Société et commémoration à Barcelone à la mi-XIXe siècle - article ; n°1 ; vol.40, pg 6-32
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Genèses - Année 2000 - Volume 40 - Numéro 1 - Pages 6-32
Society and Commemoration in Barcelona in the Mid-19th Century This article examines the political and social process whereby a part of Barcelona society sought to build a collective memory. The policy of creating a liberal-provincial memory ; involved not only to producing discourse on the Catalans, but also practising it through commemorations in a specific urban setting. The project was not a tangible sign of any alleged pre-nationalism, but on the contrary, a conscious attempt on the part of certain elite groups in Barcelona to propose a new Spanish national consensus. Beyond that, the policy of memory reveals the formation of a society of memory organised with a view to wresting from , the local authorities the legitimacy required to convert individual memories into collective ones. In this case, memory existed only in the mode of conflict. It brought into play strategies of social control through symbols memory was thus used to discipline the particularly refractory Catalan society into assuming the model of a commemorating society. The history of memory is always rooted in social1 history.
■ Stéphane Michonneau: Société et commémoration à Barcelone à la mi- хке siècle L'article étudie le processus politique et social par lequel, à partir des années : 1860, une partie de la société barcelonaise prétend construire une mémoire collective. La politique de mémoire libé- ralo-provincialiste renvoie non seulement à la production d'un discours sur le : groupe catalan mais encore, et de manière indissociable, à sa mise en pratique par la commémoration dans un cadre urbain déterminé. Le projet n'est pas le signe tangible d'un prétendu prénationalisme mais bien au contraire une tentative consciente, de la part de certaines élites barcelonaises, de proposer un nouveau consensus national espagnol. Au-delà, cette politique de mémoire met en relief la constitution d'une société de . mémoire organisée en vue de conquérir, auprès des autorités locales, la légitimité nécessaire permettant de convertir ses souvenirs particuliers en souvenirs collectifs. La mémoire n'existe alors que sur. le mode du conflit. Elle met en jeu des : stratégies de contrôle social par le biais > du symbolique: la mémoire sert alors à discipliner une société catalane particulièrement récalcitrante sur le modèle de la société commémorante. Il n'est d'histoire de la mémoire qu'ancrée dans l'histoire sociale.
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Stéphane Michonneau
Société et commémoration à Barcelone à la mi-XIXe siècle
In: Genèses, 40, 2000. pp. 6-32.
Citer ce document / Cite this document :
Michonneau Stéphane. Société et commémoration à Barcelone à la mi-XIXe siècle. In: Genèses, 40, 2000. pp. 6-32.
doi : 10.3406/genes.2000.1633
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/genes_1155-3219_2000_num_40_1_1633Abstract
Society and Commemoration in Barcelona in the Mid-19th Century This article examines the political
and social process whereby a part of Barcelona society sought to build a collective memory. The policy
of creating a liberal-provincial memory ; involved not only to producing discourse on the Catalans, but
also practising it through commemorations in a specific urban setting. The project was not a tangible
sign of any alleged pre-nationalism, but on the contrary, a conscious attempt on the part of certain elite
groups in Barcelona to propose a new Spanish national consensus. Beyond that, the policy of memory
reveals the formation of a society of memory organised with a view to wresting from , the local
authorities the legitimacy required to convert individual memories into collective ones. In this case,
memory existed only in the mode of conflict. It brought into play strategies of social control through
symbols memory was thus used to discipline the particularly refractory Catalan society into assuming
the model of a commemorating society. The history of memory is always rooted in social1 history.
Résumé
■ Stéphane Michonneau: Société et commémoration à Barcelone à la mi- хке siècle L'article étudie le
processus politique et social par lequel, à partir des années : 1860, une partie de la société
barcelonaise prétend construire une mémoire collective. La politique de mémoire libé- ralo-provincialiste
renvoie non seulement à la production d'un discours sur le : groupe catalan mais encore, et de manière
indissociable, à sa mise en pratique par la commémoration dans un cadre urbain déterminé. Le projet
n'est pas le signe tangible d'un prétendu prénationalisme mais bien au contraire une tentative
consciente, de la part de certaines élites barcelonaises, de proposer un nouveau consensus national
espagnol. Au-delà, cette politique de mémoire met en relief la constitution d'une société de . mémoire
organisée en vue de conquérir, auprès des autorités locales, la légitimité nécessaire permettant de
convertir ses souvenirs particuliers en souvenirs collectifs. La mémoire n'existe alors que sur. le mode
du conflit. Elle met en jeu des : stratégies de contrôle social par le biais > du symbolique: la mémoire
sert alors à discipliner une société catalane particulièrement récalcitrante sur le modèle de la société
commémorante. Il n'est d'histoire de la mémoire qu'ancrée dans l'histoire sociale.DOSSIER
Genèses 40, sept. 2000, pp. 6-32
SOCIETE ET
COMMEMORATION
A BARCELONE
A LA MI-XIXe SIECLE
propre et catalane partir collectif. cohérente des Non s'ordonne années du seulement passé 1860, pour de une elle l'Espagne produire conforte partie et de du une de la souvenir la société lecture CataA Stéphane Michonneau
logne, mais elle s'efforce également d'en assurer l'effica
cité sociale par la pratique du geste commémoratif. La
politique de mémoire libéralo-provincialiste est née.
L'expression de «politique de mémoire» libéralo-
provincialiste peut prêter à confusion: contre toute
apparence, elle ne désigne pas un programme préconçu
de manipulation consciente des mémoires individuelles,
façonné par un État centralisé qui s'efforcerait d'impos
er une vision univoque du passé de l'Espagne à l'aide
des instruments privilégiés que sont les noms de rue et
les monuments commémoratifs. Deux raisons motivent
la critique d'une telle conception instrumentaliste, si sou
vent invoquée par une certaine historiographie catala-
niste : d'une part, l'État espagnol n'a pas, au xixe siècle, la •
volonté et la capacité d'imposer, aux Barcelonais une
mémoire prêt-à-porter. Comme l'a souligné Borja de
Riquer, c'est bien plutôt la relative indifférence de l'État
ou son incapacité notoire à prendre en charge l'espagnoli-
sation des Espagnols qui pose problème1. L'apparition à
Barcelone d'un souci de mémoire renvoie principalement
à la conformation particulière de la société locale. D'autre
part, la population barcelonaise n'est pas unie dans ses
sentiments et ses aspirations, ni dotée par essence d'une
« 1. La Borja faiblesse de Riquer, du processus mémoire collective qu'elle aurait pu afficher unani
de construction nationale en Espagne : mement contre les menées de l'État central, dans un geste
au xixe siècle », Revue d'histoire
héroïque de résistance. La société commémorante qui se moderne et contemporaine, vol. 41,
n° 2. 1994, pp. 353-366. charge de la gestion du souvenir à Barcelone ne se confond pas avec l'ensemble de la société: sa volonté de
ranger tout le corps social à ses propres souvenirs se
heurte à des résistances, si bien que le conflit de mémoire
recouvre toujours un conflit social. .
Par. politique de mémoire, il faut bien plutôt entendre
la délimitation d'un passé par et dans le conflit politique.
Ainsi, le passé de la Catalogne peut bien être considéré
comme une réalité objective faisant des Catalans un grou
pement humain dissemblable des autres: l'historiographie
espagnole du XIXe siècle a amplement insisté sur ses
caractéristiques. Mais l'important n'est pas ici- tant 'dé
considérer ces différences objectives que de comprendre
par quel processus cette différence est reconnue comme
telle par la société, incorporée à une histoire et instaurée
comme commune par des pratiques commémoratives
mutuellement compréhensibles par. tous les membres du
groupe2.
Par conséquent, la mémoire a deux visages: d'une part,
elle est un usage politique du passé dans le présent reflé
tant les grandes lignes de fractures de la vie politique
espagnole du XIXe siècle. De l'autre, elle est un processus -
d'objectivation du passé en mémoire, c'est-à-dire en fait
différentiel identitaire de l'ensemble de la communauté
imaginée. Autrement dit, la mémoire renvoie non seul
ement à la production d'un discours sur le passé du groupe
catalan mais encore, et de manière indissociable; à sa mise
en pratique par la commémoration. Discours d'autorité
qui fait exister, la nation, elle est aussi sa réalisation,
concrète qui permet l'incorporation de l'idée de nation
dans le corps social. Étudier la mémoire, c'est déterminer
son ancrage C'est aussi déterminer en quoi l'activité
de mémoire est susceptible de découper pratiquement le
champ social en de nouvelles catégories (nationaliste/non
nationaliste, commémorant/non commémorant, promot
eur de mémoire, public spectateur, etc.).
Pour montrer combien cette perspective se révèle fruc
tueuse, nous limiterons cette étude aux années centrales
du XIXe siècle à Barcelone. Des années soixante à la fin
des années quatre-vingts, une partie de la société barcelo
naise s'est arrogée le monopole du discours et de la pra
tique du passé au nom de l'ensemble de la société au
cours d'un mouvement culturel appelé la Renaixenç a. La
question qui se pose est de comprendre quel intérêt cette 2. Marie-Carmen Garcia,
L'identité catalane, analyse du processus microsociété commémorante en cours de formation avait
de production de l'identité nationale à promouvoir au rang de mémoire collective la somme de en Catalogne, Paris, L'Harmattan,
ses souvenirs particuliers. 1998, p. 51. ;
S S I E R DO
Fabrique des lieux La Renaixença,
Stéphane Michonneau naissance d'une culture nationale espagnole Société et commémoration
à Barcelone à la mi-xix* siècle
À partir des années 1830, la Catalogne connaît l'éclo-
sion d'un mouvement culturel provincialiste désigné plus
tard comme le point de départ d'un réveil national, la
Renaixença. Il faut aujourd'hui renoncer à

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