Ecrire l inter-dit
170 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Ecrire l'inter-dit , livre ebook

-

170 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

L'oeuvre romanesque de Monique Wittig s'avance sur la scène littéraire avec ses thèmes provocateurs, ses inventions linguistiques et ses audaces formelles qui séduisent et déroutent à la fois. Sur le plan intertextuel, Monique Wittig mêle les formes épique et lyrique aux mythes, aux contes populaires, aux romans d'aventures. Sur le plan interdiscursif, elle déséquilibre des notions données pour complémentaires ou opposées - l'action et la passion, le Sujet et l'Autre, les classes de sexe.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 mai 2006
Nombre de lectures 64
EAN13 9782336264868
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sommaire
Bibliothèque du féminisme Page de titre Page de Copyright Dedicace Remerciements Prologue I. La subversion intertextuelle II. La subversion dialogique Épilogue Bibliographie Ouvrages parus dans Bibliothèque du féminisme
Bibliothèque du féminisme
Collection dirigée par Oristelle Bonis, Dominique Fougeyrollas, Hélène Rouch
publiée avec le soutien de l’Association nationale des études féministes (ANEF)

Les essais publiés dans la collection Bibliothèque du féminisme questionnent le rapport entre différence biologique et inégalité des sexes, entre sexe et genre. Il s’agit ici de poursuivre le débat politique ouvert par le féminisme, en privilégiant la démarche scientifique et critique dans une approche interdisciplinaire.
L’orientation de la collection se fait selon trois axes : la réédition de textes qui ont inspiré la réflexion féministe et le redéploiement des sciences sociales ; la publication de recherches, essais, thèses, textes de séminaires, qui témoignent du renouvellement des problématiques ; la traduction d’ouvrages qui manifestent la vitalité des recherches féministes à l’étranger.
Ecrire l'inter-dit

Dominique Bourque
www.librairieharmattan.com harmattan1@wanadoo.fr diffusion.harmattan@waanadoo.fr
© L’Harmattan, 2006
9782296007314
EAN : 9782296007314
À Claudine Vivier
Je tiens à exprimer ma plus vive gratitude à :
Nicole Bourbonnais, à qui je dois la cohérence et la clarté de cette étude,
Claudine Vivier, qui m’a soutenue jour après jour et de mille façons, pendant sa rédaction,
Oristelle Bonis, pour ses précieux conseils éditoriaux et sa généreuse mise au point du manuscrit.
Je remercie également Johanne Coulombe, Louise Turcotte, Pascale Noizet, Danielle Charest, Geneviève Arsicault, Namascar Shaktini, Marguerite Houle et Jean-Jacques Bourque, pour leur soutien à divers niveaux. Enfin, je remercie Nathalie Ayotte, pour sa première version de la traduction des citations en anglais.
Prologue
Monique Wittig déroute et déconcerte lorsque, dans ses étranges romans, elle élimine non seulement le mot « femme » – en écho à la célèbre thèse de Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme 1 » –, mais également le mot « homme » et les notions mêmes de « féminité » et de « masculinité » par la mise en scène de personnages qui congédient ces catégories. Il en va de même lorsqu’elle violente la syntaxe ainsi que la langue en écrivant : « j/e te suis tu m/es 2 », non pour (se) dire « l’Autre », à la suite d’Arthur Rimbaud, mais pour l’abolir avec le Sujet qui l’invente. Il suffit, en fait, d’ouvrir n’importe lequel des « romans » qu’elle a publiés, à savoir L’Opoponax, Les Guérillères, Le Corps lesbien et Virgile, non 3 , pour être immédiatement dépaysé. Outre la présence de séries de mots en gros caractères qui coupent le texte à intervalles réguliers, de néologismes ou de thèmes provocateurs 4 , nous sommes confrontés à une utilisation inhabituelle des pronoms et de la ponctuation, comme le relève Claude Gruaz :

Pour M. Wittig, la ponctuation ne traduit pas les variations articulatoires du contenu : celles-ci n’existent pas, le texte étant une succession de touches descriptives ou narratives ; il appartiendra au lecteur d’établir les liaisons éventuelles entre ces touches séparées 5 .
Enfin, et surtout, l’ensemble de ces ruptures se produit sur un fond de citations et de paroles rapportées parfaitement incorporées à l’œuvre, c’est-à-dire non séparées des mots de la voix narrative par des guillemets ou des tirets – non « objectivées », dirait Mikhaïl Bakhtine, le théoricien des mots contrapuntiques.
Ainsi, quelque chose a lieu, qui ne dev(r)ait pas avoir lieu, qui dépasse toutes les bornes ou, plus encore, qui les fait fondre comme neige au soleil. Quelque chose qu’il faut bien nommer « subversion » à la suite des divers commentateurs – pour la plupart anglophones, d’ailleurs – de cette œuvre, comme en témoignent les titres ou sous-titres de leurs études : « Revolutionary Signifier », « Explosive Discourse in Monique Wittig », « Exploding the Issue », « Subversive Intent », « The Trojan Horse of Universalism : Language as a “War Machine” in the Writings of Monique Wittig », « Opening Closed I’s » 6 , etc. Néanmoins, aucun de ces commentateurs n’a choisi de traiter en profondeur les procédés formels qui, tels qu’exploités par Monique Wittig, ont clairement une portée transgressive : il s’agit des procédés, omniprésents dans l’œuvre, qui relèvent des approches intertextuelle et interdiscursive.
Dans ce dernier cas, on découvre bien, ici et là, dans les trop courts articles qui ont été consacrés à l’une ou à l’autre des œuvres de l’auteur, des commentaires judicieux sur l’originalité de l’usage d’un pronom ou d’une voix narrative qui auraient pu mettre en relief le dialogisme du texte. Toutefois, même une critique de la trempe de Mary McCarthy néglige l’effet réel des choix formels de l’auteur sur la constitution d’une perspective narrative ouverte. C’est ce qui l’amène, par exemple, à assimiler la voix narrative (Catherine Legrand) de L’Opoponax à celle de la rumeur (du « on dit ») : « Monique Wittig a choisi de désubjectiver Catherine Legrand jusqu’aux limites du possible, jusqu’à en faire une espèce de “on dit”, une rumeur plus ou moins digne de foi 7 . » Faute d’avoir vu que le choix du pronom « on » (plutôt que du « je » ou du « elle ») s’explique par sa potentielle ouverture discursive, Mary McCarthy n’a pu distinguer le « on » ouvert de la voix narrative du « on » fermé de la « rumeur » ambiante.
Si la stratégie intertextuelle à l’œuvre dans les textes de Monique Wittig échappe moins aux commentateurs que la stratégie interdiscursive, cela ne signifie pas pour autant qu’ils en mesurent bien l’ampleur. De fait, la majorité d’entre eux traitent cette dernière comme un procédé secondaire en évoquant, au besoin, la transformation que l’auteur fait subir à un mythe ou à un vers. D’autres vont un peu plus loin en tentant d’analyser la récurrence, par exemple, de certains types de mythes, ou les rapports que l’une ou l’autre des œuvres de l’auteur entretient avec un genre littéraire en particulier, mais ils le font de manière ponctuelle, c’est-à-dire sans chercher à en découvrir la portée réelle. Ainsi, Hélène Vivienne Wenzel relève bien la dérivation générique que pratique l’auteur, à savoir son appropriation des genres dits « masculins » : « Wittig refuse de se retirer dans le sombre recoin des genres littéraires traditionnellement associés aux femmes – le roman [d’amour], les mémoires, l’autobiographie – toujours perceptibles dans une bonne part de la production appelée écriture féminine. Elle s’approprie et investit plutôt les genres littéraires traditionnellement associés aux hommes dans la mesure où ils ont toujours détenu le pouvoir de façonner leur langage et leur réalité 8 . » Mais il ne s’agit que d’un seul aspect, et fragmentaire de surcroît, de l’intertextualité que pratique l’auteur.
La réserve des commentateurs en ce qui concerne la présence ou l’importance des stratégies de l’interdiscursivité et de l’intertextualité dans l’œuvre de Monique Wittig renvoie à leur perception épidermique de la subversion formelle qui s’y déploie. Erika Ostrovsky, auteur de A Constant Journey. The Fiction of Monique Wittig, fait figure d’exception en ce qui concerne le repérage de l’ampleur du phénomène. Contrairement cependant à sa présentation du renversement comme « bouleversement, révolution, anéantissement et subversion – [qui] peut être considéré comme la clef de l’écriture de Monique Wittig 9 », nous distinguons ce procédé de la transgression wittigienne et montrons que l’auteur expose les limites du renversement, notamment en le mettant en scène.

Dans le présent ouvrage, nous examinons donc cette dimension insuffisamment approfondie de l’œuvre romanesque de Monique Wittig, soit le fonctionnement de la subversion forme

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents