Le plurilinguisme au Moyen Âge
375 pages
Français

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Le plurilinguisme au Moyen Âge , livre ebook

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Description

L'ensemble des études présentées ici, dues à des chercheurs de renommée internationale, linguistes, historiens et littéraires, a notamment pour but de déterminer le statut des langues savantes et vernaculaires dans les mondes d'Occident et d'Orient, dont les relations méritent d'être encore précisées et approfondies. Le plurilinguisme médiéval montre des cultures ouvertes les unes aux autres, des sociétés en interaction dans un intense processus de circulation d'un bout à l'autre du "monde connu".

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 avril 2009
Nombre de lectures 167
EAN13 9782296223851
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1450€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan 1 @wanadoo.fr
9782296081963
EAN : 9782296081963
Le plurilinguisme au Moyen Âge
Orient-Occident - de Babel à la langue une

Suzanne Thiolier-Méjean
Sommaire
Page de Copyright Page de titre Epigraphe INTRODUCTION INTRODUCTION I- DES SOCIÉTÉS PLURILINGUES - LANGUES ET CULTURES EN CONTACT
LES ILES BRITANNIQUES, KALÉIDOSCOPE LINGUISTIQUE DANS L’OPTIQUE DE BÈDE LE VÉNÉRABLE LE VULGAIRE, POUR QUOI FAIRE ? L’ANGLO-NORMAND AU SIÈCLE DE CHAUCER : UN REGAIN DE STATISTIQUES LE PLURILINGUISME COMME PROCÉDÉ STYLISTIQUE DANS LA POÉSIE MÉDIÉVALE GALICIENNE PORTUGAISE LE PLURILINGUISME AU MOYEN ÂGE DANS LE CONTEXTE MUSICAL
II-PASSEURS DES DEUX RIVES - VOYAGEURS ET TRADUCTEURS
JOSEPH CASPI ET LE PLURILINGUISME DES JUIFS PROVENÇAUX LES IBN TIBBON DYNASTIE DE TRADUCTEURS LE LANGAGE PHILOSOPHIQUE DE L’EMPEREUR FRÉDÉRIC II DANS LES QUESTIONS SICILIENNES DE IBN SAB‘IN ET L’AIGUILLON DES DISCIPLES DE JA’AQOV ANATOLI STUPOR MUNDI : CULTURES AND DIFFERENCES IN SICILY AND THE MEDITERRANEAN WORLD LES IRANIENS MUSULMANS PREMIERS TRADUCTEURS DU CORAN (X E -XII E SIÈCLE) : DU CALQUE AU COMMENTAIRE PERSAN LA TRANSMISSION DES TEXTES MANICHÉENS EN CHINE
III- DES AUTEURS EXEMPLAIRES - HOMMES DE SAVOIR, POÈTES ET PHILOSOPHES
LE PLURILINGUISME PARADOXAL DE RAYMOND LULLE LE BILINGUISME DE BRUNETTO LATINI : LE LIVRE DU TRÉSOR GOD’S RULES, AND MAN’S TWO APPROACHES TO THE PROBLEM OF TRANSLATIO IN TWELFTH CENTURY WESTERN PHILOSOPHY GILBERT OF POITIERS AND ALAN OF LILLE LE MÉLANGE DES LANGUES DANS LES DIVERSES VERSIONS DU DEVISEMENT DU MONDE DE MARCO POLO LE PLURILINGUISME CHEZ QUELQUES FEMMES ÉCRIVAINS DU XII E SIÈCLE WITH SPECIAL ATTENTION TO HILDEGARD OF BINGEN’S PHYSICA
IV AU-DELÀ DES LANGUES - LANGUE DES OISEAUX, DES ANGES DU PARADIS, DU SILENCE
LE LANGAGE DU PERROQUET DANS QUELQUES TEXTES D’OC ET D’OÏL SEULS, CEUX QUI SAVENT ENTENDRE L’APPEL DE LEUR SUPÉRIEUR ET LUI RÉPONDRE, PEUVENT L’ENTOURER DES LANGUES MULTIPLES À LA LANGUE UNE UNE LANGUE AU-DELÀ DE LA LANGUE
V-UN PLURILINGUISME PERSISTANT - LE CAIRE AU XX E SIÈCLE
QUELQUES ASPECTS DU PLURILINGUISME AU CAIRE AU XX E SIÈCLE
FINALE RÉSUMÉS - ABSTRACTS RÉSUMÉS - ABSTRACTS REMERCIEMENTS
Je peregrine tres saoul de nos façons, Non pour cercher des Gascons en Sicile (j’en ay assez laissé au logis) ; je cerche des Grecs plustost, et des Persans ; j’acointe ceux-là, je les considere ; c’est là où je me preste et où je m’employe. Et, qui plus est, il me semble que je n’ay rencontré guère de manieres qui ne vaillent les nostres.
Montaigne, Essais , Livre III, ch. IX
INTRODUCTION
L’oiseau chantait dans le verger de l’Aimé Vint l’Ami qui dit à l’oiseau : « Si nous ne nous comprenons pas par la langue, comprenons-nous par l’amour, car par ton chant mon Aimé apparaît devant mes yeux ».
Raymond Lulle, Livre de l’Ami et de l’Aimé
INTRODUCTION
Le plurilinguisme est sans doute un fait naturel dans toutes les sociétés : la situation de la France actuelle nous fait prendre ce fait pour une exception, parce que l’unité linguistique des parlers français en France remonte à un passé ancien. Mais, pour ne citer que des pays tout proches comme l’Allemagne et l’Italie, c’est loin d’être partout le cas. Aujourd’hui encore, des élèves qui vont à l’école dans diverses régions d’Allemagne peuvent avoir des difficultés à s’adapter au milieu linguistique dans lequel ils sont arrivés de fraîche date. Il y a des variantes considérables à l’intérieur d’une même sphère linguistique. À plus forte raison, la diversité des langues existe-t-elle du fait des mouvements de population : l’immigration, les déplacements constants pour des raisons multiples, tantôt contraintes, tantôt voulues.
L’ensemble des études que nous présentons dans cet ouvrage consacré au Moyen Âge, dues à des chercheurs linguistes, historiens et littéraires, a notamment pour but de déterminer le statut des langues savantes et vernaculaires dans les mondes d’ici et de là-bas, d’Occident et d’Orient, dont les relations méritent d’être encore précisées et approfondies.

La situation du Moyen Âge était encore bien plus diverse que celle qu’on peut observer de nos jours : les langues étant loin d’être unifiées, de nombreux dialectes étaient pratiqués à l’intérieur d’une même famille linguistique. En France, les régions de langue d’oïl et celles de langue d’oc pouvaient ne pas se comprendre mutuellement. Si l’on s’en tient au seul bassin méditerranéen, diverses communautés coexistaient : juives, « grecques » (au sens large), italiennes, espagnoles, portugaises, « arabes » (au sens large aussi, incluant des non arabes comme les berbères, pour ne citer qu’un seul exemple), syriennes, persanes, turques, etc.

Depuis le mythe de la tour de Babel, la langue et les langages n’ont cessé d’être au centre de la pensée médiévale, qu’elle soit orientale ou occidentale. Or la structure en escaliers de la tour de Babylone en fait, dans l’iconographie médiévale occidentale, le pendant diabolique de la montagne du Purgatoire. Comment ne pas évoquer la superbe représentation de la tour de Babel dans le Livre d ‘ Heures du Duc de Bedford 1 , ou la structure de la montagne du purgatoire dans la Divine Comédie représentée par di Michelino, dans son tableau « Dante et son poème » 2  ?
Si des anges apparaissent au sommet de Babel, ce n’est pas, comme à la cime du Purgatoire, pour aider les âmes guéries à s’envoler vers le Paradis, mais, tout au contraire, pour précipiter au sol les hommes présomptueux, et les punir.

Mais pourquoi un tel châtiment ?
C’est que le privilège de la langue est donné par Dieu. Car la langue, dans bien des cultures, est d’abord celle de la divinité, des dieux ou de Dieu. Elle est une comme Dieu est Un.

Pour l’Occident médiéval, la seule langue possible, la langue sacrée, celle qui est fixée, qu’on doit apprendre sans l’altérer, c’est le latin. Comme pour le grec, l’hébreu et l’arabe, il est la langue qui unit Dieu et les hommes.
Le latin sera donc la langue privilégiée pour traduire, transmettre et communiquer d’une langue à l’autre. C’est la lingua franca des lettrés, car elle n’est pas seulement utilisée comme langue d’écriture mais aussi comme langue orale et permet aux litterati d’être chez eux dans toute l’Europe et même au-delà. Ce phénomène, loin d’avoir disparu, continue de concerner nos sociétés modernes.

[...] au cours de l’histoire, certaines langues sont devenues des lingua franca, le latin à l’époque classique et médiévale, le français pendant plusieurs siècles en Occident, le swahili dans certaines parties de l’Afrique et l’anglais dans le monde entier à partir de la seconde moitié de ce siècle 3 .
Il est un fait : si on veut véritablement comprendre la culture médiévale occidentale, il faut étudier les relations qui s’établirent entre le latin et les langues maternelles. Le latin se caractérise alors par l’ordre, la fixité de ses règles et la systématique de la grammatica. Les langues vernaculaires, au contraire, représentent un certain désordre, sont, dans le domaine littéraire, en rivalité les unes avec les autres afin de s’assurer la suprématie. Et cette histoire, infiniment complexe, est au cœur de bien des œuvres, et même bien des conflits, comme le remarquait Montaigne :

Notre parler a ses foiblesses et ses défauts, comme tout le reste. La plus part des occasions des troubles du monde sont Grammairiennes. Nos procez ne naissent que du débat de l’interpretation des loix ; et la plus part des guerres, de cette impuissance de n’avoir sçeu clairement exprimer les conventions et traictez d’accord des princes 4 .
Ces propos, s’ils témoignent de l’importance d’un langage clair et dépourvu d’ambiguïté, nous apprennent aussi que la langue joue un rôle politique et social déterminants.

La langue représente cependant bien plus qu’une monnaie destinée aux échanges rationnels ou affectifs. Elle entretient des rapports privilégiés, tout-puissants, avec l’environnement social 5 .
Et cela, notre monde contemporain l’e

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