LA PUISSANCE ET LA GLOIRE : DIEU DOMESTIQUE. Essai sur la notion ...
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LA PUISSANCE ET LA GLOIRE : DIEU DOMESTIQUE.
Essai sur la notion de détournement en matière religieuse,
Lecture de
Stridences d’un insecte parmi les Saints
, du pasteur Joël Valleray
Edition revue. Février 2004.
Gérard Gabriel MARION
Professeur d’histoire du droit
Faculté de droit et d’économie de Martinique
Dieu ne fait ni ce qu'on attend de lui, ni comme on le veut. Le constat est amer. Serait-il inutile ?
Heureusement, il y a une Eglise, ou plutôt des Eglises : la pensée unique est aussi nocive en théologie qu'en
politique, en philosophie qu’en économie. Il faut admettre que le pluralisme en matière religieuse a du bon : plus
on a le choix, plus on est objectif, d'autant qu'en France métropolitaine depuis 1905, ou 1911 en Martinique, il n'y a
plus de monopole d'Etat dans ce domaine. Insatisfait ici, content ailleurs, ce qui crée les croyants pèlerins
gyrovagues : autant d'options religieuses différentes, autant de systèmes, autant de clergé, autant de haines, autant
de jours à sanctifier, faute de pouvoir modifier le calendrier en fonction des pérégrinations religieuses de chacun
1
.
Toutefois, il y a des croyants à qui la stabulation libre répugne, pour de nombreuses raisons. Ils sont
stables, ils s'accrochent à leurs convictions, ils en ont : c'est leur enfance, leurs normes, leurs repères, leur
colonne vertébrale, le fondement de leur conduite morale, ils suscitent un immense respect : sincères, ils essaient
de pratiquer des principes, ils sont honnêtes dans leurs relations avec autrui, y compris avec leur conjoint. Leur
bonne foi est inattaquable, surtout quand ils autorisent autrui à avoir une autre opinion qu'eux, fût-elle religieuse.
Celui qui est honnête dans ses croyances, envers son système métaphysique, est honnête dans tous les niveaux de
sa vie : à s'en faire des amis.
Il faut nuancer cette situation : pour aller à Dieu - faut-il préférer les Dieux uniques ? la question se posera
bientôt - il est forcément nécessaire de passer par des intermédiaires. La relation de l'homme normal avec son Dieu
est sans doute un idéal, qui, dans les faits, ruinerait les professionnels de la foi, ils perdraient toute influence sur
les âmes, ils seraient dépouillés de la gloire et de l’auréole de sainteté. Je place une distance majeure entre les
croyants, et leur clergé, toutes tendances confondues, car c'est bien du clergé qu'il est ici question.
1
Dans l'histoire de France, il y a bien eu une réforme fondamentale. Avec la première Assemblée nationale
constituante, la nouvelle division du pays en départements et les organes d'administration afférents sont une trouvaille
géniale, et continuent encore de fonctionner aujourd'hui. La Convention va plus loin avec la prétention de faire un homme
neuf en créant le calendrier révolutionnaire, bouleversant totalement le rythme de la vie. Il est aboli sans regret aucun le 10
nivôse an XIV, 31 décembre 1805. On avait cru cette réforme définitive : on a fait preuve de prétention, on a voulu nier
l’histoire, celle-là même qui identifie l’individu dans une culture donnée, dans une lignée historique qui le transcende
indépendamment de sa volonté. Vouloir changer la fonction des jours de la semaine, voilà qui paraît bien prétentieux. La
leçon n'a pas été retenue : il faut reconnaître avec courage que l'expérience ne se transmet pas.
Les générations qui se succèdent à un endroit donné transmettent une manière d'être, de penser, de se comporter qui
se rattachent inévitablement à des valeurs communes, qui enracinent les individus dans un terreau culturel et leur donnent des
références morales. Ceux qui n'ont pas cette assise culturelle forment le gros des sauvageons, pour lesquels les actes
d'incivilité n'ont aucune caractère d'anormalité : ils n'ont pas appris la norme, la société, la place de chacun, les règles, les
interdits qui fondent la civilité, l’urbanité, la politesse ; ils ne sont pas normés. Ils sont a-normés : cf. supra, note 92. § 3.
Les essais modernes de vouloir changer la fonction des jours dans la semaine ne sont pas sans poser un problème à
la société. On peut y voir évidemment un phénomène sectaire (
sequor
, suivre,
secare
, couper, d'où section, secteur,
sécateur…) dissociant les individus d'une société qui a adopté le dimanche comme férié hebdomadaire. Une minorité qui veut
généraliser son férié du samedi à la totalité qui ne partage pas son option religieuse ? C'est interdire la constitution d'une
majorité nécessaire à toute société, à toute vie politique. C'est imposer son particularisme à autrui, c’est vouloir soumettre le
général au particulier, c’est aller à l’encontre du principe même de liberté, c’est refuser de comprendre le fonctionnement
d’une société qui a nécessairement besoin de dégager des règles générales nécessaires avant de privilégier des groupements
minoritaires, voire ultra-minoritaires. La porte est ouverte à différentes formes d'intolérance : il est bien connu que ceux qui
exigent la tolérance pour eux sont souvent d’une insigne intolérance pour autrui.
Dans le fond, personne n'est dupe. Tout individu sait que la sanctification du dimanche, et plus tard son
institutionnalisation comme férié, sont le résultat d'une volonté politique purement conventionnelle, même si les chrétiens des
débuts la relèvent explicitement, imposée dans tout l'empire romain au IV
e
siècle. Vouloir revenir au samedi, le sabbat juif,
est simplement biffer seize siècles pleins d'histoire, c'est réformer l'évolution de l'Europe durant cette époque et, partant, du
monde, c'est se démarquer de la société civile depuis cette date. Colossale prétention, ignorance crasse des mécanismes
culturels et psychologiques, ou seulement grave inconscience ? Le révisionnisme ne fonctionne pas autrement.
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