L ENFANT , L ADOLESCENT ET LES LIBERTES
160 pages
Français

L'ENFANT , L'ADOLESCENT ET LES LIBERTES , livre ebook

160 pages
Français

Description

En utilisant les ressources du droit positif, et principalement les garanties et les obligations des libertés publiques, les auteurs, dans une tradition déjà bien établie, proposent les conditions d'une socialisation active des jeunes. Sans la mise en œuvre d'une pratique concrète de la démocratie ordinaire, dans le quotidien des institutions d'enseignement et de loisirs, on ne réduira ni la " violence ", ni " l'ennui ".

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2000
Nombre de lectures 72
EAN13 9782296412637
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'ENFANT, L'ADOLESCENT
ET LES LIBERTÉSChristian 'VOGT
Reynald BRIZAIS
Christian CHAUVIGNÉ
Yann LE PENNEC
L'ENFANT, L'ADOLESCENT
ET LES LIBERTÉS
Pour une éducation à la démocratie
L'Harmattan L'Harmattan Inc.
5-7, rue de l'École Polytechnique 55, rue Saint-Jacques
75005 Paris - FRANCE Montréal (Qc) - CANADA H2Y IK9@ L'Harmattan, 2000
ISBlV:2-7384-9188-){On ne naît pas citoyen. On le devient.
Spinoza
Aucune société, si elle veut assurer sa continuité, ne
peut se désintéresser de la manière dont les jeunes sont
intégrés en son sein. Différentes pratiques amènent l'enfant à
assimiler les cadres de références propres aux groupes dans
lesquels il est inséré. C'est la condition nécessaire pour sa
participation aux échanges. Les enjeux de la socialisation
sont tels qu'il est indispensable de prétendre en contrôler le
cours. Tout projet d'éducation constitue une telle tentative.
La socialisation est un processus, l'éducation une
stratégie. Ces deux niveaux sont fréquemment confondus. Le
processus correspond à la dynamique globale de
transformation d'un phénomène. La stratégie consiste en un plan
mûrement réfléchi visant à intervenir sur un processus.
L'éducation est cette tentative délibérée d'orienter, de
canaliser la socialisation du sujet. Elle agit par les échanges
formels et informels, les interactions de la vie quotidienne.
L'éducation traditionnelle repose pour une large part
sur des usages, normes et règles que l'enfant doit respecter.
Les institutions d'éducation prévoient à cet égard les
prérogatives des différents membres de la communauté. Les
astreintes et les échéances des multiples étapes que doit traver-ser le sujet sont indiquées. Les rites de passage scandent les
identités que ce dernier doit investir successivement.
Dans nos États modernes, ce mode d'éducation
perdure. Tout un réseau complexe d'institutions s'est mis en place
autour de la famille, institution première de l'enfance.
L'école a émergé, puis les centres de loisirs, les clubs sportifs,
les dispositifs de garde... Lorsque la famille est défaillante,
des établissements spécialisés prennent le relais.
Tout le monde s'accorde sur la nécessité de l'éducation,
mais à partir de conceptions diverses.
S'affirme tout d'abord le modèle d'un lieu protégé,
coupé du monde extérieur. L'enseignement d'État émerge à
la fin du XIXe siècle. Sa mission est d'inculquer des savoirs,
sur un mode autoritaire.
Dès le début du XXe siècle, le mouvement d'Éducation
nouvelle insiste à l'opposé sur la spécificité de l'enfant dans
son rapport au monde. On prend en compte ses besoins et ses
intérêts, aux différentes étapes de son développement.
L'enfant n'est plus le simple réceptacle d'influences extérieures. Il
devient actif dans sa rencontre avec le milieu. Quelques
expériences socialistes motivent une réflexion sur la
démocratisation du rapport entre générations. De rares tentatives
d'application sont mises en échec.
Les pratiques éducatives ont constamment évolué. Une
éducation autoritaire et contraignante a cessé d'être la seule
référence. Les éducateurs d'aujourd'hui prennent
systématiquement en compte le développement de l'enfant, son
expression aussi, sans toutefois lui accorder beaucoup plus
d'autonomie. La diffusion des connaissances psychologiques
sur l'enfant a impulsé ce processus. Mais, comme le note
Pierre-Gilles de Gennes, « Il y a une distance sidérale entre les
8grands principes affichés et le quotidien que vivent nos
enfants. »1
Actuellement coexistent des stratégies multiples, des
plus autoritaires aux plus permissives, sans que les conditions
d'une inscription à terme de l'enfant dans la cité soient
clairement posées.
Quelles que soient les pratiques prises en référence,
toutes prennent appui sur des représentations de l'enfant et de
l'adolescent. Elles ont des racines profondes qui les ancrent
dans le «mythe d'origine relatif à l'homme lui-même. »2
L'enfant reste parfois assimilé au bon sauvage mythique,
«être pur, simple, vrai, non encore déformé par la société,
inculte et sauvage, innocent parce qu'inconscient du bien et
du mal. » Cet enfant-là est en symbiose avec la nature,
spontané et créatif. Nous retrouvons le discours rousseauiste,
traduit en termes de principes éducatifs par Tolstoï: «L'homme
naît parfait. Il est insensé de vouloir donner l'instruction et
l'éducation à l'enfant, car il est bien plus près que moi de
l'idéal harmonieux du vrai, du beau, du bien. »3 À l'autre pôle,
les partisans de l'autorité vont chercher leurs arguments à la
même source, la proximité de l'enfant à la nature. C'est
l'animalité qui est mise en procès. Il faut dresser cet être asocial,
« terrasser la bête », le soumettre aux vertus « humanisantes »
de la vie en société. Il est inculte et sauvage. Il faut lui
inculquer les bons principes.
Ces conceptions posent le dilemme de l'éducation. La
permissivité fait face à la contrainte. Il s'agit, dans cet
ouvraI De GENNES P.-G. (1999), Espoirs et désespoirs d'un parent d'élève. Le
Monde, 28 février.
2
CHOMBART DE LAUWE M.-J. (1975), Un monde autre, l'enfance, Paris:
Payot.
3 Cité par BESSE J.-M. (1975), Les courants libertaires. ln La pédagogie
du xxe siècle, Toulouse: Privat, page 152.
9ge, de dépasser cette vision tronquée de la réalité pour fonder
un projet d'éducation plus raisonnable.
Le projet d'éducation vise à inscrire le sujet dans la
société, à lui faire occuper une place. On attend de l'individu
qu'il participe aux échanges qui organisent la vie sociale. La
formation scolaire et professionnelle y contribue. Dans nos
démocraties, il s'agit aussi d'amener l'enfant à assumer sa
position de citoyen, par sa capacité à intervenir sur les
structures sociales, qui, en partie, le déterminent.
« Ni la Constitution française, ni même la Déclaration
des Droits de I'homme ne seront présentées à aucune classe
de citoyens comme des tables descendues du ciel, qu'il faut
adorer et croire... Tant qu'il y aura des hommes qui
n'obéiront pas à leur raison seule, qui recevront leurs
opinions d'une opinion étrangère, en vain toutes les chaînes
auraient été brisées, en vain ces opinions de commande
seraient d'utiles vérités; le genre humain n'en resterait pas
moins partagé en deux classes: celle des hommes qui
raisonnent et celle des hommes qui croient, celle des maîtres et celle
des esclaves. »4
L'enjeu est de taille. Il s'agit de promouvoir une
société d'égaux en droit contre une société clivée. Le clivage
social, souvent pris en référence, commence dans cette
nonparticipation de tous les citoyens à la vie politique. Cette
participation suppose, comme le notait Condorcet, que les
institutions apparaissent bien à tous comme des «construits»
humains. Elles ne sont et ne doivent être ni la conséquence
d'une quelconque transcendance, ni de l'activité réservée
d'une catégorie de citoyens.
Un siècle et demi après ce projet de la Révolution, une
« commission d'études pour la réforme de l'enseignement »,
4 CONDORCET, V mémoire sur ['instruction, Œuvres, VII, page 455-456.
10instituée le huit novembre 1944 et issue de la Résistance,
produit un rapport officiel achevé en juin 1947.
C'est le fameux Plan Langevin-Wallon, souvent
célébré, rarement consulté, et dont les principes et les
propositions restent soit ignorés, soit passés sous silence.
Et pourtant, aujourd'hui, et pour longtemps, ce Plan
représente le marbre sur lequel toute conception
démocratique doit passer. Ce fut le cas pour quelques réformes
parcellaires de ces cinquante dernières années. Mais on est loin du
compte.
Sur le thème qui nous intéresse ici, le Plan note que:
« L'enseignement méconnaî

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