La violence dans les établissements scolaires britanniques : approches sociologiques - article ; n°1 ; vol.123, pg 123-151
30 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

La violence dans les établissements scolaires britanniques : approches sociologiques - article ; n°1 ; vol.123, pg 123-151

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
30 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Revue française de pédagogie - Année 1998 - Volume 123 - Numéro 1 - Pages 123-151
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 67
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

M. Emmanuel Peignard
Mme Elena Roussier-Fusco
Agnès Henriot-Van Zanten
La violence dans les établissements scolaires britanniques :
approches sociologiques
In: Revue française de pédagogie. Volume 123, 1998. pp. 123-151.
Citer ce document / Cite this document :
Peignard Emmanuel, Roussier-Fusco Elena, Henriot-Van Zanten Agnès. La violence dans les établissements scolaires
britanniques : approches sociologiques. In: Revue française de pédagogie. Volume 123, 1998. pp. 123-151.
doi : 10.3406/rfp.1998.1131
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfp_0556-7807_1998_num_123_1_1131NOTE DE SYNTHESE
La violence
dans les établissements
scolaires britanniques :
approches sociologiques
Emmanuel Peignard
Elena Roussier-Fusco
Agnès van Zanten
violence L'objectif dans de les cet établissements article n'est britanniques, pas de faire ni le sur point l'évolution sur l'importance de ce phénode la
mène dans le temps ou sa distribution dans l'espace social et géographique.
Une telle démarche, dont nous ne contestons guère la légitimité scientifique,
reste à entreprendre et on pourra pour ce faire s'appuyer sur un corpus de
recherche important. Celui-ci montre notamment que la violence n'est pas un
phénomène récent mais qu'il a acquis une notoriété nouvelle au cours des
quarante dernières années pour au moins deux raisons. En premier lieu, il faut
noter les progrès accomplis dans le repérage « scientifique » des élèves « per
turbateurs » (disruptive pupils) ainsi que dans le développement de structures
et la formation d'un personnel spécialisé pour assurer leur prise en charge
depuis la deuxième guerre mondiale. En deuxième lieu, il faut souligner l'i
mportance de la création d'un enseignement secondaire commun à tous,
notamment tel qu'il est mis en œuvre à partir du milieu des années 1960.
Celui-ci a engendré des problèmes spécifiques dans nombre d'établissements
polyvalents dont au premier chef « l'échec scolaire » et la « violence ». Ces
problèmes ont profondément altéré le vécu quotidien des acteurs de l'éducat
ion. Ils ont aussi cristallisé l'opposition des défenseurs d'une éducation
visant la sélection des meilleurs et la transmission des valeurs traditionnelles,
et mobilisé l'attention des médias et des hommes politiques. (Francis, 1975 ;
Lowenstein, 1975 ; Docking, 1980 ; Galloway et al. 1982 ; Denscombe, 1984).
La littérature qui s'intéresse à l'indiscipline ou aux élèves « perturba
teurs » est néanmoins majoritairement d'orientation purement psychologique
ou pédagogique, voire philosophique (Wilson, 1981), et c'est pour cette rai-
Revue Française de Pédagogie, n° 123, avril-mai-juin 1998, 123-151 123 son principalement que nous avons décidé de la laisser de côté ici. Nous
avons donc choisi d'isoler plutôt les orientations, scientifiques ou politiques,
qui au sein de la sociologie de l'éducation ont déterminé l'appréhension de
ce phénomène. Ainsi dans une première partie de cette note de synthèse
nous examinons comment les différentes approches théoriques (culturalisme,
interactionnisme, théories de la résistance...) qui ont marqué la recherche
sociologique entre le milieu des années 1960 et le milieu des années 1980
ont cherché à conceptualiser et à interpréter ce phénomène à travers des
paradigmes comme celui de la « déviance », de I' «adaptation » ou de la
« résistance ». Dans une deuxième partie, nous nous focalisons sur des
approches plus récentes qui, à partir des années 1980, dans une optique à
la fois militante et scientifique, analysent la violence qui s'exerce à l'égard
de groupes socialement dominés comme les filles ou les élèves de minorités
ethniques et celle produite par ces groupes eux-mêmes en réponse à cette
domination. Enfin, dans une troisième partie, nous nous intéressons à une
dimension particulière de la violence scolaire, « le bullying » (c'est-à-dire les
brimades entre élèves), qui a retenu prioritairement l'attention tant des psy
chologues que des sociologues de l'éducation dans les années 1990.
LA VIOLENCE DANS LES THÉORIES SOCIOLOGIQUES DE L'ÉDUCATION :
DÉVIANCE, ADAPTATION ET RÉSISTANCE
C'est à partir de la fin des années 1960 que l'on voit apparaître en
Grande-Bretagne des travaux qui s'intéressent au rapport des élèves à leur
scolarité et, plus précisément, aux comportements qui vont à l'encontre des
normes officielles de l'institution en matière d'ordre et de discipline.
L'émergence d'une telle orientation obéit à la fois à des raisons politiques et
à des raisons scientifiques. L'analyse des recherches qui suit fait apparaître
en effet des liens évidents entre l'instauration progressive d'un enseignement
secondaire commun à tous les élèves et l'intérêt croissant des acteurs, des
décideurs et des chercheurs en éducation pour les difficultés scolaires des
élèves de milieu populaire et, un peu plus tardivement, de ceux appartenant
aux diverses minorités ethniques. Mais cet intérêt répond aussi à des évo
lutions propres au champ de la recherche en éducation où l'on voit apparaître,
sous l'influence notamment dans un premier temps des travaux américains,
fonctionnalistes ou interactionnistes, sur la déviance, un intérêt nouveaux
pour les limites et les effets complexes de la socialisation scolaire sur l'int
égration sociale des élèves de milieu populaire et, plus généralement, pour les
articulations entre les objectifs institutionnels de l'école et les perspectives
des élèves.
La production scolaire de sous-cultures déviantes
Les premiers travaux conduits dans ce domaine s'inspirent largement des
théories de la déviance à orientation fonctionnaliste. En effet, les sociologues
de l'éducation britanniques empruntent aux auteurs américains de ces théo
ries l'idée que la déviance des jeunes de milieu populaire, telle qu'elle se
manifeste dans les établissements d'enseignement au travers des perturba
tions plus ou moins graves de l'ordre scolaire, doit certes être rapportée à
certains traits de la culture populaire qui prédisposent les jeunes issus de ce
124 Revue Française de Pédagogie, nc 123, avril-mai-juin 1998 milieu aux comportements délinquants (Miller, 1958), mais aussi, et surtout,
au décalage entre les aspirations de réussite de ces jeunes et les procédés
acceptables dont ils disposent pour les atteindre (Thrasher 1927 ; Merton,
1959). Ce sont surtout les thèses de A. Cohen (1955) concernant la spécif
icité de la sous-culture délinquante juvénile — définie non pas comme
une culture différente de celle des adultes « respectables » des classes
moyennes mais comme une culture qui inverse délibérément les normes de
cette dernière — qui ont été reprises. Les travaux de R. Cloward et L. Ohlin
(1960), et notamment leur thèse sur le fait que la déviance ne se développe
qu'à la faveur d'une « structure des occasions » qui permet au sein d'un
groupe d'apprendre à devenir déviant et d'avoir accès à des moyens illég
itimes pour exercer les « compétences » acquises dans ce domaine, ont éga
lement exercé une influence considérable (1).
Les monographies d'établissements d'enseignement secondaire réalisées
en Grande-Bretagne par D. Hargreaves (1967) et C. Lacey (1970) apportent
toutefois une contribution spécifique dans le champ de l'éducation en ana
lysant finement les processus scolaires qui participent à la construction
de sous-cultures déviantes. Ainsi, D. Hargreaves étudie l'émergence dans la
secondary modem school qu'il a étudiée de deux sous-cultures spécifiques,
une sous-culture « académique » et une sous-culture « déviante ». Deux
hypothèses principales sous-tendent ce travail. La première est que grâce à
l'extension de la scolarisation des classes populaires, c'est principalement à
l'école que les jeunes de la classe ouvrière vont être confrontés à la fois aux

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents