Dialectes idiosyncrasiques et analyse d erreurs - article ; n°57 ; vol.14, pg 17-28
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Dialectes idiosyncrasiques et analyse d'erreurs - article ; n°57 ; vol.14, pg 17-28

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Description

Langages - Année 1980 - Volume 14 - Numéro 57 - Pages 17-28
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1980
Nombre de lectures 103
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

S. Pit Corder
Dialectes idiosyncrasiques et analyse d'erreurs
In: Langages, 14e année, n°57, 1980. pp. 17-28.
Citer ce document / Cite this document :
Corder S. Pit. Dialectes idiosyncrasiques et analyse d'erreurs. In: Langages, 14e année, n°57, 1980. pp. 17-28.
doi : 10.3406/lgge.1980.1834
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1980_num_14_57_1834Pit Corder S.
Université d'Edimbourg
DIALECTES IDIOSYNCRASIQUES
ET ANALYSE D'ERREURS *
Ce qu'il est convenu maintenant d'appeler « Analyse d'erreurs » a trait à la
recherche sur la langue des apprenants d'une langue étrangère (LE). J'adopterai tout
au long de cet article le point de vue selon lequel la langue que parle l'apprenant,
ou, éventuellement, certaines « communautés » d'apprenants, constitue un type par
ticulier de dialecte. Ce point de vue se fonde sur deux constatations :
(i) Tout discours spontané par lequel un locuteur vise à communiquer avec autrui a
une signification, en ce sens qu'il est systématique. Par conséquent on peut, en prin
cipe, le décrire grâce à un ensemble de règles : autrement dit, il est grammatical.
Dans cette optique, le discours spontané de l'apprenant d'une LE est du langage, et
il est grammatical.
(ii) Puisque bon nombre de phrases de la langue de l'apprenant sont isomorphes avec
certaines phrases faisant partie de ce qui est, de son point de vue, la langue cible, et
puisqu'on doit donner la même interprétation à ces paires de phrases, en consé
quence au moins certaines des règles grâce auxquelles on décrit la langue de l'appre
nant sont identiques à celles dont on a besoin pour décrire la langue-cible.
La langue de l'apprenant est donc un dialecte, dans l'acception linguistique l de
ce terme : si certaines règles grammaticales sont communes à deux parlers, ces par-
1ers sont en relation de "dialecte.
Ensemble de / / \ \ Ensemble de
règles du r*" I J -*т règles du
parler В V V/ / parler A
Figure 1 .
Dans la figure 1, A et В sont en relation de dialecte l'un avec l'autre (je ne m'occupe
pas ici de savoir si on peut estimer cette relation valide pour toutes les langues natur
elles).
Bien sûr, on fait intervenir, d'habitude, un critère supplémentaire, d'ordre extra
linguistique, pour pouvoir qualifier de dialecte un parler quelconque : il faut que ce
* Traduit avec la permission de l'auteur et de Julius Groos Verlag, Heidelberg, de
l'anglais : « Idiosyncratic Dialects and Error Analysis », publié dans IRAL, vol. IX (2), 1971,
pp. 147-160, Heidelberg, Julius Gross Verlag. Reproduit dans RICHARDS, J.C. (éd.), Error
Analysis : Perspectives on Second Language Acquisition, Londres, Longman, 1974,
pp. 158-171, et dans Nehls, D. (éd.), Studies in Descriptive Linguistics, vol. 2 : Studies in
Contrastive Linguistics and Error Analysis I : the Theoretical Background, Heidelberg, Julius
Gross Verlag, 1979, pp. 93-106. '
1. Et non sociologique, cf. infra (NDT).
17 parler soit partagé par une communauté, qu'il constitue, au sens saussurien du
terme, une langue 2. Par rapport à ce critère, la langue de l'apprenant peut être con
sidérée ou non comme un dialecte. Je reviendrai là-dessus. Pour le moment, il suffit
de distinguer les dialectes qui constituent la langue d'une communauté (que j'appelle
rai « dialectes sociaux ») et ceux qui ne constituent pas la langue d'une communauté
(et j'appellerai ceux-ci « dialectes idiosyncrasiques »). J'avance donc des arguments
d'ordre linguistique, et non sociologique, pour appeler ces derniers des dialectes. On
pourrait penser que l'appellation idiolecte suffit à désigner ces dialectes non-sociaux.
Il me semble que ce n'est pas le cas. Un idiolecte, c'est le « dialecte » d'une seule
personne (j'en conviens), mais qui est caractérisé linguistiquement par le fait que
l'ensemble des règles qu'il contient se trouve déjà dans la grammaire de l'un ou
l'autre des dialectes sociaux. On peut dire qu'un idiolecte est, en quelque sorte, un
mélange de dialectes.
Ensemble de Ensemble de
règles du règles du
dialecte С dialecte A
Ensemble de Ensemble de règles de règles du l'idiolecte X dialecte В
Figure 2.
On voit, dans la figure 2, que l'idiolecte X contient des règles puisées dans trois dia
lectes sociaux qui se chevauchent, mais ne aucune règle qui se situe en
dehors de ces dialectes. Si les dialectes sociaux A, В, С, « font partie » d'une langue
D, l'idiolecte X est alors, au sens conventionnel du terme, un dialecte de D.
Il en va différemment lorsqu'on considère ce que j'appelle les dialectes idiosyncra
siques. Ici, certaines des règles dont on a besoin pour les décrire n'appartiennent à
aucun dialecte social : elles sont propres à celui qui parle ce dialecte.
Dialecte
social
« cible »
Dialecte
idiosyncrasique
Figure 3.
Tous les dialectes idiosyncrasiques ont ceci de commun que certaines des règles
devant entrer dans leur description sont particulières à un individu. Il en résulte,
bien sûr, que certaines des phrases appartenant à ces dialectes ne sont pas interpréta
bles de manière évidente, car la capacité d'interpréter une phrase implique en partie
une connaissance des conventions sous-jacentes. Les phrases appartenant à un idio
lecte ne présentent donc pas les mêmes problèmes d'interprétation puisqu'on peut
trouver des membres d'un groupe social qui partagent ces conventions avec le locu
teur.
2. En français dans le texte (NDT).
18 dialectes idiosv ncrasiques sont par nature — normalement — instables, ceci Les
pour une raison évidente. On parle — normalement — afin de pouvoir communiq
uer, c'est-à-dire de se faire comprendre. Si la compréhension n'est que partielle, le
locuteur est motivé pour adapter son comportement aux conventions d'un groupe
social, s'il le peut. Cette instabilité explique une partie des difficultés qu'éprouve le
linguiste à décrire les dialectes idiosyncrasiques. Les données sur lesquelles est fondée
sa description sont fragmentaires, ce qui veut dire que les procédures en usage pour
vérifier la construction d'une grammaire generative ne sont guère utilisables.
Le linguiste rencontre ici une autre difficulté, qui est de donner une interprétation
à certaines des phrases de ce dialecte. Si cette interprétation fait défaut, il est év
idemment impossible de commencer l'analyse.
La langue de l'apprenant d'une LE ne constitue pas le seul type de dialecte
idiosyncrasique. L'« Analyse d'erreurs » ne s'applique donc pas uniquement à la lan
gue des apprenants d'une LE. Le langage poétique constitue une autre classe de dia
lectes idiosyncrasiques, puisque ce langage ne peut être analysé uniquement au
moyen des règles d'un dialecte social donné. Comme le dit J.P. THORNE (1965) :
« ... un texte comme le poème de CUMMINGS Anyone lived in a pretty how town,
contenant des séquences qui ne se prêtent pas à une analyse dans les termes de la
grammaire de l'anglais, pourrait être analysé d'une manière plus révélatrice, en le
considérant comme un échantillon d'une langue différente, ou d'un dialecte différent,
de l'anglais standard (c'est CORDER qui souligne [NDT]).
Il est clair que le langage de ce poème est idiosyncrasique, ne serait-ce qu'à cause
de la difficulté qu'on éprouve à l'interpréter. Il faut remarquer que l'approche
qu'adopte THORNE vis-à-vis de ce poème est essentiellement celle de l'« analyse
d'erreurs », c'est-à-dire une sorte de comparaison bilingue. Autrement dit, il essaie
de mettre en relief les règles nécessaires pour décrire les phrases idiosyncrasiques 3 en
faisant appel au modèle syntaxique dont il se sert pour décrire le dialecte social le
plus proche : en l'occurrence, l'anglais standard.
Il serait peut-être légitime de qualifier de volontairement déviantes les phrases
idiosyncrasiques d'un texte poétique, car l'auteur est censé connaître les conventions
du dialecte standard correspondant, bien qu'il choisisse de ne pas s'y conformer (cf.
KATZ 1964). Ses écarts sont motivés. Ceci veut dire que l'on a besoin, pour interprét
er le texte, de connaître la structure sémantique du dialecte standard correspondant.
De ce point de vue, les textes poétiques entretiennent une relation

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