Essai sur le fondement métaphysique de la morale - Thèse présentée à la Faculté des lettres de Paris
144 pages
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Essai sur le fondement métaphysique de la morale - Thèse présentée à la Faculté des lettres de Paris , livre ebook

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Description

Toute doctrine, même utilitaire, admet que se résigner et se sacrifier, au moins partiellement, est la seule solution pratique de la question de la vie. Mais est-ce là simplement un moyen pratique comme un autre, utile pour rendre la vie supportable, ou n’est-ce pas plutôt le moyen nécessaire, l’« unica res, » le salut, la vie ? C’est la vie, et il y a dans le détachement de soi-même et en un sens du monde, quelque chose de si essentiel que nous trouvons quelque grandeur, même dans le froid courage de celui qui souffre ou meurt sans espoir, en se disant : mes cris n’y changeront rien.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346059997
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
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Frédéric Rauh
Essai sur le fondement métaphysique de la morale
Thèse présentée à la Faculté des lettres de Paris
A
 
Monsieur Emile BOUTROUX
PROFESSEUR A LA FACULTÉ DES LETTRES DE PARIS
 
 
HOMMAGE DE RECONNAISSANCE ET DE RESPECT
AVANT-PROPOS
Il nous semble que dans l’ordre des questions métaphysiques, l’effort même pour repenser la doctrine des grands philosophes peut intéresser à défaut d’invention. Il est des études d’une importance à la fois si réelle et si peu visible qu’il est bon de savoir si le sens et la tradition ne s’en perdent pas. Si ce travail et la peine qu’il a coûtée lui paraissent inutiles, le lecteur peut se dire, pour tempérer ses regrets, que le but de l’auteur a été surtout de témoigner, par son exemple, que l’admiration des hautes pensées métaphysiques n’a pas encore disparu de la jeunesse philosophique d’aujourd’hui : ce qu’il n’est peut-être pas sans intérêt de savoir.
INTRODUCTION
Notre objet essentiel est d’essayer de faire disparaître l’opposition établie par Kant entre l’ordre de la connaissance et celui de la moralité. Nous voudrions montrer que les idées de devoir et de liberté réalisent précisément les conditions que la raison spéculative elle-même exige de la vérité qui doit fonder toutes les autres. De plus, nous essaierons de dépasser par cette conciliation le rationalisme pratique de Kant, et de justifier non pas seulement l’idée, mais le sentiment de la liberté et du devoir, ou mieux, l’état d’âme, qui nous fait capables de dévouement actif et de résignation, la communion des hommes, humbles et penseurs, dans le sacrifice et la résignation nécessaires.
Mais nous ne nous élevons pas tout d’un coup à cette doctrine, et voici par quels degrés, allant du dehors au dedans des choses, nous espérons y aboutir.
 
Justifier la moralité, c’est justifier l’honnête homme, — celui qui se résigne et celui qui se sacrifie, — si incapable qu’il soit de rendre compte de sa croyance. C’est établir la supériorité du sentiment, de l’acte moral, de la pensée pratique, vivante et réalisée, sur la pensée spéculative et contemplative.
Par suite, il est évident d’abord que des philosophes ne reconnaissant que le fait, le donné, quand ils prolongeraient et multiplieraient ce fait dans l’infini de l’espace et du temps, ne peuvent nous fournir la justification que nous cherchons. L’idée même d’une hiérarchie des choses leur est étrangère ; et c’est la place du sentiment, de la vie, dans la hiérarchie des existences, que nous voulons savoir (1) .
 
Mais la justification du sentiment, de l’acte moral ne peut être que le dernier effort de la pensée. Logiquement nous traversons, — pour nous élever à cette justification, — une doctrine qui semble rendre impossible la moralité, ou du moins la moralité proprement dite.
Une hiérarchie ne peut, en effet, être établie que du point de vue d’une doctrine qui distingue le fait et le droit, ce qui est et ce qui doit être et qui établisse que le droit est le véritable fait d’où le fait tire son apparence d’existence. Or comment établir cet ordre éternel idéal, sinon par une déduction nécessaire à partir d’un absolu dont l’existence soit type d’existence, et connu d’une connaissance qui soit type de certitude ? Ce qui doit être ne peut qu’être objet de démonstration, et la démonstration ne se complète et ne s’achève que par l’absolue nécessité du premier Principe.
Mais dès lors, le philosophe supprime en assimilant Dieu à une définition géométrique, qui se développe, et la liberté et la certitude morale qui veut être libre elle-même ou participer d’une autre lumière.
De plus, et par suite, dans une telle philosophie, c’est l’ordre des choses qui intéresse le penseur plus que l’obéissance de l’homme à cet ordre : que tel homme connaisse cet ordre et tel autre non, c’est là un accident perdu parmi les effets qui vont à l’infini de l’universelle nécessité.
Enfin, celui qui peut être dit vraiment moral d’après une telle doctrine, c’est le penseur, le sage, seul capable de comprendre cette déduction et de jouir de l’ordre éternel. C’est une philosophie païenne, aristocratique, impuissante à justifier la « lumière du sentiment » ou ne lui donnant pas sa vraie valeur.
 
Une philosophie finaliste, tout en substituant l’harmonie à la nécessité comme loi de l’univers, et pouvant s’élever même jusqu’à placer dans la hiérarchie des choses le désir, l’amour, la volonté libre au-dessus de l’intelligence, ne peut encore que justifier le désir, la liberté universelle, non mon désir, ma liberté. Je suis encore partie d’un Esprit qui m’enveloppe et quoique j’en puisse être dit « partie totale, » la valeur incommensurable de mon effort n’est pas mise en lumière encore : c’est toujours un ordre éternel et donné qu’une telle philosophie établit. Mais ma lutte contre les choses, mon effort vers le mieux, voilà ce qu’elle ne justifie pas. Ou du moins, je suis le reflet d’une lumière éternelle, et ne vaux que par elle. Mais je veux être lumière moi-même, et il ne me suffit pas que la vérité me choisisse ; je veux être certain que je choisis la vérité.
 
Il faut donc une fois encore déplacer l’axe de la certitude, et montrer que l’absolu ne peut être une res aeterna analogue à la définition géométrique donnée, ou même à l’amour universel irréfléchi ou conscient ; que par la nature même de la certitude que nous en pouvons avoir, nous ne connaissons pas un absolu qui serait une notion ou un désir se développant spontanément, dans et par les choses. Mais ce que nous connaissons plus que tout le reste, et en vertu même des conditions de la certitude première, c’est moi en tant que sujet raisonnable, non la Raison universelle mais ma Raison. Et le rapport de ma Raison aux choses n’est pas naturel ; c’est un rapport que nous connaissons pratiquement en vertu d’un acte. Je ne vois pas les choses dériver d’une res aeterna, d’une cause intelligible qui serait l’âme, mais j’agis comme si je le voyais. Eu cherchant à déduire les choses d’une notion intelligible, j’aboutis donc à un tout autre type de certitude ; et considérant cette Raison absorbée ou qui risquait de s’absorber, selon les anciens philosophes, dans les notions même qu’elle découvrait, je constate qu’elle ne me présente qu’elle-même, contrainte par elle-même « durch sich selbst gezwungen » ou renonçant à elle-même par le péché : conception insensée au point de vue des sciences de la nature, mais qui est le « fait même de la Raison pure » et que l’on ne peut dépasser qu’au prix de contradictions, ou plutôt, par la ruine même de la notion de l’esprit. Tel est le sens de la doctrine de Kant. Kant a vraiment sauvé l’individualité morale et définitivement établi l’impossibilité pour le métaphysicien de prendre pour point de départ de son système une notion.
Mais faut-il, comme Kant l’a fait par peur, semble-t-il, de la chose éternelle, de la notion géométrique prise comme type d’existence, laisser la pensée comme désarmée en présence des choses, renoncer à construire le système du monde, parce que cette entreprise semble devoir nous ramener à la certitude géométrique ? Et ainsi ne sachant rien de l’absolu, de la réalité fondamentale, rien du rap

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