dans un décor soigneuse
ment choisi pour frapper un grand coup sur les esprits : c'est devant
le buste de Brutus, héros des vertus républicaines, trônant en lieu et
place de l'autel en la cathédrale Saint-Cyr de Nevers que Fouché, en
présence de Chaumette, renouvelle ses exhortations à combattre pour
le salut de la République en danger. Par cette cérémonie spectacul
aire, il semble vouloir signaler son ralliement à une politique
religieuse radicalement nouvelle puisque, dès le lendemain, il
prononce devant l'administration départementale son fameux
discours contre le célibat des prêtres, transformé par le département
en arrêté le 25 septembre. Ce jour-là, il est déjà en route pour
Moulins pour un séjour bref mais capital d'une semaine, puisqu'il y
définit tous les grands axes de la politique qu'il va désormais
appliquer dans la Nièvre : attaque résolue contre le culte et les
croyances catholiques, rafle de l'or et de l'argenterie des églises aussi
bien que des châteaux, cela grâce à un instrument nouveau, l'armée
révolutionnaire : mentionnée dès le 29 septembre à Moulins comme
partie constitutive du cortège iconoclaste qui parcourt la ville
en détruisant les signes de la féodalité et de la superstition, elle
voit ses fonctions précisées par l'arrêté imprimé à Nevers et daté du
2 octobre (3).
Le 9 octobre — 18 vendémiaire — à Nevers, il ordonne la
démolition des clochers des églises des paroisses supprimées, car il
s'apprête à éclaircir de façon drastique la carte des cures (un tiers
doivent disparaître dans le seul district de Corbigny selon l'arrêté du
14 octobre). Enfin le 10 octobre — 19 Vendémiaire — c'est
(1) AF II 128, 981, p. 28, imprimé : « Proclamation au nom du peuple français,
Legendre de la Nièvre, représentant du peuple aux corps constitués et aux citoyens du
département de la Nièvre ». Signée : Legendre et Fouché.
(2) AF II 128, 980, 5 : copie des procès-verbaux de l'administration
départementale de la Nièvre, de juillet à novembre 1793. Nombreux élargissements de
prêtres reclus, 4 le 8 août, dont Bergougnoux curé de la Charité, 2 le 24 août, 2 le 25,
4 le 4 septembre dont les très actifs curé et vicaires de Luzy, un seul refus le 7
septembre concernant le curé de la Nocle. Subventions aux sœurs de la Charité à
Nevers les 9 et 20 août.
(3) Audiat, la Terreur en Bourbonnais, Paris 1873 et J. Cornillon, le
Bourbonnais sous la Révolution française, Riom 1892, tome IV. AUX ORIGINES DE LA DÉCHRISTIANISATION 183
fameux, qui non seulement proscrit toute manifestation extérieure du
culte (au nom de l'égalité, il s'agit d'éradiquer du paysage tout signe
d'une « religion dominante »), mais encore prétend ériger en
doctrine officielle la négation de l'immortalité de l'âme : il ne s'agit
pas seulement d'imposer un enterrement civil, dans le prolongement
après tout du décret qui a confié l'enregistrement des naissances et
des mariages à un officier municipal chargé de l' état-civil. En
bannissant des cimetières toute référence symbolique à la
résurrection, en chassant les croix au profit exclusif de l'allégorie du
sommeil sculptée à l'entrée des champs du repos et peinte sur le drap
mortuaire qui recouvrira obligatoirement les défunts, il inaugure une
politique radicalement différente de celle qu'a définie la Législative
avant de se séparer : d'un effort de laïcisation qui s'efforce, et non
pas sans contradictions, de cantonner la foi chrétienne dans la sphère
des croyances privées, d'assurer l'indépendance du pouvoir politique
dispensé de toute légitimation religieuse, on passe ici à l'affirmation
exclusive d'une métaphysique antichrétienne officielle. Étonnante
innovation (venant d'un opportuniste qu'on nous montre toujours
soucieux de prendre le vent !) et dangereux dérapage qui va entraîner
la Révolution dans une grande aventure, où ne vont pas manquer les
périlleuses embardées.
En moins de trois semaines, il a donc défini une politique
radicalement anticatholique qui frappe l'église dans ses trésors, dans
s

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