Une revue d intellectuels communistes dans les années vingt : « Clarté » (1921-1928) - article ; n°3 ; vol.17, pg 484-519
37 pages
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Une revue d'intellectuels communistes dans les années vingt : « Clarté » (1921-1928) - article ; n°3 ; vol.17, pg 484-519

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Description

Revue française de science politique - Année 1967 - Volume 17 - Numéro 3 - Pages 484-519
36 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 64
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Madame Nicole Racine-Furlaud
Une revue d'intellectuels communistes dans les années vingt : «
Clarté » (1921-1928)
In: Revue française de science politique, 17e année, n°3, 1967. pp. 484-519.
Citer ce document / Cite this document :
Racine-Furlaud Nicole. Une revue d'intellectuels communistes dans les années vingt : « Clarté » (1921-1928). In: Revue
française de science politique, 17e année, n°3, 1967. pp. 484-519.
doi : 10.3406/rfsp.1967.393019
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1967_num_17_3_393019Une revue d'intellectuels communistes
dans les années vingt :
«Clarté» (1921-1928)
NICOLE RACINE
Héritière d'un rêve internationaliste et pacifiste qui s'incarne
de 1919 à 1921 dans le mouvement Clarté, ou Internationale
de la pensée, la revue Clarté (1921-1928) est issue de la
tendance de ce mouvement qui, la plus favorable au bolchevisme,
la plus acquise aux idées de la IIIe Internationale, adhéra en 1920
au communisme. Première expérience d'une revue d'intellectuels
communistes ou communisants qui ne soit pas une revue de doctrine
ou de théorie, la revue Clarté revêt pour l'historien une signification
idéologique certaine. Il convient, cependant, avant de retracer son
évolution, de rappeler ce qu'a été dans les années 1919-1921 le
mouvement Clarté ; on comprendra mieux ainsi la filiation entre
le et la revue et on verra en quoi celle-ci a cherché
à se distinguer de l'inspiration originelle du mouvement.
Né d'une réaction contre la guerre, le mouvement Clarté dont
la première idée revint à Raymond Lefebvre, et qui fut officie
llement constitué en mai 1919, tente d'organiser, sous la direction
effective d'Henri Barbusse 1 la protestation contre la guerre par
1. Henri Barbusse, né en 1873, connaît avant la guerre des succès litt
éraires (poésies et roman) . Politiquement, il est à ce moment pacifiste et colla
bore à la revue Paix, publiée par la Société française pour l'arbitrage entre
les nations. Lorsque survient la guerre, exempté pourtant, il demande à partir.
Il écrit le 9 août 1914 à Renaudel, directeur de L'Humanité, une lettre où il
précise les raisons de son engagement volontaire et se qualifie de « socialiste
antimilitariste » se battant contre le militarisme et l'impérialisme. De son expé
rience de combattant, Le Feu, paru en 1916, est le témoignage ; ce roman,
qui échappait à la littérature patriotique de circonstance et qui s'élevait vio
lemment contre la guerre, connaît alors un immense retentissement. De là vint
le prestige de Barbusse auprès des révolutionnaires. Sans adhérer au Parti
socialiste, Barbusse, ami de Longuet, collabore avec les « minoritaires » du
parti. En 1917, il patronne l'Association républicaine des anciens combattants
(A.R.A.C.), fondée par Raymond Lefebvre, Paul Vaillant-Couturier, Georges La Revue « Clarté » 485
la constitution d'une Internationale des intellectuels. Il cherche à
rassembler contre la guerre, les élites du monde entier, les hommes
de « bonne foi » et de progrès, sans distinction de tendances ou
d'écoles. Barbusse, animé par la conviction que les intellectuels ont
un rôle privilégié à jouer dans l'avènement d'un ordre nouveau,
fait patronner le mouvement par Anatole France, et y attire
des personnalités telles que Gorki, Einstein, H. Mann, B. Shaw.
Il lui donne également sa devise : « II faut faire la révolution dans
les esprits ». En France, le mouvement Clarté bénéficie durant les
années 1919-1921 des aspirations à l'internationalisme qui se sont
fait jour au lendemain de la guerre dans les milieux intellectuels
et socialistes. Un journal, le journal Clarté, et des groupes qui se
constituent sous son égide deviennent alors un lieu de rencontre
entre intellectuels pacifistes de tradition libérale et militants du
mouvement socialiste attirés par la Révolution russe. Sous l'i
nfluence d'Henri Barbusse qui se rapproche des conceptions défen
dues par la IIIe Internationale, le mouvement évolue en 1920 vers
le communisme sans toutefois y adhérer explicitement. Mais l'e
ngagement de membres actifs du en France, Raymond
Lefebvre, Paul Vaillant-Couturier, Boris Souvarine, dans la cam
pagne pour l'adhésion du Parti socialiste à la IIIe Internationale,
la fondation en décembre 1920 d'un Parti communiste se réclamant
d'une Internationale qui donne un contenu révolutionnaire à l'inte
rnationalisme, posent bientôt le problème de la place politique de
Clarté. Henri Barbusse, malgré son ralliement en 1920, selon sa
propre formule, au « communisme international », tient essentie
llement à préserver l'indépendance de Clarté et à en faire une
organisation « au-dessus des partis politiques ». Au contraire, une
minorité acquise au communisme, composée notamment de Paul
Vaillant-Couturier, Jean Bernier, Marcel Fourrier, Magdeleine
Marx, cherche à orienter Clarté vers une action révolutionnaire.
Vaillant-Couturier inspire à cet effet, en février 1921, une décla
ration que Barbusse accepte avec difficulté ; cette déclaration qui
Bruyère. En 1918, Barbusse accueille avec enthousiasme les idées wilsoniennes
et le projet d'une Société des Nations. En 1920, il rompt définitivement avec
le pacifisme wilsonien et se rapproche de la doctrine de la IIIe Internationale.
Bibliographie : sur le mouvement Clarté, on peut consulter le livre très
documenté de l'historien tchèque Vladimir Brett, Henri Barbusse, sa marche
vers la clarté, son mouvement Clarté, Académie des sciences, Prague, 1963,
qui retrace l'évolution littéraire de Barbusse avant 1914 et la fondation du
mouvement Clarté. V. Brett ne parle qu'incidemment de la revue Clarté qu'il
considère, à partir de sa rupture avec Barbusse, comme une revue « opposi-
tionnelle », ce qui ne nous semble pas exact. Nous avons consacré un article
au « Mouvement Clarté en France, 1919-1921 », The Journal of Contemporary
History, vol. 2, n° 2, 1967. 486 Le P.C.F. et les Intellectuels 1920-1939
définit Clarté comme un « centre d'éducation révolutionnaire inte
rnational », récuse implicitement les ambitions premières du mouve
ment. A la fin de 1921, la minorité communiste, avec l'accord
réticent de Barbusse, décide de lancer la revue Clarté : idéologie
quement plus homogène, la revue succéderait au journal suspendu
au début de 1921. Par sa volonté de marquer ainsi sa rupture
avec les origines pacifistes et idéalistes de la première Clarté, la
revue Clarté est infidèle à l'inspiration originelle du mouvement
qui avait cherché à établir un vaste front uni d'intellectuels. Si les
nouveaux dirigeants avaient tous collaboré au journal Clarté, s'ils
ont conservé son nom même, ils ont en revanche pris soin de
donner à la revue une orientation tout à fait nouvelle, à la fois
plus limitée et plus ambitieuse. Renonçant à opérer le « rassem
blement des élites » à travers le monde dans une organisation à
ramifications internationales, ils veulent faire vivre une revue qui
serait la première revue « d'éducation révolutionnaire et de culture
prolétarienne ».
Ainsi la revue Clarté a-t-elle trouvé son originalité par rapport
à 1' « ancienne » Clarté. Elle l'a trouvée également par rapport au
Parti communiste. Si la plupart des jeunes journalistes de Clarté
sont en effet proches du Parti communiste (Vaillant-Couturier 2,
Marcel Fourrier 3 sont membres du parti, Jean Bernier 4, sympat
hisant), la revue n'en garde pas moins son indépendance. Elle
cherche à mener sur le plan culturel une lutte parallèle à celle que
le parti mène sur d'autres plans contre la bourgeoisie. C'est cette
tentative qui constitue sa principale originalité.
Ecrite par des intellectuels révolutionnaires, Clarté revêt une
autre originalité : celle d'être la tribune d'une fraction, la fraction
jeune, de la première génération communiste, de cette poignée
d'intellectuels que la révolte contre la guerre vécue a conduits
2. Paul Vaillant -Couturier, né en 1892, a vécu dans un milieu d

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