Au petit bonheur la brousse
143 pages
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Au petit bonheur la brousse , livre ebook

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Description


A la croisée des idiomes et des accents, entre la Suisse et son idéal de blancheur et d'ordre, et le Tchad marqué par l'arbitraire d'une histoire postcoloniale « mal apprivoisée », Nétonon Noël Ndjékéry narre les aventures de Bendiman, un enfant tchadien ayant grandi à Genève et s'étant nourri des mythologies des bons petits Helvètes : Guillaume Tell, la Mère-Patrie, la Croix-Rouge, etc. Un soir, son père est rappelé au Tchad avec toute la famille. A l'aéroport de N'Djaména, une voiture noire emporte ses parents. Recueilli par un oncle, il mène son enquête pour découvrir que son père et sa mère sont enfermés pour « Raison d'Etat ».




Commence alors pour Bendiman une quête pour faire sortir ses parents de prison dans un pays qu'il ne connaît finalement pas, en guerre civile, tourneboulé par un afflux massif de pétrodollars, où le droit n'a jamais vraiment quitté les livres pour entrer dans la vie quotidienne des gens.




Ndjékéry livre un récit picaresque, plein de saveur entre les helvétismes et l'oralité des griots. A mi-chemin entre le conte et le récit d'initiation, Bendiman est le héros malgré lui d'une chevauchée entre les langues et les imaginaires moraux.





NETONON NOËL NDJEKERY est né à Moundou au Tchad. Sa carrière d’auteur débute avec une première nouvelle publiée par Radio-France Internationale. Depuis, il habite sur les rives du Léman, en Suisse. Dans ses écrits, Nétonon Noël Ndjékéry flirte autant avec la nouvelle, le théâtre qu’avec le roman. A ce jour, il est l’auteur de trois romans : Sang de kola (1999, l’Harmattan), Chroniques tchadiennes (2008, In Folio) et Mosso (2011, In Folio). En 2014, il publie un recueil de nouvelles La minute mongole aux éditions de la Cheminante. En 2017, il reçoit le Grand Prix Littéraire National du Tchad pour l’ensemble de son œuvre.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 avril 2019
Nombre de lectures 2
EAN13 9782940522798
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0064€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

AUPETIT BONHEURLA BROUSSE
TONONNOËLNDJÉKÉRY
AUPETIT BONHEUR LABROUSSE ROMAN
L’auteurremercie de son soutien ProHelvetia,Fondationsuisse pourlaculture. HéliceHélasEditeurbénéficied’uneprimeàl’encouragementdel’Officefédéraldela culturepourlesannées2019-2020. Cettepublicationabénéficiédu soutienduCantondeVaudainsiqued’une aideàla promotiondeProHelvetia.
©NétononNoëlNdjékéry, 2015pourletexte ©macbe,2019pourledessindecouverture ©HéliceHélasEditeur, 2019 ISBNdel’édition papier:978-2-940522-76-7 ISBNdelaprésente édition : 978-2-940522-79-8 www.helicehelas.org
Collection Mycéliummi-raisin
AMarie-Antoinette, pourloxygènede lâme
1 AL’OMBREDUJETD’EAU La terren’est pasunverger enfleuroùl’on vientfolâtrerenattendant demourirenpaix.Cette banalicrèveles yeux, surtoutauurdecetteAfrique touteslespassionsdu continentsexacerbent, culminentetrivalisentdansune vertigineusesurenchère.Etcette année-là,la caste tchadienne desnababs lapprit à sesdépensd’une manière quil’alaisséetraumatisée à perpétuité.
La campagne pourla première réélectiondu présidentdelaRépubliqueduTchad, DidiSalmanDada, aliasL’Autre-là,battait sonplein. Engagésdans une tournéequis’annonçait longue, sixténorsdu parti régnant conduisaientunecaravane chargéede porterlabonne parolede leurchampionàtraverstoutle pays. Comme ilsavaient reçulaconsigne stricte desabstenirde meubler leursnuits deconquêtesd’unsoir etqu’ilsne souhaitaientpasavoirleursprogénituresdanslesjambes,ilsavaientembarquéleursépouses dans laventure etlaissé leursenfantsaux bons soinsde leursparentèlesrespectives. Lexpéditionvoguaitdune kermesseàlautre.Elleétaitpartoutaccueillie dansuneambiancefolle par unefoulerevêtue depagnesà leffigie dufavoridessondagesgouvernementaux.Elledistribuaitgratisde nombreux produits:t-shirts,casquettes,bonbons,bières,painsde sucre,sacs decéréales,comprimésde nivaquineou,sous leboubou, pastillesde Viagra.Enplus desmeetingshabituels,elleoffraitaussidesbals populaires etdesméchouis géantsoùchacunpouvait,sansboursedélier,absorberenune soiréedes quantitésde nourrituresqu’ilavaitrarement la chance deconsommerenune semaine entempsnormal. Ce mardi-là,toute laville deMongos’étaitendimanchéeet attendaitlacaravanedans unegrande ferveur patriotique. Ne la voyantpasarriver,elle envoya une équipedevolontairesà sarencontre. Une heure plus tard, ceux-ci, effondrés, donnèrentl’alertepartéléphone. Le cortègeétaittombé dans une embuscadetendue pardes rebellesen pleinebrousse. Ses sept véhiculesavaientbrûlé etleursoccupants étaienttousmortscarbonisés. Minutesde silence àchaqueprêchi-prêchaofficiel, trois joursdedeuilnationalaveccomme bouquet finaldesfunérailles de même rang,la mémoire desvictimesfutlébrée et leurmartyregravé enlettresdor dans lesannalesdupays.Enplus dediverseslargessesenfaveur des famillesendeuillées,leParti,frappéen plein cœur, décida de prendre encharge jusquà leurmajorité tous les enfants qui avaient perdu leurs parents dansle massacre. C’estenraisondecettemunificencemilitantequeLilianeKandaetZakariaSolalse retrouvèrentàvivre sous lemême toitqu’unedizaine d’autresorphelins.Ilsavaienttousété pompeusement investisdutitrede «pupillesdelaNation».LePartidevintàla foisleurmamanetleurpapadesorte qu’avant même desavoir distinguer un bulletinde vote d’unpapierhygiénique,ilsenétaient déjà devenusd’ardentszélateurs. De simplescolleursd’affiches,Liliane et Zakariaavaientgraviensemble leséchelonsdu Partiau point d’enles s tutoyer ommets àl’âgede leur majorité.Elle endirigeaitle groupede choc, une troupede danseuses fessuesà souhaitdontletremblementdepostérieur attiraitfouleetmettaitlepublicen transe en ouverturedechaque meeting.Luienorchestraitchaquemanifestationd’envergure,ce qui le plaitde fait à la tête dunecohorte de griotsassermentés,degrosbras duserviced’ordre et declaqueursattitrés. C’était donc gravédansla cartedu ciel que cettelune etce soleilétaient, d’éclipseen éclipse, condamnésà ne plusfaire quunà terme.Parunsamedide janviercinglé par lharmattan,Liliane et Zakaria donnèrent enfinraisonauxastresens’unissantdevant toutceque Ndjamena comptaitde politiciens pleinsà éclater deleurpropreimportance.LePartiétaitleur mère. LePartiétait leurpère.C’estpourquoi 1 lePartileuroffritdesomptueuxcadeauxdemariage,enparticulierunemangeoiredoréeaumiel:ilfut nommé chef comptable à l’ambassade du Tchad enSuisseavecrésidenceà Genève !
Une foislestam-tamsde leursnoces tus,Liliane et Zakaria sautèrent dans unavion.Ils planèrent une nuit entièreprèsdesétoiles.Puis toutes les délicatesses de la Suisse s’offrirentàleurgourmandise.
*
Cinq moisaprèsson arrivée à Genève, LilianeSolal rencontra Ginette Rouget,alias Gigi, dans un tramway bondé,entre laBel- place Airet le RondeaudeCarouge.Encore dans la fleurprimesautièrede ladolescence,la blonde Genevoiseordonna àunpunkvoûtésous lepoidsde ses piercingsdecédersaplace assise àla Tchadienne dont lagrossesse commençait àsaffirmer.Contre toute attente, lhurluberlu s’ecutasanslambiner.Et ce succèscréa uncourant immédiat de sympathieentre lesdeuxpassagères. Fatiguéesdéchangerdessourires béats,ellesfinirentparengager laconversation.Lesoleilquisefaisait désormais prénommer Désiré parlesestivants,les soldesàl’année qui garnissaienttoujoursplusla garde-robe aux dépensdupanier delaménagère,le cygneen couvaisonqui mettaitles Bainsdes Pâquisen
ébullition:ce furent là quelques-unsdespotinsdujourquelles passèrent enrevue.Puis,fixant le ventre arrondide lAfricaine comme siellecherchait à voirautravers,la collégienne osa enfinla questionquilui brûlait leslèvres: C’estunesimple blague de bac à sable,n’est-ce pas,cette histoirede bébés noirsqui naîtraient dabord tout blancs? La Tchadienne,tout sourire,jura ducontraire.Elle essayad’enpersuaderlaSuissesse,envain.Aussise résigna-t-ellejusteà luiproposerde serevoir.Elleséchangèrent ensuiteleursnumérosdetéléphoneavant de se quitter. Dès lesamedisuivant, Liliane retrouva Ginetteetsamère,Nadine, au Musée de Malagnou, àla demande insistantede cettedernière.Uneexposition,intitulée «Tousparents,tousdifférents », quidémontrait la grande proximitégénétiqueentretousles êtresvivantsen général etleshumains enparticulier, ydrainait foule.Uneattraction des plus désopilantes y exhibait laphoto grandeur naturedune sourianteblonde platinée qui setransformaitsoudainen unbonobopatibulairelorsque,parsimplepressionsurunbouton, on modifiait l’un de ses chromosomes. Cette métamorphose, heureusement réversible,amusa les trois visiteuses jusqu’aux larmes.Elle leur permitde ro mprela glace en entrant, puis de partager d’interminablesfous riresen sortant.Dans l’intervalle, ellesavaientpuréaliser à travers dix-huitpanneaux passionnantsquele patrimoine quelles avaientencommun était beaucoupplus importantquene le donnaientàpenserleurssurestiméescaractéristiquesphysiques. Acompter de ce jour-là, les famillesRougetetSolaldevinrent deplusenplus proches.Ellesprirent lhabitudedesetéléphoner, des’inviter àmangerouàfairedes balades.Ellesapprirentdecettefaçonà mieuxseconnaîtreau fildelonguesdiscussionssouventcentréessurleurscultures respectives.
Parunematinée d’hiverla grâcetombait ducielenfloconstourbillonnants, lesSolal goûtèrentenfin àlajoiedaccueillirleurpremierhéritier.IlsleprénommèrentBendiman,ce quisignifiedansleurdialecte «Patrie d’emprunt ». Peuaprèsquelamèreetl’enfantfurent rentrésdelamaternité,Ginette futconviéechezLiliane.Celle-ci,unpeu excitée, luifitdentréedejeu visionnerla vidéoqueson mari avaitréalisée destoutpremiers instants de leur bébé frétillant sur le ventre maternel. Commecela, la jeune fille put suivre lessept secondeshallucinéespendant lesquellesle nouveau-néétaitdemeuréblancde chezlesBlancs.Celapsde tempsparutdurer uneéternité.Lacollégienneeutl’impressiondevoirtournerlarouedudestin,ce qui lébranladelatêteauxpieds.Lepinceau fatidiqueallait-ilsefigeretlaisserlebébéalbinosou,aucontraire, s’emballer,forcerle traitetlerendreaussinoirqueducharbon?...Lesuspensepritfinsansconsacrerlun oul’autrede ces extrêmes. Ginette demeurait subjuguéeparlenouveau-né désormaissaisiengros-planfixe.Lamère,qui sétait entre-tempséclipsée en douce, revint. Sans un mot, elle lui confia lefruitgigotantde ses entrailles.Au mêmemoment,l’écranséteignit.Etl’adolescenteeutlatroublantesensationquelebébéétaitsorti tout droitdu rectanglemagique etsétaitfaitchairrienque pour venirse loverdanssesbras.Elle s’aperçutàson regardrieur etàses mouvementsvifsdes bras quilluifaisaitlafête.Lesprunellesdilatéesderavissement, elle ressentit sur-le-champun attachementaussiprofondqu’instinctif pourle petitbout de chou.La joie qui la submergea futsiintense qu’elle neutque dessanglots pourlexprimer. Maisla pauvre collégienne nétait pasau boutde sesémotions. Le surlendemain,accompagnéepar sa mèreetsonpère, ellerevint sacrifier au ritueldesRoismages chezlesSolal. Ceux-cienprofitèrent pourluiadministrerlecoupdegrâce:ils lasupplièrent à lunisson d’être lamarraine de leur fils. Depuis lors, Ginette assuraitque cette naissance avait constituéuntournantdécisifdanssa vie.Outre unfilleul enremplacement du frère que sesparentsluiavaienttoujours refusé,elle luiavaitoffert un métier.Parceque,àl’instantmêmeoùle premiercrideBendimanl’avait traversée,elle avaitsentijailliren ellel’envie de devenirsage-femme,envie qu’elle allait porterjusqu’à sa complèteréalisation.
*
Bendiman,Benpour sesproches,coulaàGenèveuneenfancemarquée parles feux deslébrations du er23 1 Août,les lampions delate de lEscaladeetlesilluminationsà dominantesbleueset jaunes des réveillonsdelaSaint-Sylvestre.Dansle souvenirdupetit,cette périodebaignéed’insouciance ségrenait toujourssur fondde sommetsalpinsenneigésetd’azuraquatique ondulé. Cependant, elle empruntaittout 4 sonpanache auJet d’Eauqui,par beautemps, se dressait enunbouillonnanttrait dunionentre leman etleciel.Avec lacomplicitédu soleildéclinant,ilsemuaitsouventenpiègeàarcs-en-cieletexposaitses superbestrophées pour le plus grandbonheur des mouettes envolplané et des touristes en apnée d’admiration. Et,comme toutSubsaharienjamaisenrupturetotaledefoianimiste,ses parents,Lilianeet
Zakaria,tombaient quasiment enadoration devant ce tableauoù l’ingéniosité humaine s’alliait aux prodigesde la nature.Ils yvoyaient mêmeune apparitiondufameuxEsprit de Genève,cetteforce singulière qui avaitpermisàtantdepartiesenconflitdepar le mondederetrouvermiraculeusementlechemindela paixà l’ombre duSalève après avoirsystématiquementéchouéà y parvenir sousdautreslatitudes. Ce n’étaitdoncpaspar hasardquelesparents deBen avaientretenule Jardin Anglais, esplanadede contemplation privigiée du Jet dEau, comme destination préférée des promenadesdominicales de la famille.Ilssedécouvrirent ensuitemille raisonsdeseféliciterde cechoix.Parexemple,dèsqu’une dispute lesopposaitdansl’étroitessedeleurappartementduquartier desGrottes,ilssenallaientvite s’expliquer au borddulac.Le tempsd’unaller-retourlelongdesquais,lecactusdela discorde,quelleque fûtsataille, perdaitinéluctablementsesépines une à une. Et toutfinissaittoujours parrentrerdans lordre. Laseule vue de l’eau, ennappe piquetée d’étoiles ou entrombeintime aufirmament, suffisait-elle à éteindreleurs âmesmisesrégulièrement à rude épreuveparlesrigueursde lexil?Ilfallaitbien lecroireauvudunombre considérable de crisesque le pèlerinage réussissaità viderde leurchargevénéneuse. Bense mit lui aussi à éprouveràsamanière le sortigedelEspritde Genèvesitôtquilenreçutla révélationdeses parents.Entreautres,chaque foisquil avaitunextraà leurdemander,ilattendaitpourle fairedêtre enveloppé parcette bruine éthérée quele JetdEaurépandaitcomme unebénédiction sur les baladesdudimanche.Entre la halteau piedde l’emblème à laller et la pause aumêmeendroitauretour, son capricedu jourpouvait être discuté, décrié, déclaré inacceptable. Ilsortait l’artillerie lourde des pleurnicheriesdelenfantunique éternellementincompris desadultes.Ilenusaitetenabusait,convaincu que le charmedelendroitautantquel’attention agacée despassants jouaientensa faveur.Auboutdu compte,ilobtenaitgénéralementgainde cause. Detoute façon, tout cequi lui manquait encestemps-làrelevaitdusuperflu. Sicen’étaient pas ses parents qui luioffraienttel jouetdernier-cri,tel spectacleànepas manquerou telvêtement àlamode, c’étaitsamarraine,Gigi,quis’enchargeait.
Toujoursàl’ombre tutélaireduJetd’EaudeGenève,Bengagnait enâge.Sils’étaitdésormaisémancide satétine,ilrechignaittoujours à seséparerdesa mascotte.Cette girafeaupelage plus douxquesoie détenaitla faculté de l’introduiredans les arcanes delasavane.En effet,dès qu’ils’assoupissait,elle lentraînaitdansdessanctuairesdumondesauvagedont leshumainssoupçonnentàpeine l’existence.Là, entreboasetbonobos,lièvresetléopards, gazelles etguépards,lycaons etlions,il revivait, agrippéaulong coude sonamie,lescontes etles légendesquiémaillaient de merveilleux la plupartdesesheures éveiles. Aufildutemps, l’universde Ben sélargissait.CetteAfriqueque ressuscitaientla verve deses parentsou la magiedu petitcomme dugrandécran,ilpouvaitmaintenantla rencontrer en chairet en os àtravers certainsde ses ambassadeurs.Carlesweek-ends oùGigi avait congé,ellevenait souventl’enlever àsa familleet,danssa coccinelle bruissantdes chansons dHenriDès,le conduisaittoutdroit chezleurs Excellences.Cesdernières accordaientaudienceenleursrésidences sisessoit auVivarium deLausanne, soit au Zoo deServion, soitauPapilioramadeNeuchâtel. Auseinde ces différentsthéâtresparfumés aux senteurs moites de lajungle,il avait le bonheur d erespirerlemême airquele mamba noir ou lavipère cornue,d’honorer plusbas que terre lebabouin,l’autrucheou leflamantrose,ouencored’applaudirles papillons habillésdarcs-en-ciel quidansaientindéfiniment unépoustouflant balletrien. Parfoisces excursions tombaient durantlesvacancesscolaires.EtGigiprolongeait le plaisirenamenant sonfilleulà Altdorf auborddulacdesQuatre-Cantons.A partirdecettevilleévadéetoutdroitd’unecarte postale,ellele menaitsurlestracesde GuillaumeTell,personnage dont elle ne selassait jamaisde luiconter
lexploit le plusfabuleux. e Danslechaudrondu14siècle,unepartiede la Suisse primitive,placéesoustutelleautrichienne,était tyrannisée par uncertainHermannGessler quiy exerçait lafonction demagistrat impérial.Ce satrape moustachu avaitfaitplantersurune placepubliqueunpoteausurmonté de son chapeau etexigeaitdeses administrésde saluer cet assemblage comme sic’étaitsa propre personne. Mais le fier Guillaume Tell passa devant le fameuxcouvre-chef sans s’incliner, ni se décoiffer. Il fut aussitôtcondamné àtranspercerd’uneflècheune pommeposéesurlatêtedesonpropre fils. Il réussit miraculeusement àatteindrelefruit,ce quipréserva safamilled’undeuilinsurmontable.Parlasuite,ilalla s’embusquerautourd’un chemin forestier,guettalebailli etlui planta une flèche en pleincœur. Benadoraitl’iluctable sensationd’apnée dans laquellele plongeaitle pointculminantde ce récit chaquefoisquill’écoutait.Maisil raffolait encore plusdesmomentsoù Gigi et luimimaient lhistoiretoute entière.La marraine étaittoujourstenue de jouerlenfantetle filleul,lepère.Unsimple sifflementsimulait le tir fatidique, tircensé frapper unevraie reinettetrônantsur latignasse blondede ladulte. Dès quune decesreconstitutionsse terminait,Bensehâtaitden proposerune nouvelle variante. Elle entrnantlespiedsetluiencourant,ilsréendossaient chacunsonle.La miseenscèneserépétaiten boucletantque legarçonnetconservait lamoindreénergienécessairepourtenirdebout.Lorsquiltombait
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