Les Peurs urbaines et l autre sexe
243 pages
Français

Les Peurs urbaines et l'autre sexe , livre ebook

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243 pages
Français

Description

Garçons cogneurs et violeurs, filles démunies et outragées sont les deux versants d'un même stéréotype urbain véhiculé par les media. Pourtant, l'observation de la réalité quotidienne dément cette analyse. Les garçons sont régulièrement accusés de manquer de virilité et sont les victimes de sévices corporels tandis que le filles ont appris à se battre et prennent l'initiative d'agression. Dans ce cadre, continuer de propager les éternels et mêmes stéréotypes reviennent à légitimer symboliquement la soumission de la féminité à la masculinité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2003
Nombre de lectures 187
EAN13 9782296337046
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les peurs urbaines et l'autre sexeCollection Logiques Sociales
fondée par Dominique Desjeux
et dirigée par Bruno Péquignot
En réunissant des chercheurs, des praticiens et des essayistes, même si
la dominante reste universitaire, la collection Logiques Sociales entend
favoriser les liens entre la recherche non finalisée et l'action sociale.
En laissant toute liberté théorique aux auteurs, elle cherche à
promouvoir les recherches qui partent d'un terrain, d'une enquête ou d'une
expérience qui augmentent la connaissance empirique des phénomènes
sociaux ou qui proposent une innovation méthodologique ou théorique,
voire une réévaluation de méthodes ou de systèmes conceptuels
classiques.
Dernières parutions
Philippe GABORIAU, Les spectacles sportifs, 2003.
Sous la direction de Daniel TERROLLE et Patrick GABORIAU,
Ethnologis des sans logis, 2003
Christian PAPILLOUD, La réciprocité, diagnostic et destins d'un
possible dans l'ouevre de Georg Simmel, 2003.
Claude GIRAUD, Logiques sociales de l'indifférence et de l'envie, 2003.
Odile MERCKLING, Emploi, migration et genre, 2003.
Dominique JACQUES-JOUVENOT (sous la direction de), Comment
peut-on être socio-anthroplogue ? Autour de Pierre Tripier, 2003.
Katia SORIN, Femmes en armes, une place introuvable ?, 2003.
Antigone MOUCHTOURIS, Lesjeunes de la nuit, 2003.
Pantaleo RIZZO, L'économie sociale et solidaire face aux
expérimentations monétaires. Social et Multilatéral, 2003.
Marco CIUGNI et Mark HUNYADI (Sous la direction de), Sphères
d'exclusion,2003.Jacqueline COUTRAS
Les peurs urbaines et l'autre sexe
L'Harmattan L'Harmattan Hongrie L'Harmattan ltalia
Hargita u. 3 Via Bav~ 375-7
~ rue de I
~ÉcolePolytechnique 1026 Budapest 10214 Torino
HONGRIE ITALIE75005 Paris
FRANCEcgL'Harmattan, 2003
ISBN: 2-7475-5237-3SOMMAIRE
IlAvant-propos
15Introduction
Entre menace et invisibilité
Fragilisation des identités spatiales masculines
Les «jeunes des cités» : l'un et l'une
PARTIE I
UNE CONSTRUCTION ASEXUEE
Chapitre 1. Histoire d'une naturalisation:
31images et métaphores
Une insécurité partout inéluctable
La naturalisation par les politiques publiques
Pour que s'évanouissent les exclus qui font peur
Chapitre 2. Violence masculine,
57victimisation féminine
Les objets de recherche et leurs présupposés
Les explications. Consolidation du champ au neutre
Les femmes se dérobent à leur devoir spatialPARTIE II
LES SEGREGATIONS SEXUEES
Chapitre 3. Un espace public pas si public 85
A risques incertains, espaces suspects
Le différentiel d'insécurité sexuée
A l'ombre de « la propriété des frères»
Violences, esthétisation et diversité sociale
Chapitre 4. Nous et elles.
Les ségrégations en héritage 107
Peurs sociales clamées, peurs du « sexe» masquées
Les femmes dans l'espace normatif des hommes
L'entre-deux et ses figures du « sexe»
L'espace dans la sphère publique
Du flâneur au galérien
Chapitre 5. Mondialisation et régénération
des espaces sexués 135
Le ripolinage moderniste
La recombinaison des espaces-temps
Le globcal et les espaces sexués
8PARTIE III
« LES JEUNES DES CITES»
Redéploiement des espaces sexués 159
Chapitre 6. Crâne ou guignol,
163objet sexuel ou embrouilleuse
Le territoire au secours de la virilité
Violences de sexe et toute-puissance
La caïd, l'objet sexuel, l'embrouilleuse
Chapitre 7. L'ailleurs entre local et global 195
Dans la métropole fragmentée
Les réseaux: nouveaux atours de virilité
Conclusion. Espaces sexués et insécurité:
un bel avenir 219
Bibliographie 227
9AVANT PROPOS
« J'étais en train de me faire 'braquer' à la station
BarbèsRochechouart. Lorsque... j'ai finalement compris que
vraisemblablement mon agresseur n'avait pas le couteau avec
lequel il était censé me 'planter', j'ai élevé la voix et me suis
débattue, attendant une aide... ç'est une jeune femme arrivant
à contre-sens qui s'est dirigée sur lui sans hésitation, a planté
son regard dans le sien et lui a ordonné d'une voix fenne de
me rendre ce qui m'appartenait. Enhardie par son audace, j'ai
fait les poches de mon agresseur (complètement décontenancé
par nos réactions !) » raconte ValérieI.
Au début des années 1980, une de nos enquêtées, elle aussi
jeune parisienne: «Depuis que je travaille dans le quartier
des grands magasins, la pause de midi est stressante et
distrayante. Quand il fait beau, je mange un sandwich dans le
square; j'y vois des enfants comme les miens, et puis
d'autres gens. Des fois, je finis mon temps de repos dans un
café à côté. Il y a un coin tranquille, je m'assieds, je lis, j'écris
une carte ou une lettre en retard... Tout ce mouvement, c'est
vivant »2.
1 Télérama, le 6 novembre 2002, p. 7. Le récit est volontaire, il figure à
la rubrique « Courrier des lecteurs».
2 Coutras, J. 1987.20 ans ont été nécessaires pour que le premier récit s'énonce
publiquement. Pour que l'une clame sa fierté quand, agressée,
elle impose sa présence dans des lieux appartenant à tous par
principe, et au besoin s'y fasse justice. Pour que l'autre sexe,
agresseur, soit troublé, désemparé, voire traumatisé quand le
féminin défend son territoire au lieu de s'abstraire du
« mouvement », de glisser dans des écarts et de se fondre
dans le décor.
Les deux scènes sont distantes d'une génération. Leur
rapprochement suggère que la conquête des unes a signé la
défaite des uns. Laisse-t-il entrevoir un équilibrage des
capacités corporelles du masculin et du féminin dans l'espace
public? En tout état de cause, l'interchangeabilité du rôle
d'attaquant devrait créer des situations de respect mutuel et
donc de moindre insécurité puisque chacun, chacune est
désormais apte à exprimer la même assurance et la même
menace physique.
« Ce n'est pas seulement le niveau de délinquance qui façonne
l'insécurité, mais également celui des espérances »3. Les
gains, petits ou grands, que les femmes ont acquis ces
dernières années, ont peut-être augmenté leur sécurité
objective. Ils ont aussi élargi l'horizon de leurs désirs, de leurs
exigences; ils ont abaissé le seuil des privations et des risques
tolérables. Les peurs éprouvées par le masculin ne se sont pas
forcément estompées dans les mêmes proportions. Les attentes
déçues sont devenues spoliation pour ceux des hommes qui se
sentent dépossédés de leur privilège de dire la chose publique
et ne trouvent pas de compensation ailleurs, dans le travail par
exemple. Les désillusions et insatisfactions que les uns et les
unes lisent dans l'espace public disent les espoirs que chacun
y met pour trouver des révélations de soi-même dans les yeux,
les gestes, les paroles de l'autre. Elles sont crainte d'insuccès.
3 Roché, S. 1998, p. 259.
12Chiffres et émotions s'entremêlent. Les statistiques parlent.
Les corps le font également. Les premières quantifient les
violences expressives les plus graves. Les seconds laissent
affleurer les blessures qui les forment et les déforment en
public, et aussi dans le secret des logements et des relations de
couple. Dans le pragmatisme des situations, les affrontements
plus ou moins directs et durs selon les catégories sociales, les
âges, les histoires personnelles manifestent la recherche d'un
nouvel équilibre des espaces sexués. Les femmes apprennent à
maintenir les corps des autres à la distance qu'elles décident et
à se débarrasser de I'habit de victimes qui leur a collé à la
peau. Les hommes doivent renoncer à leur supériorité
physique et morale naturelle qui leur faisait droit et obligation
d'être des protecteurs.
Pourquoi une adolescente d'une de ces « cités» tant décriées
par les médias et les politiques dit qu'elle « meurt» si elle ne
« sort» pas et prépare pendant des heures, si ce n'est des
jours, sa « sortie» sur les Champs-Elysées? Le regard de
l'inconnu croisé par hasard provoque peut-être hostilité ou
malaise; il donne aussi à

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