Les routes des drogues : explorations en Afrique subsaharienne - article ; n°131 ; vol.33, pg 645-671
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Description

Tiers-Monde - Année 1992 - Volume 33 - Numéro 131 - Pages 645-671
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Maria Luisa Cesoni
Les routes des drogues : explorations en Afrique subsaharienne
In: Tiers-Monde. 1992, tome 33 n°131. pp. 645-671.
Citer ce document / Cite this document :
Cesoni Maria Luisa. Les routes des drogues : explorations en Afrique subsaharienne. In: Tiers-Monde. 1992, tome 33 n°131.
pp. 645-671.
doi : 10.3406/tiers.1992.4714
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1992_num_33_131_4714LES ROUTES DES DROGUES :
EXPLORATIONS EN AFRIQUE
SUBSAHARIENNE
Etat des lieux pour une approche critique
par Maria Luisa Cesoni*
L'Afrique a été traditionnellement concernée par l'usage de substances psy-
choactives ', dont les plus connues sont les dérivés du « cannabis sativa », le
khat et les boissons alcooliques de production artisanale. Cet usage était toute
fois bien maîtrisé, socialement et individuellement, à des fins rituelles ou théra
peutiques 2. Certaines de ces substances, comme la kola, ont joué un rôle écono
mique et culturel important, comme moteur des échanges transfrontaliers en
Afrique.
Des problèmes liés à ce genre de produits apparaissent à une époque
récente.
Du côté des trafics r les importations de médicaments psychotropes échap
pent aux règles auxquelles elles sont soumises dans les pays occidentaux, en
même Temps que se développent des marchés parallèles ; rÁfríquťTsembTe ëtrëT
utilisée de manière croissante pour le transit des stupéfiants, ce qui déterminer
ait l'ouverture de marchés locaux ; les importations d'alcool seraient en train
d'augmenter, suite à l'introduction de législations plus rigides dans les pays du
Nord.
* Centre d'Etude de Technique et d'Evaluation législatives (cetel). Faculté de Droit de l'Univers
ité de Genève.
1. On appelle communément « drogue » des substances disparates et aux définitions multiples
aux connotations différentes, qui ont apparemment en commun d'exercer une action sur le psy
chisme : nous utiliserons, de préférence, pour l'ensemble de ces substances le qualificatif « psychoact
if», qui paraît finalement le plus neutre. Nous utiliserons le mot « psychotrope » pour indiquer
les substances définies comme telles par les conventions internationales, de même que, les pro
duits illicites, le terme stupéfiants, correspondant à leur définition juridique.
2. Pour une exemplification de ces multiples substances et usages, cf. M. Gueye et M. Omaïs,
Tentative pour une approche socioculturelle de l'usage abusif de « drogues » au Sénégal, in Psychop
athologie africaine, n° 2, 1983, p. 141-172. Cf. aussi les articles de V. Funken et de O. Gollnhofer et
R. Sillans, cités en bibliographie.
Revue Tiers Monde, t. XXXIII, n° 131, Juillet-Septembre 1992 646 Maria Luisa Cesoni
Du côté de la consommation : l'abus de médicaments psychotropes inquiète
les autorités, ainsi que l'importante consommation d'alcool et de dérivés du
cannabis ; l'usage d'héroïne et de cocaïne commence à être constaté.
En 1990, selon Interpol, l'Afrique est impliquée à trois niveaux : production
et trafic de cannabis, trafic de transit d'opiacés et de cocaïne, importation de
médicaments psychotropes1.
Etant donné l'étendue géographique, culturelle et socio-économique de ces
phénomènes, nous limiterons notre exploration à l'Afrique subsaharienne,
notamment l'Afrique de l'Ouest, qui semble être la plus concernée.
Nous nous concentrerons, surtout en ce qui concerne les trafics, sur deux
types de substances : les médicaments psychotropes et deux « drogues » dites
dures, la cocaïne et l'héroïne. En effet, c'est à partir du moment où l'Afrique a
commencé à jouer un rôle dans les filières des stupéfiants, débouchant sur les
marchés occidentaux, que l'Occident a découvert le problème de « la drogue en
Afrique », tandis que la diffusion des médicaments psychotropes sur les marchés
clandestins est passée sous silence.
Lorsqu'on considère les données disponibles, on s'aperçoit que les pro
blèmes posés par la surconsommation de médicaments psychotropes sont bien
plus importants que ceux que provoque l'abus d'héroïne et de cocaïne : il nous
paraît ainsi important de contrer une approche qui déplace l'attention selon les
préoccupations des pays occidentaux.
De même que les médicaments psychotropes, l'abus d'alcool et de tabac
pose problème, ainsi que leur commercialisation par les firmes occidentales
selon des normes bien moins strictes que celles qui sont imposées à la vente
dans les pays d'origine. Cependant, nous ne pouvons qu'effleurer les problémat
iques concernant ces deux derniers produits car, n'étant pas pris en compte par
les conventions internationales sur les stupéfiants et substances psychotropes,
ils relèvent d'une réglementation différente et demandent une approche axée sur
le fonctionnement des marchés licites.
Dans la première partie de notre article, nous donnerons un aperçu général de
l'offre et de la demande de stupéfiants et de médicaments psychotropes, en soul
ignant la difficulté de repérer des sources fiables d'information tant quantitative
que qualitative, afin de mettre en garde contre le danger d'interventions fondées
sur des informations et des évaluations médiatiques ou pseudoscientifiques.
Dans la deuxième partie, nous examinerons trois pays — Nigeria, Sénégal
et Togo — pour suggérer qu'il ne s'agit pas de problèmes policiers, mais de
phénomènes enracinés dans les contextes socioculturels, économiques, sani
taires pour les cas d'abus, et qu'il ne semble pas y avoir un lien univoque de
cause à effet entre le trafic de stupéfiants et leur consommation dans les pays
impliqués.
Ainsi, d'une part, l'abus de produits psychoactifs, lorsqu'il pose problème,
est à affronter par une activité de prévention ; d'autre part, l'abus de médica-
1. Interpol, Overview of illicit traffic in drugs and psychotropics substances, Africa 1988-1990. routes des drogues : explorations en Afrique subsaharienne 647 Les
ments psychotropes est aussi le produit du croisement entre une politique
commerciale anomique et l'absence de réglementations et de structures efficaces
de contrôle dans les pays récepteurs : il devra donc être affronté par la soumiss
ion à des réglementations efficaces.
La transdisciplinarité de notre approche, tout en ayant des limites, est ren
due inévitable par les nécessités d'appréhension d'un phénomène qui se situe
d'emblée au croisement de disciplines multiples, à cause, aussi, de ses enjeux
politiques.
I — UN APERÇU D'ENSEMBLE
Les sources d'information
Les données disponibles sont relativement limitées : les législations répres
sives en vigueur rendent ces phénomènes difficilement saisissables, en Afrique
comme ailleurs, et la pauvreté1 des politiques sociales africaines ne les fait pas
émerger dans des réseaux de prise en charge.
Les informations dérivent, pour l'essentiel, des rapports de police et de quel
ques enquêtes épidémiologiques. Ces types de sources présentent des limites, et
on doit rappeler que les informations quantitatives recueillies « témoignent
essentiellement du fonctionnement des institutions qui les produisent et donc de
leurs objectifs, de leurs moyens et de leur efficacité »2.
Les rapports de police, et notamment le nombre de saisies et des arresta
tions, tout en correspondant à une réalité, ne permettent pas d'en déduire des
évaluations quantitatives et des tendances, étant liés à des facteurs tels que les
priorités et les politiques répressives^ les moyens disponibles et l'efficacité des
services, le degré de corruption des fonctionnaires. Ils constituent difficilement
une preuve définitive sur la constitution des filières, à cause, entre autres, du
calibre intermédiaire des individus arrêtés, de leur tendance à fournir des faux
renseignements soit pour sauvegarder leurs complices, soit pour complaire à
l'enquêteur afin d'obtenir un traitement répressif atténué. De plus, à cause du
cloisonnement existant entre les différents échelons tout au long de la filière
pour des raisons év

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