Voyager aux Indes à la fin du XVIIème siècle - article ; n°4 ; vol.6, pg 485-494

Lydie Villers

Description

Histoire, économie et société - Année 1987 - Volume 6 - Numéro 4 - Pages 485-494
Abstract Travelling at the end of the seventeenth century in India was both a matter of adventure and organization. Some French people - scientists, amateurs or merchants - experienced it. The most representative being Tavernier and Bernier. Their writings which never take the form of a diary reveal many aspects of Indian life and civilization at the time of the last Great Moghul Aureng-Zeb. Furthermore, Bernier was the first to visit Kashemere. We must not assume their work to be just a kind of guide-book; It reveals much more.For instance Bernier the most reliable and the deepest of them all expresses his views on economics and takes advantage of his description of Indian religion to assert his own views on the subject. Thus a subtle criticism of the Western world can be found in most of these books of travelling ; Indian society is used as a safeguard and relativism is never far away. Their success was tremendous. Their influence grew particularly in the field of literature. Their political influence is to be considered with more equanimity though we must not forget that some of them « worked » for the establishment of the French Indian Company. As for the influence of India on Western architecture, mainly in England, or for the study of plants and their following exploitation we will have to wait for the eighteenth century botanists and artists.
Résumé Les voyages aux Indes à la fin du XVIIème siècle nécessitaient à la fois esprit d'aventure et organisation. Quelques Français - savants, amateurs de voyages, marchands - en firent l'expérience. Les plus remarquables furent Bernier et Tavernier. Leurs écrits, qui jamais ne se présentent sous la forme de journal de bord, révèlent de nombreux aspects de la vie et de la civilisation indienne sous le règne du dernier des Grands Mogols : Aureng Zeb. Par ailleurs, Bernier fut le premier à pénétrer au Cachemire. Leurs récits sont loin d'être des guides de voyage. Ils sont beaucoup plus que cela. Par exemple, Bernier, le plus intéressant et le plus profond, a des vues très personnelles sur l'économie qu'il soumet à Colbert, de plus, il prend prétexte de sa description de la religion hindoue pour glisser quelques remarques dérangeantes sur le Christianisme et le Clergé. On peut découvrir dans la plupart des livres de voyage une critique subtile du monde occidental. Le monde indien n'est parfois qu'un prétexte et le Relativisme s'y exprime souvent. Leur succès fut grand. Ainsi que leur influence qui transparaît dans la littérature de l'époque. Quant à leur influence politique, restons plus modérés même si nombreux furent ceux qui œuvrèrent à l'implantation de la Compagnie Française des Indes Orientales. Cependant, il faudra attendre le XVIIIème siècle pour que l'Inde et son art influencent l architecture et ce surtout en Grande-Bretagne et que soit entreprise l'étude des plantes grâce à une nouvelle race de voyageurs.
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: HISTOIRE-_ECONOMIE_ET_SOCIETE
• Publié le: 01 janvier 1987
• Nombre de lectures: 29
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Lydie Villers
Voyager aux Indes à la fin du XVIIème siècle
In: Histoire, économie et société. 1987, 6e année, n°4. pp. 485-494.
Citer ce document / Cite this document :
Villers Lydie. Voyager aux Indes à la fin du XVIIème siècle. In: Histoire, économie et société. 1987, 6e année, n°4. pp. 485-494.
doi : 10.3406/hes.1987.1467
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_1987_num_6_4_1467Résumé
Résumé Les voyages aux Indes à la fin du XVIIème siècle nécessitaient à la fois esprit d'aventure et
organisation. Quelques Français - savants, amateurs de voyages, marchands - en firent l'expérience.
Les plus remarquables furent Bernier et Tavernier. Leurs écrits, qui jamais ne se présentent sous la
forme de journal de bord, révèlent de nombreux aspects de la vie et de la civilisation indienne sous le
règne du dernier des Grands Mogols : Aureng Zeb. Par ailleurs, Bernier fut le premier à pénétrer au
Cachemire. Leurs récits sont loin d'être des guides de voyage. Ils sont beaucoup plus que cela. Par
exemple, Bernier, le plus intéressant et le plus profond, a des vues très personnelles sur l'économie
qu'il soumet à Colbert, de plus, il prend prétexte de sa description de la religion hindoue pour glisser
quelques remarques dérangeantes sur le Christianisme et le Clergé. On peut découvrir dans la plupart
des livres de voyage une critique subtile du monde occidental. Le monde indien n'est parfois qu'un
prétexte et le Relativisme s'y exprime souvent. Leur succès fut grand. Ainsi que leur influence qui
transparaît dans la littérature de l'époque. Quant à leur influence politique, restons plus modérés même
si nombreux furent ceux qui œuvrèrent à l'implantation de la Compagnie Française des Indes
Orientales. Cependant, il faudra attendre le XVIIIème siècle pour que l'Inde et son art influencent l
architecture et ce surtout en Grande-Bretagne et que soit entreprise l'étude des plantes grâce à une
nouvelle race de voyageurs.
Abstract Travelling at the end of the seventeenth century in India was both a matter of adventure and
organization. Some French people - scientists, amateurs or merchants - experienced it. The most
representative being Tavernier and Bernier. Their writings which never take the form of a diary reveal
many aspects of Indian life and civilization at the time of the last Great Moghul Aureng-Zeb.
Furthermore, Bernier was the first to visit Kashemere. We must not assume their work to be just a kind
of guide-book; It reveals much more.For instance Bernier the most reliable and the deepest of them all
expresses his views on economics and takes advantage of his description of Indian religion to assert his
own views on the subject. Thus a subtle criticism of the Western world can be found in most of these
books of travelling ; Indian society is used as a safeguard and relativism is never far away. Their
success was tremendous. Their influence grew particularly in the field of literature. Their political
influence is to be considered with more equanimity though we must not forget that some of them «
worked » for the establishment of the French Indian Company. As for the influence of India on Western
architecture, mainly in England, or for the study of plants and their following exploitation we will have to
wait for the eighteenth century botanists and artists.VOYAGER AUX INDES
A LA FIN DU XVIIème SIECLE
par Lydie VILLERS
Abstract Résumé
Travelling at the end of the seventeenth century Les voyages aux Indes à la fin du XVIIème siè
in India was both a matter of adventure and organizatcle nécessitaient à la fois esprit d'aventure et organisa
ion. Some French people - scientists, amateurs or tion. Quelques Français - savants, amateurs de voyag
merchants - experienced it. The most representative es, marchands - en firent l'expérience. Les plus r
being Tavernier and Bernier. Their writings which neemarquables furent Bernier et Tavernier. Leurs écrits,
ver take the form of a diary reveal many aspects of qui jamais ne se présentent sous la forme de journal de
Indian life and civilization at the time of the last Great bord, révèlent de nombreux aspects de la vie et de la
Moghul Aureng-Zeb. Furthermore, Bernier was the civilisation indienne sous le règne du dernier des
first to visit Kashemere. Grands Mogols : Aureng Zeb. Par ailleurs, Bernier fut
We must not assume their work to be just a le premier à pénétrer au Cachemire. Leurs récits sont
kind of guide-book; It reveals much more.For instance loin d'être des guides de voyage. Ils sont beaucoup
Bernier the most reliable and the deepest of them all plus que cela. Par exemple, Bernier, le plus intéressant expresses his views on economics and takes advantage et le plus profond, a des vues très personnelles sur l' of his description of Indian religion to assert his own économie qu'il soumet à Colbert, de plus, il prend pré
views on the subject. Thus a subtle criticism of the texte de sa description de la religion hindoue pour glis
Western world can be found in most of these books ser quelques remarques dérangeantes sur le Christianis
of travelling ; Indian society is used as a safeguard and me et le Clergé. On peut découvrir dans la plupart des
relativism is never far away. Their success was tremenlivres de voyage une critique subtile du monde occi
dous. Their influence grew particularly in the field of dental. Le monde indien n'est parfois qu'un prétexte
literature. Their political influence is to be considered et le Relativisme s'y exprime souvent.
with more equanimity though we must not forget that Leur succès fut grand. Ainsi que leur influence
some of them « worked » for the establishment of the qui transparaît dans la littérature de l'époque. Quant à
French Indian Company. As for the influence of India leur influence politique, restons plus modérés même si
on Western architecture, mainly in England, or for the nombreux furent ceux qui œuvrèrent à l'implantation
study of plants and their following exploitation we de la Compagnie Française des Indes Orientales. Ce
pendant, il faudra attendre le XVIIIème siècle pour que will have to wait for the eighteenth century botanists
and artists. l'Inde et son art influencent l architecture et ce surtout
en Grande-Bretagne et que soit entreprise l'étude des
plantes grâce à une nouvelle race de voyageurs.
Nombreux furent les Français qui voyagèrent aux Indes dans le courant du
XVIIème siècle et qui en rapportèrent des témoignages écrits dont le contenu concorde
généralement. La personnalité de chacun leur fit insister sur des intérêts divers, au ha
sard de leurs découvertes, mais ils ont tous fourni des renseignements précieux sur l'In
de de cette époque.
Bernier et Tavernier furent les plus représentatifs de ces voyageurs : rappelons que
Bernier séjourna près de dix ans en Inde (il y arriva en 1659) et que Tavernier y fit
six voyages s'étalant de 1635 à 1665. Leur désir de découvertes est stimulé chez le pre
mier par un sens très fin de l'observation et du relativisme, dénotant sa formation de
« scientifique » (il était disciple de Gassendi), et de médecin, chez le second par des 486 HISTOIRE ÉCONOMIE ET SOCIÉTÉ
motifs plus mercantiles ; en effet le marchand et joaillier Tavernier venait chercher aux
Indes des gemmes prestigieuses et y apportait des objets manufacturés de luxe, des
« curiosités » européennes dont les Mogols et autres rajahs étaient très friands. Aussi,
n'est-il pas étonnant que Tavernier ait attaché une grande importance aux lettres de
recommandation, aux firmans, sortes de passeports octroyés par le Grand Mogol, aux
poids et mesures et aux tractations commerciales, révélant ainsi ses préoccupations
majeures.
Les écrits d'un Chardin ou d'un Thevenot ne sont pas non plus négligeables ; leur
désir de rapporter des renseignements et leur honnêteté les rendent dignes de figurer
parmi les grands voyageurs du siècle.
Mais quelle que fut la personnalité de l'auteur, nous ne lisons jamais un journal de
route : ce sont des souvenirs, ne l'oublions pas, écrits après coup, qui nous sont donnés.
Les années se sont écoulées, la spontanéité des premières impressions a souvent cédé le
pas à un travail de synthèse, mais cette synthèse est plus ou moins habilement présent
ée. Tavernier essaye de donner le change en faisant se dérouler ses pérégrinations au fil
des chapitres, suivant un itinéraire type dûment mesuré. Thevenot l'imitera. Bernier
travaillera plutôt par thè