Dom Juan en langue bassa
120 pages
Français

Dom Juan en langue bassa , livre ebook

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120 pages
Français

Description

Cet ouvrage fait une traduction de la pièce de Molière, Dom Juan, dans une langue camerounaise, la langue bassa, et donne à voir la diversité culturelle que porte un texte écrit au XVIIe siècle par un auteur français. Don Juan est devenu un mythe universel mais très peu de lecteurs modernes ont accès à cette histoire, il s'agit donc de montrer ici comment ce mythe a évolué au point de devenir un mythe africain.


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Date de parution 09 octobre 2014
Nombre de lectures 40
EAN13 9782336359595
Langue Français

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Extrait

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Alice Delphine TA NG
DOM JUAMEN LANGUE BASSA
Une traduction de la pièce de Molière en langue bassa
DOM JUANNI HOB BASSA
Ngobol kaat i Molière ni hob Bassa
Préface de / Nkwel bisu ni Émile Moselly Batamack
Dom Juamen langue bassa Dom Juanni hob Bassa
Alice Delphine TangDom Juamen langue bassa
Une traduction de la pièce de Molière en langue bassa Dom Juanni hob Bassa Ngobol kaat i Molière ni hob Bassa Préface de / Nkwel bisu ni Émile Moselly Batamack
© L’Harmattan, 2014 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.harmattan.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-04565-8 EAN : 9782343045658
Préface Don Juanune œuvre de Molière. Nous étions est informés de son existence et la culture populaire aussi bien que scolaire nous ont habitué non pas à son contenu mais à un aspect proverbial du personnage deDon Juan. C’est donc la première fois que nous avons l’occasion de découvrir Molière dans son texte et Don Juan dans sa pratique. De première vue, c’est donc aussi comme une œuvre de littérature africaine et bàsàa que nous l’abordons plus aisément. Le débat s’inaugure sur la question non pas de Molière comme auteur français, mais sur celle de Dom Juan comme rendu littéraire conforme à l’académisme africain sous ses différents modes : antique/précolonial, colonial et post-colonial, les deux derniers comportant d’importants apports esthétiques importés, francophones pour l’occasion et parfois l’apport de l’école éloignant de la source africaine.
La langue de l’écrit est le bàsàa non pas populaire, non pas des villes, non pas de certaines campagnes, mais lebàsàa commun. Le bàsàa commun doit être compris comme une modalité dialectale générale dans laquelle sont admis les usages de la grammaire et du lexique les plus habituels de la langue basaa au-delà des dialectes. Cette volonté de se river à ce niveau de langue se vit aussi au niveau scriptural car le traducteur a choisi les graphèmes les plus évidents pour ses lecteurs que ces derniers soient ou non
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linguistes. Il respecte une tendance de l’écriture africaine présente depuis l’Antiquité et qui veut qu’en écriture, le lecteur fasse attention aux contextes linguistiques et à partir d’eux retrouver le ton général de la phrase et des mots.
La langue deDom Juanest une langue qui se veut savante à l’occasion, mais qui surtout se fonde sur l’idéal que tout ce que l’on veut dire et peut dire, l’on doit le faire le plus simplement dans l’idiome de référence. Le traducteur y parvient en faisant à la langue bàsàa le moins d’entorses possibles et essayant de ne jamais parler en traduction aucune autre langue que la bàsàa commun. Le bàsàa commun, et le traducteur le respecte, suppose aussi à l’occasion l’habileté de dire ce qu’il veut exprimer par la voie des proverbes, des expressions peut communes voire châtiées.
Ce que nous avons observé, c’est la volonté du traducteur d’écrire un texte dans un bàsàa qui demeure compréhensible du locuteur moyen, qui réintroduit dans sa culture linguistique le locuteur urbanisé qui ne parle pas toujours sa langue couramment et donc n’en maîtrise pas toujours l’esthétique. C’est donc d’un engagement culturel et linguistique particulier qu’il s’agit. Et l’on s’interroge sur ce que le traducteur a voulu rendre en langue bàsàa. Non pas la langue savante de Molière, mais une intuition de celle-là, non pas la culture de la fin de la Renaissance, mais un thème universel et la manière dont il a été traité.
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Insistons sur cet autre aspect pour dire que la langue aidant, Molière qui parle bàsàa, paradoxalement et pour nous ceci est une marque d’excellence de la traduction, commence à parler l’africain. Hors décors du grand siècle, l’on note des comportements si particuliers aux Africains, si communs dans un Monde Noir dans lequel les comportements les plus débridés sont susceptibles d’exister, ainsi que l’attrait pour une sexualité active parfois décriée et susceptible de conduire à des addictions sexuelles.
Molière parle aussi africain par les images et peut être la plus forte, l’une des plus intéressantes sans doute, la relation aux totems et aux défunts, l’appel de la mort et les actions de l’ange de la mort. Dans le contexte africain, tout ceci semble être une évidence et faire partie de la vie réelle, alors que dans celui européens et occidental de l’auteur cela relevait de représentations sur le surnaturel.
Les continuités intellectuelles et culturelles sont si impressionnantes que si l’on disait à un locuteur moyen que Dom Juan est à l’origine un personnage d’un conte du répertoire bàsàa, il pourrait adhérer à cette thèse sans grande difficulté. Ce n’est pas qu’il y a inculturation, c’est-à-dire aliénation plus ou moins voulue de sa culturalité par une autre, ce qui conduit à l’aliénation métaphysique de l’autre, mais identité dans le faire et le rendu culturel. Don Juan ou plutôt Dom Juan rappelle sur bien des plans les personnages épiques mis en exergue dans les contes et mythes africains.
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EtDom Juand’une grande leçon pour les serait lecteurs et les auditeurs. Car par lui, le Molière de traduction dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas, explique dans un personnage non pas populaire mais aux comportements et attitudes déchargés de toute culpabilité excessive ce que toute personne voudrait bien atteindre : être soi-même dans ses actes, réduire autant que possible les expressions de soi commefaux self.
Le lecteur reconnaît bien informé de Molière, qui a lu Molière n’éprouve aucune difficulté à reconnaître celui-ci dans le texte. Ce qui le frappe, c’est que Molière parle bàsàa aux Bàsàa, aux bàsàa-phones et aux bàsàa-philes.
Et ici, l’on fera aussi observer que la grande leçon du traducteur et qui est inévitablement comme une marque de son courage est de montrer de manière autre qu’idéologique et abstraite que l’on peut véhiculer dans les langues de communication africaines la haute culture africaine, française, francophone et mondiale, que leur usage ne saurait se limiter à des manifestations littéraires folkloriques (contes et proverbes) et où de vecteurs de discours dogmatiques de type religieux.
Le lecteur et le spectateur noteront aussi que le traducteur a réussi à faire passer dans une langue comme le bàsàa les raisonnements des différents acteurs et qui traduisent non seulement les approches de Molière, mais aussi les thèses des différents acteurs sociaux de l’époque et que l’on retrouve bien de nos jours : les religieux et leur
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conception de la sexualité et du plaisir comme choses chrétiennes et/ou essentiellement soumis au conditionnement religieux, les libres penseurs dont certains penchent aisément pour une sexualité de plaisir plus que de procréation, l’hypocrisie des institutions religieuses et sociales–familiales notamment, etc. C’est toute la leçon du savoir de l’époque que l’on retrouve dans l’œuvre. Chacun est appeler à la vivre à sa manière, maisDon Juan/Dom Juanmontre le long chemin qui conduit à Freud.
Le choix de l’œuvre qui comme nous l’avons vu, n’est pas très connus du public camerounais ayant jamais fait des études secondaires, on lisaitL’École des femmes,Les fourberies de Scapin, mais pasDon Juan. L’œuvre de Molière est de thème excellent et la critique sociale et morale qu’il contient ne fait l’ombre d’aucun doute. Il est à penser que si l’on pense à l’immense public bàsàa-Mbog Liaa au moins un million et demi, voire deux millions de personnes privées de la culture littéraire moderne et de référence culturelles solides autres que celles instillées par des théologiens de niveaux culturels et intellectuels parfois très discutables, on peut dire que Dom Juan participera sans nul doute à son relèvement intellectuel et esthétique.
Don Juan aborde avec simplicité des questions complexes comme la laïcité de l’Etat et notamment le droit de chacun à la religion de son choix et aux croyances allant avec ses convictions intellectuelles, la tolérance dans les appréciations morales d’autant plus que celles-ci sont la plupart du temps dictées
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