Cléopâtre, usages et mésusages de son image
112 pages
Français

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Description

Ah que ne l’eut-elle eu plus long, plus court, plus mignon ! La face du monde en eût été changée, disait Blaise Pascal. En vérité, ce qui a changé, ce n’est pas la face du monde mais son visage à elle, Cléopâtre. Femme et étrangère, longtemps évoquée à travers le seul prisme de ses vainqueurs, elle est le prototype du personnage dont l’image a toujours été altérée par les préjugés : une disgrâce pour elle et une jubilation pour l’historien d’art. Ce livre entend mettre en perspective les mille images de celle qui fut au propre la dernière reine d’Égypte et que sa postérité n’a cessé de faire grandir, ce qui a souvent rimé avec salir. Toujours — et de plus en plus — fortement sexuée, mais égyptianisée (voire africanisée), solitaire et dominatrice, l’image de Cléopâtre qui triomphe aujourd’hui dans l’imaginaire collectif s’est encore écartée de la réalité historique en même temps qu’elle paraît terriblement révélatrice de la société actuelle.

Archéologue et historien de l’art, spécialiste de l’histoire hellénistique, François de Callataÿ est chef de département à la Bibliothèque royale de Belgique, professeur à l’Université libre de Bruxelles et directeur d’études à l’École pratique des hautes études (Paris). Membre de l’Académie royale de Belgique (Classe des Lettres et des Sciences morales et politiques) et de l’Institut de France (membre correspondant étranger de l’Académie des inscriptions et belles-lettres), il est le lauréat du Prix Francqui 2007.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 12
EAN13 9782803104932
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0030€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

CLÉOPÂTRE USAGES ET MÉSUSAGES DE SON IMAGE
François de Callataÿ
Cléopâtre, usages et mésusages de son image
Académie royale de Belgique
rue Ducale, 1 - 1000 Bruxelles, Belgique
www.academieroyale.be
Informations concernant la version numérique
ISBN : 978-2-8031-0493-2

© 2015, Académie royale de Belgique
Collection L’Académie en poche
Sous la responsabilité académique de Véronique Dehant
Volume 56
Diffusion
Académie royale de Belgique
www.academie-editions.be
Crédits
Conception et réalisation : Laurent Hansen, Académie royale de Belgique
Illustration de couverture : Cléopâtre , c 1875, Hans Makart (Stuttgart. Staatsgalerie. inv. 785)
Publié en collaboration avec
Bebooks - Editions numériques
Quai Bonaparte, 1 (boîte 11) - 4020 Liège (Belgique)
info@bebooks.be
www.bebooks.be

Informations concernant la version numérique
ISBN 978-2-87569-189-7
 
A propos
Bebooks est une maison d’édition contemporaine, intégrant l’ensemble des supports et canaux dans ses projets éditoriaux. Exclusivement numérique, elle propose des ouvrages pour la plupart des liseuses, ainsi que des versions imprimées à la demande.
« Qui voudra connaître à plein la vanité de l’homme n’a qu’à considérer les causes et les effets de l’amour. La cause en est un je ne sais quoi. Corneille. Et les effets en sont effroyables. Ce je ne sais quoi, si peu de chose qu’on ne peut le reconnaître, remue toute la terre, les princes, les armées, le monde entier. Le nez de Cléopâtre s’il eût été plus court toute la face de la terre aurait changé ». (Blaise Pascal, Pensées , 1669, n º 162)
Ah que ne l’eut-elle eu plus court, plus long, plus mignon ! La face du monde en eût été changée, disait Blaise Pascal en ses posthumes Pensées . Les historiens pensent que non, mais ceux-là sont d’éternels ronchons. En vérité, ce qui a changé, ce n’est pas la face du monde mais son visage à elle, Cléopâtre, toujours recomposé, toujours travesti en fonction de qui l’a peint, de qui s’en est emparé pour des combats tantôt solitaires tantôt collectifs, ou par pure fantaisie tant il est vrai que nulle autre icône n’aura autant captivé l’imaginaire d’un si grand nombre et cela à toutes les époques.
Or si le mythe Cléopâtre est aujourd’hui à son plus haut, porté notamment par le succès planétaire du film éponyme de 1963, il est aussi totalement dévoyé de ce que fut le personnage historique, et absolument ignorant de la riche tradition artistique qui l’a construit.
C’est à faire revivre les différents moments de cette grande aventure iconographique que ce petit livre est consacré. Il entend offrir un kaléidoscope des mille images de celle qui fut au propre la dernière reine d’Égypte et que sa postérité n’a cessé de faire grandir, ce qui a souvent rimé avec salir.
Inversement, cet opuscule laisse aux spécialistes le soin de débattre qui fut la Cléopâtre historique, dont les contours n’émergent toujours pas nettement en dépit d’une kyrielle de travaux récents. S’en tenant aux images figurées, il n’évoque qu’en passant les mutations littéraires de celle à qui de nombreux dramaturges, librettistes et romanciers ont consacré des œuvres portant son nom. Il n’entend pas non plus d’abord rendre justice à Cléopâtre, la femme de tous les préjudices.
Il ambitionne plutôt de créer chez son lecteur un mouvement réflexif en lui faisant se demander quel genre d’image il s’est composé pour lui-même, et de lui faire par là mieux prendre conscience de la force de certains biais. Et, très au-delà de Cléopâtre, sourd aussi la lourde marche lors de ces dernières décennies d’une société toujours plus individualiste et sexuée.
chapitre I
Cléopâtre, reine d’Égypte : un entonnoir à préjugés
X énophobie et phallocratie : la fortune critique de Cléopâtre a très longtemps — c’est-à-dire jusqu’à ce que l’archéologie et l’épigraphie ne s’en mêlent — reposé presqu’exclusivement sur ce qu’en on dit ses pires ennemis, les Romains. Deux œuvres littéraires dominent de leur haute stature la réception de son personnage : la Vie d’Antoine de Plutarque et l’ Antoine et Cléopâtre de Shakespeare (1607).
Plutarque de Chéronée (46-125 apr. J.-C.) écrit ses Vies parallèles sous le règne de Trajan, dans la première décennie du ii e  siècle, sur la foi d’une documentation avant tout romaine. Platonicien, opposé tant aux épicuriens qu’aux stoïciens, il n’a aucune raison d’éprouver de la sympathie pour cette Cléopâtre, qui dérègle la vertu de son héros Antoine. Le portrait qu’il en dresse porte la trace de la propagande augustéenne et des deux préjudices irrémédiables que celle-ci s’emploie à stigmatiser : elle est femme et elle est étrangère. Double péril aggravé du fait qu’en ayant mis au monde le fils de César, elle détenait en outre une forme de légitimité. La traduction en français des Vies parallèles par Jacques Amyot en 1559 fut un succès éclatant et répandit Plutarque partout. Sa traduction en anglais par Thomas North en 1579 influencera Shakespeare dont l’ Antoine et Cléopâtre (1623) est directement inspiré.
Autour de ces deux phares diffusant largement une même image cléopatrienne, on trouve — en amont et en aval —, une kyrielle d’auteurs. Les poètes romains de la première heure (ou de la seconde) ne la citent que par périphrase dégradante : « épouse néfaste » chez Virgile ( Énéide , viii , 688 : « nefas … coniunx »), « démente » chez Horace ( Odes , ...

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