Sept mois
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Description

Un collège. Clémence, une élève de troisième arrivée en cours d’année. Sa perspicacité et ses maladresses attirent l’attention d’un de ses professeurs. Deux tranches de vie qui se côtoient, se croisent, se rencontrent parfois.
Et au fil de tous ces échanges, ces paroles qui germent le long des chemins de chacun.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 mai 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312072715
Langue Français

Extrait

Sept mois
Alain Bouthier
Sept mois
« Quand est-ce qu’on est ? »
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2020
ISBN : 978-2-312-07271-5
Il est 7 h 30. Antoine hésite un instant… puis renonce à passer dans la salle des profs pour déposer sa veste. Il doit faire encore frais dans le collège, le chauffage est toujours coupé les week-ends par souci d’économie bien sûr… et puis, à cette heure, il ne doit pas y avoir encore grand monde.
Il songe, au fond, qu’il aime bien ces instants où, seul dans les couloirs, il se prend pour un artiste qui rejoint sa loge. Il évite même d’actionner la minuterie, cette semi-pénombre accentue encore une sorte d’intimité avec les lieux.
Dans la salle 14, les tables sont bien alignées. Il sourit en imaginant l’arrivée des élèves tout à l’heure, la manière dont la géographie des lieux allait être remodelée en fonction des amitiés souvent fluctuantes du fameux « groupe classe ».
Il a machinalement disposé sur le bureau réservé au professeur son classeur, un manuel et sa vieille trousse.
Antoine s’assoit un instant. Comme des ombres en filigrane, les visages des élèves de la classe prennent place peu à peu devant lui.
Et puis, vendredi dernier…
La fin du cours a été un peu perturbée. Cynthia est subitement sortie en pleurant, évidemment accompagnée instantanément de sa copine Sabine. C’est tout juste si celle-ci a pris quelques secondes pour demander l’autorisation de l’accompagner. Antoine ne se souvient même pas lui avoir répondu quoi que ce soit. « C’est grave m’sieur. Je peux pas la laisser… mais on reste là, ne vous inquiétez pas ! » Elle n’a même pas imaginé un instant que le prof pouvait refuser…
C’est grave ! Qu’est-ce qu’on peut mettre derrière ces mots-là ? Il faudra tout de même demander à Cynthia comment elle va… Elle n’a pas été très présente pendant le cours, c’est vrai, et ce n’est pas habituel chez elle. C’est une fille plutôt exubérante !
C’est comme Kevin. Il est resté toute l’heure dans son coin au fond de la classe sans desserrer les dents.
Antoine s’étonne de revoir ces scènes avec tant de précisions, mieux même lui semble-t-il qu’au moment où il les a vécues. Bizarre la mémoire !
Cette semaine, trois nouveaux élèves… L’information était vendredi midi dans les casiers. Antoine a bien lu le papier et l’a remis où il l’avait pris comme il le fait bien souvent. Dans quelles classes était-ce ? Il faut descendre de toute façon, passer à la salle de profs… si sa classe est concernée, ne pas être pris au dépourvu… ni avoir l’air de découvrir le nouvel élève.
Une ombre passe devant les vitres dépolies qui donnent sur le couloir. Antoine se lève, sort de la salle. En fermant la porte à clé, il jette un coup d’œil circulaire. Personne en vue. Ça devait être une surveillante : c’était plutôt une silhouette féminine…
On entend déjà, dans le préau au rez-de-chaussée, le chuintement des premiers élèves pas encore très réveillés. Les autres doivent s’ébattre dans la cour. La rampe de l’escalier lui paraît très froide.
« Monsieur, s’il vous plait, vous avez fermé la salle à clé ? »
Antoine se retourne et considère un instant l’adolescente en haut de l’escalier, son visage ne lui dit rien.
« Bien sûr que je l’ai fermée. Mais toi, que fais-tu là à cette heure ? Tu devrais être en bas, avec les autres.
– Je sais, mais je suis nouvelle. Je repère les lieux… et si j’avais pu laisser mes affaires dans… elle fait mine de chercher sur son carnet de correspondance… la salle 14, c’est ça. C’est là que je suis en première heure.
– Et bien, il va te falloir porter tes affaires, qui ne semblent pas être si encombrantes que ça ».
Elle descend le rejoindre sur le palier.
« Je n’ai pas encore les livres. Vous êtes prof en 3me D ?
– Oui, on va même se retrouver tout de suite. Tu dois attendre dans la cour, ajoute-t-il d’un ton qu’il veut plus ferme.
– J’y vais. Je peux vous poser une question ? »
Elle cligne un peu des yeux en attendant une réponse qui n’arrive pas.
« Vous aimez votre métier ? »
Antoine reste un peu interdit. Il fronce les sourcils. Il s’apprête à répondre un peu vertement, mais il se ressaisit, bien que conservant un ton un peu sec.
« Voilà une bien étrange question pour un premier contact. Tu procèdes toujours ainsi ?
– Non, répond-elle avec un demi-sourire, mais vous n’êtes pas obligé de me répondre aujourd’hui !… À tout de suite. »
Elle assure son sac sur l’épaule et descend un peu nonchalamment la volée de marches jusqu’au préau.
Antoine est resté sur le palier. Il la suit des yeux. Il secoue le trouble qu’il sent monter en lui par quelques mots.
« Drôle de fille tout de même.
– Et bien Antoine, tu parles tout seul ? »
Karim, un surveillant, lui tend la main, un grand sourire sur le visage.
« Oui, tu vois ça. Je dois vieillir hein ? Tu as vu cette élève ? elle est nouvelle et déjà bien à l’aise, je trouve.
– Je l’ai à peine entrevue… Mais je vais vite l’avoir à l’œil ! »
Il rit. Les nouveaux sont vite repérés… on se méfie toujours un peu quand ils arrivent comme ça en milieu d’année.
« Tu vas l’avoir en cours ?
– Apparemment oui !
– Et bien, tu nous donneras tes impressions, c’est toi son prof principal ?
– Oui, et je pense qu’elle le savait déjà !
– Qu’est-ce qui te fait dire ça ?
– Je ne sais pas. Au fond c’est idiot, tu as raison.
– Ce n’est pas ce que j’ai dit… »
Antoine a un sourire, c’est vrai. D’autant qu’effectivement, elle avait l’air de savoir à qui elle s’adressait en l’interpelant.
La traversée du préau, quelques « bonjour m’sieur ! », quelques sourires, quelques regards embrumés aussi, et puis la salle de profs.
« Hé Antoine, tu as vu, ils ont avancé les devoirs surveillés des troisièmes ! ça m’énerve, je ne serai pas en mesure de leur trouver un sujet. T’en es où dans ta séquence avec les tiens ? »
Ce qui est bien avec Sarah, c’est qu’elle n’a pas besoin de mise en route, elle est tout de suite sur la brèche. Certains des collègues trouvent qu’elle en fait trop… Antoine aime bien sa façon d’être dans l’énergie. Ce qu’il aime chez elle, c’est son enthousiasme à s’engager, à partir au combat.
« Je n’ai pas regardé le tableau… Et bien, s’il le faut je leur donnerai un entraînement et je ne le noterai pas. Il me faut encore au moins trois séances sur l’autobiographie !
– Tu étais où ? encore en vadrouille…
– Oui, si tu veux, je suis allé poser mes affaires dans la salle 14. Tu as passé un bon WE ?
– Tu parles, je l’ai passé à corriger les dossiers de ma sixième C. Je les ai laissé décider du thème… l’année prochaine, c’est moi qui en choisirai trois ou quatre ! Je ne me suis pas rendu compte du boulot pour évaluer tout ça. Remarque, j’en ai appris pas mal aussi… Et puis je n’ai pas trop trouvé de “copier coller”… Je sais que Sylvie en a vu une grande partie au CDI. C’est pas mal en fait. »
Antoine en écoutant Sarah a retrouvé dans son casier la note de la semaine passée. C’est ça, il a bien une nouvelle élève : Clémence Souriaut. Il a déjà eu une Clémence, il y a quelques années. Ce n’est pas un prénom si répandu.
« J’ai une nouvelle, dans ma troisième. Tu es concernée par les autres ? il y a trois nouvelles inscriptions, tu as vu ?
– Non, je reste avec mes classes, suffisamment chargées comme ça. Ils sont combien dans ta troisième ?
– Tout juste 30 à présent. »
Alors que Sarah s’affère à trier le contenu de son casier au moins aussi rempli que celui d’Antoine, celui-ci échange quelques mots avec deux ou trois collègues, sans vraiment les sortir d’une certaine léthargie matinale. En sortant dans la cour, il les imagine subitement ranimés par l’animatio

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