Danse traditionnelle et anciens milieux ruraux français
311 pages
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Danse traditionnelle et anciens milieux ruraux français , livre ebook

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Description

Tout au long du XIXe siècle le monde rural n'a pas cessé de se transformer. La danse, qui compte parmi ses moyens privilégiés d'expression, a elle-même connu des renouvellements d'une ampleur sans précédent. Les danses que nous appelons "folkloriques" sont le produit final de cette évolution. Voici un éclairage nouveau sur la vie de relation, les mentalités et leur évolution au sein de l'ancienne civilisation paysanne.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2009
Nombre de lectures 311
EAN13 9782336269092
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Danse traditionnelle et anciens milieux ruraux français

Jean-Michel Guilcher
9782296082588
Sommaire
Page de titre Page de Copyright INTRODUCTION CAMPAGNES D’HIER VERS DES TEMPS NOUVEAUX L’ESSOR DES DANSES SOCIALES A FIGURES DÉCLIN ET RECONVERSION DES BRANLES FARANDOLES. DANSES LONGUES REGARD SUR LES BOURRÉES VARIATION ET TENDANCE ARTICLES ANNEXES NOTES AUTEURS ET OUVRAGES CITÉS INDEX THÉMATIQUE INDEX GÉOGRAPHIQUE
INTRODUCTION
J’ai longtemps écarté l’idée de tirer des enseignements de portée générale des recherches qu’Hélène Guilcher et moi avons menées durant un demi-siècle sur les danses traditionnelles de divers pays de France. Il était pour moi évident que le moment n’était pas venu de le faire. Trop peu de régions avaient fait l’objet d’enquêtes recevables. La prospection des sources écrites n’était que commencée ; d’autres après nous viendraient qui mettraient au jour des documents dont nous n’avions eu aucune idée. Beaucoup de travaux préparatoires, enfin, devraient paraître avant que devienne possible une vue d’ensemble suffisamment étayée.
J’ai commencé de penser autrement le jour où Hélène Guilcher m’a fait observer qu’à nos successeurs, si supérieurement documentés qu’ils puissent être, manquerait toujours une chose qui, à nous, avait été donnée en abondance : la possibilité de s’entretenir longuement avec des habitants des campagnes ayant eu vingt ans avant la fin du XIX e siècle. Ces témoins d’une culture paysanne près de s’éteindre, nous les avions, partout, méthodiquement recherchés. Nous les avions interrogés en très grand nombre. Ils nous avaient raconté la vie d’autrefois, montré et commenté les danses qui avaient cours en leur jeunesse. L’image qu’ils nous en faisaient prendre était imparfaite, sans doute, mais elle était irremplaçable.
J’essaierai donc dans ce livre de mettre en ordre, selon une perspective générale unifiée, les résultats majeurs de la double recherche que nous avons menée conjointement, par enquête auprès de témoins encore autorisés, et par dépouillement de sources documentaires de toute nature. Sans prétendre ainsi apporter autre chose qu’un bilan provisoire. Comme celui qu’un collecteur dresse au terme de chacune de ses enquêtes pour seulement mieux préparer la suivante.

Des origines supposées très lointaines
Au long du XIX e siècle et jusque dans la seconde moitié du XX e, on a tenu pour assuré que nos danses régionales, au moins les plus redevables à une tradition ancienne, avaient pris naissance dans un passé très reculé. Longtemps on en a fait honneur aux Gaulois 1 . Ou aux Grecs 2 . Ou aux Maures 3 . Plus près de nous, une génération de folkloristes nourrie de l’enseignement de Curt Sachs et des Archives internationales de la danse s’est appliquée à reconnaître dans les répertoires paysans de nos provinces les vestiges de rituels - danses de fécondité, danses guerrières, danses astrales, danses christianisées, etc. - majo-ritairement issus de la préhistoire 4 . Sans prendre garde à l’indigence de l’information concrète dont on pouvait disposer.
Il y aurait eu, en somme, à l’origine de nos danses, une ou plusieurs époques, imprécisables mais certainement très lointaines, d’invention et création pure, appelée par des finalités et orientée vers des significations définies 5 . À quoi auraient succédé des siècles, possiblement des millénaires, de transmission pure et simple. Mutilante et déformante sans doute ; assez conservatrice pourtant pour que les intentions premières demeurent reconnaissables à un regard averti.
À l’ordinaire, les auteurs procèdent par affirmation pure et simple. Aucun ne se croit tenu de démontrer. L’information, en majeure partie livresque, circule des uns aux autres sans beaucoup changer ni s’accroître. Elle nourrit une spéculation gratuite et débouche sur un « savoir » fait tout entier de vues de l’esprit. Sans examen critique des sources. Sans preuves à fournir. Avec des hypothèses qui passent thèses à l’ancienneté, à force de n’être pas contredites. Il est clair que de conduites aussi inconsistantes on ne peut attendre aucune connaissance assurée.

Conservation et changement
Longtemps les folkloristes se sont représenté la tradition populaire de la danse comme une mémoire ; imparfaite sans doute, efficace pourtant ; appliquée avant tout à retenir et à conserver 6 . Au départ de notre recherche, la question s’est posée pour nous de savoir ce qu’il convenait d’en penser. De la réponse dépendait la problématique selon laquelle nous orienterions notre recherche. La tradition s’était-elle montrée, pour l’essentiel, reconduction d’états antérieurs ? Nous aurions à nous demander quelles conduites avaient pérennisé l’expérience. Devions-nous reconnaître dans la durée où nous avions regard l’apparition de changements appréciables ? Il nous faudrait rechercher quelles causes avaient fait naître le changement, de quelle ampleur et de quelle nature il avait été, quels mécanismes lui avaient donné forme. Ce fut donc un des premiers objectifs de nos enquêtes d’apprendre comment s’était opérée la communication de la danse d’une génération aux suivantes et ce qui en était résulté pour la chose transmise. En chaque localité nous avons, autant qu’il était possible, réuni et comparé les souvenirs d’informateurs appartenant à des générations successives. Aux plus âgés nous demandions s’ils avaient conscience de changements apportés par leurs cadets aux danses de leur propre jeunesse.

Une enquête étroitement localisée ne découvre qu’exceptionnellement des changements apportés à la pratique de la danse dans les quelques décennies dont les vivants gardent mémoire. Les exceptions méritent d’être signalées. Il s’en présente dans le cas de danses entrées dans la tradition assez tard pour qu’une façon commune de les comprendre et de les vivre n’ait commencé de s’imposer qu’à une date récente. Il arrive alors que des témoins âgés se rappellent un temps où la danse en question était connue sous d’autres formes que celle qui devait finalement prévaloir. Pour n’en citer qu’un exemple : la mise au jour que nous avons pu faire de versions anciennes et jusque-là ignorées de jabadaos de Basse-Cornouaille (Bretagne) a dû beaucoup à la recherche méthodique de tels témoins.
Une situation favorable se présente aussi quand une danse a fait, dans un passé proche, l’objet d’une mutation reconnue par tous, datable, et immédiatement efficace. Les informateurs que nous interrogions dans le nord de l’Aveyron en 1964-1967 avaient tous dansé des bourrées à deux et à quatre, associant deux figures sur des airs à huit phrases (4A, 4B). Ceux d’entre eux qui avaient pratiqué la même danse avant 1914 témoignaient unanimement que la bourrée de leur jeunesse comptait une seule figure et se dansait sur des airs à quatre phrases (2A, 2B). Un modèle importé des Amicales aubraciennes de Paris avait, entre les deux guerres, amené une façon nouvelle de faire, bientôt adoptée par tous.
Encore une fois, le chercheur a rarement l’occasion d’entendre ainsi évoquer une étape précise, intervenue de mémoire d’homme, dans la réactualisation d’une danse. Au moins quand il s’agit de danses de tradition ancienne, les plus vieux témoins n’ont généralement conscience que de menues retouches (« on sautait moins..., on allait moins vite..., on ne se tenait pas pareil ») apparues depuis le temps de leur jeunesse dans la façon de les dessiner. Le style de l’interprétation a pu se faire autre ; la danse est restée fondamentalement la même.
Une prospection étendue à l’ensemble du territoire où l’on pratique une même danse ouvre d’autres perspectives. La comparaison qu’elle conduit à opérer entre tous les terroirs constitutifs d’une même aire fait apparaître une pluralité d’états, rattachables, sans doute possible, à une ascendance commune. Elle rend évidente, à la source de leur diversité, l’arrière-plan d’une histoire qui a façonné leurs dissemblances. Pour le chercheur curieux des genèses, une possibilité s’ouvre alors d’en apprendre davantage. L’ouverture de nouveaux points d’enquête, une investigation partout reprise avec une curiosité mieux avertie ont beaucoup de chances de lui faire découvrir, entre états finalement stabilisés, des intermédiaires dont il n’avait pas encore connaissance, et qui ont jalonné un passage des uns aux autres 7 .
Dispose-t-on, pour le pays qu’on prospecte, de descriptions un peu explicites établies à des dates plus anciennes, la comparaison avec l’état de choses final se montre ordinairement source

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