Les fleurs de l oubli
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Les fleurs de l'oubli , livre ebook

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Description

Voilàune semaine que j’étais enfermée dans ma chambre d'étudiante, une pièce de quelques mètres carrés sise à l’université de Cocody. Voilà une semaine que, m'étant pourvue de provisions nécessaires à ma survie, je restais cloîtrée entre quatre murs, pensant par moments à mettre fin à ma vie, refusant de voir mon amoureux, Isaac, celui-là même que j’avais coudoyé en toutes circonstances. Oh ! voilà une semaine que les ténèbres de la dépression se promenaient dans mon esprit et dans mon corps. Je fermai les yeux et je me rappelai les causes de ma dépression. J'étudiaisau département des lettres modernes, où je m’étais vite liée d’amitié avec Emma, une jeune fille à l’élégance affétée, issue d’un milieu modeste, et qui avait le culte du luxe et de l’ostentation. Notre amitié était pourtant née à cause d’autres passions, celles que nous partagions : littérature, art et musique. Quoiqu’Emma vivait à Yopougon, à une dizaine de kilomètres de Cocody, nous nous voyions fréquemment, pendant les week-ends et les jours où nous n’avions pas cours. Un jour que nous étions en vacances, — nous avions réussi la deuxième année d’études et nous attendions le début des cours de la troisième année — Emma était venue me voir dans ma chambre d’étudiante. Pendant les vacances, je passais mes journées à déambuler dans la ville d’Abidjan, cherchant en vain un travail dans une entreprise de la place. C’est alors qu’Emma, remarquant mon oisiveté, me dit : — Je voyage bientôt.

Informations

Publié par
Date de parution 05 juin 2022
Nombre de lectures 7
Langue Français

Extrait

 Voilà une semaine que j’étais enfermée dans ma chambre d'étudiante, une pièce de quelques mètres carrés sise à l’université de Cocody. Voilà une semaine que, m'étant pourvue de provisions nécessaires à ma survie, je restais cloîtrée entre quatre murs, pensant par moments à mettre fin à ma vie, refusant de voir mon amoureux, Isaac, celui-là même que j’avais coudoyé en toutes circonstances. Oh ! voilà une semaine que les ténèbres de la dépression se promenaient dans mon esprit et dans mon corps. Je fermai les yeux et je me rappelai les causes de ma dépression.
 J'étudiais au département des lettres modernes, où je m’étais vite liée d’amitié avec Emma, une jeune fille à l’élégance affétée, issue d’un milieu modeste, et qui avait le culte du luxe et de l’ostentation. Notre amitié était pourtant née à cause d’autres passions, celles que nous partagions : littérature, art et musique. Quoiqu’Emma vivait à Yopougon, à une dizaine de kilomètres de Cocody, nous nous voyions fréquemment, pendant les week-ends et les jours où nous n’avions pas cours. Un jour que nous étions en vacances, — nous avions réussi la deuxième année d’études et nous attendions le début des cours de la troisième année — Emma était venue me voir dans ma chambre d’étudiante. Pendant les vacances, je passais mes journées à déambuler dans la ville d’Abidjan, cherchant en vain un travail dans une entreprise de la place. C’est alors qu’Emma, remarquant mon oisiveté, me dit :
— Je voyage bientôt. Je vais dans une ville où l’on s’ennuie moins, où la vie est moins pénible et les rêves se réalisent. Mariam, je vais à Dubaï ; j’y ai été invitée par un ami, Abdel, qui m’a proposé de me faire accompagner par une amie. Je t’ai choisie, Mariam, je veux qu’on aille ensemble à Dubaï…  Puis elle avait présenté la ville de Dubaï comme un bout de paradis sur terre. Elle m’avait dit que nous passerions nos vacances, grâce à son ami Abdel, dans de somptueux hôtels, dans des restaurants luxueux, dans des cinémas hors du commun. Ayant cru Emma, j’avais accepté de la suivre. Nous quitterions l’Afrique et son indigence, nous romprions avec la monotonie du quotidien, nous nous rendrions dans la cité où le bonheur se cueille en plein air.  Emma et moi avions pris nos effets et voyagé jusqu’à Dubaï. Il faisait jour sur la ville et j’avais été séduite par son architecture ultramoderne, ses gratte-ciels à couper le souffle et sa propreté éclatante. Abdel, un arabe d’une trentaine d’années, nous avait aussitôt conduits dans un hôtel sept étoiles. À ma grande surprise, cet homme était l’amant d’Emma et les deux, me laissant seule dans la salle d’attente, étaient allés occuper une chambre de l’hôtel. J’étais assise, tranquille, attendant que ma camarade finît pour que nous vaquions à nos
occupations. Soudain, un homme, dont les traits étaient semblables à ceux d’Abdel, surgit à mes côtés. Il me salua, engagea la conversation et me fit la cour. Il voulait passer la nuit avec moi. J’appelai immédiatement Emma qui me dit : « Mariam, tu feras mieux d’accepter ses avances, cet homme est autant riche qu'Abdel. Vous passerez seulement une nuit et tu pourrais devenir millionnaire. »
 Emportée par la cupidité, je m’étais laissée entraîner dans une vaste chambre où se trouvait un grand lit couvert de draps blancs, un lit sur lequel l’homme me poussa brusquement, après avoir condamné la porte de la chambre. Ah ! je n’aurais pas dû accepter de passer une nuit avec lui. À peine étais-je entrée dans la chambre que la figure de l’homme, auparavant souriante et éclatante, devint sombre et agressif. Du sac en bandoulière qu’il portait, il sortit un poignard, il m’intima l’ordre de m’allonger sur le lit. J’obtempérai. Il me menotta et lia mes pieds avec une chaîne rugueuse. Je me défendis en me bousculant, en criant ; mais l’homme, de tout son poids, m’immobilisa et m’affaiblit. Il s’assit sur ma poitrine, appuya ses mains contre mes avant-bras. Alors, la plus grande atrocité du siècle se produisit : l’homme retira son pantalon et me déféqua dessus, en plein visage.
 **  *  Après avoir subi la plus violente, la plus ignoble, la plus douloureuse des humiliations, je m’étais rendue seule à Abidjan. J’avais regagné ma chambre d’étudiante aussitôt. J’y pleurais à longueur de journée ; je me lamentais, je maudissais Emma, qui m’appelait sans que je ne décroche, ainsi que le monde d’avoir occasionné ma rencontre avec un homme qui m’avait enlevé toute ma dignité, qui m’avait salie d’une tâche dégoûtante et indélébile. Un matin, on toqua à ma porte. Je refusai de l’ouvrir. Les coups se prolongèrent, pendant un quart d’heure. Je cédai et j’ouvris légèrement la porte. Emma était là, la posture chargée de remords. — Cela fait une semaine que je t’appelle en vain, me dit-elle. Je sais que c’est difficile, je sais que tu n’arrives pas à supporter ce qui est arrivé. Abdel, que je t’ai présenté comme un ami, ne l’est pas en réalité. J’ai menti et agi à cause de l’argent. Il m’a également fait subir ce que tu as subi. Je voudrais simplement te dire qu’il faut qu’on oublie notre passé, qu’on tourne la page. Le passé est ce qu’il est et nos pleurs ne peuvent le changer. Il faut que nous
cessions de regretter ce que nous avions vécu. Continuons notre existence comme si nous sommes nées aujourd’hui…  Ces paroles d’Emma m’émurent. Elles nettoyèrent de mon cœur la boue du dégoût et de la tristesse. Nous tombâmes dans les bras l’une de l’autre. Le même jour, je franchis la porte de ma chambre.  Quelques jours plus tard, Emma et moi avions adhéré à une association de lutte contre la migration des jeunes à la recherche d’un bien-être malheureux. Nous avions sensibilisé, dans toutes les régions de Côte d’Ivoire, les jeunes quant aux dangers de la migration dans les localités comme Dubaï. Nous avions fait part de nos expériences. Nos séances de sensibilisation furent publiées sur les réseaux sociaux. Nous avions été écoutées et comprises. Peu après, Isaac, mon amoureux, me contacta et me dit : « J’avais décidé de rompre notre liaison lorsque j’ai appris ce qui t’est arrivé. Mais, maintenant, je suis content de la manière dont tu l’assumes et l’endures. »  J’avais oublié mon passé et cet oubli me rapprochait de ceux qui avaient décidé de s’éloigner de moi. Oh ! si j’étais restée cloîtrer dans ma chambre, je n’aurais jamais eu la chance de pouvoir continuer ma vie avec Isaac, l’homme qui m’aimait autant que je l’aimais. Nous nous voyions régulièrement, Isaac et moi. La flamme de notre amour s’était augmentée. Isaac demanda ma main et notre mariage fut célébré à la mairie de Cocody. Quelques mois plus tard, j’étais enceinte de jumeaux.
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