Esquisse d un tableau historique des progrès de l esprit humain
127 pages
Français

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Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain , livre ebook

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Description

Extrait : "L'Homme naît avec la faculté de recevoir des sensations, d'apercevoir et de distinguer, dans celles qu'il reçoit, les sensations simples dont elles sont composées, de les retenir, de les reconnaître, de les combiner,[...], de comparer entre elles ces combinaisons, de saisir ce qu'elles ont de commun et ce qui les distingue, d'attacher des signes à tous ces objets, pour les reconnaître mieux, et s'en faciliter de nouvelles combinaisons..."

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Nombre de lectures 51
EAN13 9782335030327
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335030327

 
©Ligaran 2015

Avertissement
Condorcet proscrit, voulut un moment adresser à ses concitoyens un exposé de ses principes, et de sa conduite comme homme public. Il traça quelques lignes ; mais prêt à rappeler trente années de travaux utiles, et cette foule d’écrits, où depuis la Révolution on l’avait vu attaquer constamment toutes les institutions contraires à la liberté, il renonça à une justification inutile. Étranger à toutes les passions, il ne voulut pas même souiller sa pensée par le souvenir de ses persécuteurs ; et dans une sublime et continuelle absence de lui-même, il consacra à un ouvrage d’une utilité générale et durable, le court intervalle qui le séparait de la mort. C’est cet ouvrage que l’on donne aujourd’hui ; il en rappelle un grand nombre d’autres, où dès longtemps les droits sacrés des hommes étaient discutés et établis ; où la superstition avait reçu les derniers coups ; où les méthodes des sciences mathématiques, appliquées à de nouveaux objets, ont ouvert des routes nouvelles aux sciences politiques et morales ; où les vrais principes du bonheur social ont reçu un développement et un genre de démonstration inconnu jusqu’alors ; où, enfin, on retrouve partout des traces de cette moralité profonde qui bannit jusqu’aux faiblesses de l’amour-propre, de ces vertus inaltérables, près desquelles on ne peut vivre sans éprouver une vénération religieuse.
Puisse ce déplorable exemple des plus rares talents perdus pour la patrie, pour la cause de la liberté, pour les progrès des lumières, pour leurs applications bienfaisantes aux besoins de l’homme civilisé, exciter des regrets utiles à la chose publique ! Puisse cette mort, qui ne servira pas peu, dans l’histoire, à caractériser l’époque où elle est arrivée, inspirer un attachement inébranlable aux droits dont elle fut la violation ! C’est le seul hommage digne du sage, qui, sous le glaive de la mort, méditait en paix l’amélioration de ses semblables ; c’est la seule consolation que puissent éprouver ceux qui ont été l’objet de ses affections, et qui ont connu toute sa vertu.
Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain
L’homme naît avec la faculté de recevoir des sensations, d’apercevoir et de distinguer, dans celles qu’il reçoit, les sensations simples dont elles sont composées, de les retenir, de les reconnaître, de les combiner, de conserver ou de rappeler dans sa mémoire, de comparer entre elles ces combinaisons, de saisir ce qu’elles ont de commun et ce qui les distingue, d’attacher des signes à tous ces objets, pour les reconnaître mieux, et s’en faciliter de nouvelles combinaisons.
Cette faculté se développe en lui par l’action des choses extérieures, c’est-à-dire, par la présence de certaines sensations composées, dont la constance, soit dans l’identité de leur ensemble, soit dans les lois de leurs changements, est indépendante de lui. Il l’exerce également par la communication avec des individus semblables à lui ; enfin, par des moyens artificiels, qu’après le premier développement de cette même faculté, les hommes sont parvenus à inventer.
Les sensations sont accompagnées de plaisir et de douleur ; et l’homme a de même la Faculté de transformer ces impressions momentanées en sentiments durables, doux ou pénibles ; d’éprouver ces sentiments à la vue ou au souvenir des plaisirs ou des douleurs des autres êtres sensibles. Enfin, de cette faculté unie à celle de former et de combiner des idées, naissent, entre lui et ses semblables, des relations d’intérêt et de devoir auxquelles la nature même a voulu attacher la portion la plus précieuse de notre bonheur et les plus douloureux de nos maux.
Si l’on se borne à observer, à connaître les faits généraux et les lois constantes que présente le développement de ces facultés, dans ce qu’il a de commun aux divers individus de l’espèce humaine, cette science porte le nom de Métaphysique.
Mais si l’on considère ce même développement dans ses résultats, relativement à la masse des individus qui coexistent dans le même temps sur un espace donné, et si on le suit de générations en générations, il présente alors le tableau des progrès de l’esprit humain. Ce progrès est soumis aux mêmes lois générales qui s’observent dans le développement individuel de nos facultés, puisqu’il est le résultat de ce développement, considéré en même temps dans un grand nombre d’individus réunis en société. Mais le résultat que chaque instant présente, dépend de celui qu’offraient les instants précédents, et influe sur celui des temps qui doivent suivre.
Ce tableau est donc historique, puisque, assujetti à de perpétuelles variations, il se forme par l’observation successive des sociétés humaines aux différentes époques qu’elles ont parcourues. Il doit présenter l’ordre des changements, exposer l’influence qu’exerce chaque instant sur celui qui le remplace, et montrer ainsi, dans les modifications qu’a reçues l’espèce humaine, en se renouvelant sans cesse au milieu de l’immensité des siècles, la marche qu’elle a suivie, les pas qu’elle a faits vers la vérité ou le bonheur. Ces observations, sur ce que l’homme a été, sur ce qu’il est aujourd’hui, conduiront ensuite aux moyens d’assurer et d’accélérer les nouveaux progrès que sa nature lui permet d’espérer encore.
Tel est le but de l’ouvrage que j’ai entrepris, et dont le résultat sera de montrer, par le raisonnement et par les faits, qu’il n’a été marqué aucun terme au perfectionnement des facultés humaines ; que la perfectibilité de l’homme est réellement indéfinie ; que les progrès de cette perfectibilité, désormais indépendante de toute puissance qui voudrait les arrêter, n’ont d’autre terme que la durée du globe où la nature nous a jetés. Sans doute, ces progrès pourront suivre une marche plus ou moins rapide, mais jamais elle ne sera rétrograde, du moins tant que la terre occupera la même place dans le système de l’univers, et que les lois générales de ce système ne produiront sur ce globe ni un bouleversement général, ni des changements qui ne permettraient plus à l’espèce humaine d’y conserver, d’y déployer les mêmes facultés, et d’y trouver les mêmes ressources.
Le premier état de civilisation où l’on ait observé l’espèce humaine, est celui d’une société peu nombreuse d’hommes subsistants de la chasse et de la pêche, ne connaissant que l’art grossier de fabriquer leurs armes et quelques ustensiles de ménage, de construire ou de se creuser des logements, mais ayant déjà une langue pour se communiquer leurs besoins, et un petit nombre d’idées morales, dont ils déduisent des règles communes de conduite, vivant en familles, se conformant à des usages généraux qui leur tiennent lieu de lois, et ayant même une forme grossière de gouvernement.
On sent que l’incertitude et la difficulté de pourvoir à sa subsistance, l’alternative nécessaire d’une fatigue extrême et d’un repos absolu, ne laissent point à l’homme ce loisir, où, s’abandonnant à ses idées, il peut enrichir son intelligence de combinaisons nouvelles. Les moyens de satisfaire à ses besoins sont même trop dépendants du hasard et des saisons, pour exciter utilement une industrie dont les progrès puissent se transmettre ; et chacun se borne à perfectionner son habileté ou son adresse personnelle.
Ainsi, les progrès de l’espèce humaine durent alors être très lents ; elle ne pouvait en faire que de loin en loin, et lorsqu’elle était favorisée par des circonstances extraordinaires. Cependant, à la subsistance tirée de la chasse, de la pêche, ou des fruits offerts spontanément par la terre, nous voyons succéder la nourriture fournie par des animaux que l’homme a réduits à l’état de domesticité, qu’il sait conserver et multiplier. À ces moyens se joint ensuite une agriculture grossière ; il ne se contente plus des fruits ou des plantes qu’il rencontre ; il apprend à en former des provisions, à les rassembler autour de lui, à les semer ou les planter, à en favoriser la reproduction par le travail de la culture.
La propriété qui, dans le premier état, se bornait à celle des animaux tués par lui, de ses armes, de ses filets, des ustensiles de son ménage, devint d’abord celle de son troupeau, et ensuite, celle de la terre qu’il a défrichée et qu’il cultive. À la mort du chef, cette propriété se transmet naturellement à la famille. Quelques-uns possèdent un superflu susceptible d’être conservé. S’il est absolu, il fait naître de nouveaux besoins ; s’il n’a lieu que pour une seule

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