Récits d un officier d Afrique
100 pages
Français

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Récits d'un officier d'Afrique , livre ebook

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Description

C’est le 1er décembre 1835 que j’entendis, pour la première fois, siffler les balles. J’avais l’honneur d’être fourrier au 2e léger, régiment envoyé en Algérie avec le 17e léger et le 47e de ligne, pour venger à Mascara, sur Abd-el-Kader, l’échec que celui-ci avait infligé, à la Macta, au général Trézel. Mais avant de raconter le drame je dois décrire la scène et esquisser les grands premiers rôles, en attendant que je fasse leur portrait en pied.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

Informations

Publié par
Nombre de lectures 6
EAN13 9782346078080
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Lamoricière reçoit la soumission d’Abd-el-Kader.
Alphonse-Michel Blanc
Récits d'un officier d'Afrique
AVANT-PROPOS
Les vieillards sont généralement conteurs. S’ils ont été autrefois soldats, marins ou chasseurs, ils se complaisent au souvenir de leur vie passée : meminisse juvat, ainsi que nous disait la vieille grammaire latine de Lhomond ; et comme ils ne sont pas assez égoïstes pour garder le secret de leur plaisir, ils racontent très volontiers les accidents de guerre, de mer ou de chasse dont ils ont été les héros. On prétend même que lorsqu’il y a pénurie de faits, certains en trouvent dans leur imagination.
C’est une ressource à laquelle je n’ai pas besoin de recourir. Soldat pendant trente ans en Algérie, à partir de sa conquête jusqu’à sa soumission, j’ai assisté à toutes les actions de guerre de cette longue période ; j’ai eu ma part de toutes ses misères ; j’en ai connu les principaux héros, et je les ai suivis dès leurs premiers pas dans la glorieuse carrière qui les a conduits au summum des honneurs et des dignités.
Ce sont ces faits d’armes que je veux raconter ; ces glorieuses misères que je veux dépeindre ; ces illustres chefs d’armée que je veux portraire, avec la certitude d’un témoin et l’indépendance d’un historien qui n’a rien à craindre ni à espérer des personnages dont il parle.
Mon but n’est pas uniquement de rendre hommage à la vaillante armée qui a conquis l’Algérie ; je voudrais encore pouvoir donner à mes récits le son du clairon de Constantine et d’Isly, pour réveiller notre France, qui me paraît engourdie sinon endormie.
Une longue paix, succédant à une guerre courte et foudroyante, a détendu nos ressorts et amolli nos fibres : la fibre guerrière, qui vibrait si fort chez nos aïeux les Francs ; la fibre militaire, qui agitait notre drapeau à Rocroi et à Austerlitz ; nous n’osons même pas nous demander si la fibre patriotique n’est pas, elle aussi, sérieusement atteinte.
Et, au fait, pour qui et pour quoi nous ferions-nous tuer ? Les anciens combattaient pro aris et focis, pour leurs autels et pour leurs foyers, — les autels avant les foyers. — Où sont nos autels ? où sont nos foyers ?
Nos dieux lares, c’est-à-dire les saintes images, protectrices de nos foyers, sont officiellement arrachées des salles d’école et lâchement proscrites des maisons de tous ceux qui vivent du gouvernement et qui, catholiques, n’osent pas aller à la messe.
Le foyer, c’est pour d’innombrables citadins la Bourse, le cabinet d’affaires, le club, le tripot, le théâtre. Pour les ruraux, les murs de leur maison, leur champ, leur étable. De même que le citadin n’ignore pas que l’agiotage et le sensualisme ne lui seront pas interdits par le vainqueur, le rural sait que ce vainqueur ne lui prendra ni sa maison, ni sa vache, ni son champ ; peut-être même aura-t-il un impôt moindre à lui payer. Que leur importe dès lors cette idée abstraite de patrie ?
Si le foyer de la France est moins brillant qu’autrefois, c’est qu’il n’est plus suffisamment entretenu par le souffle religieux.
C’est à nous, soldats de la vieille armée, qu’incombe le devoir de rappeler à la nouvelle, qui s’appelle nation, qu’on n’est réellement brave que si l’on a au cœur le sentiment religieux. Napoléon le savait bien lui qui disait à l’illustre général Drouot : « Drouot, tu es le plus brave de mon armée, parce que tu en es le plus religieux. »
Nous le savons aussi, nous qui avons blanchi sous le harnais, et qui avons pu juger du degré de spiritualisme chez les hommes d’après celui de leur courage dans les combats, de leur constance dans les souffrances de toute sorte, inévitables compagnes d’une guerre de trente ans dans un pays et contre des populations à demi sauvages.
Puissent nos récits atteindre le but que nous nous proposons : exciter l’émulation de la génération nouvelle par l’exemple de celle qui s’en va !
 
CAPITAINE BLANC.
PREMIÈRE PARTIE
L’ACTION MILITAIRE

*
* *
LES PREMIÈRES BALLES
C’est le 1er décembre 1835 que j’entendis, pour la première fois, siffler les balles. J’avais l’honneur d’être fourrier au 2 e léger, régiment envoyé en Algérie avec le 17 e léger et le 47 e de ligne, pour venger à Mascara, sur Abd-el-Kader, l’échec que celui-ci avait infligé, à la Macta, au général Trézel. Mais avant de raconter le drame je dois décrire la scène et esquisser les grands premiers rôles, en attendant que je fasse leur portrait en pied. Cela viendra dans le cours des événements.
Trois régiments étaient donc venus de France, — je les ai nommés ; — on les avait tirés de la division active des Pyrénées-Orientales, commandée par le général Castellane, et qualifiée de : « la meilleure école militaire de France, » par le duc d’Orléans. En même temps que ces régiments français, arrivaient à Oran des vieilles troupes d’Afrique, entre lesquelles les zouaves, dont nous admirions surtout le jeune commandant Lamoricière, aux allures si simples et si militaires. Ses soldats, ses sous-officiers surtout, n’en parlaient qu’avec enthousiasme ; et lorsque nous le voyions passer, à cheval en selle arabe, portant ses cheveux longs comme un Palikare, sa chachia négligemment jetée sur sa tête, nous nous arrêtions pour le saluer et surtout pour mieux le regarder.
En même temps que l’armée se complétait en soldats, elle recevait les chefs qui devaient la conduire : M. le maréchal Clauzel était arrivé d’Alger, et M gr le duc d’Orléans de France.
Le premier nous apportait sa grande expérience militaire, les grandes traditions des guerres de l’Empire, toute une vie de gloire ; le second nous offrait un témoignage de l’intérêt du chef de l’État et une garantie que nos travaux seraient justement appréciés. Tous les cœurs étaient tournés vers ces deux hommes, qui personnifiaient le passé et l’avenir de l’armée.

Province d’Oran.
Le maréchal avait toute la simplicité des héros antiques : un képi à double visière, une redingote à boutons dorés, sur laquelle étaient fixées deux vieilles épaulettes de maréchal, une petite épée et une simple croix d’officier de la Légion d’honneur ; telle était la tenue de cet homme qui avait mérité l’estime du plus grand génie dans l’art de la guerre.
Le duc d’Orléans avait le feu sacré ; il témoignait en tout et partout la plus grande sollicitude pour l’armée. Il savait que les princes français doivent être les premiers soldats de cette nation guerrière ; et lors même que ses nobles instincts ne l’eussent pas porté à ce rôle, sa haute intelligence le lui eût fait embrasser. Il montrait le plus grand désir de s’instruire, et ne dédaignait pas d’entrer dans les plus petits détails de cette immense machine qui s’appelle une armée. Ces qualités, jointes à un grand air de douce familiarité, le rendirent promptement cher aux soldats et aux officiers, pour lesquels il était toujours abordable.
L’état-major général captivait aussi notre attention, et c’était à bon droit, car il se composait de noms illustres dans l’armée. Il y avait, entre autres, notre général de brigade Oudinot, le futur général en chef du siège de Rome contre Garibaldi, venu pour venger son frère, le colonel du 2 e chasseurs d’Afrique, mort au combat de la Macta, en chargeant à la tête de son régiment.
YUSUF
Dans ce groupe brillant d’habits brodés, d’épaulettes et de décorations, un homme se faisait remarquer. Il portait le costume turc ; un cachemire couvrait sa tête expressive, et sous les plis élégants de cette coiffure brillait un regard plein de feu. Une barbe noire et soyeuse encadrait le bas de son visage fin et énergique ; il montait des chevaux admirables, dont il faisait ressortir l’élégance et la vigueur par la grâce qu’il mettait à les manier. Il ne quittait jamais le maréchal, avec leque

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