La lecture à portée de main
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Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 02 juillet 2011 |
Nombre de lectures | 33 |
EAN13 | 9782296463486 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 1 Mo |
Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
DanielCohen éditeur
www.editionsorizons.com
Littératures,unecollection dirigée par DanielCohen
Littératuresest unecollection ouverte,toutentière,àl’écrire,
quelle qu’ensoitlaforme: roman,récit, nouvelles,autofiction,
journal;démarche éditorialeaussivieille que l’édition
ellemême.S’il estdifficile deblâmerles ténorsdecelle-ci d’avoir
eule goûtdesgenresqui lui ont ralliéun large public, ilreste
que, prescripteursici,concepteursde laformeromanesque là,
comptablesdecesprescriptionsetdeces conceptions ailleurs,
ont, jusqu’à un degrécritique,asséché levivierdes talents.
L’approche deLittératures,chez Orizons, est simple — ileût
étévain de l’indiqueren d’autres temps :publierdes auteurs
que leurforce personnelle, leur attachement
auxformesmultiplesdulittéraire, ont conduits audésirde faire partagerleur
expérience intérieure.Du texte dépouilléàl’écritporté par
lesouffle de l’aventure mentale etphysique, nous vénérons,
entretousles critères supposantdéterminerl’œuvre littéraire,
lestyle.Flaubertécrivant:«J’estime par-dessus toutd’abord
lestyle, etensuite levrai »;plus tard, le philosopheAlain
professant:«c’est toujoursle goûtqui éclaire le jugement»,
ils savaientavoir raisoncontre nosdépérissements.Nousen
faisonsnotrecredo.D.C.
ISBN :978-2-296-08794-1
©Orizons,Paris,2011
Pauline
ou
La courbe duciel
DANS LA MÊME COLLECTION
MarcelBaraffe,Brume de sang,2009
Jean-PierreBarbier-Jardet,EtCætera,2009
Jean-PierreBarbier-Jardet,Amarréàuncorps-mort,2010
MichèleBayar,AliAmour,2011
Jacques-EmmanuelBernard,Souslesoleil deJerusalem,2010
FrançoisG.Bussac,Lesgarçons sensibles,2010
FrançoisG.Bussac,Nouvellesde larueLinné,2010
PatrickCardon,LeGrandÉcart,2010
Bertrand duChambon,Lalionne,2011
DanielCohen,Eauxdérobées,2010
MoniqueLiseCohen,Le parchemin dudésir,2009
Eric Colombo,Lamétamorphose deAiles,2011
PatrickCorneau,Îles sansocéan,2010
MauriceCouturier,Ziama,2009
CharlesDobzynski,lebal debaleinesetautresfictions,2011
SergeDufoulon,LesJoursde papier,2011
RaymondEspinose,Libertad,2010
JeanGillibert,Àdemi-barbares,2011
JeanGillibert,Exils,2011
JeanGillibert,Nunuche,suivi deLesPompesnéantes,2011
GérardGlatt,L’ImpasseHéloïse,2009
CharlesGuerrin,La cérémonie desaveux,2009
HenriHeinemann,L’Éternité pliée,Journal, édition intégrale.
FrançoisLabbé,LeCahier rouge,2011
DidierMansuy,Casde figures,2011
GérardMansuy,LeMerveilleux,2009
Kristina Manusardi,Au toutdébut,2011
LucetteMouline,Fauxet usage de faux,2009
LucetteMouline,Ducôté de l’ennemi,2010
AnneMounic,(X)de nom etprénom inconnu,2011
GianfrancoStroppini,Leserpentde mord laqueue,2011
BéatrixUlysse,L’écho ducorail perdu,2009
Antoine deVial,Deboutprèsde lamer,2009
Nosautrescollections:Profilsd’unclassique,Cardinales,Domaine
littérairesecorrèlentau
substratlittéraire.Lesautres,Philosophie —Lamain d’Athéna,HomosexualitésetmêmeTémoins,
ne peuventpas yêtre étrangères.Voirnotresite (décliné en
page2decetouvrage).
Raymond Espinose
Pauline
ou
La courbe duciel
Roman
2011
Poèmes
Dumêmeauteur
Lesfilles-fleurs,EditionsSubervie,1973.
L’amour-stéréo,EditionsSubervie,1973.
Ladivague,EditionsSaint-Germain desPrès,1982
Essais
JacquesPrévert,Une éthique de l’homme,Editionsdu
MondeLibertaire,2007.
AlbertCossery,Une éthique de ladérision,Editions
Orizons,2008.
BorisVian,Un poète en liberté,EditionsOrizons,2009.
Nouvelles
Mauvaisesnouvellesde laliberté,EditionsduMonde
Libertaire,2007.
Dernièresnouvellesde laliberté,EditionsduMonde
Libertaire,2008.
Libertad,EditionsOrizons,2010.
Ecritsintimes
Lisières,Carnets2009-2010,àparaître.
Avertissement
Lesfaits, lesévénements, lespersonnagesdontil estquestion
icirelèventde lafiction;de même, lespensées, lesparoles,
lesappréciations surlamarche dumondeappartiennentaux
êtresde papierinventésparl’auteuretnonà celui-ci qui
n’estquele passeurdesespersonnages.
«Écrismaintenant pour leciel
Écris pour la courbe duciel. »
PierreJean-Jouve, «Àsoi-même »
inDiadème.
I
ôtle matin, ilavaitplu.Le pavé des
ruespiétonT
nières, lebitume des trottoirsétaientdéjàsecsmais
unecertaine fraîcheurdemeurait,conservée dansles
massifsde fleurs, lesarbres, laverdure desparcset sur
lesfaçadesdesimmeublesanciens situésdansdes rues
mal exposées.Lesoleil, quantàlui,tentait, nonsans
difficulté, des’imposeràlatraversle grisdesnuages.
Onze heures.L’heure préférée deRomanBoccace.
Ilavait un peu travaillé, le matin —unevingtaine de
lignes rédigées,c’étaitbiensuffisant—, etil longeait
tranquillementleboulevard ensongeantaudélicieux
cafécolombien qu’il ne manqueraitpasde déguster
dans un instant, faceàun paysage que d’aucuns
décriventcommeunevéritablecarte postale.Lui,aimait
chaque jourdavantagecontemplerlalignebrisée
desmontagnes,vertesoublanches selon letemps
oulasaison;oubienrêvasserlonguementdevantles
branchesfleuriesou sèchesdecesarbresdontlaville
s’enorgueillissait.
Boccace:la cinquantaine, encorebien
desapersonne, la crinière neigeuse peut-êtreuntrop longuesur
lanuque, levisage marqué decesdeuxlongues rides,
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RAYMONDESPINOSE
de partetd’autre de la bouche, qui
indiquentlecaractèrevolontaire, énergique etpersévérant.Il était vêtu
d’un jean, d’unechemiseblanche etd’unesaharienne
couleur sable.
Cetteville duSud-Ouest,Puységur-Forcade,située
àmi-chemin desPyrénéesetde l’océan, il l’avait
choisie pouryachever un livre.Le livre était terminé,
maisl’écrivainavaitdumalà boucler ses valisespour
regagnerla Capitale.Ilavaitmêmecommencéunautre
travail
dontlerythmeàlafoislesatisfaisaitetlerassurait.Pourtant, «Uneville,un livre»,c’était,sinonsa
devise, entoutcasl’un desélémentsdesadiscipline.
Àune époque, pas tellementlointaine ensomme,
RomanBoccacetravaillait vite etmal.Leséditeurs
étaientgentilsaveclui etlui prenaient toutde mêmeses
romans.Par sympathie.Pargénérosité.Etpuis, il fautle
dire,Romansavait se faireaimer.Un don.Inné.Mais sa
seconde épouse (rencontrée deuxdécenniesauparavant),
safilleElise (vingt-sept-ansans, née dupremiermariage)
et sesamis(les vrais,ceuxquicomptent),sansparlerdesa
jeuneamie dumoment,Marika, luiavaientasséné, les uns
aprèslesautres,ce qu’il nevoulaitpasentendre,àsavoirla
vérité:quand en finirait-ilavecson dilettantisme ? quand
se mettrait-ilenfinau travail,c’est-à-diresérieusement?
Voilàoùil en étaitaujourd’hui.Àorganiser un peu
mieux savie.Etàne plusbâcler, mêmes’ilconnaissait
lavanité detoutechose,
entreautresetpeut-êtresurtout,celle de produire de lalittérature.
RomanBoccaceralentitencore le pasetlaissaune fois
encorevagabonder sonregardsurla chaîne de
montagnesdontlespicsenneigés,toutauloin, dessinaient
PAULINE OU LA COURBE DU CIEL
13
une ligne flouesur uncielbrumeux.Puisl’écrivain leva
les yeux au-dessusdesatête,versle firmament.Leciel,
àl’aubesombre et vaguementmenaçant,se dégageait,
enunetimide ethésitantevalse de nuageslégersqui,
progressivement,s’estompaient.
Par téléphone,Boccaceavaitfixérendez-vousà
onze heures trente dans sonbarfavori,LeRiche,àune
jeune fillerecrutée parannonce etchargée de «saisir»
son dernier roman parinformatique,car telle était,
désormais, l’exigence deséditeurs,une foisluletexte
broché.Boccace, quise dépeignait volontierscomme
un homme dudix-neuvièmesiècle,avait refusé
d’emblée, dèsleurapparition,ces« nouvelles technologies»;
aussisetrouvait-ilcontraint, l’innocent,àfaireappel
aux servicesd’autrui.
L’écrivain étaitenavance;il fitdoncune haltechez
Béa, lamarchande de journaux.Béa,commeRoman,
comptabilisait un demi-siècle devie.Coiffée en pétard
(comme on dit),couleurdecheveux— etmême de
lunettesR