Y'a qu'à

Claire Laroussinie

Description

Ce matin, devant tout le monde, la maîtresse a dit : « Les enfants, je voudrais attirer votre attention sur le courage de Madame Fey, la maman de Gabrielle. Raconte-nous. Où est-elle partie et que fait-elle ? »
Gabrielle n'a rien répondu. Parce qu'elle n'avait aucune envie de répondre. Il paraît que c'est formidable les gens qui partent bénévolement dans des pays lointains pour aider les victimes de la guerre. Mais Gabrielle ne comprend pas pourquoi sa maman tient absolument à s'occuper d'enfants du Kosovo alors qu'elle a déjà une fille à la maison. À quoi ça rime ?
Gabrielle fait chaque jour des voeux secrets pour que sa maman revienne. Elle se sent prête à tout pour ça. Y compris à faire elle-même quelque chose de formidable.

Sujets

• Butch and femme
• Kosovo
• Solidarité
• Images de la femme en Occident
• Mère
• Femme

Informations

• Publié par: L'école des loisirs
• Date de parution: 14 décembre 2015
• Nombre de lectures: 18
• EAN13: 9782211226271
• Langue: Français

Extrait

Le livre
Ce matin, devant tout le monde, la maîtresse a dit : « Lesenfants, je voudrais attirer votre attention sur le couragede Madame Fey, la maman de Gabrielle. Raconte-nous.Où est-elle partie et que fait-elle ? »
Gabrielle n’a rien répondu. Parce qu’elle n’avait aucune envie de répondre. Il paraît que c’est formidable lesgens qui partent bénévolement dans des pays lointainspour aider les victimes de la guerre. Mais Gabrielle necomprend pas pourquoi sa maman tient absolument às’occuper d’enfants du Kosovo alors qu’elle a déjà une filleà la maison. À quoi ça rime ?
Gabrielle fait chaque jour des vœux secrets pour que samaman revienne. Elle se sent prête à tout pour ça. Y compris à faire elle-même quelque chose de formidable.
 

L’auteure
Claire Laroussinie a commencé à écrire à neuf ans et ellerêve de passer son temps à ne rien faire d’autre. L’écriturelui permet d’inventer des histoires et de créer des personnages « auxquels elle donne tous les courages qu’elle n’apas ». Elle a toujours vécu dans un monde d’enfants, ausein d’une famille nombreuse.
 

Claire Laroussinie
 
 

Y’ a qu’à
 
 

Neuf
l’école des loisirs
11, rue de Sèvres, Paris 6 e
 

Pour Mireille
 
et Karine Sabatier
C HAPITRE  1
 
Sept.
Il y a en tout sept barrettes dans lescheveux des filles ce matin. C’est lecours de Géo, là, et Gabrielle sait déjàque la France est comprise entre le 42 e et le 51 e degré de latitude nord. Ellesait qu’elle est située dans la zone tempérée atlantique. Elle l’a lu et puis ça luiest resté en mémoire : depuis quelquetemps, elle a commencé à lire le dictionnaire. Il n’y a pratiquement pas delivres chez elle. Alors elle a lu lesrecettes de cuisine de Maman, elle en connaît plein par cœur et quand elles’ennuie trop, elle les réalise. Son pèredit qu’il a pris 4 kilos. Gabrielle ne saitfaire que les desserts. C’est plus facile.
Il n’y a pas beaucoup de livres chezGabrielle, parce que son père s’inquiètede ses clients : que des nuls en mathsqui ont besoin d’un comptable. Et samère trouve Gabrielle trop chanceusedans la vie pour s’occuper d’elle. Sonmétier c’est bénévole. Ça lui a prisquand Gabrielle était petite : elle n’avaitque cinq ans alors que maintenant elleen a huit et demi !
Maman avait arrêté de travailler pourl’élever. Elles ont bien rigolé toutes lesdeux : des câlins, des fous rires, des glissades sur les toboggans, des bisous.
Et puis quand Gabrielle est entrée àl’école maternelle, sa mère n’avait plus envie d’aller dans un bureau tous lesjours. Papa a eu l’idée du bénévolat.C’est quand on travaille sans gagnerd’argent.
Maman a distribué de la nourritureà des gens sans maison, elle est allée liredes histoires aux enfants dans les hôpitaux et leur a chanté des chansons.
Elle a fait plein d’autres chosesencore. Et puis l’autre jour, elle aregardé le journal de 20 heures une foisde trop.
Elle a décrété que dans un pays loin,dans une région pleine de o, le Kosovo,des enfants albanais avaient besoind’elle... Parce que chez eux il y a laguerre et qu’ils perdent leurs maisons,leurs parents et tout ça.
 
Bon. D’accord.
– Y’a qu’à éteindre la télé, a tentéGabrielle, ou changer de chaînecomme ça les Albanais pourront sortirdu journal et rentrer dîner chez eux.
C’est un peu difficile de réaliser quece qui se passe dans la télé tous les soirsvers 20 heures, est vraiment réel. Parfois elle a l’impression qu’il suffit dechanger de chaîne, pour que les Lambert et les Foster ne se chamaillent plussur la 6, ou d’éteindre le poste pour queles Albanais du Kosovo sortent du journal sur la 2 et rentrent dîner chez eux.
 
Papa était tout penaud. Le bénévolat, au départ c’était son idée à lui.Alors des fois, il ferait mieux de se taire.
C HAPITRE  2
 
De toute façon, en classe, la plupart dutemps, Gabrielle se morfond. Alors ellecompte. Le nombre d’élèves qui ontdes taches de rousseur, combien portentun jean aujourd’hui. Combien de fillessont en jupe. Combien de bijoux portela maîtresse.
Et puis, c’est en discutant avec Graham, son meilleur copain, que Gabrielle a l’idée des vœux. Ils cherchenttous les deux comment obtenir quelquechose que l’on veut vraiment. Grahamveut un VTT. Alors il y a plusieurschoses à faire :
– Il faut trouver un trèfle à quatrefeuilles. Frotter des lampes pour faire sortir un génie qui doit nous donner tout cequ’on lui demande. Faire des paris,comme parier qu’il va pleuvoir demainet si ça arrive, alors j’aurai mon VTT.
– Et ça marche ?
Graham n’en sait rien. Il a commencé cette histoire de vœux pour levélo et son anniversaire est dans sixmois.
C’est toujours comme ça ! Graham ades idées farfelues sur tout. Et il sedébrouille pour que ce soit Gabriellequi les mette en pratique la première.
D’ailleurs, elle se fait avoir à chaquefois.
 
Onze jeans.
Et vingt chewing-gums !
Gabrielle a compté, il y a en toutonze élèves qui portent un jean dans saclasse ce matin. Et vingt mâchouillentdu chewing-gum en rythme. C’estArnaud qui en a ramené un sac plein.