Prisonnier de Hissène Habré
208 pages
Français

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Prisonnier de Hissène Habré , livre ebook

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208 pages
Français

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Description

De son enfance dans un Tchad encore sous le drapeau français à son adolescence d'étudiant pieux et insoumis, de sa course effrénée entre les obus de la guerre civile à deux années d'emprisonnement dans les geôles d'Hissène Habré : l'auteur raconte sa vie de combattant des droits de l'Homme où son courage en faveur de la justice contraste avec la cruauté d'un régime sanguinaire qui a ôté la vie à des milliers d'innocents.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2012
Nombre de lectures 36
EAN13 9782296484931
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

PRISONNIER DE HISSENE HABRE
Souleymane Guengueng




PRISONNIER DE HISSENE HABRE

L’expérience d’un survivant des geôles tchadiennes et sa quête de justice





Préface de Ragas Nang-Yade

Introduction de Reed Brody

L’Harmattan
Nous savons qu'il reste dans ce livre des imperfections ;
nous prenons cependant l'option de le faire circuler, à petit tirage,
remerciant d'avance tous ceux qui nous aideront
à le perfectionner dans les tirages successifs.






















© L’Harmattan, 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-55851-9
EAN : 9782296558519
Préface
J’ai fais la connaissance de mon compatriote Souleymane Guengueng au moment où nous étions tous les deux des fonctionnaires de l’État tchadien en poste au Lycée Félix Éboué de Fort-Lamy/N’Djamena, moi en tant que censeur puis proviseur, lui en tant que secrétaire d’administration. Notre collaboration n’a duré que deux années scolaires, puis on s’est perdu de vue pendant une trentaine d’années durant lesquelles nous séjournions sur deux continents différents. Ce n’est que lorsqu’il a récemment pris résidence à New York que j’ai repris contact avec lui. C’est un insigne honneur qu’il me fait en me demandant de préfacer son livre. Le souvenir que je garde de lui est celui d’un travailleur assidu et un peu surmené, car il remplissait des tâches qui étaient confiées, avant son arrivée, à deux secrétaires (fonctionnaires français) ayant de l’expérience que la France retira de l’établissement lorsqu’il passa sous le contrôle d’un proviseur tchadien.
D’emblée je dois dire qu’après avoir pris lecture de son livre, j’ai été très choqué, en tant que tchadien, en tant qu’africain et en tant qu’être humain du mauvais traitement infligé à leurs semblables, qui de plus sont leurs compatriotes, par les sbires du régime Habré, lesquels de surcroit mettaient au devant leur religion pour se distinguer de leurs compatriotes. Bien sûr, si l’on tient compte de l’histoire du monde on aura tout vu en ce qui concerne l’inhumanité de l’homme envers l’homme, mais cela est plus choquant quand cela frappe tout près de vous.
Issu d’une famille de l’ethnie Kim du Mayo-Kebbi convertie au christianisme, version protestante pentecôtiste (Assemblées chrétiennes), Souleymane Guengueng est un croyant dont la foi en Dieu l’a soutenu durant les heures difficiles. Arrêté le 3 août 1988, interrogé par des agents de la Direction de la Documentation et de la Sécurité (DDS), il sera emprisonné sans forme de procès et traîné de prison en prison (quatre prisons différentes, et quelles prisons !) pendant près de deux ans et demi avant d’être libéré le 1er décembre 1990, suite au changement de régime résultant du coup d’État d’Idriss Déby.
Son crime ? Il était tout simplement suspecté d’avoir collaboré avec les opposants au régime d’Hissène Habré, dont le Gouvernement d’Union Nationale et de Transition (GUNT) dirigé par Goukouni Weddeye et les groupes rebelles sudistes appelés « Codos-cocotier » opérant dans la préfecture du Mayo-Kebbi, durant la période où il vivait comme réfugié dans le nord-Cameroun voisin.
Les conditions inhumaines de détention des personnes accusées de crime sous le régime d’Hissène Habré de 1982 à 1990 sont impensables en cette fin du XXème siècle dans une Afrique où on était en droit d’espérer qu’un tel traitement digne du colonialisme le plus raciste n’était plus qu’un mauvais souvenir : prisons insalubres, sans cour de récréation, cellules exiguës, surpeuplées, promiscuité totale, nourriture insuffisante et inadéquate, conditions sanitaires déplorables, absence totale de soins médicaux et d’exercices physiques, soumission au contrôle de gardes illettrés et sans humanité, et j’en passe… Et lorsque le régime décidait de relâcher certains prisonniers, ceux-ci subissaient une dernière humiliation, la cérémonie de prestation de serment obligatoire requise de tout prisonnier avant sa sortie de prison.
Monsieur Habré, ex-révolutionnaire, poursuivi par son passé depuis le Sénégal où il s’est réfugié et où il jouit tranquillement des deniers du trésor public tchadien dont il avait vidé les caisses avant de prendre la fuite, joue aujourd’hui aux dévots en fréquentant les marabouts de la confrérie soufie Tijaniyya (la branche de la famille Niasse), appelle à son secours les membres de l’ethnie Lébou du Sénégal chez lesquels il a pris femme [«Je suis un membre de la famille lébou et en tant que membre de la famille vous avez le droit de dire stop [à ceux qui me poursuivent] »], cultive une image de héro nationaliste africain noir persécuté par des revanchards blancs de France et de Libye, et rejette toute responsabilité concernant les crimes dont on l’accuse. Il n’arrive pas à croire que ce sont ses victimes et leurs parents qui ont pris l’initiative de demander justice en fondant l’Association des Victimes de Crimes et Répressions Politiques au Tchad (AVCRP), avant de trouver sur leur chemin des organisations de défense des droits humains qui ont bien voulu leur prêter secours, et préfère donner crédence à une cabale internationale contre lui : « Toute cette affaire, c’est la France et la Libye… les gens qui n’ont pas pu avoir le pétrole du Tchad, les gens avec qui j’ai eu énormément de problèmes, les Français et les Libyens, qui sont derrière… Ils ont demandé à Idriss Deby [l’actuel président du Tchad qui a chassé Hissène Habré du pouvoir en 1990], de faire ce rapport disant que j’ai tué 40 000 personnes. Comment pourrai-je faire une chose pareille dans mon pays ?... La France, la Belgique et la Libye ont décidé d’apporter de l’argent pour me juger… On veut régler des comptes… Tous ces Tchadiens qui crient sont des gens qui ont reçu de l’argent pour crier 1 ».
Hissène Habré bénéficie au Sénégal de ce qu’il a nié à ses compatriotes quand il était au pouvoir au Tchad : la démocratie et l’État de droit. La démocratie au Sénégal a permis le remplacement par voie électorale d’un président (non juriste) apparemment respectueux de la séparation des pouvoirs et de l’intégrité du judiciaire par un autre (et paradoxalement, un juriste) qui interfère avec le judiciaire. Maître Abdoulaye Wade est de fait l’avocat défenseur de Hissène Habré et il utilise tout un répertoire de manœuvres servant à faire gagner du temps à son protégé. Peut-être ne trouve-t-il pas crédible les accusations portées contre Hissène Habré. Afin de saisir la dimension du mal que Hissène Habré a fait à son pays, il faudrait non seulement tenir compte du nombre de victimes directes (40 000) et d’innombrables victimes indirectes, mais aussi du fait que parmi les victimes directes il y avait beaucoup de membres de la petite élite tchadienne appartenant à l’ethnie Sara du sud du Tchad dont l’élimination systématique avait été ordonnée par Hisséne Habré et exécutée sous la supervision de son chef Cendrillon des colonies françaises d’Afrique, le Tchad ne disposait que d’un embryon de système d’éducation moderne durant la période de décolonisation (le premier lycée du pays, le Lycée Félix Éboué, ne sera établi qu’en 1955 et ne commencera à produire des bacheliers qu’après l’indépendance), et c’est ainsi qu’en 1960, ce furent des instituteurs, des infirmiers, des commis qui prirent en charge les départements ministériels et des sous-officiers qui prirent en charge l’armée. À cause des erreurs de calcul des populations musulmanes du « nord » du Tchad, qui avaient objecté à l’enrôlement de leurs enfants dans les écoles laïques du gouvernement, accusées d’être des écoles chrétiennes, presque tous ces fonctionnaires et officiers provenaient des ethnies non musulmanes du sud-ouest du Tchad (dont notamment les ethnies Sara, Moundang, Massa et Toupouri) et du massif central du Guéra (pour la plupart membres des groupes ethniques d’origine hétéroclite dénommés collectivement « Hadjeraï »). La France finança par la suite un programme de construction de quelques collèges au cours des années 1960 qui permit de fournir rapidement un supplément de cadres plus qualifiés pour faire fonctionner la Fonction publique tchadienne. Une bonne partie de ceux-ci furent liquidés durant les massacres perpétrés avec une sauvagerie incroyable de 1982 à 1984 (et particulièrement

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