Essais et Notices
52 pages
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Essais et Notices , livre ebook

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Description

Avant le congrès de Berlin, il ne semblait pas que la Prusse prît un intérêt bien vif à ce qui se passait sur les rivages du Bosphore, et la Turquie paraissait être, comme on dit volontiers aujourd’hui, en dehors de la sphère d’action de l’empire d’Allemagne. Après le congrès on vit avec étonnement la politique allemande s’engager dans une direction qu’on croyait toute nouvelle. Il paraît bien qu’on eût, en effet, raison d’être surpris ; l’Allemagne ne touche, par aucun point de son territoire, au territoire ottoman ; ses vaisseaux n’ont pas grand’chose à faire dans les eaux du Bosphore et s’y montrent en assez petit nombre ; bref aucun intérêt allemand ne semblait directement engagé dans la querelle du Russe avec le Turc.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346086160
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
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Nicolas Delacroix
Essais et Notices
Lorsque la Revue des Deux-Mondes publia, il y a une douzaine d’années, le premier des essais qui forment ce volume, la diplomatie allemande était très agissante à Constantinople. M. Cherbuliez, au jugement de qui l’article fut d’abord soumis, voulut bien m’ écrire que ç’avait été pour lui comme une révélation. On s’était imaginé jusque là dans le public que la politique de M. de Bismarck à Constantinople constituait une innovation ; il n’en était rien. Bien loin d’innover, le chancelier de l’empire ne faisait que reprendre, pour la continuer, une tradition, que le royaume de Prusse avait léguée à l’empire d’Allemagne.
Plus tard, M. de Bismarck fut disgracié comme l’avait été le comte Hertzberg ; comme lui, le chancelier voulut, du fond de la retraite, donner des conseils qui furent mal reçus ; et le jeune empereur se conduisit en cette circonstance comme son aïeul s’était conduit à l’égard de Hertzberg. M. Cherbuliez m’écrivit à ce moment pour me rappeler cette coïncidence qui l’avait frappé. C’est ce qui m’a décidé à faire, sans y rien changer, une nouvelle publication de cet article, bien qu’il n’ait plus aujourd’hui qu’un intérêt rétrospectif. On voudra bien considérer cet essai comme une modeste contribution à l’étude de cette question d’Orient qui reste posée devant l’Europe et ne parait pas encore près de recevoir une solution définitive.
Goailles, août 1898.
LA POLITIQUE PRUSSIENNE EN ORIENT A LA FIN DU SIÈCLE DERNIER
Avant le congrès de Berlin, il ne semblait pas que la Prusse prît un intérêt bien vif à ce qui se passait sur les rivages du Bosphore, et la Turquie paraissait être, comme on dit volontiers aujourd’hui, en dehors de la sphère d’action de l’empire d’Allemagne. Après le congrès on vit avec étonnement la politique allemande s’engager dans une direction qu’on croyait toute nouvelle. Il paraît bien qu’on eût, en effet, raison d’être surpris ; l’Allemagne ne touche, par aucun point de son territoire, au territoire ottoman ; ses vaisseaux n’ont pas grand’chose à faire dans les eaux du Bosphore et s’y montrent en assez petit nombre ; bref aucun intérêt allemand ne semblait directement engagé dans la querelle du Russe avec le Turc. Pourquoi donc l’Allemagne jugeait-elle à propos de sortir d’une indifférence presque séculaire, et, dans la pièce dont les actes divers se déroulent à Constantinople, pourquoi prenait-elle tout à coup un rôle bien plus marqué.
D’ingénieux écrivains 1 se sont crus obligés à rechercher les causes de ce soudain changement. Ils ont prêté au chancelier de l’empire les plus longs desseins, — et tels qu’il faudrait, pour en amener la réalisation, le concours de circonstances qui, sans être impossibles, ne sont pourtant point probables, ni surtout prochaines. On sondait l’avenir, un avenir éloigné, et on faisait fond sur l’influence germanique en Orient pour projeter tout un remaniement de la carte du vieux monde. Après comme avant ces conjectures, l’avenir garde son secret. Mais, puisqu’il est convenu que l’histoire est un perpétuel recommencement, n’eût-il pas été plus sage de remonter dans le passé de la Prusse et d’y chercher quelles avaient pu être, en un temps donné, ses vues sur l’Orient ? Ainsi interrogée, l’histoire aurait répondu que ce n’est pas d’aujourd’hui, — ni d’hier, — que la Turquie est entrée dans le jeu des hommes d’état prussiens. On aurait vu qu’à une époque qui ne manque pas de ressemblance avec la nôtre, un ministre qui, lui aussi, mérita bien de la patrie allemande, avait fait de la Turquie la maîtresse carte de son jeu. Il est bien vrai qu’il perdit la partie, mais un joueur plus habile peut venir qui gagnera avec les mêmes cartes. Tant s’en faut donc que la politique prussienne s’engage dans une voie nouvelle, qu’au contraire elle reprend les voies qu’elle a suivies il y a un siècle, — et peut-être pour atteindre le même but.
Il semble d’autant plus intéressant de conter cette histoire qu’elle est demeurée jusqu’à présent à peu de chose près inconnue, non divulguée. Comme, à la fin du siècle dernier, la question d’Orient se trouvait intimement liée, dans les desseins de la Prusse, avec la question polonaise, à laquelle les deux derniers partages allaient donner une solution qui a semblé jusqu’ici définitive, on ne s’étonnera pas si l’on trouve dans le récit qui va suivre quelques allusions aux affaires polonaises : elles sont nécessaires pour l’intelligence de la politique prussienne en Orient à la fin du siècle dernier.
I
Disons d’abord, aussi brièvement qu’il se pourra, quelle était, à cette époque, la situation des puissances européennes relativement à la Turquie La Crimée avait été cédée à la Russie par le traité de 1786, mais les Turcs comptaient bien que celte cession n’était que provisoire, et leur indignation fut très vive lorsqu’ils virent Catherine II prendre possession de sa nouvelle conquête dans le fameux voyage qu’elle y fit cette même année. En janvier 1787, le vieux Abdul-Hamid, au sortir d’une audience où l’ambassadeur de Russie avait résisté à toutes ses sollicitations, écrivit à son grand-vizir ce billet laconique : « Déclare la guerre ! advienne que pourra. » Le divan fut aussitôt convoqué et l’ambassadeur de Russie emprisonné au château des Sept-Tours.
L’impératrice Catherine II prévoyait depuis longtemps cette explosion, mais elle ne l’attendait pas si tôt. Depuis qu’elle tendait à Constantinople, elle avait négligé l’alliance prussienne, si utile lors du premier partage de la Pologne. On a dit, dans ces dernières années, que les clés de Constantinople sont à Berlin ; à la fin du siècle dernier, elles étaient à Vienne, et l’impératrice l’avait compris. Elle avait su le plus habilement du monde tirer parti de la rivalité de la Prusse et de l’Autriche, et avait fait à Joseph II des promesses si séduisantes qu’elle l’avait amené à conclure un traité offensif et défensif (21 mai 1781). En cas de guerre, les deux puissances se promettaient mutuellement un secours de dix mille hommes d’infanterie et de deux mille cavaliers qui, dans certaines conjonctures prévues, pouvaient être remplacés par un subside de 400.000 roubles. De plus, au cas où l’un des contractants serait attaqué par la Turquie, chacun d’eux s’engageait, mais par une clause tenue secrète, à ne conclure séparément ni paix ni armistice.
Lorsque le voyage de Crimée fut résolu, l’impératrice en informa Joseph II. Celui-ci comprit que ce n’était là qu’une invitation déguisée, et bien qu’il trouvât « très cavalière » la façon d’agir de son alliée (lettre à M. de Kaunitz), il accepta après quelque hésitation. On trouvera notée, dans les lettres de M. de Ségur et du prince de Ligne, l’impression que fit ce voyage sur l’esprit de Joseph II. Catherine avait beaucoup compté sur cette longue entrevue pour rallier définitivement l’empereur d’Autriche à sa politique orientale : elle ne réussit pas, et se rendit très bien compte de son échec. « Constantinople, disait l’empereur à M. de Ségur, sera toujours une pomme de discorde entre les puissances européennes, qui, pour cette seule ville, se refuseront à partager la Turquie. J’ai pu consentir à la cession de la Crimée, mais jamais je ne souffrirai que les Russes s’installent à Constantinople : j’aime encore m

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