La révolution impossible
250 pages
Français

La révolution impossible , livre ebook

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250 pages
Français

Description

Fin des années 40 : deux blocs se partagent le monde, mais une bande de jeunes refuse ce choix : être du bord des bureaucrates à l'Est ou des capitalistes à l'Ouest. L'ouvrage raconte l'histoire de ces iconoclastes et de leur organisation, dont l'auteur fit partie, Socialisme ou Barbarie. C'est aussi l'histoire de l'auteur, déchiré entre la fidélité à ses camarades et l'attraction des nouveaux courants culturels, comme le jazz, l'alpinisme, la littérature américaine, ou encore le nouveau cinéma.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2013
Nombre de lectures 4
EAN13 9782296530133
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Questions contemporaines
Sébastien de Diesbach Questions contemporaines
Sébastien de Diesbach
LA RÉVOLUTION IMPOSSIBLE
Questions contemporaines
Mes années avec Socialisme ou Barbarie
LA RÉVOLUTIONIMPOSSIBLE
Questions contemporaines Collection dirigée par B. Péquignot, D. Rolland et Jean-Paul Chagnollaud Chômage, exclusion, globalisation… Jamais les « questions contemporaines » n’ont été aussi nombreuses et aussi complexes à appréhender. Le pari de la collection « Questions contemporaines » est d’offrir un espace de réflexion et de débat à tous ceux, chercheurs, militants ou praticiens, qui osent penser autrement, exprimer des idées neuves et ouvrir de nouvelles pistes à la réflexion collective. Dernières parutions Jacob ETIENNE,Protection rapprochée et sécurité entreprise. Des nouvelles normes à l’international, 2013. Jacques ARNOL-STEPHAN,Entreprendre dans un monde en mutation, 2013. Françoise HAY, Christian MILELLI, Yunnan SHI, avec la collaboration de Joëlle LE GOFF,Faut-il encore investir en Chine ? Opportunités, risques et logiques économiques, 2013. Andreea ZAMFIRA,Une sociologie électorale des communautés pluriethniques, 2012. Eric LAFOND et Vincent BELEY,Emploi, ne pas renoncer, 2012. Geneviève GUILPAIN,Les célibataires, des femmes singulières. e e Le célibat féminin en France (XVII -XXI siècle),2012. François DI SALVO,La Grèce à l’heure du décrochage européen, 2012. Grégory CARTEAUX,Eva Joly et les affaires financières. Analyse du discours télévisuel, 2012. Alain CHEVARIN,Fascinant/Fascisant. Une esthétique d’extrême droite, 2013. Marcelo BIDINOST,La ville comme paysage du sentiment, Le e e sentiment urbain à Buenos Aires aux XIX et XX siècles, 2012. Gérard SAINSAULIEU,Les trottoirs de la liberté. Les rues, espace de la République, 2012. Jean-Christophe TORRES,Les enseignants. Quelle reconnaissance pour un métier en crise ?,2012.
Sébastien de Diesbach
LA RÉVOLUTIONIMPOSSIBLE
Mes années avecSocialisme et Barbarie
© L’Harmattan, 2013 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-00071-8 EAN : 9782343000718
« Crois-tu que cendre devenus ou mânes ensevelis nous y pensions encore ? » Virgile, l’Énéide
CHAPITRE 1 : THÈMES DE CE LIVRE
Les deux passions : la nouvelle, « Changer la vie », l’ancienne, « Changer la société » - Socialisme ou Barbarie : les hommes doivent gouverner leur sort sans intermédiaires - Horreur de la hiérarchie - Dénonciation de la bureaucratie, nouvelle classe sociale - Contre le capitalisme à l’Ouest et la bureaucratie à l’Est - Dirigeants et exécutants - Tendance des ouvriers à diriger leur travail - Les ouvriers en passe de prendre le pouvoir - Éclaireurs de la nouvelle passion : les G.I. - Leurs méthodes de combat - La révolution des mœurs - Espoir d’une synthèse des deux passions - Conflit du Moi et du Nous dans La Chartreuse de Parme - Le triomphe du Moi et la fin de SouB. * * * “La révolution impossible” est l’histoire d’un groupe politique, Socialisme ou Barbarie (SouB), auquel j’ai appartenu, comme modeste et jeune militant. La période dans laquelle se situe mon récit s’étend de la fin des années quarante jusqu’au milieu des années soixante. Mon livre est la description de deux passions, l’une nouvelle, qui arrivait, l’autre ancienne, qui était sur le départ. La passion qui arrivait, comme portée par un de ces fronts dont parlent les météorologistes, installa un nouveau régime, celui de l’indépendance individuelle, du « je fais à ma manière », de la réalisation de soi. Elle chassa devant elle les vieilles passions des temps révolus, et prétendit changer la vie. La passion sur le départ fut celle que partageait SouB. Elle nous empoignait tout aussi souverainement que celle qui pousse cet homme que je vois
La révolution impossible
aujourd’hui sous ma fenêtre, un demi-siècle plus tard, courir le long de la route, le front perlé de sueur. « Pourquoi ne pas emprunter le chemin qui surplombe la route, ai-je demandé à ce passionné d’héroïsme intime, la vue est plus belle et vous seriez seul. - Sur la route, je contrôle mieux mon allure, dit le joggeur, et donc mon temps. » Son souci, le temps sur sa montre. Le nôtre, le temps sur le cadran de l’Histoire, un temps que nous allions modifier de fond en comble, faisant pour cela table rase. Le but de ce définitif remue-ménage : restituer aux gens le gouvernement de leurs vies (nous évitions la langue de bois, et préférions « gens » au pompeux : prolétariat) ; permettre donc à l’humanité de réaliser sa nature et d’accéder au véritable « bien vivre ». Nous ne pensions pas que ceci passât par le système des élections : confier son sort à des représentants, puis se détourner de ce qu’ils faisaient pendant quatre, cinq ou sept ans, nous semblait absurde, irresponsable, enfantin. La Russie et son empire nous paraissaient, eux aussi, aux antipodes de cette responsabilité des hommes à l’égard de leur vie collective qui était, selon nous, le but suprême de la politique. Être un homme, c’était s’occuper des affaires de la Cité, et ceci personnellement, directement, sans intermédiaires : voilà ce à quoi nous croyions passionnément. La subordination nous faisait horreur : or celle-ci naissait chaque jour dans ces institutions qui formaient le cœur de la société moderne : les usines, bureaux et autres lieux de travail. Nos ennemis : les patrons, les bureaucrates, les chefs de tous bords. Qu’un groupe marxiste, révolutionnaire, fustige les capitalistes et la hiérarchie qui les servait n’avait rien de nouveau : y ajouter la bureaucratie l’était. Rares étaient ceux qui, durant les années d’existence de SouB, identifiaient, dans la bureaucratie, l’apparition d’une classe nouvelle, exerçant un mode original de direction de la société fondée sur la manipulation des populations, la mystification idéologique et l’exercice de la terreur. En France, Élie Halévy, dans sonÈre des tyranniesavait analysé (1938) l’apparition de la bureaucratie lors de la Première Guerre mondiale. Aux États-Unis : James Burnham (ancien dirigeant trotskiste) avait décrit, dansThe managerial revolution (1941), l’apparition d’un nouveau type de dirigeants, les managers, qui
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Thèmes de ce livre
exerçaient le pouvoir aux dépens des capitalistes. Et en Angleterre, Orwell dans1984en1948) avait donné aux thèses de (paru Burnham une traduction romancée, dramatique, extraordinairement pessimiste. À ces voix solitaires (que nous ignorions ou ne voulions pas connaître), SouB joignit la sienne : personne ne nous accompagna, ni à gauche ni à droite. Au moment où la bureaucratie s’étendait en Europe de l’Ouest, se chargeant du bien-être de tous (santé, retraite, emploi, éducation, transport, énergie, information, loisirs), il était mal venu de critiquer une catégorie sociale qui, à l’Est, faisait la même besogne, et interdit de révéler que, sous la bannière du « bonheur », se cachaient, chez les Soviets, pénurie, famine, camps de concentration et esclavage industriel. La révolution pour laquelle nous militions avait pour objet de renverser non seulement le système capitaliste occidental, mais aussi l’ordre similaire qui régnait dans le bloc communiste (« soi-disant communiste » disions-nous, puisque nous étions, nous, les vrais communistes). Peu importait qui possédait le capital, capitalistes individuels ou classe bureaucratique : dans les deux univers, on trouvait des dirigeants et des exécutants, qu’un même conflit opposait. Position risquée, celle-ci, qui nous faisait des ennemis à gauche comme à droite. Irréaliste ? Cela ne nous semblait pas être le cas. L’idée que « le monde puisse continuer ainsi » nous paraissait bien plus irréaliste. Aucun régime, pensions-nous, ne pouvait subsister longtemps s’il niait la tendance des hommes à gérer eux-mêmes leurs affaires. On recueillit, dès la formation du groupe, le témoignage d’ouvriers, aux États-Unis et en France, qui exposaient comment eux-mêmes et leurs camarades s’organisaient spontanément, en dehors des syndicats, pour lutter contre hiérarchie, cadences et conditions de travail, mais aussi pour diriger eux-mêmes leur travail, en définir le rythme et les méthodes. Les sociologues américains, anglais, et français confirmèrent l’existence de ce fait. Encouragé par ces témoignages, SouB élabora la thèse selon laquelle, si la « lutte informelle » représentait la réalité de la journée de travail, il existait aussi, sous cette lutte négative, l’affirmation d’un « contrat social » entre producteurs. Au sein de
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