Relations de coréférence dans la phrase et dans le discours - article ; n°1 ; vol.44, pg 42-79
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Relations de coréférence dans la phrase et dans le discours - article ; n°1 ; vol.44, pg 42-79

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Description

Langue française - Année 1979 - Volume 44 - Numéro 1 - Pages 42-79
38 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jacqueline Guéron
Relations de coréférence dans la phrase et dans le discours
In: Langue française. N°44, 1979. pp. 42-79.
Citer ce document / Cite this document :
Guéron Jacqueline. Relations de coréférence dans la phrase et dans le discours. In: Langue française. N°44, 1979. pp. 42-79.
doi : 10.3406/lfr.1979.6170
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1979_num_44_1_6170Jacqueline Guéron
Université de Paris VIII
RELATIONS DE COREFÉRENCE
DANS LA PHRASE ET DANS LE DISCOURS
1 . Introduction.
Nous nous posons le problème des conditions sous lesquelles deux syn-
tagmes nominaux (SN) peuvent être interprétés comme se référant à une
même entité dans le monde du discours.
Soit les phrases suivantes :
(1) Jean pense qu'ïY pourra venir dîner ce soir.
(2) *// pense que Jean pourra venir dîner ce soir.
Dans (1) les SN en italiques, Jean et il, peuvent être interprétés comme se
référant à une même personne, celle désignée par le nom Jean. (Il est égale
ment possible que ces deux SN se réfèrent à des personnes différentes, il
Ф Jean.) Mais dans (2), il et Jean ne peuvent pas désigner la même per
sonne *.
Nous allons proposer une explication pour ce phénomène dans la sec
tion 3 de cette étude. Mais avant de ce faire, nous passerons en revue, pour
bien situer le problème, les principales théories de la coréférence proposées
jusqu'à ce jour dans le cadre de la grammaire transformationnelle.
A ne regarder que le contraste entre (1) et (2), on pourrait croire que les
conditions régissant la coréférence un SN et un pronom sont basées sur
Vordre respectif des deux constituants. La coréférence serait régie par la
règle (3).
(3) Un pronom ne peut être coréférentiel qu'avec un SN qui le précède.
La règle (3) ne distingue pas la coréférence dans la phrase de celle qui
apparaît dans un discours contenant plusieurs phrases. Elle a ainsi le mérite
de rendre compte du contraste entre (4) et (5) en même temps que de celui
entre (1) et (2).
1. Le signe * signifie, non l'agrammatic.alité syntaxique de la phrase; mais uniquement l'impossiblité de
coréférence entre les SN en italiques.
42 Jean est entré. // s'est assis tout de suite. (4)
(5) *// est entré. Jean s'est assis tout de suite.
Mais la règle (3), conçue comme une contrainte sur les structures syn
taxiques, ne peut pas contraindre la coréférence de façon générale.
D'une part, il existe des types de phrases où le pronom peut être coréfé-
rentiel avec un SN qui le suit, en violation de la contrainte (3).
(6) Quelqu'un qui ne le connaissait pas a demandé à Jean de lui rendre un ser
vice.
D'autre part la règle (3), si elle doit s'appliquer indifféremment aux
phrases et au discours, prédit que la coréférence serait acceptable dans (2)
si cette phrase est insérée dans un discours de telle façon que le pronom sujet
est précédé d'une occurrence d'un SN antécédent.
(7) Jean est entré. Il s'est assis tout de suite. Marie lui a demandé s'il pouvait
venir dîner le lendemain. *Heureusement, il pense que Jean pourra venir
dîner.
Mais même dans une situation de discours favorable, la coréférence reste
impossible dans la phrase (2).
Il faut donc trouver les règles qui contraignent la coréférence à l'intérieur
de la phrase, mettant de côté dans un premier temps l'intégration de ces règles
avec celles qui régissent le discours.
1.2. Dans le cadre de la grammaire transformationnelle, les règles sont for
mulées pour s'appliquer à des structures syntaxiques hiérarchisées. Les règles
syntagmatiques engendrent des arborescentes sur lesquelles s'ap
pliquent des transformations. A chaque niveau du composant syntaxique, la
structure hiérarchisée de la phrase joue un rôle crucial dans l'opération
des règles. Si la coréférence est régie par une règle de phrase, il devient nor
mal de se demander si les règles de coréférence ne doivent pas elles aussi être
conçues en fonction de la structure hiérarchisée de la phrase, et non, comme
la règle (3), en fonction de notions linéaires comme celle de précéder.
En effet, dans l'état actuel des études sur la coréférence dans le cadre de
la grammaire transformationnelle, une règle qui contraint la coréférence à
l'intérieur de la phrase est proposée qui mentionne explicitement une configu
ration structurale de type hiérarchisée. Cette règle implique que l'ordre
entre deux constituants — la notion de precedence — ne joue aucun rôle dans
les relations de coréférence, au moins à l'intérieur d'une seule phrase. Nous
étudierons cette proposition dans la section 2.
1.3. Il faut distinguer la relation de coréférence, illustrée dans les
exemples (1) et (6), de celle ďanaphore, illustrée dans (8).
(8) Jean se trompe.
La distinction entre coréférence et anaphore peut se faire du point de vue
sémantique et du point de vue syntaxique (conditions générales régissant
l'application des règles de phrase).
Du point de vue sémantique, la coréférence est une relation entre deux SN
ayant valeur référentielle. Un pronom, comme un SN plein, peut désigner une
43 entité dans le monde du discours, même s'il est seul dans une phrase; et il
peut désigner un réfèrent autre que celui désigné par d'autres SN de la
phrase.
(9) a. // est rentré.
b. Jean ne sait pas s'i/ viendra dîner.
Dans (9a), comme dans la lecture non coréférentielle de (9b), le pronom réfère
indépendamment de tout autre SN de sa phrase.
La relation anaphorique, par contre, met en relation un SN ayant une
valeur référentielle — syntagme nominal plein ou pronom — et un SN n'ayant
pas de valeur référentielle, Vanaphore proprement dite. Les pronoms anapho-
riques sont désignés en tant que tels dans le lexique.
Par exemple, en français le pronom clitique se est anaphorique; en
anglais c'est le pronom himself qui l'est2. Une anaphore ne peut ni paraître
comme seul SN de la phrase, ni désigner une entité autre que celle désignée
par au moins un autre SN de la phrase. Les phrases de (10) contrastent ainsi
avec celles de (9).
(10) *a. Himself arrived. (Lui-même est arrivé).
b. Jean ne sait pas s'habiller.
(10a) est agrammatical, car un pronom anaphorique est seul SN de la
phrase. (10b) est grammatical, mais il est exclu que le pronom clitique
puisse s'interpréter comme se référant à quelqu'un d'autre que le réfèrent
du SN Jean.
Du point de vue syntaxique, Noam Chomsky a mis en avant une complé
mentarité remarquable entre la coréférence et l'anaphore : de façon géné
rale il y a relation anaphorique dans les contextes où la coréférence est
impossible, et, inversement, la n'est possible que dans les
contextes où l'anaphore est exclue. Les phrases suivantes illustrent cette
complémentarité.
(11) a. Jean /'habille,
b. s'habille.
(12) a. Jean voudrait que Marie /'habille,
b. Jean que Marie s'habille.
(13) a. Jean a permis à Marie de s'habiller,
b. a à de /'habiller.
(14) a. Jean a promis à Marie de
b. a à de
(15) a. John believes himself to be intelligent.
(Jean croit soi être intelligent)
b. John believes him to be intelligent.
(Jean croit lui être
Dans (11), phrase simple, la coréférence n'est pas possible entre Jean et
le pronom clitique le, mais la relation anaphorique entre Jean et se est pos-
2. Dans la théorie de Chomsky il existe, à côté des anaphores lexicales, comme se ou himself, des ana-
ihores abstraites. Ainsi lors du déplacement d'un constituant par transformation, une trace du constituant
léplacé est laissée à son site d'origine. Cette trace est une anaphore abstraite,
(i) Marie a vu Jean + transformation passive -»
(ii) Jean a été vu e par Marie.
& relation entre Jean et e (coïndexé au moment du déplacement du SN) est la même que celle entre Jean et
if» dans (8). sible (et en fait obligatoire). Dans (12), phrase complexe, il y a la situation
inverse : la coréférence est possible entre Jean dans la phrase matrice et

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