Trophée des plumes 2021
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Trophée des plumes 2021 , livre ebook

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Description

- Hamed s’il te plaît, maîtrise-toi ! Je souffre autant que toi. Et ce n’est pas dans l’avion en plein vol que nous allons déballer nos problèmes conjugaux. L’endroit n’est pas idéal. ./Ce n’était pas à moi qu’étaient destinés ces mots, et pourtant je ressentais moi aussi le heurt de ses paroles, la tension du désaccord. Ce n’était pas ma femme, ce n’était pas mon problème et pourtant ses paroles résonnaient en moi. J’avais l’impression de connaître déjà ces mots, comme si je les avais déjà lu dans un livre ou écoutés dans un film. Mais lequel, quand, pourquoi ça me fait cet effet. Un souvenir ? Aurais-je déjà vécu cette scène. Je ne m’appelle pas Hamed mais… Et puis j’ai plongé. Moi aussi j’ai déjà senti cette vague éclater. Le moment où je me prends dans la gueule tout ce que j’ai mis de côté. En regardant ma main je me suis surpris à la voir trembler. Comme leur discussion m’affecte, elle me parle. Hamed est tremblant lui aussi, je sens comme un lien avec cet homme, un fils doré d’un vécu commun. Il est à fleur de peau, une bombe à retardement qui essaye d’écouter sa femme, de s’expliquer calmement mais, tout de suite, il ne peut pas. Il en est incapable, etj’ai l’impression de le comprendre, de le connaître, de savoir tout ce qui lui passe dans la tête. Ou plutôt ce qui ne lui passe pas par la tête, une difficulté à s'expliquer, à être au clair avec ses idées. Il paraît profondément malheureux, enfermé dans un carcan dont il est lui-même le bourreau.

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Date de parution 17 juin 2021
Nombre de lectures 23
Langue Français

Extrait

- Hamed s’il te plaît, maîtrise-toi ! Je souffre autant que toi. Et ce n’est pas dans l’avion en plein vol que nous allons déballer nos problèmes conjugaux. L’endroit n’est pas idéal.
./Ce n’était pas à moi qu’étaient destinés ces mots, et pourtant je ressentais moi aussi le heurt de ses paroles, la tension du désaccord. Ce n’était pas ma femme, ce n’était pas mon problème et pourtant ses paroles résonnaient en moi.
J’avais l’impression de connaître déjà ces mots, comme si je les avais déjà lu dans un livre ou écoutés dans un film. Mais lequel, quand, pourquoi ça me fait cet effet. Un souvenir ? Aurais-je déjà vécu cette scène. Je ne m’appelle pas Hamed mais… Et puis j’ai plongé. Moi aussi j’ai déjà senti cette vague éclater. Le moment où je me prends dans la gueule tout ce que j’ai mis de côté. En regardant ma main je me suis surpris à la voir trembler. Comme leur discussion m’affecte, elle me parle. Hamed est tremblant lui aussi, je sens comme un lien avec cet homme, un fils doré d’un vécu commun. Il est à fleur de peau, une bombe à retardement qui essaye d’écouter sa femme, de s’expliquer calmement mais, tout de suite, il ne peut pas. Il en est incapable, etj’ai l’impression de le comprendre, de le connaître, de savoir tout ce qui lui passe dans la tête. Ou plutôt ce qui ne lui passe pas par la tête, une difficulté à s'expliquer, à être au clair avec ses idées. Il paraît profondément malheureux, enfermé dans un carcan dont il est lui-même le bourreau. Il me vient une folle envie de l’aider. Pour la sympathiequej’éprouve envers cet homme, et envers ce couplequi semble sur le pde se disloquer. À cet instant, il avait même l’air de porter à lui seul toute la responsabilité de ce coupleoint . Il doit s’en vouloir terriblement. Je regarde le pauvre homme, j’aimerais tellement pouvoir partager sa peine, et l’aider.
Depuis cette phrase il reste un silence de mort dans l’avion, coupé seulement par le bruit des moteurs, et, de temps en temps, un sanglot.
- Maman, pourquoi le monsieur il pleure ?
- Il a une grosse dispute avec sa femme alors, tu sais, les disputes ça fait sortir plein d’émotions.
../Ma fille est toute mignonne avec sa question. Elle fait du bien en détendant un peu l’atmosphère. Une petite voix douce et innocente est beaucoup plus agréable à entendre que deux adultes qui s’engueulent.
- Il a besoin de réconfort alors.
- Peut être, suivant les situations, on a pas les mêmes besoins.
- Alors je ne peux pas aller l’aider ?
- La personne qui nous réconforte a aussi une importance, on a pas forcément envie qu’un inconnu s’occupe de nos histoires.
Elle s’est mise à chuchoter, elle est consciencieuse quand même ma petite. Quant au couple au fond j’ai de la peine pour eux. La femme a l’air prise entre son amour pour le « Hamed » et son inquiétude sur son comportement. Elle doitgérer un homme torturé alors qu'elle l’est elle-même. C’est bien une situation de femme ça,trop accommodante parfois, l’instinct maternel peut être. Ils ont l’air tous deux d’avoir quelque chose à ruminer dont ils ne parlent pas. Qui fait taire la femme et trembler de malaise son mari. Oui, ils semblent au bord des larmes, prêt à éclater si on leur donne un lieu plus pudique. Et ce jeune homme à l’air bien malheureux, comme s’il était muet, incapable de s’exprimer réellement, incapable de prononcer les mots qui le libéreraient, comme s’il ne les connaissaient pas.
- Mman, toi aussi tu ne vas pas bien ?
Je me retourne vers mon enfant, comme réveillé après une absence soudaine.
- Tout va bien Saskia. Qui a-t-il?
- Tu pleures.
Je frotte mon œil et y découvre avec surprise une goutte. C’est capable de me faire cet effet là ? Ils sont forts, leur lien est fort, leur histoire est forte, et leur dispute est d’une violence sourde affreuse et confuse. Chacun s’en veut, pas à l’autre, à soi, même leur rupture n'interviendrait pas comme solution. Ils sont piégés dans un mal-être profond.
/Je regarde ailleurs, autour de moi. J’étais tranquillement en train d’écouter ma musique et je n’ai pas suivi ce qui s’est passé. Mon voisin est tremblant, le regard figé sur un autre homme qui semble encore plus mal.
- Que s'est-il passé ?
Ma question reste sans réponse de ce voisin. Il semble complètement absorbé par l’homme tremblant. Les autres passagers ont eux aussi leurs réactions, alors que certains ignorent le phénomène malgré la tension palpable en s’occupant de refaire un lacet, de boire un café ou lire un journal déjà terminé, d’autre fixe le vide dans un silence morne et d’autre encore, quelques uns dévisagent le monsieur fébrile sans aucune pudeur. Là bas une femme semble sur le point de pleurer elle aussi si son enfant ne maintenait pas son attention ailleurs. Un autre homme près d’un hublot paraît lui aussi ignorer pudiquement la scène sans succès, il est tendu comme un arc. C’est assez fou quand j’y pense j’ai l’impression d’avoir accès à une pensée collective, avec, au cœur, ceux qui semble être un couple, là bas, les deux individus transis dans l’angoisse, la gène, et la perte de contrôle. Ceux que mon voisin ne cesse de fixer. Je ressens absolument tout, les pensées chargées de cet homme d’à coté, le sommeil agité maintenant de la vieille dame devant moi, la petite fille inquiète à l’avant qui semble vouloir aider. Absolument tout. C’est lourd, c’est chargé, l’air pèse.
Je n’ose plus parler, ma voix se casse avant même d’exister. Et je sais pourquoi, ce n'est pas ce que l’homme fébrile veut dire. Moi aussi j’ai été happé par l’atmosphère, et personne n’en sort.
Un homme mûr sort d’ailleurs pour rejoindre les toilettes, il fuit la tension, j’en suis sûr. Elle met à mal bien du monde.
./Voir Hammed comme ça me brise. Littéralement, je ne sens plus mon ventre et je sens ma tête exploser à la recherche de mon souvenir d’une scène identique. Je ne sais même pas si c'est dans ma tête que je cherche la suite de cette scène, ou si c’est dans la sienne. Que j’essaye de trouver ses mots pour lui. Ou alors dans la tête de tout le monde, comme un cerveau collectif. En tout cas, je suis sûr de connaître la fin. C’était dans un rêve, hier, ou avant, j’étais en face d’un autre homme, beau, et je l’aimais. Et je lui sortait la phrase, celle de la femme, l’homme semblait en colère. Puis son visage s'effondre pour en laisser un autre triste d’enfant désespéré. Et alors la table a tourné, et j’ai parlé encore, à moi-même semble-t-il. J’ai prononcé des mots en réponse, pour libérer ma souffrance, mon petit visage triste désespéré.
J’en étais sûr, j’ai déjà vécu ça, ceux que Hammed veut dire c’est :
- J’en ai marre de cette vie que je t’impose. Je ne t’en voudrais pas si tu décidais de me quitter.
Je vois le dénommé Hamed se lever et me dévisager avec des yeux ronds. Mince ! J’ai parlé à voix haute.
- Comment avez- vous fait ? c’est exactement ce que je voulais dire.
Fin ./personnage 1../personnage 2.../personnage 3
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