Le marché du travail russe : entre inertie et flexibilité - article ; n°2 ; vol.30, pg 123-152
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Revue d’études comparatives Est-Ouest - Année 1999 - Volume 30 - Numéro 2 - Pages 123-152
The puzzling coexistence of inertia and flexibility in the Russian labor market are explained using a segmentation model. By placing uncertainty at the center of decision-making by both firms and employees, this article shows that workers, all of whom are risk averse, may adopt behaviors differentiated according to their productivity. Some of them, with favorable job prospects, become mobile and enter into contracts whereby their pay varies depending on their productivity. Others, with less favorable opportunities, accept lower wages in exchange for job security and fringe benefits (the firm's social services). This model suggests an interpretation of wage arrears as part of the implicit insurance contract between the firm and certain wage-earners. The model's predictions are tested by using a database of 13.628 Russian companies observed from 1992 to 1997.
Cet article propose une vision du marché du travail russe permettant d'expliquer la coexistence d'éléments d'inertie et de flexibilité par un phénomène de segmentation. Plaçant l'incertitude au cœur des décisions des firmes et des employés, il montre que les travailleurs, qui ont tous une aversion pour le risque, peuvent adopter des comportements différenciés selon leur productivité relative. Certains, bénéficiant de perspectives favorables, adoptent un comportement mobile et nouent des contrats prévoyant de les rémunérer en fonction de leur productivité. D'autres, jouissant d'opportunités moins favorables, acceptent une réduction de leur rémunération réelle en échange de la sécurité de l'emploi et de l'accès aux actifs sociaux de la firme. Notre cadre d'analyse permet de proposer une interprétation des arriérés de salaire. Ces derniers constitueraient un élément du contrat d'assurance implicite noué entre l'entreprise et certains travailleurs. Nous vérifions les prévisions du modèle à l'aide d'une base de données comprenant 13 628 entreprises russes, observées de 1992 à 1997.
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Irena Grosfeld
Madame Claudia Senik-
Leygonie
Thierry Verdier
Stanislav Kolenikov
Elena Paltseva
Le marché du travail russe : entre inertie et flexibilité
In: Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 30, 1999, N°2-3. Les économies post-socialistes: une décennie
de transformation. pp. 123-152.
Abstract
The puzzling coexistence of inertia and flexibility in the Russian labor market are explained using a segmentation model. By
placing uncertainty at the center of decision-making by both firms and employees, this article shows that workers, all of whom are
risk averse, may adopt behaviors differentiated according to their productivity. Some of them, with favorable job prospects,
become mobile and enter into contracts whereby their pay varies depending on their productivity. Others, with less favorable
opportunities, accept lower wages in exchange for job security and fringe benefits (the firm's social services). This model
suggests an interpretation of wage arrears as part of the implicit "insurance contract" between the firm and certain wage-earners.
The model's predictions are tested by using a database of 13.628 Russian companies observed from 1992 to 1997.
Résumé
Cet article propose une vision du marché du travail russe permettant d'expliquer la coexistence d'éléments d'inertie et de
flexibilité par un phénomène de segmentation. Plaçant l'incertitude au cœur des décisions des firmes et des employés, il montre
que les travailleurs, qui ont tous une aversion pour le risque, peuvent adopter des comportements différenciés selon leur
productivité relative. Certains, bénéficiant de perspectives favorables, adoptent un comportement mobile et nouent des contrats
prévoyant de les rémunérer en fonction de leur productivité. D'autres, jouissant d'opportunités moins favorables, acceptent une
réduction de leur rémunération réelle en échange de la sécurité de l'emploi et de l'accès aux actifs sociaux de la firme. Notre
cadre d'analyse permet de proposer une interprétation des arriérés de salaire. Ces derniers constitueraient un élément du contrat
d'assurance implicite noué entre l'entreprise et certains travailleurs. Nous vérifions les prévisions du modèle à l'aide d'une base
de données comprenant 13 628 entreprises russes, observées de 1992 à 1997.
Citer ce document / Cite this document :
Grosfeld Irena, Senik-Leygonie Claudia, Verdier Thierry, Kolenikov Stanislav, Paltseva Elena. Le marché du travail russe : entre
inertie et flexibilité. In: Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 30, 1999, N°2-3. Les économies post-socialistes: une
décennie de transformation. pp. 123-152.
doi : 10.3406/receo.1999.2977
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/receo_0338-0599_1999_num_30_2_29771 23
Revue d'études comparatives Est-Ouest, 1999, vol. 30, n° 2-3, pp. 123-152
Le marché du travail russe :
entre inertie et flexibilité
Irena GROSFELD+, Claudia SENIK-LEYGONIE @, Thierry VERDIER &,
Stanislav KOLENIKOV °, Elena PALTSEVA ° *
résumé : Cet article propose une vision du marché du travail russe permettant d'expli
quer la coexistence d'éléments d'inertie et de flexibilité par un phénomène de segmentat
ion. Plaçant l'incertitude au cœur des décisions des firmes et des employés, il montre que
les travailleurs, qui ont tous une aversion pour le risque, peuvent adopter des comporte
ments différenciés selon leur productivité relative. Certains, bénéficiant de perspectives
favorables, adoptent un comportement mobile et nouent des contrats prévoyant de les
rémunérer en fonction de leur productivité. D'autres, jouissant d'opportunités moins acceptent une réduction de leur rémunération réelle en échange de la sécurité
de l'emploi et de l'accès aux actifs sociaux de la firme. Notre cadre d'analyse permet de
proposer une interprétation des arriérés de salaire. Ces derniers constitueraient un él
ément du contrat d'assurance implicite noué entre l'entreprise et certains travailleurs.
Nous vérifions les prévisions du modèle à l'aide d'une base de données comprenant 13
628 entreprises russes, observées de 1992 à 1997.
abstract : The puzzling coexistence of inertia and flexibility in the Russian labor mar
ket are explained using a segmentation model. By placing uncertainty at the center of
decision-making by both firms and employees, this article shows that workers, all of
whom are risk averse, may adopt behaviors differentiated according to their productivity.
Some of them, with favorable job prospects, become mobile and enter into contracts whe
reby their pay varies depending on their productivity. Others, with less favorable opport
unities, accept lower wages in exchange for job security and fringe benefits (the firm's
social services). This model suggests an interpretation of wage arrears as part of the
implicit "insurance contract" between the firm and certain wage-earners. The model's
predictions are tested by using a database of 13.628 Russian companies observed from
1992 to 1997.
*+ DELTA (Unité mixte de recherche, CNRS, EHESS, ENS, Paris ; E-mail :
grosfeld@delta.ens.fr) ; @ DELTA, MEDEE (Université de Lille-I) et ROSES (Université de
Paris-I) (E-mail : clo@java.ens.fr) ; & CERAS (ENPC, Paris), DELTA et CEPR (Londres)
(E-mail : verdier@delta.ens.fr) ; ° Russian European Center for Economic Policy, Moscou
(E-mail : respectivement skolenik@recep.glasnet.ru et epaltseva@recep.glasnet.ru).
Ce travail a été réalisé dans le cadre du Russian European Center for Economic Policy à
Moscou, financé par le programme TACIS EDRUS 9609. Nous remercions David Brown pour
sa contribution cruciale à l'élaboration de la base de données sur laquelle repose cette étude.
Les financements de la Fondation Mac Arthur et de l'Union européenne à travers le pr
ogramme ACE-TACIS (n° T 95-41 15-R) ont permis l'acquisition de la base de données des
entreprises. Nous remercions également Guido Friebel et Sergueï Guriev pour les échanges
fructueux que nous avons eus avec eux sur le thème de cet article. 124 I. Grosfeld, C. Senik-Leygonie, T. Verdier, S. Kolenikov, E. Paltseva
INTRODUCTION
"spécificité" de la transition russe, le fonctionnement du marché Au sein de la
du travail occupe assurément une bonne place. L'inélasticité relative de l'emploi
par rapport au niveau d'activité est l'élément le plus remarquable de cette diffé
rence. Alors que dans les pays d'Europe centrale, la baisse de l'emploi a suivi de
près celle de la production, l'emploi n'a baissé que de 15 % en Russie tandis que
l'activité reculait de près de 45 % (Goskomstat, 1998).
Ce constat est souvent interprété comme un signe de l'échec de la politique de
transformation de l'économie russe, incapable de stimuler la restructuration des
entreprises. En Europe centrale, la baisse de l'emploi est en effet associée à la
restructuration "défensive" (Grosfeld & Roland, 1996) menée par toutes les
entreprises quel que soit leur statut de propriété. Ce type de mesure consiste à
réduire les coûts de production et les activités non rentables, ce qui entraîne la
réduction des effectifs employés. Elle s'oppose à la restructuration "offensive",
qui repose sur l'investissement et n'est observée dans les premiers temps de la
transition que dans les firmes privatisées, vendues à des investisseurs strat
égiques (investisseurs étrangers, managers et parfois investisseurs institutionnels
[Frydman et al., 1999 ; Earle & Estrin, 1998]). L'absence de restructuration dans
les entreprises russes est attribuée à trois séries de facteurs :
- Le gouvernement d'entreprise serait inapproprié. La privatisation ayant livré
les entreprises aux insiders (les directeurs d'entreprise et les employés), ces der
niers se contenteraient d'en dissiper les rentes au lieu de les restructurer, profitant
de l'absence de menace de faillite. Les insiders ne seraient pas incités à procéder
à la restructuration des firmes : les employés par peur des licenciements, les direc
teurs par crainte d'être démis de leurs fonctions par l'assemblée des actionnaires
dominée par les salariés (Carlin & Aghion, 1996 ; Frydman et al., 1996).
- Les incitations au licenciement et au départ seraient affaiblies par les carac
téristiques institutionnelles du marché du travail (coûts élevés de licenciement et
de rempla

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