Ombres du passé - Souvenirs d un officier du Caucase
124 pages
Français

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Ombres du passé - Souvenirs d'un officier du Caucase , livre ebook

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Description

Mon voyage au Caucase ; Grosnaia ; Hassaff-Jurt ; quelques portraits de soldats du Caucase ; l’aoul Koumick.Savons-nous pourquoi nous agissons de telle ou telle autre manière à un moment donné ? Je ne le crois pas, du moins je suis sûr que personne, pas même les plus grands génies, n’ont la faculté d’entrevoir tout le résultat de leurs actions et de leurs paroles. La sagesse de l’homme consiste à savoir comprendre la signification des faits qui se produisent autour de lui et de s’en emparer pour faire triompher ses idées ou ses plans ; mais l’homme n’a pas la possibilité de préparer les événements qui arrivent d’après une logique impitoyable que l’homme comprend après coup, mais qu’il ne prévoit jamais dans tous ses détails.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346082148
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Georgij Konstantinovic Vlastov
Ombres du passé
Souvenirs d'un officier du Caucase
PRÉFACE
Quoique issu d’une bonne famille de gentilshommes, officier sans fortune, j’ai passé une grande partie de ma vie au Caucase, qui attirait vers lui ceux qui avaient de l’ambition ou désiraient échanger une vie fade et quelquefois nulle contre les émotions d’une vie de danger, poétique dans toute sa brutale réalité. En avançant vers la fin de la vie on aime à se retourner pour contempler le chemin parcouru, et les feuillets suivants sont autant de pages détachées de mes mémoires, qui, du reste, ne seront publiés en entier que beaucoup plus tard, probablement après ma mort.
Je crois que le récit d’un officier caucasien pourrait intéresser ceux qui ne connaissent pas cette vie de Bohême, et aussi ceux qui l’ont goûtée dans les plaines brûlées de l’Oran ou sur les montagnes boisées de la Kabylie ou du Pundjab. Ce qu’on va lire n’est pas, du reste, une histoire de la guerre ; les épisodes militaires ne sont rapportés qu’à mesure qu’ils se présentent dans la vie de l’auteur. Je ne suis pas assez savant ni assez ennuyeux pour entreprendre un ouvrage scientifique. Qu’on regarde ce livre comme une peinture de mœurs, la photographie d’une vie qui sera bientôt oubliée, même en Russie, car le Caucase, sauf son aspect pittoresque et les beautés éternelles de la nature, a perdu beaucoup de son prestige pour le soldat. Le danger et la guerre ont fait place à une vie tranquille et régulière, qui doit remplir de bonheur le cœur d’un économiste et d’un humanitaire, mais fait hausser les épaules à un soldat.
CHAPITRE I

Mon voyage au Caucase ; Grosnaia ; Hassaff-Jurt ; quelques portraits de soldats du Caucase ; l’aoul Koumick.
Savons-nous pourquoi nous agissons de telle ou telle autre manière à un moment donné ? Je ne le crois pas, du moins je suis sûr que personne, pas même les plus grands génies, n’ont la faculté d’entrevoir tout le résultat de leurs actions et de leurs paroles. La sagesse de l’homme consiste à savoir comprendre la signification des faits qui se produisent autour de lui et de s’en emparer pour faire triompher ses idées ou ses plans ; mais l’homme n’a pas la possibilité de préparer les événements qui arrivent d’après une logique impitoyable que l’homme comprend après coup, mais qu’il ne prévoit jamais dans tous ses détails.
Un beau jour je me sentis découragé à Saint-Pétersbourg ; mes affaires d’argent allaient mal ; je n’avais pas de dettes, mais je sentais que jamais je ne me plierais au joug qu’impose la pauvreté à un officier de la garde impériale qui ne veut pas qu’on devine sa pauvreté et qui, cependant, ne veut pas acheter un moment d’une brillante existence aux dépens de son nom compromis par des engagements qu’il ne pourrait tenir. De plus, je venais de faire un tour en Europe 1  : dix mois de liberté, dix mois passés à Milan et à Venise, où l’on s’amusait à faire des niches aux Autrichiens, à ne pas fumer leurs cigares et à écrire sur tous les endroits peu décents : «  Vivo, Pio Nono  ! » ce qui offensait extrêmement la police ; à Gênes, où l’on faisait des processions de trente mille personnes, la princesse Doria en tête, en l’honneur de Balila et de Carlo Alberto, processions qu’un Anglais et moi nous regardions gravement comme un spectacle donné pour nous par le peuple de Gênes ; à Rome, où Pio Nono accueillait gracieusement Circervaccio, tribun du peuple, et formait sa garde municipale ; au Shleswig et Holstein où des Lieder-Tafeln prenaient une teinte fortement politique et venaient d’être mis à la porte de leur salle par des gendarmes (comme à Rendsbourg au mois de juin 1847) ; — enfin à Paris d’où je venais de partir huit jours avant là révolution de février.
Le dirai-je, arrivé à Saint Pétersbourg je fus pris d’une maladie qui n’a pas de nom, mais qui doit être parente de la nostalgie..... Ce fut un violent désir de quitter les sentiers battus, la vie calme et plate des sociétés civilisées pour la vie aventureuse et bohémienne que je venais de goûter. Aussi tournais-je mes regards vers le Caucase, où une vie de Bohême était rehaussée et anoblie par un devoir à remplir et un danger permanent. J’écrivis une lettre au prince X., qui commandait le fameux 39° des chasseurs, pour lui demander la permission de servir sous ses ordres, et je demandais officiellement au ministère de la guerre de me faire passer à ce régiment. L’ordre du jour parut au mois de décembre 1848, et je fus nommé capitaine au 39 e des chasseurs qui faisait le service dans la plaine des Koumieks et dans la Tchetchna.
L’état-major du régiment se trouvait à Hassaff-Jurt, sur l’Arak-sou, dans la plaine dite des Koumicks ; mais comme la résidence du général de division, qui était aussi général-gouverneur de ce qu’on appelait alors l’aile gauche (qui comprenait tout le versant nord de la chaîne Caucasienne, depuis Wladikawcas jusqu’à la mer Caspienne), était à Grosnaia, forteresse dans le centre de la Tchetchna, je crus de mon devoir d’y aller me présenter avant de passer à mon régiment.
Je ferai remarquer par parenthèse que les chemins de fer n’existant pas encore en Russie vers le commencement de 1849, mon voyage de Saint-Pétersbourg par Moscou, Toula, Voronéj, le pays du Don, Stravropol et le long de la ligne des postes cosaques qui embrassait tout le nord du Caucase, était une véritable odyssée dont on ne peut avoir aucune idée maintenant. Les immenses distances de la Russie, l’absence totale de routes construites, le mode primitif de voyage dans un téléga (instrument de torture à quatre roues), le manque de chevaux aux relais ; enfin la fatigue vous faisait employer un mois à ce voyage qui, ajourd’hui se fait en trois jours par les chemins de fer. Mais cependant quoique subissant la question ordinaire et extraordinaire dans l’infernal équipage qui m’emportait vers la gloire, je n’oublierai jamais ces moments délicieux quand j’aspirais l’air embaumé d’un printemps des steppes, quand au lien des frimas et des neiges du commencement de mars, je voyais autour de moi la nature belle et verdoyante et me chauffais avec délices aux doux rayons du soleil du midi.
 
Tout était nouveau pour moi, la nature comme les hommes. Depuis Stavropol je voyais de lieue en lieue des piquets de cosaques de la ligne avec leurs sentinelles placées sur des hautes tourelles en bois ; des troupeaux immenses de bêtes à corne et de brebis étaient gardés comme en pays ennemi par des cavaliers parfaits, et habillés de cette élégante tunique que nous avions empruntée à nos ennemis les Circassiens. A mesure que j’avançais vers l’Orient je voyais les précautions contre un coup de main redoublées ; enfin j’entrai dans le pays voisin de la Tchetchna, qui était le centre de la petite guerre acharnée que nous livraient les montagnards, car elle avait mille issues par lesquelles les bandes pillardes s’introduisaient dans les terres des cosaques agriculteurs et pillaient les troupeaux ou attaquaient les voyageurs ou les postes qui suivaient la grande route de la Russie.
Pour aller à Grosnaia je devais quitter la ligne, passer le Terck, qui séparait le pays ennemi du pays des cosaques, et m’enfoncer dans la vallée de la Sounja. Pour l’intelligence en général de ce pays, il faut dire que le Terek et la grande route de poste qui longeait le bord du Terek et passait par les villages cosaques, étaient notre base d’opérations militaires. Nous avions plusieurs ponts sur le Terek et des forteresses plus ou moins avancées dans la Tchtchna. La contrée tout autour des forteresses était plus ou moins à nous ; mais dès que nous nous enfoncions dans les bois, nous avions devant, derrière, sur les c&

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