La Révolution, l Europe et la guerre - Ou de Louis-Philippe et de Charles X
75 pages
Français

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La Révolution, l'Europe et la guerre - Ou de Louis-Philippe et de Charles X , livre ebook

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Description

NON, je ne croirai jamais, quoi qu’on en dise, que les grands événements que nous venons de voir soient l’ouvrage des passions, et le produit de l’esprit d’irréligion et de désordre ; ils sont le glorieux résultat d’une résistance généreuse, énergique, universelle, enthousiaste, légale et légitime : c’est la conscience indignée d’une nation qui n’a eu qu’un cri, qu’un mouvement pour courir aux armes ; qu’un bras pour agir et pour vaincre, qu’un coup à frapper.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346095452
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Julien-Marie Daniélo
La Révolution, l'Europe et la guerre
Ou de Louis-Philippe et de Charles X
CHAPITRE PREMIER
LA RÉVOLUTION
NON, je ne croirai jamais, quoi qu’on en dise, que les grands événements que nous venons de voir soient l’ouvrage des passions, et le produit de l’esprit d’irréligion et de désordre ; ils sont le glorieux résultat d’une résistance généreuse, énergique, universelle, enthousiaste, légale et légitime : c’est la conscience indignée d’une nation qui n’a eu qu’un cri, qu’un mouvement pour courir aux armes ; qu’un bras pour agir et pour vaincre, qu’un coup à frapper 1 . C’est la raison publique opposée à la démence de huit individus : c’est le sentiment de la conservation s’élevant, courroucé, contre l’usurpation faible et perfide : c’était la justice du peuple armée contre le parjure d’un roi 2 .
Les passions ne procèdent pas ainsi à leurs œuvres ; leur élan ce n’est point de l’enthousiasme, c’est de la haine, c’est de la rage : ici vous n’avez vu dans le danger qu’héroïque dévouement, que joie pure dans le triomphe, et qu’oubli généreux après la victoire. Les passions sont habiles à briser, à défaire, mais à réédifier, impuissantes : il y a de la stérilité dans le crime, il mène au néant.
Des ordonnances de ministres ont suffi dans un jour pour renverser, avec une charte de quinze ans, une monarchie de quinze siècles 3 . Mais ces ministres, leurs conseillers et leurs partisans n’eussent-ils pas lâchement fui, eussent-ils paru, avec leurs habits de cours ou de ville, leurs décorations, leurs cordons, leurs croix, leurs sabres ou leurs épées de batailles, s’ils en ont, au milieu de cette belle et malheureuse garde royale qu’ils envoyaient dans nos rues, sur nos places, mourir pour eux et nous tuer ; non, quand bien même ils auraient été braves et visibles 4 aux jours d’alarmes, ils n’auraient jamais pu rétablir ni cette charte ni cette monarchie : ils auraient bien pu refouler un instant les lumières dans l’ombre, la liberté dans l’esclavage, la justice dans la vengeance ; ils auraient pu révéiller pour deux jours le spectre de l’ancien régime, relever, pour y mourir plus tard, lés fourches de Montfaucon, les potences et les oubliettes seigneuriales, les guillotines ambulantes des cours prévotales et de la terreur ; ils auraient pu tuer la France et en faire une colonie d’Espagnols, de Cosaques et d’Anglais ; mais y ramener le bon ordre et la vieille dynastie, jamais ! Le sang d’un peuple versé par un roi dans la cité de ses pères y fit toujours glisser les pieds du coupable, et sortir du sol un long cri de mort, fatal arrêt de ruine certaine et de malédiction pour lui et sa postérité 5 .
D’un autre côté voyez comme tout s’est fait et rétabli avec promptitude, et comme par enchantement : on dirait d’une scène de la lampe merveilleuse et du coup de baguette d’une fée bienfaisante. L’autre jour, en revenant de vaincre, nous étions inquiets sous nos armes, nous nous demandions tristement, quel sera notre chef ? quel sera notre gouvernement ? quel sera notre roi ? qu’allons-nous devenir et que ferons-nous de notre victoire ? allons à l’hôtel-de-ville, allons à la mairie, et l’on allait à l’hôtel-de-ville, et l’on allait aux mairies réclamer le bon ordre, tout aussi décidés à châtier le crime de ceux qui auraient voulu le troubler, qu’on avait été prompt à punir l’attentat de ceux qui avaient voulu violer les lois.
Des dispositions si louables, si unanimes dans un peuple attaqué à l’improviste et blessé au cœur, méritaient une grande récompense : il l’a reçue, il possède la réalité de son vœu le plus cher, il a dans son gouvernement ce qui est dans sa devise, ordre public et liberté.
Il n’y a pas huit jours encore que tout était en désordre, brisé, bouleversé, détruit ; de trône il n’y en avait plus, et deux drapeaux flottaient sur la même capitale ; au milieu fumait le sang, et planait la mort : on n’entendait que le tocsin dans les temples, que des fusillades et des cris dans les rues ; les portes et les fenêtres des maisons, des palais, étaient percées de balles ; la, garnison, protectrice du repos de la ville, chargeait ses armes contre elle, marchait en bataille sur ses quais et ses places, la tenait assiégée 6 . Les rues étaient dépavées et coupées de barricades que l’on fortifiait encore de toutes les charrettes, les diligences, les calèches et les fiacres égarés qui cherchaient un passage. Les boutiques étaient fermées, toutes les administrations détruites, toutes les communications, tout le mouvement, tout le commerce, toute la vie de la capitale suspendus.
Et aujourd’hui déjà toutes les affaires ont repris leurs cours, les administrations se recomposent, les ateliers, les boutiques, les théâtres se rouvrent avec éclat et activité, les diligences et les postes parcourent toute la France sans obstacles, les familles quittent leurs campagnes pour revoir Paris, les voyageurs y arrivent de toutes parts, et nous apportent les éloges de leurs journaux et de leurs rois, qui applaudissent à notre courage, admirent notre sagesse et nous proclament LA GRANDE NATION ! Tout vit et circule en liberté à l’abri des chambres, du trône et des lois reparues ; tout est rentré dans l’ordre et la routine accoutumée : le monde a repris ses travaux et ses plaisirs ; les tribunes et les tribunaux leurs séances ; enfin tout est replacé, l’édifice social tout entier est debout, et il a retrouvé la clef de sa voûte. Un prince opulent et simple, vivant et pensant comme nous, un honnête et bon bourgeois de Paris nous gouverne aussi patriarchalement que toujours il gouverna son auguste et nombreuse famille 7 .
De sorte que la brillante population qui se promène en habit de fête aux Tuileries, riante et étonnée, se demande : mais n’est-ce pas un rêve que la guerre des trois jours ? est-il donc bien vrai qu’il y ait eu une révolution en France ? si l’on ne voyait à Notre-Dame, au Louvre et aux Tuileries le drapeau tricolore ; dans la salle des maréchaux de jeunes étudiants, de jeunes ouvriers de la garde nationale, et sur la place du Palais Royal, une foule immense, qui dans l’intervalle des sérénades et des couplets de la Marseillaise, crie à pleine voix, Vive, Louis-Philippe  ! rive le Roi des Français  ! Non, si l’on ne voyait pas tout cela on ne le pourrait croire.
Preuve bien frappante que les rois ne tiennent plus à rien lorsqu’ils ne tiennent plus à leur peuple, et qu’ils n’ont pour appui que les domestiques de leur cour et les officiers de leur garde ! 8
Pendant ce temps là les mères en deuil viennent au Louvre verser des pleurs ou recevoir des consolations, au pied de la croix noire plantée sur le tombeau de leurs fils 9  ; les prêtres chantent pour eux des services funèbres ; les religieuses des hospices rivalisent de zèle avec les gens de l’art pour le pansement des blessés des deux partis ; d’augustes princesses les visitent et portent sur leurs plaies le baume de leurs douces paroles, et à leurs besoins elles accordent les secours de leur inépuisable bienfaisance. La France entière, et l’étranger même, les imitent, et des souscriptions pour les victimes des trois jours sont ouvertes dans toutes les contrées de l’Europe.
Merveilleuse victoire ! dont tous les peuples profiteront, et qui n’a coûté de sang qu’au vainqueur. Autrefois les nations voisines, jalouses, épouvantées du succès de nos armes, en frémissaient, et se liguaient contre nous : aujourd’hui elles se réunissent encore ; elles n’ont qu’un seul sentiment, qu’un seul cri ; mais c’est un sentiment de reconnaissance amicale et fratern

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