Les tributs aux Normands et l Église de France au IXe siècle - article ; n°1 ; vol.85, pg 58-78
22 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Les tributs aux Normands et l'Église de France au IXe siècle - article ; n°1 ; vol.85, pg 58-78

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
22 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Bibliothèque de l'école des chartes - Année 1924 - Volume 85 - Numéro 1 - Pages 58-78
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1924
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ferdinand Lot
Les tributs aux Normands et l'Église de France au IXe siècle
In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1924, tome 85. pp. 58-78.
Citer ce document / Cite this document :
Lot Ferdinand. Les tributs aux Normands et l'Église de France au IXe siècle. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1924, tome
85. pp. 58-78.
doi : 10.3406/bec.1924.448709
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1924_num_85_1_448709LES
TRIBUTS AUX NORMANDS
ET
IXe SIÈCLE1 L'ÉGLISE DE FRANCE AU
Nous n'avons pas l'intention de reprendre l'ensemble de ce
sujet qui vient d'être l'objet d'un travail consciencieux et appro
fondi2. Nous voudrions seulement attirer l'attention sur un cer
tain nombre de problèmes qu'il suscite et suggérer une solution.
Nous nous bornerons au dernier en date de ces tributs, celui
de mai ou juin 877 3, parce que nous avons sur lui des textes
plus explicites et qui permettent peut-être de comprendre mieux
les levées d'argent précédentes en 845, 853, 860-861, 862,
866. L'archevêque de Reims, Hincmar, nous fournit des détails
précis sur l'assiette et le produit du tribut. Il fallut donner :
1° par manse seigneurial 1 sou (12 deniers); 2° parmanse ingé-
nuile 8 deniers, payables moitié par le seigneur, moitié par le
tenancier; 3° par manse servile 4 deniers, payables de la même
manière; 4° chaque évêque tira des prêtres de son diocèse une
somme calculée d'après leurs ressources, mais dont le maximum
fut fixé à 5 sous (60 deniers), le minimum à 4 deniers; 5° on
mit à contribution le trésor de chaque église proportionnelle
ment à sa richesse. — L'ensemble fournit 5,000 livres d'ar
gent au poids des Normands. Ces derniers sont les Normands
1. Les éléments de ce mémoire sont empruntés à une conférence faite à l'École
des Hautes-Études en décembre 1922.
2. Einar Joranson, The Danegeld in France, Rock Island (Illinois), 1923,
petit in-4°. [Auguslana library publications, number 10.]
3. Joranson emploie tout un appendice (p. 220-229) pour établir que le tribut
fut consenti à Quierzy le 14 juin 877 et non le 7 mai à Compiègne. La ques
tion est, pour notre recherche, sans intérêt. .
TRIBUTS AUX NORMANDS ET l'e'gLISE DE FRANCE AU IXe SIECLE. 59 LES
de la Seine et les régions qui furent mises à contribution furent
la « France », dans les limites antérieures à la mort de Lothaire II,
et la Bourgogne. De son côté, la Neustrie eut à satisfaire aux
exigences des Normands de la Loire1.
Voilà un ensemble de 'renseignements succinct, mais clair,
confirmé partiellement, nous le verrons, par ce qui nous est resté
du capitulaire ayant pour objet ce tribut; enfin, un détail pré
cieux et qu'on ne trouve que dans les « Annales royales », le
chiffre du tribut.
C'est précisément ce chiffre (5,000 livres) qui, ayant attiré
notre attention, a fait naître en nous des inquiétudes sur l'inte
rprétation possible de ce texte, inquiétudes dont nous demandons
la permission de faire part aux lecteurs.
Il est étonnant que, en frappant la terre en la personne et du
seigneur propriétaire et du tenancier, colon ou serf, en impo
sant le clergé lui-même, enfin en taxant, ce que l'annaliste ne
dit pas, mais ce qu'on sait par ailleurs, les marchands et habi
tants des villes, on n'ait obtenu qu'une si faible somme, fût-elle
comptée au poids des envahisseurs8. Je sais bien que dans ce
chiffre seules les contributions de la « France » et de la Bour
gogne sont comprises. La Neustrie a payé à part une somme,
d'ailleurs inconnue, aux Normands de la Loire, la Lotharingie
et l'Aquitaine n'ont rien versé. Tout de même, 5,000 livres
c'est peu3.
1. Annales Beriiniani : « ... el quomodo tributum de parte regni Franciae
quam ante mortem Lotharii habuit sed et de Burgundia exigeretur disposuit,
scilicet ut de mansis indominicatis solidus unus, de unoquoque manso inge-
nuili 4 denarii de censu dominico et 4 de facilitate mansuarii, de manso vero
servili duo denarii de censu et duo de facultate mansuarii, et unus-
quisque episcopus de presbiteris suae parrocMae secundum quod cuique pos-
sibile erat, a quo plurimum quinque solidos, a quo minimum 4 denarios epi-
scopi de singulis presbiteris acciperent et missis dominicis redderent. Sed et de
thesauris ecclesiarum prout quantitas loci extitit ad idem tributum exsolven-
dum acceptum fuit. Summa vero tributi fuerunt quinque milia librae argenti
ad pensam. Uli vero, tarn episcopi quam alii, qui trans Sequanam sunt de Neu-
stria tributum illis Nortmannis qui in Ligeri erant secundum quod sibi ab eis
fuit impositum, undecumque valuerunt, reddere procuraverunt » (éd. G. Waitz,
p. 135).
2. Ce poids n'était guère plus lourd que le poids légal du système carolin
gien : 4 °/0 selon Soetber dans Forschungen z. D. Geschichte, t. VI, p. 55. Cf.
Joranson, op. cit., p. 214, n. 58.
3. L'Angleterre, pauvre et déserte au regard de la France, a versé pour le
Danegeld des sommes allant de 10,000 à 48,000 et même 83,000 livres, Voir 60 LES TRIBUTS AUX NORMANDS
Des évaluations approximatives, cela va sans dire, mais, j'ima
gine, pas trop erronées, nous portent à assigner à la « France »
(sans la Lotharingie) une superficie de 62,000 kilomètres car
rés, à la « Bourgogne » (le futur duché) 44,000
rés, au total 106,000 kilomètres carrés, soit, en gros, le ci
nquième de la France actuelle1. En outre, les Normands de la
Seine ne se sont pas contentés de piller la « France » et de
menacer la Bourgogne. Les parties de la Neustrie avoisinant la
Seine ont dû certainement se racheter à eux et non aux Nor
mands établis à l'embouchure de la Loire2. Il serait déraison
nable de prendre au pied de la lettre le renseignement fourni par
Hincmar et de vouloir que les gens de Chartres ou d'Évreux
aient versé aux Normands de la Loire, qui ne les inquiétèrent
jamais, sous prétexte que Chartres et Évreux sont géographique-
ment en Neustrie. Le total de 106,000 kilomètres carrés doit
être certainement grossi. En le portant approximativement à
130,000 kilomètres carrés, soit presque le quart de la France
actuelle, on reste au-dessous du probable.
Quoi qu'il en soit, que les régions qui ont pavé le tribut aux
Normands de la Seine en 877 forment le cinquième ou même le
quart de la France actuelle, il est extraordinaire que le produit
s'élève à une si faible somme, même en faisant la part des fuites
ou des malversations inévitables.
On voudrait savoir le chiffre des « manses » du royaume. Ce
souhait ne repose pas sur un concept chimérique. La division de
la terre en « manses » n'était pas seulement économique, mais
politique. Le texte même que nous étudions le prouve, et aussi
les nombreux capitulaires où le service militaire est dû en raison
du nombre de manses tenus en propriété ou en bénéfice3. Ce
Joranson, p. 17, n. 15. L'East Kent, à lui seul, paye 3,000 livres en 1009. Le
montant du tribut en France atteignit son apogée sous Carloman en 884,
12,000 livres. Il fut de 7,000 en 845, 5,000 en 861, 6,000 en 862, 4,000 (au
moins) en 866, 5,000 en 877. Cf. Joranson, p. 216.
1. Ces évaluations sont fondées sur la superficie des départements qui
rentrent dans la « France », la Neustrie, la Bourgogne. Pour la « France »,
on a ajouté la Flandre belge et déduit la portion du Hainaut qui faisait partie
de la Lotharingie.
2. Leur repaire paraît avoir été une île de la Loire sous Mont-Glonne. Voir
notre mémoire la Loire, l'Aquitaine et la Seine de 862 à 866 : Robert le Fort,
dans la Bibliothèque de l'École des chartes, 1915, t. LXXVI, p. 480.
3. Cf. nos Conjectures démographiques sur la France au IX' siècle, p. 9
(extr. du Moyen âge, année 1921). l'église de France au ixe siècle. 61 et
n'est pas à dire que tout le territoire du royaume fût « amansé » l ,
mais, évidemment, les parties qui ne l'étaient pas étaient consi
dérées comme négligeables, soit en étendue, soit en valeur2. Il
n'est donc nullement impossible que les rois carolingiens aient
su le nombre des manses de chaque pagus, comme les empereurs
romains connaissaient le nombre àejuga de chaque civitas de
l'Empire3. Les bureaux du « palais

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents