Le Nord de la France sous le joug allemand - 1914-1918
106 pages
Français

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Le Nord de la France sous le joug allemand - 1914-1918 , livre ebook

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Description

« Posez bien en principe que tout ce que vous avez pu entendre dire au sujet des Allemands à Lille est au-dessous de la vérité : ces gens-là sont des bandits, — rien que des bandits ! »C’est le receveur municipal de Lille, M, Welhoff, qui parle ainsi.« Dès leur arrivée à Lille, raconte-t-il, les Allemands eurent deux précautions : s’emparer de l’usine de distribution des eaux, afin de faire peser constamment sur la population la menace de l’incendie sans secours possible, et dresser un inventaire précis, détaillé, de ce que contenaient tous les immeubles de Lille.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346113170
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Maurice Thiéry
Le Nord de la France sous le joug allemand
1914-1918
L’OCCUPATION ALLEMANDE DANS LE NORD
I
QUAND LILLE FUT ENVAHIE
« Posez bien en principe que tout ce que vous avez pu entendre dire au sujet des Allemands à Lille est au-dessous de la vérité : ces gens-là sont des bandits, — rien que des bandits ! »
C’est le receveur municipal de Lille, M, Welhoff, qui parle ainsi.
« Dès leur arrivée à Lille, raconte-t-il, les Allemands eurent deux précautions : s’emparer de l’usine de distribution des eaux, afin de faire peser constamment sur la population la menace de l’incendie sans secours possible, et dresser un inventaire précis, détaillé, de ce que contenaient tous les immeubles de Lille.
Pour inspirer immédiatement la terreur, ils mirent, à l’aide de grenades jetées par les soldats, le feu à la rue Faidherbe, qu’ils brûlèrent, puis ils commencèrent l’inventaire des autres quartiers.
Quand cette opération fut terminée, ils procédèrent méthodiquement à l’enlèvement : toutes les matières premières et manufacturées, tous les métiers, toutes les machines, tous les outils furent soigneusement prélevés, numérotés, emballés et expédiés en Allemagne, Chez les particuliers, le moindre brin de laine fut ramassé : il n’y eut plus à Lille un seul matelas, pas même dans les hôpitaux !
La Compagnie de Fives-Lille avait entrepris la construction d’un vaste hangar. L’armature métallique était en place ; elle fut démontée et doit avoir permis de construire à bon marché une usine chez nos ennemis.
Un service spécial, parfaitement organisé, sous le nom de « Service des réquisitions civiles », procédait tranquillement à ces vols. Il fit la rafle de tous les objets en cuivre. Sous les yeux de leurs propriétaires, ces objets étaient brisés à coups de marteau, quelle que fût leur valeur artistique, et pesés. Le poids en était inscrit sur un bulletin remis comme bon de réquisition !
Puis ce fut le tour des musées et collections, qui, peu à peu, se dépouillèrent de leurs pièces les plus rares.
Les maisons privées furent, jusqu’en. 1915, exemptes de pillage. Mais, à ce moment, le haut commandement des armées du Nord vint s’installer à Lille. Des officiers le précédèrent pour préparer le cantonnement. Ils arrivèrent, sans la moindre hésitation, chez les habitants en disant aux uns : « Dans huit jours, vous devrez avoir vidé les lieux : un de nos chefs logera à votre place. Rien ne devra être déménagé ! » ; à d’autres, au contraire, ils intimaient : « Dans votre salon, vous pourrez enlever tel et tel meuble », ou : « Votre mobilier, tout entier, qui ne nous convient pas, devra être enlevé. » Chez quelques-uns, l’ordre portait.« Le personnel domestique restera au service des nouveaux occupants. » Pas un détail n’avait été omis...
Cependant, sous l’œil dédaigneux des autorités allemandes, la vie municipale continua. Les écoles s’ouvrirent sans ingérence de l’ennemi. Le ravitaillement se faisait par les soins du comité hispano-américain et par des achats effectués en Hollande. Chaque habitant eut droit à deux kilos cinq cents par semaine d’un pain relativement mangeable.
Une chose plus affreuse que tout fut, en 1916, l’enlèvement des jeunes filles sous prétexte de les envoyer coopérer à l’arrière aux travaux agricoles. En pleine nuit, les Boches cernaient un quartier avec des mitrailleuses, puis on barrait les rues. Des sous-officiers pénétraient dans chaque maison, faisaient lever et descendre tout le monde ; un officier passait et désignait celles des femmes qui, sans autre explication, devaient immédiatement partir. On devine les scènes déchirantes qui se produisirent, quelles tortures physiques et morales ces malheureuses endurèrent ! »
M. Welhoff poursuit son récit, inépuisable, de toutes les vexations, de toutes les atrocités infligées sans arrêt à ses compatriotes.
Mais on lui demande : « Et vous ? Quelles furent vos relations avec eux ? »
« Moi, répond-il, modeste et gêné, je leur ai tenu tête, simplement. C’est la méthode qu’il faut suivre avec eux.
Dès les premières heures de l’occupation, ils frappèrent naturellement à ma caisse pour prélever une contribution de guerre. Je discutai âprement, puis il fallut payer.
Lorsque les fonds disponibles de la ville furent épuisés. nous décidâmes d’émettre des bons, sûr que notre France serait victorieuse, et que nous pouvions avoir toute confiance. Nous ne perçûmes pas un son d’impôt. J’étais le seul caissier public payant pour l’Etat, le département et la ville. Nous avons ainsi émis pour trois cent quatre-vingt-cinq millions de billets, avec lesquels furent assurés les services publics et le paiement des allocations, et prêté vingt et un millions aux communes de l’arrondissement. Nous avons distribué soixante-deux millions de secours aux chômeurs.
Quant aux réquisitions allemandes, — aux rapines, pour mieux dire, — elles s’élèvent à cent quatre-vingt-dix-neuf millions !
Mais j’ai la satisfaction de n’avoir jamais ouvert mon coffre-fort devant eux. Un jour qu’ils exigeaient tout de suite deux cent soixante-quinze mille francs, ils m’offrirent de rédiger un « protocole », comme ils disent, constatant qu’ils s’étaient emparés de force de la somme. Je refusai énergiquement cet honneur et je payai quelques heures après, avec de l’argent apporté par les Lillois... En leur résistant, vous dis-je, on les mâte... »
Mais M. Welhoff omet, dans son tranquille et solide héroïsme, d’ajouter que c’est miracle qu’une semblable attitude ne l’ait pas conduit tout droit au poteau d’exécution ou tout au moins dans quelque prison de Germanie.
Les Barbares à Lille
Le mercredi 14 octobre, furent apposées les premières affiches réglementant la police de la ville.
Entre autres choses on signifia « le dépôt des armes que possédaient les civils », Les hommes aptes au service militaire durent se présenter à la kommandantur ; les possesseurs d’automobiles eurent vingt-quatre heures pour amener leurs voitures à la citadelle ; il fut interdit de toucher à ce qui avait trait à l’armée d’occupation, le tout sous peine d’être fusillé sur-le-champ. Au cas, aussi, « où seraient trouvés des hommes mobilisables ou encore un soldat français dans une maison, les locataires seraient fusillés et les maisons brûlées ».
Par la suite, tous les véhicules furent réquisitionnés et la ville frappée d’une amende de six millions.
Les Allemands firent ensuite déblayer les rues encombrées par l’effet du bombardement, et rétablir le service des tramways, y compris ceux qui vont de Lille à Tourcoing et Roubaix ; ces derniers servirent surtout au transport des blessés allemands.
Dans les premiers jours de l’occupation, les vivres, tels que le lait, la viande, furent difficiles à trouver. Reconnaissant qu’ils en étaient victimes les premiers, les Allemands laissèrent alors circuler les laitières et les maraîchers des environs. La viande cependant devenait de plus en plus rare. A certains moments, on n’avait exclusivement que de la viande de mouton ou de bœuf, que la municipalité faisait distribuer chez les bouchers restés-dans la ville.
Peu de temps après leur arrivée à Lille, les Allemands s’occupèrent de faire exécuter de nombreux travaux pour améliorer les ouvrages militaires existants. Des tranchées et des redoutes furent ajoutées aux rem

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