Au pied de la Tour
131 pages
Français

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Au pied de la Tour , livre ebook

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Description

Françoise s'est installée à Paris, chez Charles, qui demeure non loin de la Tour Eiffel. Elle a agi ainsi pour s'assurer qu'il ne dévoilera pas certains faits. Mais, que sait-il vraiment de l'accident mortel de Luc, son époux ? Craignant qu'il ne révèle ce qu'il laisse supposer, elle subit près de cet homme de trente ans son aîné humiliation et mépris. Lorsqu'elle rencontrera Tonio, un ami d'enfance, elle essaiera de croire qu'il pourra l'aider à conjurer sa peur, ses doutes. Tout un quartier de Suffren sert d'arrière-fond au récit, et la Tour prend des allures de personnage.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 septembre 2009
Nombre de lectures 38
EAN13 9782296682849
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Au pied de la Tour
 
Du même auteur :
 
1970 Jeanne roman Editions l'Amitié par le livre
 
1972 L'autre rivage roman Editions l'Amitié par le livre
 
1980 Rio Salado chroniques Editions Privat (Toulouse)
Prix de l'Afrique Méditerranéenne
 
1984 Les persiennes roman Editions l'Amitié par le livre
(Prix des Aurès)
 
1987 Le cri retenu récit Editions de l'Harmattan
 
1991 L'Algérie source d'inspiration littéraire d'Hérodote à
Camus essai Editions de l'Atlanthrope
 
1992 Le sentier aux agaves roman -Editions Lacour
 
1993 Vie et œuvre d'Isabelle Eberhardt biographie -
Editions de l'Atlanthrope
 
1994 Les vignes rouges roman Edition du Seuil
(Prix du roman de l'Académie du Languedoc)
 
1996 Le refus, une vie de femme roman Editions
de l'Harmattan ((Prix Crevaux)
décerné par la Société de Géographie Humaine de Paris
 
2001 La branche sciée roman Editions de l'Harmattan
 
2004 Trois visages de femme roman Editions de
l'Harmattan
 
Andrée MONTERO
 
 
Au pied de la Tour
 
 
roman
 
 
L'H armattan
 
 
© L'Harmattan, 2009
5-7, rue de l'Ecole polytechnique, 75005 Paris
 
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
 
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
 
ISBN : 978-2-296-09826-8
EAN : 9782296098268
 
« La crainte ne fait que des esclaves. »
 
Paul-Henri d'Holbach
1723-1789
 
Chapitre I
 
 
L 'air est glacial le long du Champ-de-Mars. La Tour n'est que charpente métallique engourdie. Sous ses pieds, le vent s'engouffre, les touristes emmitouflés frissonnent. « Moins deux degrés » a annoncé, la veille, la météo sur les trois chaînes.
 
Sous sa capuche de fourrure synthétique, Françoise essaie de se protéger et lève parfois la tête vers le monument de fer qui fait accourir du bout du monde des visiteurs le plus souvent guidés mais aussi les autonomes.
 
Ses mains s'enfoncent plus avant dans ses poches. Hier elle a perdu les gants qu'il lui a offerts. Elle devra en acheter d'autres, avec ses propres deniers cette fois. Elle n'ose lui avouer qu'elle les a égarés. Peut-être les retrouvera-t-elle à la « maison »..., l'appartement triste, sans chaleur, où le personnage taciturne l'attend.
 
Sa main transie repousse une mèche, l'enfouit sous la capuche, glisse sur les paupières... pas envie de rentrer.
 
Une brasserie, toujours la même, l'attire. Un petit noir bien chaud lui ferait du bien. On la connaît, elle y vient régulièrement.
 
Non, elle n'y entrera qu'au retour lorsqu'elle aura le courage de revenir sur ses pas. Pour le moment elle préfère marcher.
 
Sur les allées, la boue mêlée à la neige fondue macule ses bottillons de tâches sombres. L'hiver est encore là, mais violettes et pensées ont commencé à fleurir les massifs. Elles paraissent flétries et ternes aujourd'hui. Il faut s'en approcher pour voir affleurer du magma neigeux un peu de mauve ou de jaune. Leurs feuilles, d'un vert sombre, ont mieux résisté au froid.
 
Inutile de songer à s'asseoir comme elle aime à le faire sur un des bancs face au pied nord de la Tour. Les massifs y sont nombreux, somptueux en avril. Tiens, des jonquilles... mais elles piquent du nez. Que font-elles esseulées au pied de cet arbre ?
 
Lentement, elle se dirige vers le bassin. L'eau y est glauque, sale. Quelques colverts et autres canards y glissent sans état d'âme. Certains essaient de se réchauffer sur le gazon mouillé des berges.
 
Comme eux, elle aimerait trouver un peu de chaleur, donner un nom au vide qui la creuse, l'entame, l'empêche de réfléchir, d'envisager le futur.
 
 
Dans un coin, contre la vitre, sur un siège de moleskine elle boit maintenant son café à petits coups. À l'extérieur la circulation est « fluide » comme on se plait à dire et surtout à constater, un dimanche matin. Peu de piétons avenue de Suffren, peu d'affluence dans la brasserie. Clients discrets lisant « Le Monde » ou un quotidien étranger. Elle s'attarde souvent là pour terminer un ouvrage confié par la maison d'édition où elle est chargée de lire et d'apprécier les manuscrits.
 
Un client près d'elle plie son journal, lui lance un regard distrait, et soudain, d'une main prompte, pousse son siège et à son insu le fait basculer. Elle frémit. Le souvenir d'un geste la submerge. La corde de son obsession vibre. Déstabilisée, elle n'ose plus bouger et continue à tourner les pages du texte.
 
Peu à peu, autour d'elle, le restaurant s'anime, le garçon ne la dérangera pas. Il sait que bientôt elle commandera une eau minérale et s'attardera encore quelques instants.
 
Son pouce lui sert de marque-page, elle le retire à regret, referme l'ouvrage. Mais sur le cartonnage fauve, le titre qui s'étale en caractères bruns, se brouille tout à coup, se fige, et elle retrouve, avec une agressive acuité, son geste de colère, autrefois dans le Sud... Il y a bientôt dix ans ; elle en avait trente !
 
Alors, comme un automate elle range le manuscrit, porte son verre à ses lèvres et se met à longer du regard l'avenue face à elle, y voit s'installer, sans l'agresser cette fois, l'arrière-saison dont elle ne peut chasser le souvenir.
 
Sont là, à nouveau, les lauriers roses et rouges qui, en fin d'été, commencent à se faner, les tamaris aux fleurs de plumetis, la bruyère, mais aussi les blocs erratiques à flanc de colline, les carrières crayeuses, noircies par le temps. Souvenirs aux résonances confuses qui la cernent et cependant semblent la fuir. Ce paysage se répand le long de l'avenue Joseph Bouvard, s'en éloigne et d'un coup s'effondre comme un château de cartes aux abords de la place du Général Gouraud.
 
Le son métallique de sa cuillère tombant sur le carrelage a-t-il fait fuir ses souvenirs, ou bien s'est-elle saisie de ce bruit pour les repousser ?
 
Distraitement elle effleure son sac, l'ouvrage s'y trouve à l'abri. L'auteur est nord-africain d'origine européenne. Comme beaucoup de ses compatriotes, il décrit la déchirure du départ, lors des années 60, l'âpre désir de demeurer coûte que coûte sur la terre natale. Dans ce contexte de désarroi et de terreur, un fait lui a rappelé sa main, le geste d'il y a dix ans.
 
Elle repousse sa chaise, fait un mouvement pour se lever, mais son regard accroche soudain un autre regard au fond de la salle, un regard qui se dérobe. Elle se retient pour ne pas vaciller. Ce ne peut être Tonio ? Impossible... son fils plutôt.
 
Un homme seul, assis à une table éloignée de la sienne, semble contempler, à travers la vitre, cette même avenue, d'où fugitifs mais précis ont surgi les souvenirs.
 
Hallucine-t-elle ? Tonio, visage du passé, de ce paysage reparu à l'instant ! Tonio son voisin d'autrefois, le petit-fils d'un ami de son grand-père.
 
Elle n'ose le regarder. Elle se trompe certainement, une bonne décennie change son homme. Il faisait, à l'époque, plutôt campagnard, pantalons de velours côtelé, allure empruntée. Là se trouve un homme, genre cadre supérieur, très à l'aise dans un costume strict, portant la quarantaine avec, crut-elle remarquer, défi.
 
Elle se met à avancer, le regard vide, franchit la porte. Dehors le froid la surprend, d'une main elle rabat sa capuche. Pourquoi Tonio ne s'est-il pas manifesté ? Il l'a sûrement reconnue... cette façon de détourner la tête !
 
Autrefois, amoureux d'elle il avait mal accepté son mariage avec son défunt mari. Que faisait-il dans la capitale ?
 
Hâtant le pas, elle revoit la maison où il habitait avec ses parents, leur carré de vigne que l'on travaillait en même temps que le vignoble

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