Sexe et politique
347 pages
Français
347 pages
Français

Description

Ce numéro interroge et confronte - bien au-delà du postulat bien institué que le sexe est politique - dans des configurations variées, de la France à la Chine, de l'Irak au Chili et au Mexique, de la Guyane à la Guadeloupe, de la Mongolie à l'Algérie, les constructions idéologiques qui ramènent la sexualité sur la scène du politique : ces constructions mobilisent le capital symbolique des sociétés mais le transforment sous l'effet des imaginaires qui visent à dépasser les situations socioéconomiques et politiques...

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Date de parution 15 février 2014
Nombre de lectures 14
EAN13 9782336338095
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

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Extrait

-190
L’homme
la société
4
L’homme et la société Revue internationale de recherches et de synthèses en sciences sociales
Sexe et politique
C OO R D O N N ÉPARClaude Didry et Monique Selim
C.N.L. et du C.N.R.S. Publié avec le concours du
10/02/14 15:08
L’homme et la société Revue internationale de recherches et de synthèses en sciences sociales
Sexe et politique
Coordonné par
Claude Didry et Monique Selim
Revue soutenue par l’Institut des Sciences Humaines et Sociales du CNRS et le CNL
L’Harmattan
L’homme et la société Revue internationale de recherches et de synthèses en sciences sociales
Fondateurs Serge JONASet Jean PRONTEAUDirecteursClaude DIDRYet Michel KAILComité scientifique Michel ADAM, Pierre ANSART, Elsa ASSIDON, Solange BARBEROUSSE, Denis BERGER, Alain BIHR, Monique CHEMILLIER-GENDREAU, Catherine COLLIOT-THÉLÈNE, Catherine COQUERY-VIDROVITCH, Christine DELPHY, René GALLISSOT, Michel GIRAUD, Gabriel GOSSELIN, Madeleine GRAWITZ, Colette GUILLAUMIN, Serge JONAS, Serge LATOUCHE, Jürgen LINK, Richard MARIENSTRAS, Sami NAÏR, Gérard RAULET, Robert SAYRE, Benjamin STORA, Nicolas TERTULIAN. Comité de rédaction François ATHANE, Marc BESSIN, Pierre BRAS, Francesca BRAY, Patrick CINGOLANI, Laurence COSTES, Christophe DAUM, Véronique DERUDDER, Claude DIDRY, Camille DUPUY, Jean-Pierre DURAND, Jean-Pierre GARNIER, Dominique GLAYMANN, Gaëtan FLOCCO, Bernard HOURS, Aziz JELLAB, Michel KAIL, Pierre LANTZ,Florent LEBOT,Margaret MANALE, Louis MOREAU DEBELLAING, Numa MURARD, Nia PERIVOLAROPOULOU, Thierry POUCH, Pierre ROLLE, Laurence ROULLEAU-BERGER,MoniqueSELIM,RichardSOBEL, Sophie WAHNICH, Claudie WEILL. Secrétariat de rédaction Jean-JacquesDELDYCK
© L’Harmattan, 2015-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.harmattan.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-02752-4 EAN : 9782343027524
L’homme et la société Revue internationale de recherches et de synthèses en sciences sociales
N° 189-190
2013/3-4
Éditorial. Libérons le matérialisme……………………………………….5 * * * SEXE ET POLITIQUE
Claude Didry et Monique Selim e e Sexe et politique du XX au XXI siècle : entre aliénation et émancipation……………………………………….. 7 Ludivine Bantigny Quelle « révolution » sexuelle ? Les politisations du sexe dans les années post-68…………………………………………………………15Tassadit Yacine (entretien avec) « Plantée comme un garçon dans l’Algérie coloniale »……………….35 Claude Didry Les midinettes, avant-garde oubliée du prolétariat…………………… 63 Monique Selim La très courte carrière des tâcheronnes de la presse à Canton. Entre domination politique et assignation sexuelle……………………87 Gaëlle Lacaze « Crise de la virilité »vs« fuite des femmes » : gouvernementalités genrées et conflictualités des corps en Mongolie…………………….107 Jean-Yves Le Talec Sortir des placards de la République : visages de l’homosexualité dans le monde politique français……………………………………..123 Catherine Deschamps Les recherches sur la sexualité et le sida sous les fourches caudines du néolibéralisme……………………………………………………. 145 Françoise Guillemaut Un « dispositif de sexe et genre créolisé ». L’exemple de la Guadeloupe et de la Guyane………………………. 163
Nicole Forstenzer Zones d’ombre et lumières dans le traitement de la revendication d’égalité des sexes dans la politique chilienne : du positionnement historique à un enjeu de réalisation démocratique…………………... 191 Maxime Cervulle Les controverses autour du « mariage pour tous » dans la presse nationale quotidienne : du différentialisme ethno-sexuel comme registre d’opposition…………………………………………207 Zahra Ali Le mouvement des femmes de l’Irak post-Saddam…………………. 223 Mathieu Caulier, Anne Querrien et Monique Selim Déplacements de la domination. Nouvelles substantialisations dans et par les normes de genre………………………………………245
HORS DOSSIER
* * *
Camille Dupuy Du journaliste actionnaire au journaliste salarié. Sociétés de personnels actionnaires et comités d’entreprise dans la procédure de rachat du groupe La Vie-Le Monde……………………………… 269
NOTES CRITIQUES
Pierre Rolle Un socialisme au présent ?………………………………………….. 305
Guy Laberge À quoi sert le savoir ?……………………………………………….. 317 COMPTES RENDUS……………………………………………………... 323 Résumés/Abstracts……………………………………………………. 335
* * *
Toute la correspondance — manuscrits (double interligne, 35 000 signes maximum pour les articles, 4 200 pour les comptes rendus), livres, périodiques — doit être adressée à laRédaction: L’homme et la société -Jean-Jacques Deldyck - Université Paris 7 - Boîte courrier 7027 75205 Paris Cedex13-Téléphone 01 57 27 64 86 E-mail : deldyck@univ-paris-diderot.fr ABONNEMENTS ET VENTES AU NUMEROÉditions L’Harmattan 5-7 rue de l’École-Polytechnique 75005 PARISUn abonnement annuel couvre 3 numéros dont 1 double (joindre un chèque à la commande au nom de L’Harmattan) France : 60— Étranger par avion : 65
Libérons le matérialisme
Éditorial
Comme nous l’indiquions dans la présentation de la ligne éditorialere-nouvelée de la revue et comme nous l’avons rappelé à l’occasion de cer-tainséditoriaux,l’ambitiondela revue est de parvenir à définirlesprin-cipes d’un matérialisme antinaturaliste afin de demeurer fidèle à l’inspi-rationlibertairedumatérialisme.Inspiration trop souvent bafouéeavecdes conséquences historiques catastrophiques.D’aucun(e)s dans le comité de rédaction sont convaincu(e)s que l’ap-port de Sartre et Beauvoir est, entre autres, décisif pour cette entreprise. Nous voudrions souligner cette fois-ci celui de la philosophe. Un point permettra d’illustrer ce qu’un tel matérialisme promet : la question de l’autre. C’est une question classique dans la philosophie occi-dentale, qui s’attache alors à définir, de manière générale, les articulations possibles entre le même et l’autre, entre l’identité et l’altérité. À rebours de cette tradition, Simone de Beauvoir remarque que l’altérité est une abstraction vide, à laquelle elle substitue ce que l’on pourrait appeler des « régimes d’altérité ». Ainsi, le discours qui prétend justifier la domina-tion masculine — l’idéologie « masculiniste » — enferme-t-il les femmes sous la catégorie de l’Autre absolu, les privant par là d’une relation au monde, c’est-à-dire, dans le vocabulaire de Beauvoir, de leur transcen-dance. Ranger les femmes sous la qualification de l’Autre absolu revient à rapporter ce qu’elles sont à un soi-disant « éternel féminin », en d’au-tres termes à les naturaliser. Naturalisation préalable qui est, soit dit en passant, la condition de l’application de la notion de « déterminisme so-cial », constitutive du sens commun sociologique. Or, si la naturalisation nous apparaît pour ce qu’elle est, une opération normative, il en va de même de la notion qu’elle conditionne, le « déterminisme social », qui n’a donc aucune valeur explicative mais une seule dimension normative.
o L’homme et la société189-190, juillet-décembre 2013, n
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L’homme et la société
Cetteabsolutisationn’est heureusement pas la seule manifestation pos-sible de l’altérité, n’est pas le seul régime d’altérité envisageable : en opé-rant une dénaturalisation rigoureuse, nous devenons capables, nous assure Simone de Beauvoir, d’anticiper, dans le cadre d’un projet d’émancipa-tion, un régime d’altérité organisé selon une exigence de réciprocité. En insistant sur le fait que les dominants sont si préoccupés d’affaiblir, voire d’annihiler, la capacité de transcendance des dominé(e)s, leur capa-cité de se projeter dans le monde, Beauvoir délivre une leçon de phi-losophie politique décisive. Le plus souvent, les analystes, y compris cri-tiques, de la domination soutiennent qu’elle est fondée sur la maîtrise des choses, avancée comme la condition de la maîtrise des autres. L’argu-mentation de Beauvoir nous convainc que c’est l’inverse qui est vrai, la maîtrise des autres est première et donne accès à la maîtrise des choses. End’autrestermes,le politique est premier, l’économique second. Le dis-cours dominant actuel, dans sa version libérale ou matérialiste mécaniste, qui présente la réalité économique comme déterminante (discours dit « économiciste »), sert à renforcer la domination en masquant la vérité de la primauté du politique. Vérité que Beauvoir, notamment, enseigne, offrant aux femmes et à tous les dominés, le moyen de leur libération.
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Michel KAIL
e e Sexe et politique du XX au XXI siècle : entre aliénation et émancipation
Associés, les deux termes, sexe et politique, ouvrent un vaste champ de réflexion que l’actualité a brutalement remis sur le devant de la scène, enjoignant, pour comprendre le présent, à revisiter ses multiples déclinai-sons.Sexeetpolitiques’articulent en effet sur de nombreux plateauxidéo-logiques, historiquement situés et aux résonances contrastées. Les liens entreformesde sexualité et modes de domination politique ont ainsi nour-ri l’inspiration freudo-marxiste des décennies 1950/1960. Le mouvement féministe, dans les années 1970 a reformulé la coagulation du sexe et du politique en luttant pour que le corps des femmes cesse d’être la propriété de l’État et des hommes et leur soit restitué dans toutes ses dimensions sexuées et générales. La fin de la guerre froide et les croisades humani-taires avaient laissé croire que dans les anciennes démocraties indus-trielles le politique avait été définitivement délié de ses avatars sexuels de toutes sortes. La barbarie des tyrans assoiffés de vierges aurait été refou-lée vers des sphères lointaines dans la Chine maoïste ou dans les terres musulmanes,leshorreurs sidérantes perpétuées par les despotes déchus s’étalent cependant encore aujourd’hui dans les médias. Et pourtant, en 2011, sexe et politique ont refait ensemble une irrup-tion fracassante dans le monde globalisé, au sein même de ses organes de « bonne gouvernance ». Dès lors, une autre trame s’est fait jour appelant à dénoncer une violence sexuelle masculine irrépressible et omniprésente. Derrièrelacentralitédu viol qui incontestablement perdure partout et dans toutes les classes sociales, seraient retissées dans l’imaginaire des posi-tions d’assignation pérennes des femmes aux rôles naturalisés de victime. Laproblématiquedeleur consentement s’en voit réactualiséesouventavec justesse mais parfois dans des termes extrêmes d’assimilation de tout acte sexuel à une domination hégémonique et forcluante. Dans ce théâtre fan-tasmatique fascinant c’est la figure même du désir qui paraît pouvoir être expulsée. Quel sens donner alors à cette éradication symbolique dans un monde saturé par le(s) marché(s) et la consommation hédoniste.
o L’homme et la société189-190, juillet-décembre 2013, n
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Claude DIDRYet Monique SELIM
Ce numéro deL’homme et la sociétéinterroge et confronte — bien au-delà du postulat désormais bien institué que le sexe est politique — sous différents angles et dans des configurations variées, de la France à la Chine, de l’Irak au Chili et au Mexique, de la Guyane à la Mongolie, sans oublier l’Algérie, les constructions idéologiquesquiramènent la sexualité sur la scène dupolitique:cesconstructionsmobilisent le capital symbo-lique des sociétés mais le transformentsousl’effetdesimaginaires qui visent à dépasser les situationssocioéconomiques et politiques. La con-joncture présente de crise — qui édifie l’altérité en négativité radicale — est particulièrement propice à la réflexion : les débats sont nombreux qui font de la sexualité un enjeu politique majeur sur des champs aussi con-trastés que la prostitution, la sexualité précoce des petites filles, la pédo-philie, l’homoparentalité, etc. Les termes et les contradictions internes à la somme de ces débats prise comme une totalité significative et symp-tôme du politique et de la politique au présent montrent que la sexualité e est désormais, au XXI siècle, une affaire entièrement publique et que les scènesditesautrefois privées sont devenues des marchandises et des spec-tacles comme les autres, offrant à l’individu un mode de construction de soi d’un côté, et, de l’autre, à la gouvernementalité politique de nouvelles ressources:c’estpourquoi aliénation et émancipation s’enchevêtrent,lors-que le sexe s’invite à la table du et de la politique. Reprenons donc les jalons de cet enchevêtrement. Sexe et politique ont, sous un certain angle,a prioripeu de choses à voiretc’estdeleur rencontre conjoncturelle que se rassasie la presse, sous la forme de « faits divers », quand leurs débordements sexuels rattrapent lespolitiques,ousous la forme de débats plus ou moins passionnés, quand le politique se penche sur ce que l’on a coutume de désigner pudiquement les « sujets de société » comme le mariage pour tous, l’avortement ou la e contraception. Rappelons qu’historiquement, jusqu’au XX siècle, le sexe relève de la vie privée, sur laquelle veille le droit, réservant au politique la réglementation de la vie publique. État de droit oblige, la discrétion est donc de rigueur sur le sexe renvoyé à la normalité des « bonnes mœurs », limitant l’intervention publique à la répression des « mauvaises ». Mar-ginalité et « exclusion » deviennent le lot de ces « débauchés » que leur comportement, ou leur condition sociale, mettrait au ban de cette norma-lité à laquelle renvoient les « bonnes mœurs ». Bourgeoises par principe pour les uns, les déviances sexuelles sont aussi attachées à cette « ques-tion sociale » poussant les femmes à la prostitution et les familles à l’in-ceste. Sewell (1983) souligne ainsi que les enquêtes du docteur Villermé vont jusqu’à déduire de la promiscuité ouvrière dans les caves lilloises,
e e Sexe et politique du XX au XXI siècle : entre aliénation et émancipation
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une pratique de l’inceste à grande échelle qui établit la déchéance ou-vrière au niveau de l’animalité. La politique ne peut que se faire discrète sur de telles déviations, abandonnant la répression aux forces de l’ordre et traitant de la question sociale sous l’angle d’un niveau de vie insuffisant, que la bienveillance d’un « État-providence » saura élever par un salaire minimum et des allocations familiales. Bien sûr, on regrettera bien vite que les femmes soient renvoyées aux tâches ménagères et que triomphe le «male bread winner». À force de tenir le sexe en lisière, voilà que les mœurs « évoluent » et viendraient régulièrement rappeler au politique la nécessité de procéder aux ajustements nécessaires du droit pour intégrer le nouveau partage entre les « bonnes » et les « mauvaises » mœurs qui en résultent. Rejetées du côté des conventions anciennes qui entravaient la liberté des individus, les bonnes mœurs d’hier céderaient la place à de « meilleures mœurs » plus en accord avec la liberté naturelle d’individus soumis à des pulsions que la société tente de guider vers un libéralisme respectueux des droits de chacun. La gêne, un temps au rendez-vous, quandilfautparler de divorce, de contraceptionoud’homosexualité,serait surmontée par l’héroïsme de politiciens capables de briser les tabous et de mettre le droit en phase avec une nature que la société ne peut prétendre entraver que provisoirement. On se réjouira alors de débats démocra-tiques vigoureux et d’« avancées » importantes, avant que ne reviennent le calme et la sérénité qui s’attachent à une normalité renouvelée. Est-ce à dire qu’en dehors de ces moments de tension qui ponctuent la vie démocratique, le sexe prendrait congé de la politique en attendant un prochain rendez-vous, pour laisser les citoyens jouir paisiblement de leurs droits ? Le regard change si, au lieu de parler « du » sexe comme ensemble de pratiques encadrées par une « normalité » transitoire réservant la « débau-che » à une « minorité », on envisage « les » sexes et plus particulière-ment celui dont Beauvoir a traité magistralement, le « deuxième ». Mas-culin-féminindevient une question tellement centrale du politique, qu’elle en devient un implicite, travaillant de l’intérieur un patriarcat d’autant plus efficace qu’il est ignoré. Dans cette perspective, les révolutions po-litiques sont aussi des révolutions sexuelles comme en témoignent Con-dorcet pour l’éducation des filles, Olympe de Gouges et Mary Wood-worth pour l’accès à la citoyenneté des femmes. La « domination mascu-line » en est ébranlée et ne se rétablit que sous la figure du « bon père de famille », que le Code civil érige en modèle de gestion. Atteinte dans sa naturalité,cettedominationtente de se trouver des justifications juridiques dont les limites ouvrent les voies d’une « autoémancipation » pour des
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