Développement, utopie, projet de société - article ; n°75 ; vol.19, pg 645-656
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Description

Tiers-Monde - Année 1978 - Volume 19 - Numéro 75 - Pages 645-656
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1978
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ignacy Sachs
Développement, utopie, projet de société
In: Tiers-Monde. 1978, tome 19 n°75. pp. 645-656.
Citer ce document / Cite this document :
Sachs Ignacy. Développement, utopie, projet de société. In: Tiers-Monde. 1978, tome 19 n°75. pp. 645-656.
doi : 10.3406/tiers.1978.2823
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1978_num_19_75_2823UTOPIE DÉVELOPPEMENT,
PROJET DE SOCIÉTÉ
par Ignacy Sachs*
Le débat sur la nature et les modalités du développement semble
avoir franchi un nouveau tournant. En effet, de plus en plus nombreux
sont ceux qui interprètent en termes de crise du l'impasse
dans laquelle se sont trouvées les économies industrielles au terme d'un
quart de siècle de croissance extrêmement rapide et de progrès techniques
éblouissants. Chômage structurel et stagnation sur le plan économique;
incapacité de résoudre malgré l'abondance les problèmes sociaux des
vieux et des femmes, des immigrés et des marginaux; détérioration des
rapports entre les centres et la périphérie au sein des nations et entre
nations; atteintes de plus en plus graves à l'environnement au point de
rendre crédibles les prophéties de catastrophes écologiques et par-là
sociales et annuler les impacts positifs de la croissance sur la qualité de
la vie; course effrénée aux armements et la quasi-certitude de prolifé
ration nucléaire généralisée; sentiments d'aliénation et de frustration de
la part des jeunes instruits; si la croissance à l'ouest s'est faite par inégal
ités, du moins elle n'a pas trop mis en cause les libertés formelles. A
l'est une moindre inégalité a été payée d'un lourd prix institutionnel et
politique; les droits de l'homme — élément intégral du développe
ment — y sont constamment bafoués.
Modernisation oui, développement non. Ce diagnostic souvent
avancé à propos de la poignée des pays du Tiers Monde qui a réussi à
croître vite — Brésil, Mexique, Iran — s'applique en réalité à l'ensemble
des pays industriels. Faut-il pour autant gommer les différences qui
séparent les pays industriels des pays du Tiers Monde ?
* Directeur d'Etudes à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, directeur du cired
(Paris).
Revue Tien Monde, t. XIX, n° 75, Juillet-Septembre 78 646 IGNACY SACHS
Bien entendu non. Ce qui les divise avant tout c'est leur insertion
antagoniste dans l'économie mondiale, conséquence de quatre siècles de
l'histoire du capitalisme puis de l'impérialisme. A quoi s'ajoute une diff
érence de degré d'inégalités. Le fossé entre les riches et les pauvres du Tiers
Monde — les élites urbaines et les masses rurales et urbaines marginal
isées — est plus profond, «et ne peut se combler sans une remise
en cause fondamentale des modalités de la croissance. La constella
tion des facteurs économiques et démographiques ne permet pas aux
pays du Tiers Monde d'espérer répéter le chemin parcouru naguère
par les pays industriels même s'ils voulaient s'aventurer dans la même
impasse. La croissance mimétique et même le maldéveloppement mimét
ique semblent hors de leur portée (heureusement ?). En tout cas il ne
saurait y avoir de développement qu'à travers des voies originales,
endogènes.
Mais, une fois la multiplicité des voies du développement admise et
compte tenu de la diversité des problèmes concrets devant être attaqués
dans chaque cas, il est parfaitement légitime de se livrer à une méta-
réflexion sur le développement de portée tout à fait générale et de retrouver
ainsi, à un niveau supérieur de la spirale de la connaissance, l'unité d'une
problématique éclatée au moment où, à juste titre, fut mise en cause la
validité pour les pays du Sud des modèles du Nord. Dans cet essai nous
essaierons donc d'analyser des concepts s'appliquant également aux pays
industriels et à ceux du Tiers Monde.
* * *
Si la croissance n'est plus le synonyme du développement, il s'ensuit
immédiatement que le taux de croissance du pnb ne peut pas constituer la
mesure du processus du développement, pas plus que le pnb par tête ne l'état atteint de développement. A condition de connaître la
répartition du pnb par groupes sociaux et leur participation aux fruits
de la croissance, ces deux indicateurs ne reflètent au mieux que l'évolution
des forces productives, condition nécessaire mais nullement suffisante
du développement, et le rapport des forces économiques au sein de la
population. Pour évaluer les retombées sociales et écologiques de la
croissance, il faut se servir de toute une batterie d'indicateurs repérant
à la fois les flux et les modifications d'état, y compris dans le capital de la
nature. Sans nier l'utilité de telles quantifications, nous pensons qu'elles
ne peuvent pas appréhender le développement dans son aspect qualitatif
le plus essentiel : celui d'un processus d'apprentissage rendant les nommes UTOPIE, PROJET DE SOCIÉTÉ 647 DÉVELOPPEMENT,
de plus en plus maîtres de leurs destinées grâce à la formulation de projets
individuels et sociaux viables, c'est-à-dire fondés sur une dialectique
ascendante d'objectifs et de moyens, subordonnée à une axiologie et
nourrie par l'esprit d'invention institutionnelle, spirituelle et matérielle.
Il va de soi qu'une partie seulement de ces objectifs s'inscrit dans la
sphère matérielle et se réfère à la richesse des économistes. La capacité de
rêver, de projeter, d'apprendre et de transcender la simple adaptation au
milieu pour le transformer radicalement constitue un attribut exclusif
de l'espèce humaine.
Ainsi perçu, le processus du développement exclut une évaluation
quantitative; la conformité à Paxiologie qui le sous-tend devient le
critère de performance. Une étude récente à laquelle nous avons colla
boré1 a postulé un développement endogène, comptant sur ses propres
forces2, égalitaire, axé sur la satisfaction des besoins fondamentaux
matériels et immatériels3, en harmonie avec la nature4, peu respectueux
du statu quo institutionnel et subordonné à l'objectif primordial de
l'épanouissement de la personnalité humaine dans la convivialité. Quel
pays industriel peut se targuer d'être en voie de développement ainsi
défini ?
Le terme « en voie de développement » demande à être réinterprété.
Si le développement est un processus, l'on ne peut que se trouver sur sa
voie. En aucun cas le n'est un état « final » jugé désirable,
pas plus qu'un palier auquel l'on accède à travers un rite de passage.
Par conséquent, la dichotomie pays développés/pays sous-développés
(moins développés, peu développés, en voie de développement en tant
qu'euphémisme onusien) est logiquement dépourvue de sens. Rigoureu
sement parlant, il n'existe que des pays en voie de ou en
1 . Que faire ? (Rapport Dag Hammarskjôld 1975) , préparé à l'occasion de la 7e session extra
ordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies, New York, 1-12 septembre 1975.
2. Le français n'a pas de bon équivalent pour le terme anglais self-reliance, parfois rendu
par « développement autocentré ». Les équivalents espagnol (autovalimiento) et portugais
( auto-confiança) nous semblent plus près du sens réel de ce concept, qu'il ne faut en aucun
cas confondre avec autosuffisance ou autarcie. Self-reliance implique avant tout une autonomie
de décision, une capacité d'identifier ses propres problèmes et solutions, mais la rupture avec
le monde environnant ne se fait nécessaire que très exceptionnellement.
3. Besoins fondamentaux matériels et immatériels, ce qui englobe mais dépasse largement
le concept du minimum vital concerné avec la satisfaction des besoins matériels les plus
élémentaires.
4. L'écodéveloppement répond à cette préoccupation d'harmoniser les objectifs écono
miques et sociaux avec une gestion écologiquement prudente des ressources et du milieu.
Vu sous un autre angle, il consiste à préserver, dans la prise des d&#

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