Les Folles-brises
84 pages
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Les Folles-brises , livre ebook

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Description

Extrait : "En l'année 1803 ou 1804, quelque temps après le commencement de la guerre acharnée qui venait de se rallumer entre la France et l'Angleterre, on vit arriver à Brest un jeune homme auquel d'abord personne ne prit garde, et qui bientôt sut se venger du dédain avec lequel on l'avait accueilli en se faisant, par son seul mérite, une des réputations les plus populaires que l'ont ait vu briller dans les fastes de notre marine." À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN : Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants : Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin. Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Publié par
Nombre de lectures 20
EAN13 9782335068641
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335068641

 
©Ligaran 2015

Les marins nomment folles-brises ces légères bouffées de vent qui, pendant les calmes plats, naissent de tous les points de l’horizon pour venir effleurer la surface de la mer, et pour disparaître aussitôt sans laisser après elles la trace de leur passage sur les flots, ou l’indice de la direction qu’elles ont prise en s’évanouissant dans les airs.
Cette définition explique la raison pour laquelle on a donné le titre de Folles-Brises aux différentes pièces qui composent l’ouvrage que nous mettons aujourd’hui sous les yeux de nos lecteurs.
Marquis et comtesse
En l’année 1803 ou 1804, quelque temps après le commencement de la guerre acharnée qui venait de se rallumer entre la France et l’Angleterre, on vit arriver à Brest un jeune homme auquel d’abord personne ne prit garde, et qui bientôt sut se venger du dédain avec lequel on l’avait accueilli en se faisant, par son seul mérite, une des réputations les plus populaires que l’on ait vu briller dans les fastes de notre marine.
Le jeune étranger dont nous avons à nous occuper, en se présentant au bureau des classes pour obtenir la très mince faveur de naviguer en qualité de novice ou de matelot sur un des bâtiments en partance, avoua qu’il n’avait pas encore vu la mer, quoique la vocation qu’il croyait se sentir l’eût toujours porté à embrasser la profession de marin. Il était grand et robuste, vif, délié et joli garçon ; sa physionomie intelligente et sa mise assez recherchée semblaient annoncer qu’il appartenait à une famille aisée ; et, à la manière dont il s’exprimait, on pouvait même supposer qu’il avait déjà reçu une certaine éducation, ou tout au moins acquis quelque petite habitude du monde. Le citoyen chef de l’inscription maritime à qui il avait fallu qu’il s’adressât en premier lieu lui demanda d’un ton protecteur et quelque peu aristocratique, mais pourtant assez bienveillant, quel était son nom et quel âge il avait. Le jeune volontaire répondit qu’il allait bientôt avoir dix-huit ans et qu’il se nommait tout simplement Ernestin Taillebois. Après avoir posé ces deux petites questions préliminaires au futur amiral, le commissaire jeta un coup d’œil distrait sur les papiers dont notre nouvel enrôlé avait eu soin de se munir en partant de chez lui. Les papiers se trouvèrent en règle, et dans moins d’un quart d’heure Ernestin Taillebois, ou M. de Taillebois, si mieux vous semble pour le moment, se vit inscrit, à sa grande satisfaction, sur le rôle d’équipage de la corvette de la République la Prévoyante , avec le grade de novice citoyen à la paye de 4 francs 50 centimes par décade.
La malle, ou, pour mieux dire, le sac de nuit du petit navigateur ne fut ni long ni difficile à faire : un paletot bleu, une demi-capote brune, deux pantalons, six chemises, deux paires de souliers et un chapeau de cuir bouilli composèrent toute sa garde-robe de voyage. Cependant, outre ce bagage, réduit aux strictes conditions du nécessaire et aux minces proportions de l’austérité républicaine dont on faisait parade alors, Taillebois eut soin d’ajouter un petit coffret fort propre, fermant à clef et qui devait contenir, selon toute apparence, des effets ou des ustensiles à l’usage du bord.
En mettant pour la première fois le pied sur le pont de la corvette la Prévoyante , le beau novice alla saluer l’officier de quart, et il se rendit ensuite, selon l’usage prescrit en pareil cas, aux ordres du capitaine sous le commandement duquel il allait bientôt faire ses premières armes à la mer.
Le capitaine, qui depuis quelques jours voyait arriver pêle-mêle à bord de sa corvette les volontaires que le bureau des classes trouvait bon de lui envoyer en masse pour compléter de façon ou d’autre son équipage, toisa d’abord Taillebois des talons à la tête en fronçant un peu le sourcil. Taillebois, qui ne manquait pas plus d’assurance que de zèle, se tint raide et droit, le chapeau à la main et l’œil fixe, pour subir avec autant d’avantage que possible la rigueur de ce premier examen muet d’où dépend si souvent la destinée des nouveaux venus. Le capitaine de la Prévoyante , qui jusque-là n’avait pas eu lieu, à ce qu’il paraît, de se montrer très satisfait du choix des recrues qui lui avaient été jetées en pâture par le bureau des classes, s’oublia jusqu’à sourire de satisfaction en passant l’inspection de l’extérieur du jeune novice qu’on venait de lui mettre sous la main.
– Parbleu ! s’écria-t-il, je crois qu’aujourd’hui le citoyen commissaire du bureau des armements s’est trompé ! il vient de m’envoyer, Dieu me pardonne ! un homme tout comme un autre !
– Et que sais-tu faire de bon, mon garçon ? ajouta le commandant en s’adressant à Ernestin, et en laissant un sourire de contentement se mêler à la parole brève et saccadée qui sortait de sa bouche.
– Rien encore, mon commandant, répondit Ernestin, mais, avec un peu de patience de votre côté et beaucoup de bonne volonté du mien, cela viendra peut-être.
– Eh bien ! voilà, s’écria le capitaine à ces mots, un luron au moins qui ne se flatte pas, et qui promet peut-être plus qu’il n’en a l’air.
– Et qui tiendra peut-être plus qu’il n’en promet, reprit vivement Ernestin en rougissant un peu de plaisir et de timidité.
– Lieutenant, citoyen lieutenant, ordonna aussitôt le capitaine à son second, colloquez-moi vite ce grand gaillard-là au poste des pilotins. Il ne faut pas qu’il se gâte avec les mauvais gars du gaillard d’avant. L’égalité républicaine me le perdrait en moins de quinze jours de confraternité démocratique.
– Mais, mon commandant, fit observer Taillebois avec modestie, c’est qu’il faut vous dire que je n’ai jamais navigué.
– Eh ! mais, reprit vivement le capitaine, ne navigueras-tu pas aussi bien pour la première fois au poste des pilotins, avec lesquels tu vas manger la soupe, que parmi les brebis galeuses qui broutent la galette de biscuit de la République sur l’avant du mât de misaine de la corvette ? Ton billet d’embarquement porte que tu es des environs de Saint-Brieuc, n’est-ce pas ? tu dois par conséquent avoir déjà vu la mer, quand ce ne serait qu’à la longue-vue : c’est donc un commencement ; laisse-moi faire le reste. Je te la montrerai de la bonne manière en seconde édition dans notre prochaine campagne, va, cette lame du ouest que tu as la franchise d’avouer que tu n’as jamais vue. Et en attendant, fais-moi le plaisir d’aller t’arrimer en long ou en travers au poste de la timonerie avec ton sac et ton petit coffre. Ton commandant, pour le moment, a bien l’honneur de te souhaiter le bon soir.
La corvette la Prévoyante appareilla bientôt de la rade de Brest pour aller croiser sur les côtes de l’île de Saint-Domingue qui venait de nous échapper, à nous, sa métropole, par tous les bouts à la fois. Dans les premiers coups de cape que la corvette eut à essayer Taillebois se sentit gagner par le mal de mer, et il l’éprouva, mais à la façon des marins qui l’ont encore, c’est-à-dire sans être malade, sans se laisser vaincre par la douleur, et sans cesser de faire le service que le devoir prescrit aux bien portants. Après deux mois de croisière on se battit, et le courageux pilotin fut un des premiers à sauter à bord d’un fort brick anglais, que le commandant jugea à propos de couler pour ne pas perdre de temps en route. Cette action prompte et décisive, dans laquelle Taillebois s’était distingué aux yeux de tout l’équipage, lui Valut les félicitations de ses chefs et l’honneur plus positif de passer d’emblée, du grade de novice à 15, au grade de matelot à 21 francs par mois.
Cet avancement si subit, cet enjambement si rapide du grade de novice à 45 à la paye de matelot à 21, sans passer par le grade intermédiaire de novice à 18, fit bien quelques jaloux parmi ceux des prétendants qui croyaient pouvoir invoquer la loi contre ce qu’ils appelaient un passe-droit évident ; mais aucun des envieux n’osa murmurer tout haut, car Taillebois possédait par bonheur pour lui, au bout des bras vigoureux dont la nature l’avait doué, une poigne assez large et assez solide pour imposer silence à la jalousie. C’était, à dix-huit ans, un des plus rudes distributeurs de coups de poings de tout l’équipage de la Prévoyante .
Au retour de la corvette à Brest le jeune volontaire, qui avait quitté le port quelques mois auparavant pour la pr

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