Le secteur public élargi au coeur d une politique - article ; n°1 ; vol.17, pg 96-115
21 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Le secteur public élargi au coeur d'une politique - article ; n°1 ; vol.17, pg 96-115

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
21 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Revue d'économie industrielle - Année 1981 - Volume 17 - Numéro 1 - Pages 96-115
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 35
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-François Lemettre
Le secteur public élargi au coeur d'une politique
In: Revue d'économie industrielle. Vol. 17. 3e trimestre 1981. pp. 96-115.
Citer ce document / Cite this document :
Lemettre Jean-François. Le secteur public élargi au coeur d'une politique. In: Revue d'économie industrielle. Vol. 17. 3e
trimestre 1981. pp. 96-115.
doi : 10.3406/rei.1981.2890
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rei_0154-3229_1981_num_17_1_2890secteur public élargi Le
au cœur d'une politique
Jean-François LEMETTRE
Chargé Vice- de conférences Président de en l'université sciences économiques de Paris X
I. — UN ENJEU DE POUVOIR
Pour comprendre l'importance et l'âpreté du débat sur les nationalisations, il
faut le situer par rapport à l'enjeu de pouvoir que celles-ci recouvrent. On a écrit
beaucoup, souvent à tort, à propos du gâchis dans la gestion, du manque de
dynamisme, de la sclérose de l'esprit d'initiative qui seraient le lot de toute entre
prise publique ; on a brandi la menace de retorsions de firmes multinationales ou
de gouvernements étrangers refusant de collaborer avec des entreprises contrôl
ées par un Etat, comme si le cas ne se présentait pas déjà fréquemment. Et sou
vent, l'importance des intérêts en balance et la passion de la propagande ont
débordé la raison.
Il n'y a là rien qui surprenne. Dans une société où les rapports économiques
déterminent les rapports sociaux, où le contrôle des principales forces de product
ion et des circuits financiers permet d'exercer une influence déterminante sur le
développement économique national, et sur les équilibres régionaux et sur l'évo
lution des rapports internationaux, où ce contrôle permet en outre d'orienter for
tement la politique économique, sociale, culturelle,... il n'est pas étonnant qu'un
projet de changement des titulaires de ce pouvoir déclenche des confrontations
au plus haut degré.
Car tel est bien le sens de l'opération en cours avec le vote — et
l'application — de la loi portant extension du secteur public industriel et finan
cier (S.P.I. F.). Nationaliser, c'est retirer à une catégorie dirigeante, constituée en
oligarchie financière exerçant les prérogatives du droit de propriété, la disposi
tion des principaux instruments de son pouvoir sur la société. C'est remettre ce
pouvoir à des institutions représentatives d'autres forces sociales et politiques
plus représentatives de la collectivité nationale.
Les discussions sur l'étendue, la forme, le calendrier sont importantes mais
seulement dans la mesure où elles se rapportent à ce principe premier : la natio
nalisation est une technique de contrôle des instruments du pouvoir économique
et financier. En 1981, le pouvoir économique change de mains, à l'instar du pou
voir politique. Mais au delà des détenteurs de ce pouvoir, c'est aussi sa nature qui
change.
96 REVUE D'ÉCONOMIE INDUSTRIELLE — n° 17, 3» trimestre 1981 Nationalisation n'est pas nécessairement socialisme. 1.
Il ne faudrait pas pour autant que l'expropriation des anciens titulaires du pou
voir économique d'un certain nombre de grandes entreprises, banques et établi
ssements financiers soit compris comme changeant définitivement , à elle seule, les
rapports de pouvoir dans la société. Un rapide retour sur l'histoire du S.P.I. F. en
France permettra une vue plus précise.
L'appropriation collective des grands moyens de production, des services
publics, de la banque et de la finance font partie d'un héritage ancien dans l'his
toire de la gauche politique et syndicale. « le secteur public représente (pour elle)
une volonté — et un moyen — d'organisation harmonieuse de la société,
d'orientation de l'économie au service de la population et de la solidarité natio
nale » (1).
Mais la constitution du secteur public n'est pas le fait de la seule gauche. Sous
la monarchie d'abord, puis avec l'ascension et la domination de la bourgeoisie
d'affaires, l'Etat n'a jamais cessé de prendre part à la vie économique. Dans un
premier temps le secteur public s'est constitué pour les besoins des armées, de
l'administration et du contrôle politique du territoire, ou du Trésor royal : la
poste, les monopoles royaux et les grandes manufactures, les grands travaux
publics relèvent de cette histoire. Le XIXème siècle, malgré le libéralisme écono
mique érigé en idéologie dominante, a vu une continuité remarquable en ce
domaine. Même si en apparence la propriété et l'initiative privées formaient la
règle constante, l'Etat continuait à développer le service public et prenait part au
développement des affaires privées. Ainsi des compagnies privées de chemin de
fer qui exploitaient une infrastructure mise en place grâce à l'argent public mais
étaient contraintes à tenir compte des besoins de certaines catégories d'usagers à
côté des activités rentables et étaient soumises à autorisation de l'Etat pour ouvrir
de nouvelles lignes (ce qui garantissait aussi leur monopole).
Dans l' entre-deux-guerres, avant même le gouvernement de front populaire, le
secteur public industriel (S.P.I.) se trouvait élargi, d'une part du fait du traité de
Versailles qui transférait à l'Etat français des industries d'Etat allemandes en
Alsace-Lorraine (azote, potasse...) et d'autre part sous la forme nouvelle de
l'économie mixte combinant, selon ses promoteurs, les missions (et l'argent) du
service public avec l'efficacité (et sous l'influence) de l'entreprise privée.
La crise des années 30 amplifia le mouvement, avec notamment la victoire élec
torale du Front Populaire. Pour autant, les nationalisations n'engageaient pas le
pays dans la voie d'une transformation profonde :
— elles résultaient le plus souvent d'une transformation en parts de capital de
créances que l'Etat ne pouvait plus recouvrir auprès de sociétés au bord de la fail
lite (d'où résulte le statut d'économie mixte de la S.N.C.F.).
— Léon Blum lui-même les caractérisait ainsi : « tenant en main le gouvernail
des industries-clés et du crédit, la collectivité nationale peut gouverner l'écono-
(1) Parti Socialiste : L'agression, l 'Etat-Giscard contre le secteur public, Club Socialiste du Livre,
Paris 1981 p. 17.
REVUE D'ÉCONOMIE INDUSTRIELLE — n" 17, 3» trimestre 1981 97 mie capitaliste de façon (...) à établir dans le chaos un rudiment de règle et de
clarté » (2).
L'actuel secteur public a surtout été constitué après les nationalisations de
1945-1946.
2. la nationalisation comme sanction
« Les deux grandes vagues de nationalisations qui ont touché l'économie fran
çaise, en 1936 et en 1945, se rattachaient implicitement au concept de sanction :
sanction d'une attitude contraire à l'intérêt public : Renault et les industries
d'armement ; et le plus souvent sanction d'un échec de l'économie de marché :
transports et distribution d'énergie. Ces échecs sont le lot de tous les pays indust
riels, y compris les Etats-Unis comme le montre la faillite de Penn Central en
1971 » (3).
Ce rappel, qui prolonge le développement précédent sur les origines du secteur
public industriel, est nécessaire pour qui serait tenté de porter crédit au dogme de
la supériorité en toutes choses de l'initiative privée sur la gestion au nom d'une
collectivité. La nationalisation apparaît comme une forme nécessaire du dénoue
ment du conflit d'intérêt entre les dirigeants des grandes affaires privées et la col
lectivité nationale, voire même parfois entre les intérêts propres à chaue entre
prise et ceux de la grande bourgeoisie d'affaires prise dans son ensemble, conflit
que les mécanismes courants de régulation n'étaient plus à même de régler.
i — L'incapacité pour les propriétaires du capital à intégrer à leurs critères de
décision les nécessités du service public ou de l'intérêt collectif en est un exemple.
La théorie des biens collectifs donne de cette incapacité une explication qu'elle
veut neutre par rapport aux grandes confrontations politiques et sociales. Mais le
déba

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents