Gracchus Babeuf et la Conjuration des Égaux
122 pages
Français

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Gracchus Babeuf et la Conjuration des Égaux , livre ebook

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Description

Parmi les partis qui firent prendre à la révolution française tant de couleurs diverses, il en est un qui doit fixer les regards du sage, par le dévouement constant avec lequel il consacra ses efforts à la délivrance réelle de l’humanité.Tandis que l’ambition, la jalousie, l’avidité et l’amour irréfléchi des innovations entretenaient une lutte déplorable entre des hommes dont les uns combattaient pour rétablir l’ancienne monarchie, d’autres pour placer sur le trône de France une dynastie nouvelle, d’autres enfin pour transporter le pouvoir d’une caste à une autre caste, les uns et les autres pour s’attribuer exclusivement l’autorité et les jouissances dont elle est la source, il se forma lentement une classe de citoyens qui, mus par des principes bien différents, désiraient aussi un grand changement politique, mais un changement opposé aux vues et aux passions de tant d’instigateurs intéressés de troubles civils.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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Publié par
Nombre de lectures 3
EAN13 9782346120567
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Philippe Buonarroti
Gracchus Babeuf et la Conjuration des Égaux
PRÉFACE
I
Un moment avant la déclaration du jury qui était pour eux un arrêt de mort, Babeuf et Darthé reçurent de Buonarroti, sur les bancs de la haute cour de Vendôme, devant la hache aristocratique qui allait les frapper, le serment de venger leur mémoire.
D’autres devoirs, une longue et rigoureuse détention suivie d’une surveillance plus longue, empêchèrent d’abord Buonarroti de s’acquitter de cette obligation. En 1828 seulement, il put tenir sa promesse et publia un ouvrage en deux volumes sous ce titre : Histoire de la conspiration pour l’égalité, dite de Babeuf, suivie du procès auquel elle a donné lieu. Les deux premières éditions de cet ouvrage parurent à Londres et à Bruxelles. Une troisième fut publiée à Paris, en 1830, par les frères Baudouin, et fait partie de leur collection de Mémoires sur la Révolution française. En 1842, il en fut publié un abrégé contenant exclusivement la partie économique. En 1850, un éditeur, M. Charavay, qui par ses opinions se rattachait au groupe politique dont Buonarroti fut si longtemps l’âme, reproduisit dans une édition populaire l’histoire de la conspiration et du procès telle que Buonarroti l’avait écrite, en retranchant des notes inutiles et presque toutes les pièces justificatives qui sont fort nombreuses. M. Charavay, en outre, rétablit Je premier le nom de plusieurs personnages qui étaient encore vivants au moment où Buonarroti écrivait, et qu’il n’avait désignés que par des anagrammes. Toutes ces éditions sont épuisées, et il serait presque impossible de s’en procurer un exemplaire. Il eu est de même du procès en six gros volumes qui fut publié par les soins du gouvernement. Une collection des grands procès politiques ne pouvait pas ne pas contenir celui de Gracchus Babeuf et des Égaux. Je réimprime donc à mon tour le récit de Buonarroti dans toutes ses parties essentielles. J’ai seulement abrégé quelques passages où ce grand citoyen, qui était plus homme d’action qu’écrivain, se répète. J’ai aussi ajouté quelques notes qui m’ont paru indispensables, en ayant soin de les distinguer de celles de Buonarroti lui-même.
II
La conspiration des Égaux est le dernier effort tenté par les Républicains pour enrayer la contre-révolution. Après cette tentative avortée, la réaction triomphe définitivement et la trahison permanente des gouvernements prépare les voies à la fourberie, à l’audace de Bonaparte. Si les directeurs à défaut de patriotisme eussent eu quelque sens politique, Bonaparte, à son retour d’Égypte, eût été dans les vingt-quatre heures traduit devant un conseil de guerre et fusillé. Mais les gouvernements dits modérés n’agissent jamais autrement. Impitoyables envers les amis du peuple, ils n’ont pour les aristocrates que complaisances et caresses. Nous avons vu les mêmes choses en 1848. On flattait, on encourageait les royalistes et on envoyait les Républicains sur les pontons.
Les ennemis de la Révolution ont affecté de voir dans la conspiration de Babeuf un mouvement purement communiste. Ils ont dit que les Babouvistes voulaient la suppression immédiate et radicale de la propriété individuelle. C’est une double erreur. Buonarroti s’est expliqué nettement sur ce point : « Nul, dit-il, ne nous fera l’injure de penser que nous eussions le fol espoir de voir nos principes mis en pratique par un seul coup de baguette et par un acte semblable à celui de la création. Nous ne nous dissimulions pas les obstacles que nous avions à vaincre, mais nous étions convaincus que la réforme projetée était le seul moyen de fonder une république vigoureuse et durable, et nous voyions dans les progrès de l’esprit public, dans l’activité renaissante des éléments révolutionnaires, dans la réunion des démocrates, dans l’extrême mécontentement du peuple et dans le courage des citoyens dévoués, des matériaux suffisants pour commencer et pour consolider successivement la révolution dont nous avions jeté les fondements. »
Babeuf et ses amis fondaient en effet leur principal espoir sur l’union des démocrates, et, c’est le caractère frappant de la conjuration des Egaux que toutes les nuances du parti révolutionnaire s’y trouvèrent confondues. On travaillait au rétablissement de la Constitution de 1793, et dans cette œuvre commune les anciens montagnards tels qu’Antonelle, Amar, Ricord, etc., les amis d’Hébert et de Chaumette, les partisans de Robespierre, donnaient la main aux égalitaires purs. Tous étaient d’accord que la Constitution de 1793 devait être la première étape de la Révolution reprenant son cours pour ne plus s’arrêter. Il n’y avait pas en France à cette époque, dit quelque part Buonarroti, un véritable républicain qui ne fût conspirateur ou prêt à le devenir. Cet admirable accord de tous les patriotes, cette unanimité du peuple parisien dont les rapports des agents du comité insurrecteur donnent à chaque instant la preuve, encourageaient les chefs du mouvement. Ce fut aussi ce qui les perdit, en leur donnant trop de confiance. On se croyait sûr du succès, à la seule condition de ne pas attaquer prématurément, et on conspira pour ainsi dire à ciel ouvert. Au centre, les agissements étaient secrets, mais l’agitation qui se communiquait aux extrémités était trop peu dissimulée pour échapper à l’œil des gouvernants. Peut-être aussi perdit-on trop de temps, parce qu’on ne voulait agir qu’à coup sûr, après avoir tout organisé pour l’attaque, après s’être créé partout, au sein même du gouvernement et dans l’armée, des intelligences.
Le comité insurrecteur comptait sur l’armée, principalement sur la légion de police où il y avait beaucoup de patriotes et sur le camp de Grenelle. C’était là une funeste erreur dans laquelle le traître Grisel, capitaine au troisième bataillon de la trente-huitième demi-brigade, entretint le comité. La nécessité où l’on se croyait de se concilier l’armée fit que ce misérable fut jugé indispensable. On pensait qu’il pouvait beaucoup ; on lui laissa pénétrer les ressorts intimes de l’affaire. Au moins Babeuf et ses amis étaient-ils excusables de croire aux soldats. Les enseignements leur manquaient ; ils avaient vu les armées de la Révolution ; ils n’avaient vu ni le 18 brumaire ni le 2 décembre. Singulière illusion que celle des armées démocratiques ! Aux élections de 1849 et de 1851, presque tous les régiments donnèrent la majorité aux candidats républicains-socialistes. On sait à quoi cela nous a servi. Quand l’autorité se dissout elle-même, quand le gouvernement perd la tête et se désorganise, il peut arriver comme en 1848 que les soldats lèvent la crosse en l’air. Mais toutes les fois que le gouvernement ne s’abandonne pas lui-même, l’armée ne lui manque pas ; c’est duperie en France que d’espérer le contraire.
La trahison de Grisel seul n’eût pas suffi probablement à perdre la conjuration. La faute capitale du comité insurrecteur me paraît d’avoir accepté ou demandé dans une certaine mesure le concours de certains membres du gouvernement, tels que Barras. Jusqu’où alla l’entente entre les Babouvistes d’une part et de l’autre Barras, Fouché et Bonaparte, on ne le peut déterminer avec exactitude. Buonarroti, soit qu’il n’eût pas tout su, soit volontairement, a gardé sur ce point une grande réserve dans son écrit. Je ne crois pas qu’il s’en soit non plus ouvert dans la suite à aucun de ses amis. Il est certain que le 30 germinal, Barras eut une conférence avec Darthé, et que le 20 floréal, la veille même de l’arrestation des conjurés, il s’entretint longuement avec Germain, l’un des

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