Les blogs : écritures d un nouveau genre ?
199 pages
Français

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Les blogs : écritures d'un nouveau genre ? , livre ebook

199 pages
Français

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Description

Parler de genre à propos des blogs, c'est moins chercher à découvrir une espèce littéraire nouvelle dans ce corpus hétérogène et massif que tenter de définir, au-delà des spécifications techniques et fonctionnelles, un objet esthétique. Le blog invente ses usages, ses communautés, ses configurations poétiques - autant de caractéristiques par lesquelles il fait genre. Entre contrainte de forme et liberté de parole, les déclinaisons multiples du blog décrivent aussi l'aventure d'une écriture.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2010
Nombre de lectures 119
EAN13 9782296700550
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les blogs
Écritures d’un nouveau genre ?
Itinéraires. Littérature, textes, cultures

2010, 2


Les blogs
Écritures d’un nouveau genre ?


Centre d’Étude des Nouveaux Espaces Littéraires
Université Paris 13


L’Harmattan
Direction
Anne Tomiche et Pierre Zoberman

Comité de rédaction
Anne Coudreuse, Vincent Ferré, Xavier Garnier, Marie-Anne Paveau,
Christophe Pradeau.

Comité scientifique
Ruth Amossy, Marc Angenot, Philippe Artières, Isabelle Daunais, Papa Samba Diop, Ziad Elmarsafy, Éric Fassin, Gary Ferguson, Véronique Gély, Elena Gretchanaia, Anna Guillo, Akira Hamada, Thomas Honegger, Alice Jardine, Philippe Lejeune, Marielle Macé, Valérie Magdelaine-Andrianjafitrimo, Dominique Maingueneau, Hugues Marchal, William Marx, Jean-Marc Moura, Christiane Ndiaye, Mireille Rosello, Laurence Rosier, Tiphaine Samoyault, William Spurlin.

Secrétariat d’édition
Centre d’Étude des Nouveaux Espaces Littéraires
François-Xavier Mas (Paris 13, UFR LSHS)
Université Paris 13
99, av. Jean-Baptiste Clément
93430 Villetaneuse

Diffusion, vente, abonnements
Éditions L’Harmattan
5-7, rue de l’École polytechnique
75005 Paris
Périodicité
4 numéros par an.
Publication subventionnée par l’université Paris 13.

© L’HARMATTAN, 2010
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-12012-9
EAN : 9782296120129

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Introduction
Il serait curieux de tout publier.
Raymond Queneau {1}

Les blogs forment un corpus à la fois hétérogène et massif. Leur nombre croissant, au-delà du phénomène de mode, marque un retour en force du « je », s’énonçant à travers une large variété de thèmes, de styles, d’approches. Mais à travers cette diversité, qu’ils le théorisent explicitement ou que leur pratique seule le signale, ils apparaissent comme un lieu d’expression spécifique, adapté à de nouvelles contraintes et générant de nouveaux codes, susceptible de repenser les champs de l’écriture et de la publication – création, édition, liberté d’expression, réseaux de sociabilité, légitimité des écrits, frontières des genres…
Écritures en recherche
L’écriture des blogs ne s’invente pas ex nihilo. Elle suppose souvent l’adhésion à un genre constitué (roman, poème, aphorismes, récit de voyage, journal intime, essai, critique, article de journal, etc.), nécessairement travaillé – et potentiellement déformé – par l’actualisation singulière qu’en propose le blog. Elle peut au contraire choisir le porte-à-faux, soit par la revendication d’une forme nouvelle, soit par une pratique déroutante, hybridant, remixant, détournant les canons génériques pour mieux s’en distinguer. Elle accentue, enfin, l’importance de « l’image du texte », de « l’énonciation éditoriale {2} », à travers des modalités qui, sans être propres à Internet, sont encouragées par ce cadre : arborescence, interactivité, standardisation des mises en œuvre.
Ce désir d’écrire autrement peut faire du blog un lieu de contestation des institutions (littéraires, éditoriales, médiatiques, éducatives…), un espace d’émergence, réelle ou supposée, de contre-pouvoirs ou de systèmes de valeurs parallèles. C’est aussi un lieu d’engagement créatif : l’implication des internautes débouche volontiers sur des manifestes, c’est un appel à la discussion, à la prise d’initiative. Ce positionnement invite à réfléchir sur des notions telles que la démocratie participative, les communautés idéologiques ou thématiques, les écritures du collectif. Il débouche sur une culture du « happy few », en suggérant la création de communautés d’auteurs et de lecteurs (larges ou plus restreintes comme le montre le phénomène des blogs privés), réseaux de sociabilité parallèles qui forment de nouveaux salons ou cénacles. Les paroles de connaisseurs, le lexique renouvelé par des néologismes ou émaillé par des gimmicks fonctionnent comme des signes de reconnaissance. Les « niches » se multiplient sur le net, tandis que le libre jeu sur les identités pseudonymiques, les indices de connivence construisent un espace relationnel à géométrie variable.
Qu’écrire dans un blog ? Quatre axes configurent les objets qu’il se donne. D’un côté, les « choses vues », qui tirent le blog vers le journal, le bloc-notes, l’écriture fragmentaire, et l’orientent vers le réel. De l’autre, l’« extimité {3} », qui tend vers une écriture publique de l’intime, entre exposition de soi et mise en débat, égocentrisme et engagement. Puis le savoir, qui fait du blog le lieu privilégié d’un partage des connaissances et des savoir-faire, un outil de vulgarisation ou de sensibilisation. Enfin, la création littéraire ou artistique. Les quatre peuvent bien sûr se rejoindre, par exemple dans certaines formes du journal intime.
Le geste créateur suppose également une réflexion spécifique. La première question est celle de ses modalités. A-t-il lieu directement sur la page web, ou bien a-t-il ses brouillons, ses étapes préalables, voire ses variantes « papier » ? On peut se demander comment il se rattache à une identité (pseudonyme), voire à une communauté. Sa pâte, son empreinte, sa trace doivent en général être reconsidérées dans ce contexte virtuel, à la lumière de ses contraintes matérielles – morcellement, taille, périodicité, fixité des formes, impératifs techniques – ou éthico-poétiques – contrat avec les lecteurs, autocensure. La seconde question est celle de ses motivations : qu’est-ce qui détermine la prise de parole ? Le choix du blog de préférence à un autre support a des implications sur le geste d’écriture, il programme une certaine forme d’engagement ou de mise à distance, et lie par ce contrat son lecteur, invité, la plupart du temps, à réagir.
L’activité du lecteur constitue donc aussi une piste de réflexion privilégiée. Il a sa part dans ce processus d’écriture au long cours, intervenant sur la création (interactivité) ou l’évaluation de l’œuvre (réception). Cependant, selon les blogs, la marge de liberté qui lui est donnée est variable, et suppose donc une ouverture graduée du corpus au lecteur. Variable aussi est la liberté qu’il se donne, lorsque surgit ce désir d’écrire à son tour, à visage découvert ou abrité par un pseudonyme, la nature de ses commentaires pouvant aller de l’avis de consommateur au dialogue critique, voire à l’émulation créatrice.
Au sein de cette écriture accumulative et interactive, le rapport à la temporalité s’avère complexe, « l’œuvre » tendant à s’effacer au profit d’un work in progress potentiellement infini. Le bouleversement de l’ordre écriture/achèvement de l’œuvre/lecture, l’immédiateté et l’éventuelle discontinuité de la lecture modifient nos habitudes de réception. D’où, aussi, des problématiques mémorielles qui touchent à la genèse textuelle, au souci de laisser une trace, à la relation à la postérité.
La redéfinition de la valeur, enfin, semble ici essentielle. Éviter la sanction éditoriale, c’est aussi se priver de sa sanctification et de son système de légitimation. La crainte de la « poubellication » n’est pas toujours à l’horizon, mais la démultiplication des jugements de valeur dans les commentaires génère une certaine inquiétude, contrebalancée par les ressources de l’« autoritativité {4} ». Beaucoup de blogs posent plus ou moins directement la question de la légitimité de celui qui parle : sa présentation – portrait formel, ironique ou intimiste, en quidam ou en spécialiste –, son rattachement à une institution – ou son refus de s’y rattacher –, sont autant d’indices révélant d’où il parle.
Du genre blog
Poser la question du blog comme genre s’avère complexe. Il ne s’agit pas ici de faire à tout prix du blog un genr

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