Théologies des religions non chrétiennes - article ; n°1 ; vol.27, pg 6-17
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Description

Autres Temps. Les cahiers du christianisme social - Année 1990 - Volume 27 - Numéro 1 - Pages 6-17
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 11
Langue Français

Extrait

André Gounelle
Théologies des religions non chrétiennes
In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°27, 1990. pp. 6-17.
Citer ce document / Cite this document :
Gounelle André. Théologies des religions non chrétiennes. In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°27, 1990.
pp. 6-17.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/chris_0753-2776_1990_num_27_1_1396THEOLOGIES
DES RELIGIONS
NON CHRÉTIENNES
André Gounelle
Quelle signification et quelle valeur accorder aux religions non-
chrétiennes ? Quel comportement adopter à leur égard ? Depuis tou
jours, ces questions ont préoccupé et divisé les théologiens chrétiens. Le
présent article voudrait esquisser une typologie des principales réponses
qu'ils ont proposées.
Intérêt et limites d'une typologie
Que faut-il entendre exactement par typologie ? Il importe de préciser
le sens de ce terme afin d'éviter toute méprise sur les propos qui vont sui
vre. Une typologie constitue un essai pour dégager, à partir d'un ensemb
le de positions concrètes, un certain nombre d'attitudes typiques ou
caractéristiques qui aident à comprendre et qui permettent de classer les
positions concrètes. Cette définition appelle deux remarques :
1. Il ne faut pas confondre une typologie avec une phénoménologie.
Une phénoménologie entend décrire ou « photographier » la réalité ; elle
essaie de rendre compte le plus exactement et le plus complètement possi
ble, dans leurs nuances et leur particularités, des thèses ou des opinions en
présence. Une typologie cherche à dégager les logiques qui les sous-
tendent et les traversent. Il n'existe pas d'auteurs ni de courants de pen
sée parfaitement logiques. Ils présentent toujours des variantes, des infl
échissements, des modifications, des failles ou des ruptures ; parfois, ils
associent ou combinent de manière plus ou moins heureuse des logiques
différentes (ainsi, pour le problème qui nous occupe, Tillich regroupe
dans une synthèse cohérente plusieurs des types que nous allons distin
guer). Dans la préface du livre d'Otto Weber qui analysait le premier
volume de sa Dogmatique, Barth a écrit : « je ne suis pas
André Gounelle est professeur de dogmatique à la Faculté de Théologie protestante de
Montpellier (IPT). barthien » ; cette boutade exprime une vérité : sa théologie se montre
souvent plus riche et plus souple, moins rigide que le barthisme. De même
Luther n'est pas purement luthérien, ni Calvin totalement calviniste.
L'histoire qui analyse l'œuvre d'un auteur accorde une très grande atten
tion à ces écarts qui font la singularité de sa pensée. Au contraire, une
typologie, qui entend cerner une problématique, indiquer des orientations
générales, dessiner des courants les néglige. Elle procède un peu comme
un caricaturiste qui grossit les traits principaux pour mieux les faire res
sortir, alors qu'une photographie reproduira tout ce qui les atténue.
2. Une typologie n'entend donc pas analyser et présenter des positions
concrètes. Elle se donne pour objectif de fournir un instrument ou une
grille qui permette de les situer et de les apprécier les unes par rapport aux
autres. Elle rend ainsi deux services. D'une part, elle dessine une situation
théorique d'ensemble, qui fait ressortir les proximités et les désaccords
entre diverses positions, qui aide donc à les répertorier et à les classer.
D'autre part, elle établit des repères grâce auxquels on peut discerner les
infléchissements d'une pensée, ses faiblesses, et également les points sur
lequels elle apporte des éléments nouveaux, originaux et ouvre des che
mins inédits. Les types dégagés fonctionnent un peu à la manière des
méridiens et parallèles qui quadrillent une carte géographique et qui mont
rent exactement où se trouve une ville, ou le chemin que parcourt un
navire. On pourrait aussi les comparer à des axes de coordonnées qui,
dans une figure géométrique, servent à déterminer l'emplacement d'un
point, ou à étudier une courbe.
La méthode typologique, à côté de ses avantages, comporte deux dan
gers. D'abord, on risque de confondre l'instrument d'analyse avec
l'analyse elle-même : quand on a établi une typologie, on n'a pas terminé
le travail, on n'a fait que le commencer. Ensuite, on risque d'enfermer
toutes choses dans des cadres pré-établis dont on fait des dogmes a priori,
et qui faussent alors la perception de la réalité. Pour qu'une typologie ne
perde pas son utilité et sa fécondité, il faut avoir conscience de ses limites
et de sa relativité. On ne doit jamais la considérer comme définitive ; il
faut sans cesse la vérifier, la remettre en chantier et la ré-aménager. La
réalité dépasse et déborde toujours les schémas qui essaient d'en rendre
compte ; mais sans schémas, nous n'arriverions pas à percevoir son mou
vement, ses tensions et ses articulations. Comme l'écrit Paul Knitter, « les
modèles (ou types, ou paradigmes) ont une grande utilité pour dresser la
carte d'un territoire théologique complexe et diversifié. Leur danger... est
que l'on prenne la carte pour le territoire. Parce qu'inévitablement géné
raux, les modèles ne peuvent pas rendre compte des exceptions et de la
diversité des opinions à l'intérieur du territoire qu'ils essaient de délimit
er »\
La typologie esquissée ici se présente donc comme une hypothèse provi
soire de travail à approfondir, à affiner, et à modifier ; elle voudrait ne
pas arrêter ni figer la recherche, mais l'inviter à avancer, à aller au-delà des attitudes repérées et indiquées. Elle distingue, parmi les penseurs chré
tiens, six types ou six attitudes logiques (qui souvent se chevauchent) à
l'égard des autres religions.
L'exclusivisme
Le premier type se caractérise par l'exclusivisme. Il affirme une incomp
atibilité radicale et une opposition totale entre la foi chrétienne et les
religions du monde. Normalement, il ne peut y avoir d'autres relations
que le combat, un combat où chacun cherche à éliminer et à détruire
l'autre. Par nature, les religions sont anti-évangéliques et l'évangile est
une anti-religion. Souvent, d'ailleurs, dans cette perspective, on refuse de
classer le christianisme parmi les religions. On estime qu'il n'a (ou ne
devrait avoir) rien de commun avec elles ; on affirme qu'il représente
quelque chose de tout-à-fait différent, et que l'appeler « religion » consti
tue une méprise et une erreur sur sa véritable nature. On voit dans les rel
igions des adversaires du Christ, des manifestations de Satan, et on rejette
par principe tout dialogue et toute alliance avec elles. Elle n'ont rien à
apporter aux chrétiens (elles ne peuvent que les perturber) ; elles n'ont
rien à leur apprendre, sinon les diverses ruses et les multiples visages du
Diable. S'il importe de les connaître, c'est uniquement pour mieux les
attaquer, pour les déraciner et les remplacer par l'évangile.
Cette première logique fonctionne très fortement dans les milieux inté
gristes, aussi bien dans le catholicisme (par exemple, dans le jansénisme)
que dans le protestantisme (en particulier dans les courants qui se disent
« évangéliques »). On la rencontre, par exemple, dans la « Déclaration de
Francfort », rédigée par Peter Beyerhaus, et approuvée par une « Con
vention évangélique internationale », le 4 mars 19702. Cette déclaration
dénonce le souci du Conseil œcuménique des Églises pour un dialogue
avec les religions ; elle considère qu'il s'agit d'un abandon de l'évangile et
d'une prostitution du christianisme. Elle affirme qu'il n'y a de connais
sance de Dieu et de salut qu'en Jésus-Christ, et que, par conséquent,
« tous ceux qui sont morts sans connaître Jésus-Christ sont destinés à la
perdition éternelle ». Le « Rassemblement évangélique » de Lausanne,
en 1974, va dans le même sens, mais avec des formules plus nuancées et
moins brutales. Les deux textes rejettent tout dialogue, et condamnent
l'idée que Dieu, d'une manière ou d'une autre, puisse agir et se manifester

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