Radio, culture et démocratie en France : une ambition mort-née (1944-1949) - article ; n°1 ; vol.30, pg 55-67
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Vingtième Siècle. Revue d'histoire - Année 1991 - Volume 30 - Numéro 1 - Pages 55-67
Radio, culture and democracy in France, a still-born ambition (1944-1949), Hélène Eck.
At the time of Liberation, the state rapidly took over the function of information, leaving that of culture and entertainment to radio professionals. The national radio thus tried to play the role of an active cultural intermediary, capable of explaining « the great issues of the hour » to a broad audience. The national radio thus became in the beginning of the Fourth Republic a factor of French cultural life. While programming hesitated as to the relative place of high culture and « popular » entertainment, the choices nevertheless privileged authors such as Jean Cocteau who accepted the apprehension of the « mouth of darkness ». Subject to public service constraints and reinforced political control due to the Cold War, the radio did not have total freedom of cultural expression, as shown by the Antonin Artaud censorship case. In spite of everything, the radio did not suspend, in the name of politics, its minimal mission of reporting literary news.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 40
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Hélène Eck
Radio, culture et démocratie en France : une ambition mort-née
(1944-1949)
In: Vingtième Siècle. Revue d'histoire. N°30, avril-juin 1991. pp. 55-67.
Abstract
Radio, culture and democracy in France, a still-born ambition (1944-1949), Hélène Eck.
At the time of Liberation, the state rapidly took over the function of information, leaving that of culture and entertainment to radio
professionals. The national radio thus tried to play the role of an active cultural intermediary, capable of explaining « the great
issues of the hour » to a broad audience. The national radio thus became in the beginning of the Fourth Republic a factor of
French cultural life. While programming hesitated as to the relative place of high culture and « popular » entertainment, the
choices nevertheless privileged authors such as Jean Cocteau who accepted the apprehension of the « mouth of darkness ».
Subject to public service constraints and reinforced political control due to the Cold War, the radio did not have total freedom of
cultural expression, as shown by the Antonin Artaud censorship case. In spite of everything, the radio did not suspend, in the
name of politics, its minimal mission of reporting literary news.
Citer ce document / Cite this document :
Eck Hélène. Radio, culture et démocratie en France : une ambition mort-née (1944-1949). In: Vingtième Siècle. Revue
d'histoire. N°30, avril-juin 1991. pp. 55-67.
doi : 10.3406/xxs.1991.2375
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/xxs_0294-1759_1991_num_30_1_2375CULTURE RADIO,
ET DÉMOCRATIE EN FRANCE,
UNE AMBITION MORT-NÉE
(1944-1949)
Hélène Eck
Comment un Etat démocratique peut- de « culture partagée », que les années
il contrôler les ondes tout en respectant 1930 déjà avaient défendues et valorisées,
prennent un élan nouveau. La radio, bien la liberté d'expression ? A la Libération,
sûr, n'échappe pas à ce mouvement. Elle se on croyait si fort au pouvoir de la radio
veut « au service de la nation » : un lieu de qu'une bataille s'engagea sur le statut
débats et de dialogue, « une tribune où, qu'il fallait à la « voix de la France ».
loyalement, puissent être exposées, dans tous Mais s'agissait-il de la France ou des
les domaines de l'art et de la pensée, les Français ? Hormis l'information, vers
conceptions de l'esprit »\ Elle n'était qu'un quels sujets fallait-il orienter les pr
écho, il faut qu'elle devienne une voix, ogrammes ? Que choisir pour être sérieux
capable de contribuer à la synthèse démocsans ennuyer et léger sans vulgarité ? Et
ratie-culture. comment faire venir les écrivains tout en
Mais, sur ce vaste projet, pèsent bien des censurant Artaud ?
hypothèques. En premier lieu, celle de l'a
ttitude des politiques : il n'est pas certain que Durant la seconde guerre mondiale,
l'arrivée au pouvoir d'un corps politique les Français ont pour la première
renouvelé, dans le contexte des libertés rfois entendu des radios devenues
etrouvées, suffise à garantir l'indépendance organes de propagande. Ils ont pu alors
de l'institution radiophonique. En outre, si constater l'importance véritable du média et
la radio doit véritablement devenir celle de se convaincre, à tort ou à raison, de l'impact
la nation française, cela suppose, de la part de ses diffusions. Us ont pu également ob
des parlementaires, la prise en considération server l'ambiguïté de ses formes d'expres
de la totalité des missions qui lui incombent : sion, à l'écoute de programmes qui mariaient,
la distraction et la culture, au même titre parfois avec bonheur, culture et censure,
que l'information. Jusqu'alors, cela n'a guère divertissement et propagande. Or, à la Li
été le cas. Les dirigeants issus de la Résistance bération, après quatre années de régime
autoritaire, l'exigence de liberté et de dé
1. Lm radio au service de la nation, Projet d'Office présenté mocratie rejoint une volonté de renouveau par le Comité de Libération de la radiodiffusion française,
culturel. Les idées de « culture populaire », janvier 1946, 32 p.
55 HÉLÈNE ECK
lui marqueront-ils plus d'intérêt que leurs la tutelle gouvernementale : il en va de l'unité
prédécesseurs ? et du prestige de la France.
La seconde hypothèque tient à la radio A ceux qui, dans les régions où subsistent
elle-même. Dans leur très grande majorité, des émetteurs, réclament le droit de disposer
les élites intellectuelles et artistiques d'avant- librement du micro et dénoncent le centra
guerre n'ont pas contribué à son essor cultur lisme excessif du « dictateur de la radiodif
el. En revanche, en vingt ans, l'aventure fusion », Jean Guignebert rétorque ver
radiophonique a suscité la formation d'un tement : « La radio est une arme de guerre
milieu professionnel qui a dû et su inventer et il n'est pas habituel, en temps de guerre,
la radio, tout en restant aux marges de la de décentraliser les efforts ... La radio est
reconnaissance sociale et intellectuelle qui encore et surtout une arme d'action, de
abrite et conforte le prestige des autres arts. persuasion, de prestige. Et cela lui impose
Dans l'atmosphère de la Libération, la radio le devoir de chercher systématiquement la
pourra-t-elle convaincre les plus grands noms qualité, la cohérence, l'unité sans fissure des
du monde intellectuel et artistique de par doctrines et des formules de ralliement»1.
ticiper à ses programmes, à l'image d'Albert Les radios privées sont condamnées : déjà
Camus venu lire au micro le premier editorial frappées de réquisition en novembre 1944,
de Combat ? elles perdent définitivement leurs autorisa
tions d'émettre en mars 1945, ce qui fonde O L'ÉTAT CONTRE LA RADIO indirectement le monopole d'Etat sur les DE LA NATION ?
ondes. La radio de la Libération fonctionne
Dans les mois qui suivent la Libération, dans un cadre juridique imprécis et provi
la conjoncture n'incite guère l'Etat à se soire. C'est, paradoxalement, la loi de
dessaisir d'un instrument essentiel de gou 1942 édictée par Laval, mais maintenue en
vernement. Il faut asseoir la légitimité et vigueur, qui continue à la régir. Sa carac
l'autorité du Gouvernement provisoire, téristique essentielle était de sortir la radio
achever la guerre, préparer les premières d'un cadre administratif trop pesant et de
élections, faire face aux problèmes écono lui accorder quelque autonomie de gestion
miques et assurer « le rang » de la France financière. Or les modifications apportées à
face aux Alliés. Dans un tel contexte, il la loi de 1942 par des ordonnances qui
paraît normal que les dirigeants viennent au s'échelonnent en 1944-1945 tendent au
micro expliquer aux Français leurs projets contraire à ramener la radio dans le droit
et leurs tâches : nul ne s'offusque d'entendre commun : retour aux règles de la comptab
Pierre Mendès France, ministre de l'Eco ilité publique, rétablissement du statut de
nomie, tous les samedis sur les ondes, de fonctionnaire pour une partie du personnel,
novembre 1944 à avril 1945, pas plus que etc. Ainsi s'esquisse, en l'absence de loi
Paul Ramadier, chargé du Ravitaillement, de organique, le « statut » de la radio, admin
février à avril 1945, ou Pierre-Henri Teitgen, istration dotée d'un budget annexe (pour
ministre de l'Information de septembre partie seulement), placée sous l'autorité di
1944 à mai 1945. D'ailleurs, la radio est recte du gouvernement, via le ministère de
entre les mains des résistants. Son directeur, l'Information ou le secrétariat d'Etat à la
Jean Guignebert, socialiste, mais aussi les Présidence qui nomme et destitue son di
personnels relevant d'autres obédiences po recteur. Cette organisation dite provisoire
litiques, reconnaissent explicitement au gou durera, en dépit de quelques aménagements,
vernement le droit d'user de la radio. Deux
arguments, déjà utilisés avant guerre, mais Archives 1. Note Radio-France. sur les émissions régionales (5 décembre 1944),
bien renforcés par les événements, justifient
— 56 - CULTURE ET DÉMOCRATIE RADIO,
jusqu'en 1959, et la question du statut, ou bien, en définitive, l'exercice du pouvoir et
plus exactement de l'absence de statut, revêt la

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