La création d'entreprises populaires par les migrants en Turquie - article ; n°1 ; vol.2, pg 59-75

Stéphane De Tapia

Description

Revue européenne de migrations internationales - Année 1986 - Volume 2 - Numéro 1 - Pages 59-75
La création d'entreprises populaires par les migrants en Turquie.
Stéphane DE TAPIA
Le déclenchement d'une importante émigration en Turquie, relayant l'exode rural des années 1950, a amené les pouvoirs publics turcs en relation, avec les autorités germaniques et néerlandaises, à élaborer une politique complexe de réinsertion s'appuyant sur l'épargne des émigrés. Nées de cette politique, plusieurs centaines d'entreprises industrielles et quelques milliers de coopératives de production ont lancé un vaste mouvement d'industrialisation rurale. Malgré les moyens administratifs et de recherche employés, les objectifs n 'ont été que très partiellement atteints, car la relative rapidité de l'accumulation d'un capital ne transforme pas pour autant un travailleur d'origine rurale en créateur d'entreprise. La Turquie est de plus secouée d'un vaste débat économique et idéologique sur les voies du développement. Seules les entreprises les mieux armées sont de taille à résister aux mutations en cours ; or, structurellement, les entreprises issues de l'émigration ne sont certainement pas les plus aptes. L'étude des succès et des échecs enregistrés en Turquie garde toute son acuité face à d'autres expériences en cours en Tunisie et au Maroc.
The creation of popular enterprises by migrants in Turkey
Stéphane DE TAPIA
The starting of a considerable emigration originating from Turkey, following over upon the drift from the land of the 50s, led the Turkish authorities in touch with the German and the Dutch governments to elaborate a complicated reintegration policy leaning on the emigres' savings. Due to this policy, several hundred industrial concerns and a few thousand productive cooperative societies started up a large movement of rural industrialization. Despite the means of administration and research used, the goals have been only partially attained for multiple reasons : the relative speed ofthe accumulation of capital can't with a stroke of magic wand turn a worker of rural origin into a company manager. Moreover, Turkey in being shaken by a vast economic and ideological debate about the means of development. The best-equipped firms only are up to withstanding the transformations under way. When in fact, structurally speaking, firms stemming from emigration are certainly not the most capable of doing so. The study of successes and failures recorded in Turkey keeps all its acuteness face to the experiments being carried out in Tunisia and Morocco.
Türkiye'de Işçi Dovizleri ve halk girişimleri.
Stéphane DE TAPIA
1950 selelerinde taşralarin boşalmasini takip eden Türk işgöcünün başlangici, Alman ve Hollandali yardimiyla Türk yönetimlerini ye yeni bir dönüş politikasina getirdi. Bu politika, yurt dişindaki işçilerin tasarruflarinin üstüne dayanir. 1964-65 yilidan itibaren yüzlerce sanayi girişimleri, binlerce üretim kooperatifleri Kuruldu : bu engin bir kirsal sanayilesme hareketini teşkil eder. Idarî ve araştirma yollari çok olmasina rağmen, istenilen hedeflere varilamadi. Zorluk nedenleri çoktur : özellikle « sermaye » yiğinlama yollari kolay ve oldukça çabuk gözüküyorsa bile, tasrali bir işçi kolay kolay sanayi bir işveren ya da işletmeci olamuz. Ayrica Türkiye çok önemli ve derin bir değişme aşamasindadir. Ekonomik ve ideolojïk tartişmalar henüz bitmis durumda değildir. Bu açidan en sağlam girişimler bile zor durumdadir. Yapi olarak, Işçi ve Halk Şirketteri çabuk değişmeye maruz kalir. Yasalar, yönetmelik, özgü olan kredi ve meuduat kurumlari yeterli değildir. Türkiye'deki basarilar ve çöküşlerin öğretileri çağdaş Tunus ve Fas ülkelerinde varolan çalişmalar için çok önemli bir nokta kavramaktadir.
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: REVUE_EUROPEENNE_DE_MIGRATIONS_INTERNATIONALES
• Publié le: 01 janvier 1986
• Nombre de lectures: 141
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Monsieur Stéphane De Tapia
La création d'entreprises populaires par les migrants en Turquie
In: Revue européenne de migrations internationales. Vol. 2 N°1. Septembre. Méditerranée. pp. 59-75.
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De Tapia Stéphane. La création d'entreprises populaires par les migrants en Turquie. In: Revue européenne de migrations
internationales. Vol. 2 N°1. Septembre. Méditerranée. pp. 59-75.
doi : 10.3406/remi.1986.995
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remi_0765-0752_1986_num_2_1_995Résumé
La création d'entreprises populaires par les migrants en Turquie.
Stéphane DE TAPIA
Le déclenchement d'une importante émigration en Turquie, relayant l'exode rural des années 1950, a
amené les pouvoirs publics turcs en relation, avec les autorités germaniques et néerlandaises, à
élaborer une politique complexe de réinsertion s'appuyant sur l'épargne des émigrés. Nées de cette
politique, plusieurs centaines d'entreprises industrielles et quelques milliers de coopératives de
production ont lancé un vaste mouvement d'industrialisation rurale. Malgré les moyens administratifs et
de recherche employés, les objectifs n 'ont été que très partiellement atteints, car la relative rapidité de
l'accumulation d'un capital ne transforme pas pour autant un travailleur d'origine rurale en créateur
d'entreprise. La Turquie est de plus secouée d'un vaste débat économique et idéologique sur les voies
du développement. Seules les entreprises les mieux armées sont de taille à résister aux mutations en
cours ; or, structurellement, les issues de l'émigration ne sont certainement pas les plus
aptes. L'étude des succès et des échecs enregistrés en Turquie garde toute son acuité face à d'autres
expériences en cours en Tunisie et au Maroc.
Abstract
The creation of popular enterprises by migrants in Turkey
Stéphane DE TAPIA
The starting of a considerable emigration originating from Turkey, following over upon the drift from the
land of the 50s, led the Turkish authorities in touch with the German and the Dutch governments to
elaborate a complicated reintegration policy leaning on the emigres' savings. Due to this policy, several
hundred industrial concerns and a few thousand productive cooperative societies started up a large
movement of rural industrialization. Despite the means of administration and research used, the goals
have been only partially attained for multiple reasons : the relative speed ofthe accumulation of capital
can't with a stroke of magic wand turn a worker of rural origin into a company manager. Moreover,
Turkey in being shaken by a vast economic and ideological debate about the means of development.
The best-equipped firms only are up to withstanding the transformations under way. When in fact,
structurally speaking, firms stemming from emigration are certainly not the most capable of doing so.
The study of successes and failures recorded in Turkey keeps all its acuteness face to the experiments
being carried out in Tunisia and Morocco.
özet
Türkiye'de Işçi Dovizleri ve halk girişimleri.
Stéphane DE TAPIA
1950 selelerinde taşralarin boşalmasini takip eden Türk işgöcünün başlangici, Alman ve Hollandali
yardimiyla Türk yönetimlerini ye yeni bir dönüş politikasina getirdi. Bu politika, yurt dişindaki işçilerin
tasarruflarinin üstüne dayanir. 1964-65 yilidan itibaren yüzlerce sanayi girişimleri, binlerce üretim
kooperatifleri Kuruldu : bu engin bir kirsal sanayilesme hareketini teşkil eder. Idarî ve araştirma yollari
çok olmasina rağmen, istenilen hedeflere varilamadi. Zorluk nedenleri çoktur : özellikle « sermaye »
yiğinlama yollari kolay ve oldukça çabuk gözüküyorsa bile, tasrali bir işçi kolay kolay sanayi bir işveren
ya da işletmeci olamuz. Ayrica Türkiye çok önemli ve derin bir değişme aşamasindadir. Ekonomik ve
ideolojïk tartişmalar henüz bitmis durumda değildir. Bu açidan en sağlam girişimler bile zor durumdadir.
Yapi olarak, Işçi ve Halk Şirketteri çabuk değişmeye maruz kalir. Yasalar, yönetmelik, özgü olan kredi
ve meuduat kurumlari yeterli değildir. Türkiye'deki basarilar ve çöküşlerin öğretileri çağdaş Tunus ve
Fas ülkelerinde varolan çalişmalar için çok önemli bir nokta kavramaktadir.59
Revue Européenne
des Migrations Internationales
Volume 2 - N° 1
Septembre 1986
La création
d'entreprises populaires
par les migrants en Turquie
Stéphane DE TAPIA
L'émigration turque à l'étranger a touché plus de deux mil
lions de personnes et peut-être trois millions si l'on tient compte des retours définit
ifs, difficiles à chiffrer et à contrôler ('). Pour beaucoup de travailleurs mariés et
résidant seuls à l'étranger, l'incidence économique sur la famille restée en Turquie
est particulièrement importante. De ce fait, une véritable économie parallèle s'est
mise en place : transferts de fonds (déclarés ou non), de biens de consommation,
d'outillage et même d'équipement. Sur le plan de l'emploi, l'absence de plusieurs
centaines de milliers de travailleurs réels et potentiels (femmes et enfants de
migrants) a sans doute diminué le chômage et atténué les tensions sociales. A
l'inverse, l'économie turque a souffert du départ d'un grand nombre de travailleurs
qualifiés qui ont préféré partir pour une rémunération plus forte en Europe de
l'Ouest, quitte à exercer un travail moins qualifié. Sur le plan « comptable », le
transfert de l'épargne a eu un effet bénéfique sur la balance des paiements, en
atténuant ou même en supprimant le déficit de la balance du commerce extérieur.
Par contre, il est très probable que l'irruption sur le marché intérieur turc de flux de
devises et de biens de consommation a eu des conséquences négatives en renforçant
les tendances inflationnistes. A côté de l'entrée des devises « officielles » (canal
bancaire et postal), le flux des rentrées au titre du « tourisme » est resté faible,
accusant même souvent un déficit, de 1964 à 1969, puis en 1976-77.
L'effet d'entraînement des revenus migratoires sur certaines activités tertiaires
(transports, commerce et secteur bancaire) et sur le bâtiment est évident, mais
particulièrement sujet à controverse. A l'inflation s'ajoutent les spéculations fon
cières et immobilières, l'engorgement de certaines activités comme les transports
péri-urbains (2), l'apparition d'organismes financiers privés accompagnés d'une
multitude de scandales financiers. 60 Stéphane de Tapia
C'est donc dans ce contexte schématiquement présenté qu'il convient de situer
l'émergence d'une expérience originale, très discutable, mais très intéressante, dite
en turc « entreprise populaire » (Halk Girisimi) ou « société ouvrière » (I§çi Çirketi).
LES ENTREPRISES POPULAIRES :
TYPOLOGIE ET PROBLEMATIQUE
Dans l'esprit des promoteurs de l'idée même « d'entreprise populaire » (halk
giris.imi), il s'agissait de créer, face au secteur public (Kamu Sektôrù) et au secteur
privé (Ozel Sektôrù), un troisième secteur économique distinct des coopératives et
du secteur d'économie mixte (Karma Sektôrù) déjà existants, une série d'entre
prises économiquement rentables, compétitives, associant travailleurs, petits pro
ducteurs, petits épargnants de Turquie et travailleurs migrants. A partir de la
constatation selon laquelle le marché interne des capitaux est étroit, et alors même
qu'on hésite à faire entrer en force les capitaux étrangers déjà présents dans les
branches automobiles ou pharmaceutiques, il serait possible de drainer une part
importante des avoirs turcs à l'étranger (l'épargne des migrants), de l'associer à
l'épargne locale en l'investissant sur des secteurs productifs. D'où les avantages
suivants :
1. alimenter le marché des capitaux ;
2. relancer le développement industriel et économique en général, en corr
igeant les déséquilibres régionaux, l'un des problèmes majeurs de la Turquie
contemporaine ;
3. diffuser les habitudes et le mode de vie industriels dans la population.
Ce « secteur pop