Figures de la magistralité
226 pages
Français

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Figures de la magistralité , livre ebook

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Description

Pourquoi dit-on d'un discours qu'il est magistral ? Quel rapport un maître entretient-il à la culture et à l'enfant ? Quel mode de présence du maître permet l'éducation ? N'est-il pas contradictoire de vouloir maîtriser un être libre par la naissance ? Ce ne sont que quelques-unes des questions que suscite la notion complexe de magistralité, dont ce livre présente des figures majeures, sans prétendre à l'exhaustivité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2009
Nombre de lectures 330
EAN13 9782296243989
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

FIGURES DE LA MAGISTRALITÉ
© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-10643-7
EAN : 9782296106437

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Coordonné par
Pierre BILLOUET


FIGURES DE LA MAGISTRALITÉ


Maître, élève et culture
Pédagogie : crises, mémoires, repères
Collection dirigée par Loïc Chalmel, Michel Fabre,
Jean Houssaye et Michel Soëtard


La collection Pédagogie : crises, mémoires, repères répond à un triple objectif : 1 - Elle se propose de soumettre à la réflexion théorique les problématiques et les situations de crise qui agitent le monde pédagogique. 2 - Elle vise à vivifier les mémoires historiques capables d’éclairer le pédagogue pour l’action présente. 3 - Elle entreprend de décrypter les repères philosophiques, éthiques, politiques qui portent le pédagogue en avant des réalités.


Déjà paru

Sébastien CHARBONNIER, Deleuze Pédagogue , 2009.
INTRODUCTION P IERRE B ILLOUET
La notion de maîtrise est équivoque puisqu’un maître d’élève n’est, bien entendu, pas un maître d’esclave. Toutefois si le mot "domination" – opposé à "servitude" – est d’usage courant, comment nommer la maîtrise du maître d’école ? Le mot "magistralité" ne figure pas plus dans les dictionnaires Robert, Larousse ou Littré que dans le Trésor de la Langue française… Ce mot désignerait l’essence du maître ( magister ) ou l’essence de ce qui est magistral. Le latin magister désigne le maître au sens de celui qui dirige (exemple : le capitaine est un magister navis ) et aussi de celui qui enseigne. Cicéron a écrit que les enfants s’exercent devant les maîtres ( pueri apud magistros exercentur ) et il ne faut évidemment pas confondre cette direction des exercices avec celle du maître de maison, du dominus qui possédait un droit de vie et de mort sur ses enfants et ses esclaves – ni avec celle du peuple souverain, maître de ses lois ( populi domini sunt legum ). Au Moyen-Âge le terme le plus empoyé pour désigner le maître est scolasticus (écolâtre), mais comme il signifie aussi "écolier", les auteurs lui préfèrent magister. {1} Le magister était le maître d’école, que l’on appelle instituteur depuis le Révolution française, en déplaçant le sens de ce dernier mot, qui désignait (celui que l’on appelle désormais) le précepteur. Le précepteur était chargé, dans le cadre familial, de mettre sur pied ( instituere ), de former et d’instruire. L’instituteur devenant professeur des écoles (1989) on pourrait croire que cette maîtrise a disparu si l’on ne prêtait aucune attention aux écoliers, qui n’ont pas cessé de s’adresser à la "maîtresse" et au "maître". Dans l’usage ces expressions s’effacent en sixième au profit de "monsieur" / "madame", de sorte que les professeurs de lycées et collèges ne seraient pas (au moins pour les élèves) des maîtres – malgré une formation reçue à partir des années 1990 dans les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres.
Quoi qu’il en soit la magistralité serait une relation de maîtrise civique, éducative et intellectuelle s’exerçant sur l’élève, distincte de la domination exercée sur l’enfant. Lorsque le capitaine d’un navire du XVIII e siècle accepte que les mousses et les cadets soient humiliés et asservis, il abuse de sa magistralité en se laissant emporter dans une logique de domination. Inversement, le maître d’école qui se ferait simple camarade n’assumerait pas la maîtrise que lui confère sa position, en refusant ce qu’il pense être une domination alors qu’il doit autoriser. Mais il reste à savoir ce qui caractérise précisément la magistralité…
Les chapitres qui composent ce livre sont organisés autour de trois thèmes : 1) présence et absence du maître, 2) immanence et transcendance du maître, 3) relation du maître et de la culture.
Présence et absence du maître
Comment éduquer un être libre ? Quelle présence peut avoir, ou être, un maître qui évite autant que faire se peut la domination asservissante ? Michel Soëtard analyse la complexité textuelle de l’ Émile de Rousseau, relativement au statut de l’auteur et du narrateur, à la figure du Gouverneur et au procédé éducatif. Le Gouverneur est présent et extrêmement attentif, mais en même temps, il n’est qu’une figure absente, laissant se développer l’enfant qu’il éduque. Cette figure de l’éducateur permet l’autonomie en laissant aller, sans caprice, la spontanéité naturelle – et en socialisant l’individu sans l’annexer. « Il faut une action spécifique qui intègre, en les dépassant ( aujhebt ), les deux pôles de la rencontre conflictuelle entre les désirs naturels et leur mise en ordre sociale. Cette action, ce sera l’éducation. » {2} D’où le paradoxe du pédagogue : l’éducation qui est un acte social doit s’effacer comme tel devant l’altérité naissante. Éduquer c’est diriger sans heurter la conscience enfantine : il faut ruser, non pas comme un prince dominant ses peuples, mais comme un « renard bienveillant » suivant l’expression de M ICHEL F ABRE, lecteur de La Fontaine. Ruser en organisant des situations éducatives – des problèmes – dont l’enfant ne pourra sortir sans progresser. La magistralité tient ici au rapport au temps, que l’éducateur considère sur une longue durée alors que l’enfant vit dans le présent, même si la prévoyance pédagogique ne peut considérer l’enfance exclusivement sous l’angle de la préparation à la vie adulte. De ce fait la relation éducative est dissymétrique et ne peut, sans être immorale pour autant, fonctionner sur le registre de la transparence (qu’exige Rousseau pour la relation entre adultes). Ainsi Émile n’est ni un traité ni un récit, c’est un texte rhétorique présentant un « répertoire de situations ou de figures pédagogiques » pour un éducateur qui ne pourra jamais, contrairement aux puérocentrismes de la transparence, se passer des ressorts de la ruse.
L’éducateur serait ainsi un maître s’effaçant, ou un maître effacé, tel un Socrate stérile accouchant les âmes. M AËLA P AUL explique comment les entraîneurs sportifs (les "coachs") s’étant aperçus que « l’adversaire intérieur » peut paralyser les meilleures champions, ont cherché à rapprocher leurs procédés réflexifs de l’ironie socratique, en cherchant à « détruire le maître dans le disciple » pour libérer le désir. Toutefois une telle (ré) éducation réflexive n’accouche pas l’âme en relation à la vérité spéculative, mais vise l’efficacité pragmatique d’un sujet dans un contexte moderne.
Quoi qu’il en soit, le maître d’école ne peut pas s’effacer au point d’anéantir son propre corps. Lorsque le maître est présent l’élève fait peut-être le mort ou le fou, mais s’il est absent que fait l’enfant ?
Il y a une difficulté des maîtres actuels à trouver leur posture, entre le corps distant et vertical du hussard noir de la République et le corps proche, maternel, presque fusionnel, du pédagogue camarade. Et ce d’autant plus que l’école, qui, « en tant qu’institution d’apprentissage de l’écrit » ( R ENAUD H ÉTIER), pouvait jusque-là conjoindre la confrontation et l’individualisation se trouve mise en difficulté par l’informatisation. Or l’élimination de « l’incarnation magistrale » du savoir dans les classes virtuelles ne mettrait peut-être pas en difficulté les apprentissages, mais bouleverserait la construction d’interdits fondamentaux, liée à la situation : dans l’institution scolaire les corps se font face avec le double risque que « l’élève peut séduire le maître » et le maître « frapper l’élève ».
Immanence et transcendance du maître
La deuxième partie du livre analyse la magistralité sous l’angle de l’opposition transcendance/immanence.
La controverse est vive dans le christianisme entre ceux qui insistent sur l’humanité de la relation d’enseignement et ceux qui pensent que sans la présence divine un homme ne peut ni enseigner ni apprendre. On sait que la relation des chrétiens médiévaux à l’école antique fût complexe {3} . Considérant le problème de l’éducation scolaire sur un plan philosophique J EAN- M ARC L AMARRE précise un aspect du différend entre augustinisme et thomisme. Le De Magistr

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