Essai sur la déclamation oratoire et dramatique, la diction et la prononciation - Suivi d'une nouvelle méthode curative du bégaiement et de tous les vices de la parole

Joseph Cresp

Description

Le grasseyement ne doit pas être considéré comme une infirmité de la parole ; c’est tout simplement un vice de localité et d’imitation qui consiste à prononcer la lettre r de la gorge.La véritable articulation de cette lettre doit se faire du bout de la langue contre le palais à peu de distance des incisives supérieures. Comme l’r est la seule consonne qui produise un son vibré, on peut, parle moyen de cette vibration, donner à cette consonne toute la douceur, tout le charme et toute l’énergie que commandera le mot auquel elle appartiendra, ce qu’on ne pourra pas obtenir si cette vibration est produite par l’arrière-bouche : aussi les chanteurs, les orateurs et les comédiens qui grasseyent sont-ils insoutenables à entendre.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

Informations

• Publié par: BNF - Collection XIX
• Nombre de lectures: 37
• EAN13: 9782346027781
• Langue: Français

Extrait

À propos de Collection XIX
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Joseph Cresp
Essai sur la déclamation oratoire et dramatique, la diction et la prononciation
Suivi d'une nouvelle méthode curative du bégaiement et de tous les vices de la parole
DÉDIÉ A SON FRÈRE,
AVOCAT A LA COUR ROYALE D’AIX
ET PROFESSEUR A LA FACULTÉ DE DROIT,
PAR L’AUTEUR.
INTRODUCTION

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En publiant ce livre, je n’ai eu ni l’intention, ni la prétention d’enrichir la bibliothèque nationale d’un nouvel ouvrage littéraire ; d’ailleurs, les sujets que j’ai traités ne comportaient pas plus qu’ils n’exigeaient cet étalage pompeux d’idées, de mots, et ce parfum de phrases rhétoriciennes qui flattent, il est vrai, l’oreille, mais qui pénètrent peu l’esprit et le cœur. Dans une production de ce genre, il fallait parler d’après un sentiment profond de la chose, d’après sa conviction, son jugement, ses observations et son expérience ; il fallait être clair, précis et persuasif ; c’est à quoi je me suis appliqué, et j’aurai rempli mon but, si je parais tel aux yeux de ceux qui me liront.
Toutefois, je dois des remerciments aux personnes qui m’ont donné quelques utiles renseignements dont j’ai profité pour compléter, autant que possible, ce que j’avais à dire sur l’art de la déclamation.
Dans la première partie, il s’agissait de faire comprendre à la chaire, au barreau et à la tribune, que leurs orateurs, à quelques brillantes exceptions près, ont besoin de changer complètement la nature vicieuse de leur déclamation ; si à cet égard je me suis montré trop amer, c’est que le mal est grand, et que dans les cas désespérés les demi moyens ne valent jamais rien.
Je me suis ensuite attaché à démontrer que, à une époque où toute personne au dessus de la classe ouvrière peut à chaque instant être appelée à prendre la parole en public, il est insdispensable que l’art de la déclamation soit sérieusement cultivé, et devienne une branche essentielle de l’éducation. Aussi, nos colléges, nos séminaires, nos facultés de droit devraient-ils avoir des chaires de déclamation, et des professeurs spéciaux.
J’ai rappelé que, à Rome, les Magistrats portaient toute leur attention sur l’enseignement de cet art, et j’ajoute ici que, en Angleterre, la jeune noblesse s’y exerce constamment, soit dans les universités, soit dans ces discussions vives et profondes qui suivent chaque repas.
Je me suis élevé contre notre obstination à négliger un art nécessaire, en prouvant que savoir défendre habilement ses droits et ceux du pays, donner à sa pensée et à ses paroles toute la force de persuasion qu’elles peuvent avoir, c’est une étude qui vaut bien celle de la physique et de la chimie que maintenant on enseigne partout.
Je me suis appliqué à désabuser ceux qui croient que l’art de bien dire est chose simple et facile, qu’on n’a pas besoin d’apprendre ou qu’on peut apprendre quand on veut, en insinuant que c’est dans la jeunesse qu’il faut se livrer à ce travail, car plus lard les organes, trop affermis dans les mauvaises habitudes, se refuseraient peut-être aux efforts de l’étudiant.
« Il n’y a point d’art qui ne demande d’effort, et s’il y a quelqu’un qui en mérite, c’est celui-ci, dit M. le Batteux. On donne pendant des années entières des maîtres aux jeunes gens pour leur apprendre à entrer, à sortir, à saluer, à se présenter, et on veut abandonner à la seule nature, au seul instinct, de régler la décence et les graces dans les occasions où l’homme est en spectacle à tout un peuple qui juge à la rigueur de tous ses mouvements et de tous ses tons. Ce naturel qu’on vante tant dans la déclamation, et qu’on s’imagine devoir être inculte, pour être vrai, ne perdrait rien de ce qu’il a, quand il serait cultivé, et il acquerrait sûrement une force et des charmes qu’il n’a pas. »
Si la déclamation est un art, si cet art est nécessaire, l’abandon où nous l’avons laissé jusqu’à ce jour est un tort qu’il faut réparer. Une arme telle que la parole serait trop dangereuse si on l’abandonnait au petit nombre ; il faut que beaucoup la possèdent pour que la raison et la vérité ne soient pas exposées à perdre leur empire.
En censurant avec sévérité quelques vieilles et quelques nouvelles célébrités de la comédie française, j’ai la conviction que c’est à leur amour-propre et à leur-orgueil excessifs que nous sommes redevables de la, décadence de notre première scène, et d’un art qu’il sera bien difficile de replacer à la hauteur où il était jadis.
Dans la seconde partie, qui traite du bégaiement et de tous les vices de prononciation, je me suis attaché principalement à faire ressortir l’inconvénient qu’il y a de rester sous la funeste influence de ces déplorables infirmités, lorsque nous avons à notre disposition une foule de moyens excellents pour s’en débarrasser. J’ai dû blâmer hautement ceux qui par insouciance ou par avarice n’en profitent pas. Et afin que cette partie de mon ouvrage fût profitable à la société, j’ai mis à sa connaissance ma méthode curative et la manière dont il faut l’employer.
Si je me suis permis de critiquer quelques-unes des méthodes connues, c’est qu’elles ont paru mériter mes reproches ; quant à la mienne, je la livre sans crainte à l’examen public : elle repose sur dix années d’observation, d’expérience el de succès.
PREMIÈRE PARTIE

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DE LA DÉCLAMATION ORATOIRE ET DRAMATIQUE, DE LA DICTION ET DE LA PRONONCIATION
Pour bien parler, il ne suffit pas d’être exempt des affections de la parole que je signale dans la seconde partie de cet ouvrage, tels que le bégaiement, le balbutiement, le bredouillement et autres infirmités de ce genre, car sans bégayer, sans balbutier et sans bredouiller, on peut avoir d’autres défauts tout aussi insupportables. A moins d’une élude spéciale de prononciation et de diction, il est fort rare, pour ne pas dire impossible, de posséder une faconde nette, pure et précise.
Je ne comprends pas pourquoi cette étude importante que l’on devrait baser sur les principes fondamentaux de l’art déclamatoire ne ferait point partie de l’éducation que la jeunesse reçoit dans les colléges ou ailleurs ; si cette nécessité était sentie, il en résulterait que, à la chaire, au barreau et dans nos assemblées politiques, nos oreilles ne seraient pas si souvent déchirées par la rudesse et les vices multipliés qui entravent le langage.
Nos orateurs sont néanmoins, pour la plupart, des hommes de mérite, mais leur éloquence, quelque profonde et solide qu’elle soit, ne touche pas plus le cœur qu’elle ne charme l’oreille. Ceci est d’autant plus vrai, que, sans le secours des journaux qui nous transmettent les discours de ces Messieurs, nous ignorerions complètement qu’il existe des orateurs en France, si nous nous étions contentés de les ouïr seulement. Ils ne possédent de l’éloquence que la richesse des idées et des mots, et non l’ame de ces idées et de ces mots ; car l’ame de l’éloquence est la manière de la présenter à nos sens avec toutes les nuapces de diction et de déclamation convenables au sujet que l’on traite.
Mais comme on ne peut obtenir ces précieux avantages que par un exercice soutenu de l’art déclamatoire, jusqu’à ce que le ministre de l’instruction publique comprenne l’importance d’introduire dans les colléges des professeurs spéciaux de diction, et que chaque individu sente la nécessité de purifier son langage ayant d’en faire l’interprète de ses sentiments et de ses opinions, nous nous contenterons de lire les discours de nos hommes publics, mais nous nous garderons d’aller les entendre avec leur accent défectueux et leur voix dénuée de couleur et de vie.
L’art de la déclamation consiste à dire d’une manière vraie, simple et naturelle, la prose, ainsi que les vers, en entrant par le maintien, le geste et la physionomie, dans l’action de son sujet ; ou, enfermes plus succincts, c’est l’éloquence de l’ame jointe à l’éloquence du corps.
La déclamation doit être considérée aussi comme une gymnastique des organes vocaux