Ivan le terrible de S. M. Eisenstein
228 pages
Français

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Ivan le terrible de S. M. Eisenstein , livre ebook

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Description

Fort nombreuses sont les pages consacrées au film d'Eisenstein Ivan le Terrible. Plus rares sont celles qui évoquent les conditions matérielles de sa réalisation entre 1941 et 1946. D'où le projet de brosser une vue synoptique de sa production, en s'appuyant sur des repères différents : l'histoire événementielle, contemporaine de la guerre et du stalinisme triomphant, la personnalité singulière de son auteur, les témoignages des acteurs, etc.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2010
Nombre de lectures 79
EAN13 9782296708334
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Ivan le Terrible de S. M. Eisenstein
Champs visuels
Collection dirigée par Pierre-Jean Benghozi,
Raphaëlle Moine, Bruno Péquignot et Guillaume Soulez

Une collection d’ouvrages qui traitent de façon interdisciplinaire des images, peinture, photographie, B.D., télévision, cinéma (acteurs, auteurs, marché, metteurs en scène, thèmes, techniques, publics etc.). Cette collection est ouverte à toutes les démarches théoriques et méthodologiques appliquées aux questions spécifiques des usages esthétiques et sociaux des techniques de l’image fixe ou animée, sans craindre la confrontation des idées, mais aussi sans dogmatisme.

Dernières parutions

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Yves URO, Pauline Carton, itinéraire d’une actrice éclectique , 2009.
Bernard LECONTE, La télé en jeu(x) , 2009.
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Jean-Paul AUBERT, L’Ecole de Barcelone. Un cinéma d’avant-garde en Espagne sous le franquisme , 2009.
Eric Schmulevitch


Ivan le Terrible de S. M. Eisenstein
Chronique d’un tournage
(1941-1946)


L’Harmattan
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-12972-6
EAN : 9782296129726

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
« Это то, нo нe про это » (Eisenstein)

« Nous ne croyons pas, nous,
qu’on puisse compromettre le génie en l’expliquant »
(Baudelaire, Salon de 1945 )
Introduction
S’agissant d’ Ivan le Terrible, le cinéphile se raccroche à un certain nombre d’idées reçues, souvent exactes, rarement fausses, mais parfois approximatives. On pourrait, sans trop risquer de se tromper, les résumer en peu de mots : artistiquement, tout le monde s’accorde à reconnaître au film du génie ; mais ce film, aussi génial soit-il, est aussi la manifestation (la preuve ! ?) de la compromission politique de son auteur. Ce qu’un critique des Cahiers du Cinéma résume par une formule lapidaire : « Le couronnement de Bruxelles fut la présentation d’ Ivan le Terrible […] seul film intégralement et génialement stalinien. » {1} Vingt ans plus tard, un autre repose la question autrement, quand bien même sa réponse est-elle identique : « Qui oserait invoquer l’innocence d’Eisenstein ? » {2}
Pour étayer cet argumentaire, on s’appuie régulièrement aujourd’hui sur les mythes sécrétés par le stalinisme. Ils ne sont pas nés ex-nihilo et brutalement : il a fallu les créer et attendre qu’ils se développent dans la conscience des masses pour devenir « réalité ». Avec le stalinisme, l’histoire a cessé d’être un moyen de renforcement des seuls mythes classiques dans la conscience sociale, elle va désormais devoir contribuer à la création d’autres mythes destinés à servir les intérêts politico-idéologiques de la nouvelle classe dirigeante. Ivan le Terrible serait la contribution d’Eisenstein à l’édifice.
En d’autres termes, son film oscillerait entre deux convictions résolument antagonistes (quand bien même les témoignages ici repris renvoient-ils l’un -à sa première et l’autre – à sa seconde partie) :

• Celle de Soljénitsyne.
Par le biais d’une conversation qu’il retranscrit entre César (un intellectuel), qui estime que le génie a droit à toutes les excuses, et le bagnard X-123, « un grand vieillard noueux condamné à 20 ans de travaux forcés », qui affirme de son côté que les génies n’ont pas à se plier aux « commandes » des tyrans, la position de Soljénitsyne est sans appel – le film est une apologie de l’autocratie, un soutien à la terreur d’Etat :
« – Mais non, mon cher, dit César sur un ton accommodant, pour être objectif, il faut reconnaître qu’Eisenstein est génial. Ivan le terrible, ce n’est pas génial, non ? Et la danse des gardes du Tsar avec leurs masques ? Et la scène dans la cathédrale ?
Contorsions, lance avec irritation X-23 […]. Et, en plus, une idée politique absolument révoltante : la justification de la tyrannie d’un individu. […]
Mais quelle autre façon de traiter le sujet auraient-ils pu laisser passer ?
Laisser passer ! Mais alors, ne me parlez pas de génie ! Dites que c’est un flagorneur qui a exécuté une vile commande ! Les génies n’adaptent pas leur conception au goût des tyrans ! » {3}
Autrement dit, Eisenstein est un traître aux idéaux démocratiques, qui courbe l’échine devant le pouvoir absolu. A quoi on peut objecter qu’avant 1958, X-23 n’a pu voir que la première partie du film, dans laquelle, précisément, Ivan n’est pas encore « le Terrible », et qu’il s’agit de la part de Soljénitsyne d’une lecture a posteriori. Mais, au fond, peu importe l’anachronisme : l’enjeu est ailleurs.

• Celle de Mikhaïl Romm, contemporaine de la formulation précédente, selon qui Eisenstein était un génie persécuté, qui par ailleurs haïssait Staline. Son film est un pamphlet contre Staline et le NKVD, il constitue sa réponse politique à la tyrannie. Et il en est mort :
« La seconde série d’ Ivan le Terrible est un film sur la tragédie de la tyrannie. On n’y trouve pas de grossiers parallèles historiques, mais toute la construction du film les suggère, ils forment le contexte de presque chaque scène. Expressive, au point d’être sensuellement tangible, l’atmosphère de meurtres, exécutions, désordres, angoisse, cruauté, soupçons, ruse, trahisons, provoquait chez les premiers spectateurs du film un malaise voisin du désarroi, malaise dont nuls n’osaient formuler le sens avec des mots. » {4}
En d’autres termes, dans la première partie d’ Ivan, Eisenstein aurait contribué à la valorisation du régime et de son illustre chef. A partir de la seconde partie, quelque chose se serait produit qui aurait radicalement modifié son rapport au pouvoir. Ce qui est chronologiquement et techniquement discutable : le scénario de la 1 ère et de la 2 ème parties a été rédigé en même temps, et plusieurs épisodes de la 1 ème partie et de la 2 ème ont été tournés en parallèle.
*
* *
Que se passait-il en Union soviétique tel jour de 1943 ? Que faisait Eisenstein tel autre jour de 1944 ? Certes, toutes les journées ne sont pas « historiques ». Cela signifie-t-il qu’il ne se passe rien ? D’autant plus si l’on est Eisenstein ? Y a-t-il un jour où il ait négligé d’être réalisateur, dessinateur, théoricien ? Les lignes qui suivent n’ont d’autres vertus que de susciter la curiosité et, pourquoi pas, de lui répondre, que ce soit par l’interrogation d’une histoire singulière, par la mise à disposition de documents inédits (en français, en tout cas) qui ont nourri cette histoire, et par leur questionnement.
Faire l’« archéologie culturelle » d’une époque, qui correspond globalement à la guerre et à l’immédiat après-guerre en URSS, n’est rien de plus qu’une tentative en vue de restituer les changements qui ont scandé cinq années de la vie d’Eisenstein (de 1941 à 1946) et les mécanismes à l’œuvre dans ces changements. Autant dire que ces lignes prennent le contre-pied d’un projet essentiellement plastique : « … parler d’ Ivan le Terrible qui, comme l’œuvre de Michel-Ange, échappe à l’histoire "dans la mesure même o&

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