La « Méditerrannée » de Fernand Braudel vue d Istamboul - article ; n°2 ; vol.9, pg 189-200
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1954 - Volume 9 - Numéro 2 - Pages 189-200
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1954
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ömer Lütfi Barkan
La « Méditerrannée » de Fernand Braudel vue d'Istamboul
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 9e année, N. 2, 1954. pp. 189-200.
Citer ce document / Cite this document :
Lütfi Barkan Ömer. La « Méditerrannée » de Fernand Braudel vue d'Istamboul. In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations.
9e année, N. 2, 1954. pp. 189-200.
doi : 10.3406/ahess.1954.2264
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1954_num_9_2_2264ESSAIS
LA «MÉDITERRANÉE» DE FERNAND BRAUDEL
VUE DTSTAMBOUL
dans Publier cette maison, ou republier — travail des superflu. comptes Mais, rendus quand concernant un excellent les livres travailleur qui nous comme sont chers notre
ami et collaborateur Orner Lutfi Barkan consacre, de son point de vue d'historien turc
ouvert aux méthodes et à Vesprit des Annales, une étude à un livre aussi considérable, à
tous égards, que La Méditerranée de Fernand Braudel, — «os scrupules cèdent le pas à
des considérations d'ordre scientifique. L'étude d'Orner Lutfi Barkan montre excellem
ment la nouveauté, mieux, quelques nouveautés, du livre de notre ami et ce qu'il apporte
aux historiens turcs. Elle contient par surcroit des promesses bien satisfaisantes — et
même plus que des promesses : la prochaine mise à four d'ouvrages et d'études fondés sur
les Archives turques et concernant la population, les recensements, l'allure des prix, etc.,
dans la Turquie moderne. C'est toute une nouvelle province d'Histoire qui va s'ouvrir à
nous. — Lucien Febvre.
I
A qui veut pleinement mettre en lumière la valeur et l'importance de
l'entreprise du professeur Braudel, il convient d'abord de signaler brièvement
l'originalité de sa conception de l'Histoire, les particularités de sa méthode et
la qualité des matériaux utilisés.
1. D'abord est-il utile de dire que l'histoire des pays méditerranéens dans
la seconde moitié du xvie siècle telle que nous la présente l'auteur, n'a plus
rien à voir avec « l'histoire générale » traditionnelle, — celle qui, prenant pour
base l'histoire des États, grands ou petits, étudie séparément les destinées de
chacun en s'intéressant d'abord aux dynasties? M. Braudel a eu le] courage
d'abolir toutes les frontières, politiques et, plus spécialement, religieuses et
culturelles. En estimant que tous .les pays méditerranéens, qu'ils fussent
chrétiens ou musulmans, vivaient, dans la seconde moitié du xvie siècle, dans
l'ambiance des mêmes problèmes économiques et sociaux et, partant, étaient
soumis aux mêmes nécessités et aux mêmes lois, l'auteur a établi une hypo
thèse de travail singulièrement féconde.
La plupart du temps, les causes profondes et l'essence même des crises
économiques ou sociales qui peuvent surgir dans des régions plus ou moins
vastes ne sont pas d'origine locale ; elles découlent d'événements à réper- 190 ANNALES
cussion internationale. On nous permettra de dire avec force à tous ceux
qui s'occupent de l'histoire de la Turquie que l'un des grands profits qu'ils
doivent retirer de l'ouvrage de F. Braudel, c'est de comprendre que l'on ne
peut étudier l'histoire ottomane en vase clos, comme un tout indépendant du
reste du monde, et en s'inspirant seulement de son évolution interne.
2. Autre chose. Pour M. Braudel, le devoir de l'historien n'est pas de
montrer comment les grands hommes ont fait ou créé l'histoire, mais comment
l'histoire a contribué à former ces hommes. D'où la nécessité de rechercher
avant tout les conséquences durables des événements anonymes qui se
produisent sans fracas au sein de la vie quotidienne des masses, plutôt que
les faits marquants, guerres ou traités, sur lesquels il est trop facile de coller
une étiquette « histoire ». Voilà pourquoi, dans la première partie de son
livre, qu'il intitule « la part du milieu », Fernand Braudel met en relief la
lutte de l'homme contre les forces naturelles et le milieu géographique. Il
convient, nous dit-il, d'étudier et de discuter les problèmes historiques dans
un milieu géographique donné, comme le fait aujourd'hui une géographie
humaine « intelligente ». Est-il utile de penser que l'importance ainsi donnée
à la description et à l'examen des facteurs géographiques est loin d'avoir
conduit l'auteur à un « déterminisme géographique » ? Ce qu'il met surtout en
relief, à côté des possibilités et des résistances offertes par le milieu, ce sont
les efforts de l'homme pour s'adapter à ce milieu et, conséquences de ces
efforts, les formes d'organisation sociale et économique créées par lui. Ainsi
s'oriente la « géohistoire », comme il dit : terme nouveau et préférable à
maints égards au terme de « géopolitique ».
3. L'ouvrage de Fernand Braudel, possède en outre une valeur toute parti
culière grâce à l'abondance des documents d'archives réunis et employés par
l'auteur. Les sujets historiques qu'il aborde sont en effet nouveaux — et il
n'aurait jamais été possible d'en faire l'étude d'après les livres, ni même
d'après les documents d'archives déjà publiés. L'auteur s'est donc trouvé dans
l'obligation d'aller recueillir lui-même, dans tous les principaux dépôts
d'archives méditerranéens, les documents capables d'appuyer ses vues
personnelles. Il a passé vingt des années les plus importantes de sa vie à
rassembler ces « preuves ». A la fin du livre on trouve la liste des archives
explorées et les noms et numéros des séries de documents étudiés. Cette
liste montre que l'auteur a pu examiner les archives de tous les pays médi
terranéens, sauf celles de la Turquie. Il reconnaît le premier que c'est là
une des lacunes de son livre, — et regrette que les historiens turcs n'aient pas^
publié d'ouvrages faisant connaître au monde savant le contenu et la valeur
des archives de leur pays. En fait, c'est pour nous, turcs, un devoir
que de nous attaquer, dans le même esprit et avec la même méthode, à des
problèmes semblables à ceux qui sont posés dans ce livre. LA «MÉDITERRANÉE» DE FERNAND BRAUDEL 191
II
II n'est pas possible d'examiner dans ce bref compte rendu la totalité
des questions que l'auteur a examinées. Nous signalerons seulement certaines
d'entre elles, qui touchent particulièrement à l'histoire de la Turquie. Nous
noterons chemin faisant l'état des recherches effectuées dans notre pays sur
ces questions et nous ajouterons quelques précisions d'après nos propres
travaux.
Problèmes de population
F. Braudel a fait une grande place aux facteurs démographiques dans ses
explications d'événements. Il a d'abord rassemblé des chiffres montrant la
situation de population des divers États méditerranéens à la fin du xvie siècle.
A l'aide de ces chiffres, il administre la preuve d'une augmentation constante
de population à cette époque. Cette population, dit-il, croît rapidement au
début du siècle, continue à progresser dans sa seconde moitié, mais tend à
diminuer au xvne siècle. Et il fournit le tableau suivant, valable pour la fin
du xvie.
En millions d'habitants
Bloc A Bloc В
Espagne 8 Turquie d'Europe 8
Portugal 1 d'Asie 8
France 16 Egypte 2-3
Italie De 12 , 5 à 13 Afrique du Nord 2-3
Total.. De37,5à38 Total De 20 à 22
Les chiffres concernant le bloc A peuvent être considérés comme « proches
de la réalité ». Mais les chiffres relatifs au bloc В (c'est-à-dire au monde
musulman) sont des approximations. Le dernier espoir de trouver des chiffres
plus proches de la réalité réside, constate l'auteur, dans les archives turques
(p. 357).
En fait, les services que le professeur Braudel attend des historiens turcs
sont nombreux. Énumérons l'établissement de tableaux statistiques montrant
comment et où a eu lieu l'augmentation ou la diminution de la population en
Turquie au xvie siècle ; corrélativement, l'établisseme

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