Les producteurs de radio à France Culture : « journalistes », « intellectuels » ou « créateurs » ? : de la définition de soi à l interaction radiophonique - article ; n°86 ; vol.15, pg 13-38
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Les producteurs de radio à France Culture : « journalistes », « intellectuels » ou « créateurs » ? : de la définition de soi à l'interaction radiophonique - article ; n°86 ; vol.15, pg 13-38

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Réseaux - Année 1997 - Volume 15 - Numéro 86 - Pages 13-38
Although they are seen from the outside as journalists, radio producers have neither that title nor the relevant experience. To understand the relationship that France Culture producers have with intellectual, creative or journalistic projects, one has to analyse the significance of their work for the cultural radio station in their preceding or current academic or professional lives. The social study of France Culture radio producers presented here also offers a morphological description of the station's population of producers and constructs a professional segment corresponding to the most active producers. As neither educators nor mediators, they are in a professionally ambiguous position which helps to explain their stance in their interaction with intellectual interlocutors (discursive position of withdrawal). Describing professional projects therefore provides a key to understanding the station and the position of producers within the intellectual configuration.
Assimilés de l'extérieur à des journalistes, les producteurs de radio n'en ont à la fois ni le titre, ni l'expérience. Pour comprendre le rattachement des producteurs de France Culture à des projets intellectuels, créatifs ou journalistiques, il est pertinent de comprendre le sens que prend le travail pour la chaîne culturelle dans leurs parcours scolaires et professionnels antérieurs ou parallèles. La sociologie des producteurs radio de France Culture qui est proposée ici offre aussi une description morphologique de la population des producteurs de la chaîne et construit un segment professionnel, celui correspondant aux producteurs les plus actifs. Ni pédagogues, ni médiateurs, ils sont dans une ambiguïté de l'expérience professionnelle qui permet de comprendre leur position dans l'interaction au micro avec leurs interlocuteurs intellectuels (position discursive de retrait). Montrer les projets professionnels fournit donc aussi une clé de compréhension de la chaîne et de la position des producteurs au sein de la configuration intellectuelle.
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1997
Nombre de lectures 44
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Hervé Glevarec
Les producteurs de radio à France Culture : « journalistes », «
intellectuels » ou « créateurs » ? : de la définition de soi à
l'interaction radiophonique
In: Réseaux, 1997, volume 15 n°86. pp. 13-38.
Abstract
Although they are seen from the outside as journalists, radio producers have neither that title nor the relevant experience. To
understand the relationship that France Culture producers have with intellectual, creative or journalistic projects, one has to
analyse the significance of their work for the cultural radio station in their preceding or current academic or professional lives. The
social study of France Culture radio producers presented here also offers a morphological description of the station's population
of producers and constructs a professional segment corresponding to the most active producers. As neither educators nor
mediators, they are in a professionally ambiguous position which helps to explain their stance in their interaction with intellectual
interlocutors (discursive position of withdrawal). Describing professional projects therefore provides a key to understanding the
station and the position of producers within the intellectual configuration.
Résumé
Assimilés de l'extérieur à des journalistes, les producteurs de radio n'en ont à la fois ni le titre, ni l'expérience. Pour comprendre
le rattachement des producteurs de France Culture à des projets intellectuels, créatifs ou journalistiques, il est pertinent de
comprendre le sens que prend le travail pour la chaîne culturelle dans leurs parcours scolaires et professionnels antérieurs ou
parallèles. La sociologie des producteurs radio de France Culture qui est proposée ici offre aussi une description morphologique
de la population des producteurs de la chaîne et construit un segment professionnel, celui correspondant aux producteurs les
plus actifs. Ni pédagogues, ni médiateurs, ils sont dans une ambiguïté de l'expérience professionnelle qui permet de comprendre
leur position dans l'interaction au micro avec leurs interlocuteurs intellectuels (position discursive de retrait). Montrer les projets
professionnels fournit donc aussi une clé de compréhension de la chaîne et de la position des producteurs au sein de la
configuration intellectuelle.
Citer ce document / Cite this document :
Glevarec Hervé. Les producteurs de radio à France Culture : « journalistes », « intellectuels » ou « créateurs » ? : de la
définition de soi à l'interaction radiophonique. In: Réseaux, 1997, volume 15 n°86. pp. 13-38.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reso_0751-7971_1997_num_15_86_3110LES PRODUCTEURS DE RADIO
A FRANCE CULTURE
de « la Journalistes définition de », « soi intellectuels à l'interaction » ou radiophonique « créateurs » ? :
Hervé GLEVAREC
© Réseaux n° 86 CNET - 1997
13 — tien où les producteurs parlent de « leur
micro » (2).
Si la chaîne accueille une telle diversité
de définitions de soi et du travail, c'est
que le poste (de travail) est caractérisé
par un certain flou : quelles fonctions
recouvre-t-il ? Quels savoirs requiert-il ?
Il en est de même du titre, au sens du
titre scolairement garanti, puisqu'il n'y a
pas de droit d'entrée scolaire. Par contre,
le titre professionnel de « producteur »
existe (3). Quiconque produit une émis
sion à France Culture peut se définir
comme producteur sans se voir opposer
un démenti juridique, sinon une absence
de reconnaissance de la part des product
eurs les plus actifs (qui l'ont inscrit sous
la forme d'un quota d'heures de product
ion dans les conditions d'appartenance à
la Société des producteurs, agents et col
laborateurs d'émissions à France Culture
Cet article a pour objectif d'analyser créée en 1987).
la conception indigène qu'ont de
leur activité professionnelle les pro « D y a un gros zlíbat* qui est un petit
ducteurs de France Culture. En effet, le peu tabou parée ф*Ш ne faut pas se laisser
travail radiophonique peut prendre diffé embringuer dans des définitions figées,
rents sens : celui d'un travail créatif, jour entre î 'étiquette áe producteur et réti-
nalistique ou intellectuel. Les résultats de quette de journaliste. Alors II vous allez
l'enquête menée auprès des producteurs avoir deux grandes tendances. Mais ces
les plus actifs de la chaîne n'abondent pas deux grandes tendances en recouvrent
de fait en faveur d'une conception instru- (fautres past fnfîroes, chaque producteur
mentalisée de leur rôle (1). Non seulement ayattt cîtècun sa définition* Mais disons
les producteurs de la chaîne publique cul qu'il y a qitonxt même deux grandes ten*.
turelle ne se pensent pas comme des relais Jâttces, II y aurait une tendance qui se"
ou des « médiateurs » entre la production revendiquerait davantage comme journal
culturelle et scientifique et un auditoire, iste, avec tout ce que ça comporte, c'est-
mais ils mettent en œuvre avec techniciens à-dire aussi carte de presse, salariat éven
et chargés de réalisation un dispositif tuellement, être intégré dans Ja Maison
d'émission où est valorisée la personnali dans le cadre d'une rédaction, Ou bien il y
sation de leur rôle. Celle-ci est visible aurait la tendance producteur. Il y a une
aussi bien dans le dispositif relationnel liberté de conscience mais on le paye de la
qu'ils mettent en place lors des émissions précarité. » [Productrice, 45 ans]
que dans les discours recueillis en
(1) Nous renvoyons à notre thèse, GLEVAREC, 1997, pp. 350-352.
(2) Cf. GLEVAREC, 1996.
(3) Ce cas excède en quelque sorte la conceptualisation par Boltanski et Bourdieu du rapport entre le titre et le
poste, dans la mesure où le titre était entendu comme le titre scolaire, titre nominal produit par le système sco
laire, et le poste comme ensemble de qualifications requises par la fonction (BOLTANSKI, BOURDIEU, 1975).
Entre le titre scolaire et le poste il y a place pour une autonomie de l'intitulé du poste (dénomination), notamment
dans toutes les situations (nouvelles) où le rapport entre le titre et le poste n'est pas objectivement codifié ou
réglementé. C'est ce que met en évidence Luc Boltanski dans son étude de la catégorie des « cadres ». BOL
TANSKI, 1982.
15 — On voit apparaître les deux pôles de la Il y a ainsi une double définition de l'ac
définition de soi et du métier : journaliste tivité : l'une qui concerne le titre, l'autre le
et producteur. L'enjeu est double. Le pro travail. Il ne s'agit pas ici de créer un titre
ducteur essaie de se définir par rapport à qui existe déjà, mais de lui donner un
un projet (une idéologie professionnelle) : contenu :
le titre de journaliste est alors vigoureuse
ment rejeté parce qu'il est associé à un
ensemble de connotations professionnelles
négatives (travail rapide, soumis, dévalor
isé, n'autorisant qu'un faible investisse
ment), ou, à l'inverse, le titre de journaliste
peut être choisi contre celui de producteur
(« qui ne veut pas dire grand-chose »
(sic)) ; le producteur essaie aussi de se
définir par rapport à des conditions de tra
Le titre de producteur radio est socialvail : il a du métier de journaliste la repr
ement faiblement stabilisé : il ne renvoie ésentation d'une activité contrainte et
pas à un monopole scolairement ou admi- contraignante (travail aléatoire, investiss
nistrativement garanti ; il est faiblement ement personnel impossible sous forme de
marqué dans les représentations et, de création, de recherche ou de prise de posi
plus, assimilé couramment à la fonction de tion intellectuelle) (4). La définition de soi
journaliste, dont l'existence sociale est par est une synthèse entre une représentation
contre forte. La divergence est même des conditions de travail et une aspiration
récurrente entre la perception qu'ont les professionnelle : le journaliste dépendrait
producteurs radio d'eux-mêmes et la perd'une rédaction mais il aurait une activité
ception des universitaires qui les assimilet une identité stables, le producteur serait
ent, eux, à des journalistes (« en fait, ce autonome mais il prendrait le risque de
sont des journalistes »). Elle n'est pas le l'instabilité professionnelle et identitaire.
fait d'une méconnaissance ou d'une Cette tension se traduit alors et surt

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