J’aime pas le lundi
40 pages
Français

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Description

Lucien, treize ans, sait que les vrais ennuis commencent aux portes du collège et ne s’arrêtent pas là. Il y a toujours un prof pour vous réveiller en plein cours et vous coller deux heures. En permanence, il n’y a personne. Ni Basile, son ami fidèle rebaptisé Croûton, ni Rosa, sa vieille copine peintre morte il y a 120 ans.
Là-bas, il n’y a que l’ennui. Et Lucien n’aime pas ça.
Comme il n’aime pas : les quatrièmes, les sixièmes, les cinquièmes, les troisièmes…
Pour s’occuper, Lucien a l’idée de dresser la liste de tout ce qu’il n’aime pas. Il est sonné devant l’ampleur de la tâche. Justement, Lucien vient d’atterrir sur le menton d’une fille. Elle s’appelle Fatou et c’est un phénomène.
Tout le monde a peur d’elle. C’est dit, Lucien ne l’aime pas, et c’est réciproque. Fatou propose un duel : celui qui déteste le plus de choses au monde l’emporte. Ça, Lucien aime bien.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2018
Nombre de lectures 12
EAN13 9782211218917
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le livre
Lucien, treize ans, sait que les vrais ennuis commencentaux portes du collège et ne s’arrêtent pas là. Il y a toujoursun prof pour vous réveiller en plein cours et vous collerdeux heures. En permanence, il n’y a personne. Ni Basile,son ami fidèle rebaptisé Croûton, ni Rosa Bonheur, savieille copine peintre morte il y a 120 ans.
Là-bas, il n’y a que l’ennui. Et Lucien n’aime pas ça.
Comme il n’aime pas : les quatrièmes, les sixièmes, lescinquièmes, les troisièmes…
Pour s’occuper, Lucien a l’idée de dresser la liste detout ce qu’il n’aime pas. Il est sonné devant l’ampleur de latâche. Justement, Lucien vient d’atterrir sur le mentond’une fille. Elle s’appelle Fatou et c’est un phénomène.
Tout le monde a peur d’elle. C’est dit, Lucien ne l’aimepas, et c’est réciproque. Fatou propose un duel : celui quidéteste le plus de choses au monde l’emporte. Ça, Lucienaime bien.
 

L’auteur
Jérôme Lambert est né à Nantes en 1975 et vit aujourd’hui à Paris où il travaille à présent dans l’édition.Tout en lisant beaucoup, il traduit les auteurs qu’il aime(comme Chaim Potok et Jerry Spinelli) et écrit à son tour.Outre ses livres à l’école des loisirs , il a publié deux romans La Mémoire neuve en 2003 et Finn Prescott en 2007 auxéditions de l’Olivier.
 
« Jérôme Lambert a le chic pour dire avec humour etélégance, les tourments de l’adolescence, l’embarrasde soi-même et de son corps, le sentiment, toujours,d’être comme une mouche dans un bol de lait. »
Michel Abescat, Télérama
 

Jérôme Lambert
 
 

J’aime pas le lundi
 
 

Neuf
l’école des loisirs
11, rue de Sèvres, Paris 6 e
 

pour Pauline et pour Ondine,
que j’aime du lundi au dimanche
 
– Lemeur ! Vous dormez ?
Apparemment la question s’adresse à moi.D’ailleurs, étant donné le ton aimable sur lequelces trois mots viennent de traverser la salle commedes boulets de canon, on ne peut pas exactementparler de question. On est plus proche de la gifle.
Quoi qu’il en soit, je suis le seul à porter cenom dans cette classe de trente-quatre élèves etje ne peux pas faire semblant plus longtemps.Franchement, ça ne m’arrange pas. Je me seraisbien passé d’un réveil aussi brutal. Parce que, pourrépondre à la question du gracieux M. Pointellequi me sert de prof de SVT, eh bien, oui, je dormais. Et profondément en plus. Je sais que jene suis pas en position d’exprimer mon point devue à ce moment précis, mais je le donne quandmême : je déteste être réveillé brusquement. Surtout pour entendre mon nom de famillehurlé par un petit caporal ventru du genre dePointelle.
– Non, non, monsieur, je réfléchissais, lui ai-jerépondu d’une voix de zombie.
On ne sait jamais, ça peut marcher.
– Eh bien, allez réfléchir en salle de permanence pendant deux petites heures et revenezquand ça ira mieux. Et vous passerez chez leCPE, histoire de lui faire part de vos réflexions.
Bon, ça n’a pas marché. Petit Caporal Ventrun’est pas idiot et il a du métier, de la bouteille,comme il dit. D’ailleurs il le répète souvent et àn’importe quelle occasion : « J’ai d’la bouteille, mesp’tits gars. Ne me prenez pas pour un imbécile. »
 
Je rassemble mes idées et mes affaires et je melève, majestueux et réveillé. L’important, c’estd’avoir l’air digne en remontant l’allée qui mèneà la porte. L’important, c’est que les copainssentent que je suis de leur côté, que j’ai tenu têteau prof, voire que c’est pas bien grave d’aller enperm’ pour ça, que je m’en fiche complètement et que ça m’amuse plutôt. L’important, c’estd’avoir un petit sourire au coin des lèvres pourque les copains prennent mon inconscience pourdu courage. L’important, c’est de regarder le profdans les yeux et d’entendre les copains étoufferun rire complice.
Enfin, c’est important quand on a des copains.
Et je dois bien reconnaître que ce n’est pas magrande spécialité. Je ne suis pas seul au mondedans ce collège, attention. Je ne suis pas un casisolé qui passerait ses récréations assis en tailleursur le bitume, s’agitant silencieusement d’avanten arrière pour tenter de communiquer mentalement avec ses amis les insectes. Mais disons queje ne suis pas non plus la nouvelle star de la cour.
J’ai un bon copain, Croûton, un héritage del’école primaire. Bien sûr, il ne s’appelle pas Croûton. Il s’appelle Basile. C’était le seul de la classede CP que j’aimais parmi les autres. Or les croûtons sont les seuls ingrédients que j’aime dans lasalade César. Quand on s’est rendu compte versle CM2 que nos prénoms n’étaient plus donnésà aucun enfant depuis plus de cent cinquante ans, quand on a découvert que nos parents respectifsétaient atteints du même mal qui consiste à infliger à leur progéniture des noms préhistoriquessans se soucier de leur vie future et de leur intégration sociale, on a décidé de prendre les chosesen main et de rendre son surnom public. Alorsvoilà, c’est Basile qui a pris et qui est devenuCroûton. Il ne s’en est jamais plaint et c’est resté.
 
En matière de copains, on peut aller jusqu’àdeux si on compte Rosa. Rosa, c’est la dame quidonne son nom au collège et dont le portrait estsuspendu dans le hall d’entrée. Rosa est morte ily a cent vingt ans, on ne peut donc pas vraimentla considérer comme une copine. Pourtant je luiparle matin et soir quand je passe devant elle,c’est la moindre des choses. Elle est là tous lesjours, elle a sûrement eu une vie chouette remplie de choses bonnes et justes, et pour la récompenser on donne son nom à un collège. Sympa.Ça ne donne pas envie de faire des choses biendans la vie. Sur ce tableau, elle porte une granderobe noire avec un tas de nuances incroyables dont je n’aurais jamais soupçonné l’existence.Du noir mat, du noir brillant, du noir gris, dunoir profond et moelleux comme du veloursqu’on croirait vrai, du noir fluide et irisé commede l’encre, ou du noir figé et texturé comme ducharbon. Et un noir encore différent pour tousles petits boutons qui ferment son corsage. Unecollerette en dentelle blanche assez rigoloteforme comme une étoile tout autour de son couet s’étale jusqu’à ses épaules, elle regarde au loincomme si elle attendait quelque chose ouquelqu’un pour la débarrasser de son ennui. Letout appuyé sur un bœuf. Oui, oui, l’animal. Sonbras droit est négligemment, mais élégammentposé à la perpendiculaire de son buste, elle tientun pinceau ou un stylo au bout des doigts, saufque là où d’habitude, dans un tableau classique,elle se serait appuyée sur un fauteuil rouge trèsélégant, un chevalet de peintre ou même unegrosse coquille Saint-Jacques dorée, eh bien, là,c’est un bœuf. Un bœuf roux et gras qui sedemande bien ce qu’il fait là et qui fixe le spectateur d’un air pas commode et très stupide. Un bœuf qui aurait pu être prof de SVT, parexemple.
Bref, Rosa est une copine, une amie personnelle, mais je ne préfère pas l’ébruiter, histoirequ’on ne me prenne pas pour un dingue.
Même Croûton ignore tout de mon amitiéavec elle.
Voilà, on a fait le tour de mes amis, copains,proches et autres connaissances. Je sais, c’est peu,très peu, c’est un butin assez maigre pour un garçon de treize ans scolarisé et entouré de l’amourdes siens, mais je n’ai rien à ajouter, personned’autre à inscrire au palmarès. Pas même unchien fidèle ou un poisson rouge déprimé. Ausujet de l’amitié, je me rassure, si besoin, en pensant à une phrase que m’avait dite un jour madouce et bouclée baby-sitter : « Ce n’est pas unami que l’ami de tout le monde. » Contrairementà beaucoup de ces phrases d’adultes qu’on necomprend pas à l’âge de huit ans mais seulementdes années plus tard, celle-ci s’était plantée dansmon cerveau et quelque part dans ma poitrine etelle m’avait réchauffé.
Une fois sorti de la classe de Petit CaporalVentru À Tête De Bœuf Roux, je me dirige versla salle de permanence puisque telle est ma peineà purger. Je fais un petit détour pour passerdevant Rosa, je lui dis qu’elle a de la chance dene pas avoir SVT le lundi matin à 9 heures, etque Bonheur est tout de même un nom defamille beaucoup plus agréable à entendre auréveil que Lemeur, même si ça finit pareil. Ellene réagit pas, mais je suis sûr qu’elle compatit.
 
Nous sommes quatre dans la salle de permanence et je me sens très seul au monde. Là, pourle coup, j’aimerais avoir un chien.
Je m’assois en soupirant. Je me demande ceque je vais faire de ces deux heures de videabsolu en dehors des exercices que Bœuf Ventrum’a ordonné de résoudre. Je sors machinalementun cahier et un crayon. J’essaie de dessiner Pointelle en train de brouter dans un pré. Sa pansetombe mollement sur l’herbe, des moucheronstournent autour de son énorme postérieur, etson regard est plus abruti que jamais. Je sais, et je n’en suis pas fier, ce n’est pas très noble, c’est unepetite vengeance de ma part, mais c’est trèsSciences de la Vie et de la Terre comme dessinfinalement. Je suis un élève sérieux et concernéquand je m’y mets.
Malheureusement, ma petite blague nem’amuse que cinq minutes et il m’en reste centcinq à faire passer.
Je reste rêveur à contempler par les carreauxsales de la fenêtre le ciel qui est en train de sedégager, qui semble décidé à me laisser apercevoir un peu de bleu. Je dois ressembler à un penseur à l’air absent et vide. Ajoutez-moi unecollerette et je serai le frère jumeau de Rosa dansson tableau.
J’aime pas le lundi.
J’aime pas Pointelle ni le CPE.
Pour faire court : j’aime pas le collège.
C’est dit.
C’est dit, c’est écrit et ça fait déjà trois lignes.Trois lignes en une minute, c’est un bon rendement pour un lundi matin.
Ce n’était pourtant pas compliqué ! J’ai trouvé comment occuper les cent quatre minutes qu’ilme reste à passer dans cette magnifique salle dontla peinture jaunasse et sèche forme des rouleauxcraquelés aux angles du plafond : je vais dresserune liste. Une liste de tout ce que je n’aime paspuisque je suis parti sur ma lancée. Allez, au boulot, mon Lemeur ! Pas de quartier ni de bonssentiments.
Pour le coup, Bœuf Pansu aurait pu me mettre au moins trois heures de colle, ça m’auraitarrangé pour une fois. Deux he

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